Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Une copie VHS avait fuitée à l'époque.
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
La revision du film il y a quelques semaines (je ne les compte plus, en attendant peut-être une énième projection sur grand écran la semaine prochaine) a été l'occasion de relire plusieurs avis à son sujet. Si je mets de côté les appréciations négatives ou mitigées et ne retiens que les enthousiastes, je m'aperçois qu'une perpétuelle dichotomie s'obstine à diviser les approches des spectateurs. Il y a depuis toujours comme deux "écoles" dans la manière de défendre ce film, et je ne cesse d'être frustré par l'une comme par l'autre tant je ne me reconnais dans aucune d'entre elles.
La première approche se fonde sur une herméneutique active de la fiction, sur son interprétation à outrance. Pour ceux qui défendent une telle lecture, le long-métrage n'est rien d'autre qu'un foisonnant jeu de pistes, une gigantesque énigme à éclaircir. Tout le plaisir proviendrait donc du travail de détective auquel la narration invite naturellement. L'intérêt du film naîtrait de sa signification cachée, de son opacité qu'il convient de surmonter à coups d'élucidations successives. Ce type de spectateurs promeut avant tout la dimension ludique de Mulholland Drive, la manière dont il stimule sur le plan intellectuel. Si on pouvait le résumer, son credo serait : "La première fois on ne comprend rien, mais ensuite on le revoit et tout s'éclaire. Alors on se rend compte à quel point tout est réfléchi, élaboré, cohérent et génial."
La seconde approche, pour ainsi dire diamétralement opposée, consiste à s'abandonner pleinement à la dimension ambient et sensorielle du film. Elle considère le plus souvent qu'il n'y a rien à y "comprendre" mais tout à y "ressentir". Les partisans de cette approche estiment le plus souvent que toute interprétation est non seulement inutile mais réductrice car elle obère l'expérience exclusive procurée par la pleine disposition aux impressions, aux images et aux sons. Pour eux, Mulholland Drive ne doit surtout pas être expliqué ni analysé. C'est un objet ouvert qui doit le rester. Tenter de l'éclaircir, de mettre un sens derrière l'enchaînement des scènes, de donner une signification à l'histoire (quelle histoire d'ailleurs ?), c'est pervertir profondément la nature du film et ce pour quoi il a été conçu. "On ne comprend rien mais c'est génial" (voire "On ne comprend rien donc c'est génial") serait plutôt le credo de cette catégorie de spectateurs.
Je ne prétend pas (loin de là) que ces deux types de réception sont les seules qui existent parmi les gens qui défendent et aiment le film. Mais, sous réserve de subjectivité, je pense qu'ils en constituent l'écrasante majorité. Je ne me réclame ni de l'une ni de l'autre : ces deux manières de plaider pour le film me semblent passer à côté de l'essentiel. Et l'essentiel, pour moi, c'est bel et bien l'émotion transmise par l'histoire de l'héroïne. Les promoteurs de l'approche "interprétative" du film pourraient sembler plus en phase avec cette conception, mais il est en fait assez rare qu'ils se montrent touchés par la charge affective de la fiction. Un jeu de pistes n'a pas pour vocation de bouleverser mais de divertir. Derrière la jubilation qui transparaît de la clarification du mystère et des différentes éléments narratifs et symboliques, il est souvent difficile de percevoir en quoi la sensibilité a été réellement touchée. Les promoteurs de l'approche "sensorielle", quant à eux, n'hésitent pas à nier l'existence même d'une histoire dans Mulholland Drive, donc l'existence d'un personnage. S'il y