LE PIEGE D'ACIER (The Steel Trap) 1952
Écrit et réalisé par Andrew L. Stone
Image : Ernest Laszlo
Musique : Dimitri Tiomkin
Produit par Bret Friedlob
20th Century Fox
Durée : 85 min
Avec :
Joseph Cotten (Jim Osborne)
Teresa Wright (Laurie Osborne)
Jonathan Hale (Tom Bowers)
Walter Sande (L'inspecteur des douanes)
Eddie Marr (Ken Woodley)
Jim Osborne, directeur adjoint dans une banque, qui a semble t'il mené une vie tout ce qu'il y a de plus honnête jusque là, se met à envisager de passer à la caisse pour de bon. C'est ainsi qu'on le découvre commencer à gamberger et à surveiller du coin de l'oeil les agissements des caissiers. Pensant avoir le plan infaillible qui lui permettra de vider le coffre fort principal de sa banque, il planifie le vol pour un vendredi soir après la fermeture de la banque. Il fait croire à sa femme qu'il vient de se voir proposer une mission de quelques jours au Brésil et lui demande de l'accompagner, le vol ne devant être découvert que le lundi suivant à la réouverture de la banque. Première étape, trouver un pays qui n'extrade pas les ressortissants américains. Mais le jour du casse venu, rien ne se passe comme prévu...

Voilà un film sur lequel -une fois n'est pas coutume - j'aurais envie de céder à ma pulsion première, l'exécution sommaire…mais je vais quand même expliquer un peu pourquoi on peut passer son chemin. C'est un film dont je gardais plutôt un bon souvenir après une 1ère vision il y a une dizaine d'année mais c'est, après cette vision plus récente, la plus grande chute libre enregistrée ces derniers temps. Quand Cotten, placide cadre de banque entre deux âges commence à marmonner en lui même (et pour nous) ses observations sur la facilité qu'il y aurait pour un homme parvenu à ce poste là de filer avec la caisse, on se dit qu'il y a du potentiel. Les préparatifs d'un casse et sa réalisation, on connait. C'est certe plus intéressant s'il est planifié par une bande de malfrats mais soit…on attend la suite des évènements. Le problème c'est que Andrew L. Stone s'attache pendant 85 minutes à nous décrire les ratés et les incidents de parcours, tous ces évènements imprévus qui viennent les uns derrière les autres, avec un manque d'imagination consternant, perturber le projet initial... et on ne voit pas grand chose d'autre.
Avant même la réalisation du casse puis la fuite vers le Brésil, le film est déjà assommant dans ce qu'il montre des préparatifs. Cotten passe son temps dans les bibliothèques pour trouver un pays qui n'extrade pas les ressortissants américains. Ensuite on a un documentaire sur les "tracasseries administratives", le problème initial étant la problématique récupération des visas avant la fermeture du bureau le soir du casse. A la suite de quoi, le metteur en scène multiplie les bâtons dans les roues "inventés"…sans la moindre invention par Mr et Mme Stone pour agrémenter leur suspense. Mais tout du long, on en reste toujours au problème de timing, de bagnoles qui tombent en panne, de maman qui est en retard…Le film se résume à une longue course contre la montre semée d'embuches : pour obtenir un visa dans les délais, pour éviter de croiser un caissier resté plus longtemps que prévu dans la banque, pour attraper la correspondance d'un avion parce que le premier vol a pris du retard. Les retards s'accumulant, le problème pour Osborne devient que le couple risque de ne pas être arrivé au Brésil au moment de la réouverture de la banque. Or, ces péripéties déjà pas passionnantes en elles même sont racontées par le bon Andrew avec la verve du chef de gare qui nous raconterait dans le détail le pourquoi du retard du 3 : 10 pour Yuma de 1957 (quoi, c'est pas un bon exemple ?). Il en reste aux problèmes d'aiguillage…et je ne rentre même pas dans les détails de l'action car le réalisateur nous ressert les mêmes plats avec les retards en voiture, en train, en taxi, et en avion. Assommant d'ennui !

