LA BATAILLE DU RAIL (1945) de René Clément avec Charles Boyer (Le narrateur), Jean Clarieux, Jean Daurand, Robert Leray, les cheminots de France.
« Ce film retrace les actions de la Résistance ferroviaire : passage de la ligne de démarcation, sabotages multiples, déraillement d'un convoi. »
René Clément réalisera six films sur la seconde guerre mondiale : Le père Tranquille (1946), Les maudits (1947), Jeux interdits (1951), Le jour et l’heure (1962), Paris brûle-t-il ? (1967). Au sortir de la guerre la France pleure ses morts, panse ses plaies et Clément alors âgé de 32 ans se lance dans « La bataille du rail », un projet de court métrage qui se transformera en long. D’essence documentaire et aux méthodes néo-réalistes le film est un hommage aux résistants du rail.
Pas question de montrer les hésitants, les pleutres et ceux qui se désolidarisent du mouvement. L’heure n’est pas aux règlements de compte mais à la célébration des héros.
Ici pas de destin individuel mais des hommes portés par des idéaux et formant en seul corps face à l’ennemi.
Le tour de force de Clément c’est de nous montrer des héros ordinaires (dépouillés de l’aura qu’aurait eu un acteur connu), le temps de quelques plans, d’une scène et de les rendre à l’anonymat.
Je pense au futur fusillé en gros plan qui attend son tour et dont la vie vaudra moins, bientôt, que celle de l’araignée qu’il observe sur le mur.
Je pense au maquisard blessé rampant dans l’eau, dans la végétation pour échapper aux balles et mourir finalement sans un cri, écrasé par les chenilles d’un char.
Je pense au conducteur de train qui prend les commandes de sa machine avant le déraillement du convoi allemand, persuadé de ne pas en réchapper.
Sur la forme malgré le parti pris réaliste et quasi documentaire, Clément soigne ses plans, ses cadrages, ses lumières (qui apportent une touche d’onirisme alors que la mort se tient en embuscade).
Il parvient a insuffler une dimension poétique : - aux scènes de combat allemands/maquisards grâce a une utilisation de la lumière naturelle,
- Au jeune maquisard émerveillé de voir pour la première fois un vers luisant,
- à l’accordéon qui dévale la ravine après le déraillement du train,
- au jeune berger, là par hasard,
- aux locomotives, bêtes vivantes et hurlantes dans la nuit.