a bien une idée avec laquelle je ne saurais être plus en désaccord, c'est celle-ci. Parce que j'estime que pour être touché par le film, il faut le comprendre - comprendre l'histoire, comprendre ce qu'éprouve son personnage. N'en rester qu'à l'ivresse provoquée par les images et les sons, ne pas vouloir charger l'agencement des séquences d'une signification profonde, c'est manquer le coeur même de l'entreprise. On ne le répétera jamais assez : MD raconte une histoire, celle d'un personnage. Et définir le film comme un bouquet de sensations et d'impressions non interprétables, c'est l'amputer de sa substance propre. A contrario, ne le concevoir que comme un Rubik's cube à remettre en place, c'est le réduire tout autant. Si je considère sans doute Elephant Man, Une Histoire Vraie et Mulholland Drive comme les meilleurs films de Lynch, c'est précisément parce que ce sont ceux où l'auteur se dévoue pleinement à la présence, à la réalité vive, à l'existence palpitante de ses protagonistes. Ce ne sont pas des "facettes", des fragments d'âme, des avatars virtuels ou théoriques qui viseraient à s'affranchir de la notion classique de personnage (antienne très prisée par les lynchophiles). Ce sont de magnifiques personnages au sens le plus traditionnel et le plus romanesque du terme, définis par leur expérience, leur parcours, leurs sentiments, et dotés d'une humanité qui fait écho à la nôtre. Cette idée-là, Strum-la-sagesse la formulait parfaitement dans une page précédente en écrivant ceci : "pour aimer un personnage ou s'identifier à lui, il faut comprendre la situation de ce personnage." Mulholland Drive, c'est Betty-Diane Selwyn (I'm in love with her), personnage sublime dont le film invite à comprendre, à ressentir la situation, l'état intérieur (comme autrefois on comprenait et on ressentait ce qu'éprouvait John Merrick).
La première approche se fonde sur une herméneutique active de la fiction, sur son interprétation à outrance. Pour ceux qui défendent une telle lecture, le long-métrage n'est rien d'autre qu'un foisonnant jeu de pistes, une gigantesque énigme à éclaircir. Tout le plaisir proviendrait donc du travail de détective auquel la narration invite naturellement. L'intérêt du film naîtrait de sa signification cachée, de son opacité qu'il convient de surmonter à coups d'élucidations successives. Ce type de spectateurs promeut avant tout la dimension ludique de Mulholland Drive, la manière dont il stimule sur le plan intellectuel. Si on pouvait le résumer, son credo serait : "La première fois on ne comprend rien, mais ensuite on le revoit et tout s'éclaire. Alors on se rend compte à quel point tout est réfléchi, élaboré, cohérent et génial."
La seconde approche, pour ainsi dire diamétralement opposée, consiste à s'abandonner pleinement à la dimension ambient et sensorielle du film. Elle considère le plus souvent qu'il n'y a rien à y "comprendre" mais tout à y "ressentir". Les partisans de cette approche estiment le plus souvent que toute interprétation est non seulement inutile mais réductrice car elle obère l'expérience exclusive procurée par la pleine disposition aux impressions, aux images et aux sons. Pour eux, Mulholland Drive ne doit surtout pas être expliqué ni analysé. C'est un objet ouvert qui doit le rester. Tenter de l'éclaircir, de mettre un sens derrière l'enchaînement des scènes, de donner une signification à l'histoire (quelle histoire d'ailleurs ?), c'est pervertir profondément la nature du film et ce pour quoi il a été conçu. "On ne comprend rien mais c'est génial" (voire "On ne comprend rien donc c'est génial") serait plutôt le credo de cette catégorie de spectateurs.