Andrew L. Stone ne creuse presque pas un thème qui avait déjà fait ses preuves, montrer le désœuvrement de cette classe moyenne américaine qui possède tout ce que peut leur offrir une existence protégée dans une économie prospère. Ce couple est sans histoire. La paye relativement confortable tombe régulièrement. On a acheté un petit pavillon coquet. Une fille est arrivée...mais on s'emmerde ! Ce thème a même fourni une bonne base à de presque chef d'oeuvre, le
Pitfall d'André de Toth par exemple. Mais ici l'immense lassitude que l'on ressent dans le couple, je me demande si ce n'est pas plutôt la lassitude et l'accablement des comédiens qui ont du avoir parfaitement conscience qu'ils n'avaient pas entre les mains un scénario comparable à celui de
L'ombre d'un doute tourné 10 ans plus tôt. C'est d'ailleurs surtout Teresa qui est la moins bien servie. Elle joue une épouse modèle terne puis deviendra un brin geignarde quand elle commencera à douter des intentions de son mari. Cotten nous joue sa partition du cadre de banque austère, les paupières tombantes et les valoches pas seulement pour les vacances. Il embarque donc Teresa dans son périple mais les excuses successives trouvées par son banquier pour justifier son départ au Brésil sont assez grotesques. Elle est d'abord enthousiaste à l'idée de passer quelques vacances au Brésil, puis s'étonne que soudain son mari envisage sérieusement de s'installer durablement dans le pays mais c'est quand ils se font chopper par les douaniers avec une valise contenant 1 000 000 de $ qu'elle commence vraiment à porter un regard soupçonneux envers son mari qui poursuit néanmoins à tenter de mentir. Pourtant, tout au long du parcours, en raison de l'inquiétude vague de sa femme, il avait commencé à fournir des parcelles de vérité mais il s'empêtre dans ses mensonges craignant de perdre sa femme et remettant à plus tard…à trop tard, lorsque la restitution de l'argent sera impossible, les révélations sur la véritable raison d'être de ce voyage imprévu.
Bref, on peut éviter ce film. Andrew L. Stone n'a pas été toujours aussi mauvais dans ce registre là. A partir de 1950, année de tournage du
Témoin de la dernière heure (Highway 301), un bon film noir, il a même été considéré comme un spécialiste du thriller. Il en a en effet réalisé beaucoup, le meilleur restant à mes yeux ce 1er film du genre dans lequel Steve Cochran était excellent. Il a aussi réalisé
A Blueprint for Murder avec Joseph Cotten, Jean Peters et Garry Merril, puis
Nuit de terreur (The Night Holds Terror qui démarque
La maison des otages mais pour la bonne cause car le film est passionnant donnant l'occasion à John Cassavetes et à Vince Edwards de camper deux "beaux" méchants de polar. En revanche, on peut presque passer sous silence
Le diabolique Mr. Benton (Julie) qui est médiocre malgré un casting réunissant Louis Jourdan, Doris Day, Barry Sullivan et Frank Lovejoy. Cri de terreur avec James Mason, Rod Steiger et Angie Dickinson n'est pas mal, mieux que son film suivant, The Decks Ran Red, à cheval sur plusieurs genres, qui réunissait cette fois à nouveau James Mason, Broderick Crawford et Dorothy Dandridge. Enfin, ces deux derniers films "à suspense", Panique à bord et Le cercle de feu, ne présentent pas beaucoup d'intérêts mais sont assez spectaculaires. Dans le premier, la belle Dorothy (Malone) restait coincée dans un paquebot en train de couler et Robert Stack son mari tentait de la sauver. Dans le second, c'est un incendie spectaculaire qui offrait un cadre parfois impressionnant à un thriller mollasson. 2 de ces films ont été édités en DVD, A Blueprint for Murder et Panique à bord (The Last Voyage), tous les deux en zone 1 avec vost. Les autres sont tous passés à la télévision chez nous.
Dans le final, qu'on peut trouver débile, Teresa donne à Joseph le choix, c'est soit :
Soit :
Qu'auriez-vous fait, fit ? qu'auriez-vous futes à la place de Joe ?