Je ne prétend pas (loin de là) que ces deux types de réception sont les seules qui existent parmi les gens qui défendent et aiment le film. Mais, sous réserve de subjectivité, je pense qu'ils en constituent l'écrasante majorité. Je ne me réclame ni de l'une ni de l'autre : ces deux manières de plaider pour le film me semblent passer à côté de l'essentiel. Et l'essentiel, pour moi, c'est bel et bien l'émotion transmise par l'histoire de l'héroïne. Les promoteurs de l'approche "interprétative" du film pourraient sembler plus en phase avec cette conception, mais il est en fait assez rare qu'ils se montrent touchés par la charge affective de la fiction. Un jeu de pistes n'a pas pour vocation de bouleverser mais de divertir. Derrière la jubilation qui transparaît de la clarification du mystère et des différentes éléments narratifs et symboliques, il est souvent difficile de percevoir en quoi la sensibilité a été réellement touchée. Les promoteurs de l'approche "sensorielle", quant à eux, n'hésitent pas à nier l'existence même d'une histoire dans Mulholland Drive, donc l'existence d'un personnage. S'il y a bien une idée avec laquelle je ne saurais être plus en désaccord, c'est celle-ci. Parce que j'estime que pour être touché par le film, il faut le comprendre - comprendre l'histoire, comprendre ce qu'éprouve son personnage. N'en rester qu'à l'ivresse provoquée par les images et les sons, ne pas vouloir charger l'agencement des séquences d'une signification profonde, c'est manquer le coeur même de l'entreprise. On ne le répétera jamais assez : MD raconte une histoire, celle d'un personnage. Et définir le film comme un bouquet de sensations et d'impressions non interprétables, c'est l'amputer de sa substance propre. A contrario, ne le concevoir que comme un Rubik's cube à remettre en place, c'est le réduire tout autant. Si je considère sans doute Elephant Man, Une Histoire Vraie et Mulholland Drive comme les meilleurs films de Lynch, c'est précisément parce que ce sont ceux où l'auteur se dévoue pleinement à la présence, à la réalité vive, à l'existence palpitante de ses protagonistes. Ce ne sont pas des "facettes", des fragments d'âme, des avatars virtuels ou théoriques qui viseraient à s'affranchir de la notion classique de personnage (antienne très prisée par les lynchophiles). Ce sont de magnifiques personnages au sens le plus traditionnel et le plus romanesque du terme, définis par leur expérience, leur parcours, leurs sentiments, et dotés d'une humanité qui fait écho à la nôtre. Cette idée-là, Strum-la-sagesse la formulait parfaitement dans une page précédente en écrivant ceci : "pour aimer un personnage ou s'identifier à lui, il faut comprendre la situation de ce personnage." Mulholland Drive, c'est Betty-Diane Selwyn (I'm in love with her), personnage sublime dont le film invite à comprendre, à ressentir la situation, l'état intérieur (comme autrefois on comprenait et on ressentait ce qu'éprouvait John Merrick).
Dernière modification par Thaddeus le 12 août 20, 14:10, modifié 1 fois.
- Alexandre Angel
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Mulholland Drive captive et émeut parce qu'on a le sentiment d'être pris en main par un scénario au sens de "densité littéraire" du terme, ce qui va dans ton sens. C'est ce qui le rend supérieur, je le pense aussi, à des films plus séquentiels comme Sailor et Lula ou Blue Velvet.
Dans Mulholland Drive, on se sent pris à témoin de quelque chose et en effet, on est dans un cheminement fait d'effroi et de compassion.
Deux années sont passées sans que j'ai remis le nez dans Twin Peaks Saison 3 mais la série (tu as vu, je fais un effort
) malgré son nombre incalculable de digressions plus ou moins dispensables (il n'est pas interdit d'appeler cela de la générosité) me laisse le souvenir d'être mue par une sève scénaristique puissante qui nous emmène, tout comme Mulholland, vers une révélation, une sorte d'apothéose du sens.
Et en effet, ce que je qualifie de "scénario", ce n'est pas (seulement) une question de twists, de chausse-trappes, d'effets gigognes où l'on est sommé de semer des petits cailloux, c'est aussi et surtout ce qui nous transforme entre le début de la projection et le mot "fin"."
Dans Mulholland Drive, on se sent pris à témoin de quelque chose et en effet, on est dans un cheminement fait d'effroi et de compassion.
Deux années sont passées sans que j'ai remis le nez dans Twin Peaks Saison 3 mais la série (tu as vu, je fais un effort

Et en effet, ce que je qualifie de "scénario", ce n'est pas (seulement) une question de twists, de chausse-trappes, d'effets gigognes où l'on est sommé de semer des petits cailloux, c'est aussi et surtout ce qui nous transforme entre le début de la projection et le mot "fin"."
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.
m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Jolie manière de cerner et de définir la cohérence impérieuse qui parcourt le film entier, et qui lui confère sa densité émotionnelle. Je préciserais juste que mon cheminement n'est pas fait que d'"effroi et de compassion" mais traverse un panel beaucoup plus large qui va de l'émerveillement à l'amusement, de l'euphorie à la plus profonde tristesse - à l'instar, une fois de plus, de celui de son héroïne. Mais je ne me répéterai pas, ayant déjà tout dit quelques pages plus tôt.
Je salue également l'effort rhétorique concernant la troisième saison de Twin Peaks
, sur laquelle je ne rebondirai puisque je ne l'ai pas vue (pour être honnête, j'estime qu'il y a plus de chances que je découvre un jour les derniers films de Tarantino).
Je salue également l'effort rhétorique concernant la troisième saison de Twin Peaks

Dernière modification par Thaddeus le 15 août 20, 21:01, modifié 1 fois.
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Alexandre Angel a écrit :Mulholland Drive captive et émeut parce qu'on a le sentiment d'être pris en main par un scénario au sens de "densité littéraire" du terme, ce qui va dans ton sens. C'est ce qui le rend supérieur, je le pense aussi, à des films plus séquentiels comme Sailor et Lula ou Blue Velvet.
Dans Mulholland Drive, on se sent pris à témoin de quelque chose et en effet, on est dans un cheminement fait d'effroi et de compassion.
Deux années sont passées sans que j'ai remis le nez dans Twin Peaks Saison 3 mais la série (tu as vu, je fais un effort) malgré son nombre incalculable de digressions plus ou moins dispensables (il n'est pas interdit d'appeler cela de la générosité) me laisse le souvenir d'être mue par une sève scénaristique puissante qui nous emmène, tout comme Mulholland, vers une révélation, une sorte d'apothéose du sens.
Et en effet, ce que je qualifie de "scénario", ce n'est pas (seulement) une question de twists, de chausse-trappes, d'effets gigognes où l'on est sommé de semer des petits cailloux, c'est aussi et surtout ce qui nous transforme entre le début de la projection et le mot "fin"."
J’ai prévu de le revoir mais lors de sa decouverte en salle, j’avais trouvé le film moins bon que Lost Highway.Alexandre Angel a écrit :Mulholland Drive captive et émeut parce qu'on a le sentiment d'être pris en main par un scénario au sens de "densité littéraire" du terme, ce qui va dans ton sens. C'est ce qui le rend supérieur, je le pense aussi, à des films plus séquentiels comme Sailor et Lula ou Blue Velvet.
Dans Mulholland Drive, on se sent pris à témoin de quelque chose et en effet, on est dans un cheminement fait d'effroi et de compassion.
Deux années sont passées sans que j'ai remis le nez dans Twin Peaks Saison 3 mais la série (tu as vu, je fais un effort) malgré son nombre incalculable de digressions plus ou moins dispensables (il n'est pas interdit d'appeler cela de la générosité) me laisse le souvenir d'être mue par une sève scénaristique puissante qui nous emmène, tout comme Mulholland, vers une révélation, une sorte d'apothéose du sens.
Et en effet, ce que je qualifie de "scénario", ce n'est pas (seulement) une question de twists, de chausse-trappes, d'effets gigognes où l'on est sommé de semer des petits cailloux, c'est aussi et surtout ce qui nous transforme entre le début de la projection et le mot "fin"."
La raison principale: la structure du film. En effet, autant Lost Highway est conçu comme un film ( avec sa structure bien particuliere, qui fait sa forte singularité), autant Mulholland Drive m’est apparu comme un pilote de serie auquel on a adjoint bonnant mallant une « deuxieme partie » pour valoriser l’existant.
Cette structure se ressent fortement au travers des personnages secondaires ( le mec en cowboy, les mafieux) ou de scenes qui n’ont rien a voir avec le schmilblick (les deux gars qui discutent dans le diner). Ceci aurait trouvé peut etre une raison d’etre dans une serie, qui jettent des pistes pour le futur, mais n’a pas de sens ou plus value dans un film concu en un tout.
Bref, independamment que le film contienne des sequences fabuleuses (mais quel film de Lynch n’en contient pas), l’objet m’est apparu comme un truc batard, pas comme un vrai film et j’ai préféré sans ambiguité Lost Highway.
Ceci c’etait avant Inland Empire et Twin Peaks le retour, qui ont montré combien le concept de « film » au sens d’objet d’un recit (avec un debut et une fin), préoccupait pas/plus Lynch qui cultivait plutot une approche patchwork de sequences sans coherence ou finalités narratives. A la grande joie des tenant de l’approche « plus c’est incompréhensible plus c’est génial.
Il vas sans dire que les dits « objets » m’ont laissé assez perplexe... et que le Lynch que j’aime, celui qui raconte une histoire (Une histoire vraie, Fire walk with me, Twin peaks,...), proche de celui qui émeut tant Thaddeus, me parait loin...
La revoyure de Mulholland Drive me fera peut etre revoir cette opinion plutot réservée.
- Jean-Pierre Festina
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Tu as quoté deux fois le même message d'Alex Angel, et comme entrée en matière lynchienne c'est SUPER-FLIPPANTThe Eye Of Doom a écrit : Ceci c’etait avant Inland Empire et Twin Peaks le retour, qui ont montré combien le concept de « film » au sens d’objet d’un recit (avec un debut et une fin), préoccupait pas/plus Lynch qui cultivait plutot une approche patchwork de sequences sans coherence ou finalités narratives. A la grande joie des tenant de l’approche « plus c’est incompréhensible plus c’est génial.
Il vas sans dire que les dits « objets » m’ont laissé assez perplexe... et que le Lynch que j’aime, celui qui raconte une histoire (Une histoire vraie, Fire walk with me, Twin peaks,...), proche de celui qui émeut tant Thaddeus, me parait loin...
La revoyure de Mulholland Drive me fera peut etre revoir cette opinion plutot réservée.

"Plus c’est incompréhensible plus c’est génial" : personnellement, c'est sans doute le seul réalisateur qui me mette dans cet état de disponibilité interprétative et de mauvaise foi. C'est une chose de laisser des trucs en plan, c'est est une autre de développer le mystère. D'ailleurs, pour évoquer le Lynch qui raconte des histoires, tu cites de drôles de films : "Fire walk with me" est truffé d'éléments rythmés mais bidon sur le plan narratif, et quand démarre la véritable histoire, ça traîne en longueur dans un climat anxiogène et malsain. Pareil pour Twin Peaks : je me rappelle un épisode avec un petit vieux qui passe son temps à lever le pouce devant Dale Cooper agonisant (il me semble que c'est le premier de la deuxième saison), là on est encore une fois aux limites de la narration buissonnière.
LU SUR FORUM A MONTRES : "(...) maintenant c'est clair que Festina c'est plus ce que c'était(...)"
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Cette séquence a pourtant tout à voir avec le récit principal du film.The Eye Of Doom a écrit :ou de scenes qui n’ont rien a voir avec le schmilblick (les deux gars qui discutent dans le diner).
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
C'est marrant ce que tu dis car si tu ne te reconnais dans aucune de ces deux catégories, moi je me retrouve dans les deuxThaddeus a écrit :La première approche se fonde sur une herméneutique active de la fiction, sur son interprétation à outrance. Pour ceux qui défendent une telle lecture, le long-métrage n'est rien d'autre qu'un foisonnant jeu de pistes, une gigantesque énigme à éclaircir. Tout le plaisir proviendrait donc du travail de détective auquel la narration invite naturellement. L'intérêt du film naîtrait de sa signification cachée, de son opacité qu'il convient de surmonter à coups d'élucidations successives. Ce type de spectateurs promeut avant tout la dimension ludique de Mulholland Drive, la manière dont il stimule sur le plan intellectuel. Si on pouvait le résumer, son credo serait : "La première fois on ne comprend rien, mais ensuite on le revoit et tout s'éclaire. Alors on se rend compte à quel point tout est réfléchi, élaboré, cohérent et génial."
La seconde approche, pour ainsi dire diamétralement opposée, consiste à s'abandonner pleinement à la dimension ambient et sensorielle du film. Elle considère le plus souvent qu'il n'y a rien à y "comprendre" mais tout à y "ressentir". Les partisans de cette approche estiment le plus souvent que toute interprétation est non seulement inutile mais réductrice car elle obère l'expérience exclusive procurée par la pleine disposition aux impressions, aux images et aux sons. Pour eux, Mulholland Drive ne doit surtout pas être expliqué ni analysé. C'est un objet ouvert qui doit le rester. Tenter de l'éclaircir, de mettre un sens derrière l'enchaînement des scènes, de donner une signification à l'histoire (quelle histoire d'ailleurs ?), c'est pervertir profondément la nature du film et ce pour quoi il a été conçu. "On ne comprend rien mais c'est génial" (voire "On ne comprend rien donc c'est génial") serait plutôt le credo de cette catégorie de spectateurs.

Première vision : tu comprends rien et tu apprécies cet abandon, tu ne cherches même pas à comprendre, tu es entraîné où Lynch veut t'emmener; pas la peine de résister
Deuxième vision (après avoir passé des heures sur le net à chercher à comprendre le pourquoi de telle scène et lu des dizaines de sites web) : tu comprends mieux, tu apprécies plus tel passage MAIS en aucun cas je ne suis passé du sensoriel, voir du sensuel, à l'intellectualisation! Non, il y a un mélange des deux, et je passe de l'un à l'autre selon la scène, l'acteur, la musique...
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
J'avoue me situer, de manière assez spécifique à Mulholland Drive (et Twin Peaks, aussi), dans un certain entre-deux, appréciant de me perdre dans un jeu de pistes qui parait parfois circulaire façon ruban de Mobius, ou menant à des impasses, tout en appréciant d'avoir pu, au fil des visionnages, mieux saisir les tenants et aboutissants de l'intrigue mais aussi des éléments plus théoriques mis en place ci et là par Lynch (le cowboy, le clodo, l'abat-jour rouge, etc).Thaddeus a écrit :La première approche se fonde sur une herméneutique active de la fiction, sur son interprétation à outrance. Pour ceux qui défendent une telle lecture, le long-métrage n'est rien d'autre qu'un foisonnant jeu de pistes, une gigantesque énigme à éclaircir. Tout le plaisir proviendrait donc du travail de détective auquel la narration invite naturellement. L'intérêt du film naîtrait de sa signification cachée, de son opacité qu'il convient de surmonter à coups d'élucidations successives. Ce type de spectateurs promeut avant tout la dimension ludique de Mulholland Drive, la manière dont il stimule sur le plan intellectuel. Si on pouvait le résumer, son credo serait : "La première fois on ne comprend rien, mais ensuite on le revoit et tout s'éclaire. Alors on se rend compte à quel point tout est réfléchi, élaboré, cohérent et génial."
La seconde approche, pour ainsi dire diamétralement opposée, consiste à s'abandonner pleinement à la dimension ambient et sensorielle du film. Elle considère le plus souvent qu'il n'y a rien à y "comprendre" mais tout à y "ressentir". Les partisans de cette approche estiment le plus souvent que toute interprétation est non seulement inutile mais réductrice car elle obère l'expérience exclusive procurée par la pleine disposition aux impressions, aux images et aux sons. Pour eux, Mulholland Drive ne doit surtout pas être expliqué ni analysé. C'est un objet ouvert qui doit le rester. Tenter de l'éclaircir, de mettre un sens derrière l'enchaînement des scènes, de donner une signification à l'histoire (quelle histoire d'ailleurs ?), c'est pervertir profondément la nature du film et ce pour quoi il a été conçu. "On ne comprend rien mais c'est génial" (voire "On ne comprend rien donc c'est génial") serait plutôt le credo de cette catégorie de spectateurs).
Ce serait donc plutôt quelque chose "ce n'est pas grave de ne pas tout comprendre", parce qu'au final, le tragique mélancolique qui ressort du film peut s'exprimer sans comprendre forcément le pourquoi du comment. Même sans comprendre de quoi il retournait, le Silencio final m'a collé des frissons la première fois que j'ai vu le film. S'il me semble utile d'être capable de ne pas se perdre à 100% afin de ne pas non plus décrocher (ce qui serait compréhensible), à l'inverse, un entre-deux peut rester à la fois suffisamment ludique dans la traversée du labyrinthe mais aussi suffisamment fantasmé pour tenir de la proposition poétique et métaphorique qui tient à la fois de la pure rêverie mais aussi d'un besoin de décodage. D'ailleurs, une des "10 clés" données dans le DVD du film pour comprendre le film était "Au club « Silencio » quelque chose est ressenti, on réalise quelque chose, les éléments se rassemblent… Mais quoi ?", ce qui soutient assez bien l'idée qu'au fond, le film tient aussi du ressenti.
J'ai plus de mal à faire ça avec Lost Highway, qui s'y prêterait pourtant assez bien aussi, parce que j'ai l'impression que quoique je fasse, le film continue de m'échapper sans pour autant me proposer autre chose afin de trouver un compromis satisfaisant. MD, lui, semble plutôt bien fonctionner sur de multiples interprétations, et pas parce que Lynch a laissé tellement de trous qu'on peut y projeter ce qu'on veut, mais bien parce que plusieurs possibilités satisfaisantes existent malgré une histoire "cohérente et compréhensible" qui possède une explication plus ou moins "officielle".
Dernière modification par tenia le 12 août 20, 18:03, modifié 1 fois.
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Pour celles et ceux qui ont encore la force d'affronter les incivilités des salles obscures, je découvre que mon multiplexe Pathé propose Mulholland Drive cette semaine.
Et il semblerait bien que ce n'est pas une exclusivité angevine, puisqu'il est à l'affiche dans quelques autres villes :
https://www.allocine.fr/film/fichefilm_ ... 28682.html
L'occasion de le (re)voir sur grand écran quand vous aurez unboxed votre coffret 4K.
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Il passe dans mon Pathé normand, ô joie!tchi-tcha a écrit : ↑9 déc. 21, 23:43 Pour celles et ceux qui ont encore la force d'affronter les incivilités des salles obscures, je découvre que mon multiplexe Pathé propose Mulholland Drive cette semaine.
Et il semblerait bien que ce n'est pas une exclusivité angevine, puisqu'il est à l'affiche dans quelques autres villes :
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En février ?mannhunter a écrit : ↑10 déc. 21, 10:45Il passe dans mon Pathé normand, ô joie!tchi-tcha a écrit : ↑9 déc. 21, 23:43 Pour celles et ceux qui ont encore la force d'affronter les incivilités des salles obscures, je découvre que mon multiplexe Pathé propose Mulholland Drive cette semaine.
Et il semblerait bien que ce n'est pas une exclusivité angevine, puisqu'il est à l'affiche dans quelques autres villes :
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Pff... cet humour de parisien...

Y'a des coups de plomb de 12 dans la trottinette qui se perdent...
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Re: Mulholland Drive (David Lynch - 2001)
Je ne suis pas parisien mais caennais ce mois-ci.
Tu habites Caen ?
Effectivement, il passe à partir de Dimanche soir. Mais j’ai vu je ne sais plus où qu’il serait programmé en février.