Perso,
L'amour l'après-midi est, de ses films en couleurs que j'ai pu voir, le plus austère (quelconque ?) des Rohmer. On dirait que toutes les couleurs de ce film ont été aspirées. C'est grisâtre ou blanchâtre, délavé, assez déprimant en fait (comme
Domicile conjugal de Truffaut ou d'autres films de la même époque: une esthétique parisienne 70's-tabac-froid qui donne envie de se pendre). En poussant le bouchon on pourrait même dire que c'est, sur la forme, le moins rohmérien des Rohmer, parce qu'inscrit dans un contexte esthétique là où tous les autres, hors films d'époque, sont beaucoup plus atemporels (même ceux des 80's, qui se tiennent tout seul).
Quand il tourne en extérieurs, et particulièrement hors ville, Rohmer me semble plus épanoui parce que ses films gagnent immédiatement une respiration qui se ressent sur l'ambiance esthétique. Il y a toujours un côté brut, naturaliste, mais les plans sont subitement dotés d'une forme de bienveillance ou de quiétude disons "existentielles" et communicatives (c'est vraiment très difficile à exprimer et ça reste bien entendu subjectif), qui culminent lors des films de vacances où t'as une seule envie, c'est de te laisser bercer par le soleil et faire une sieste avec les actrices sous l'ombre d'un pin parasol.
Pauline à la plage, de ce point de vue, avec ses persiennes entrouvertes, ses p'tits-déj dans le jardin, ses villas normandes ou sa plage qui sent la marée, c'est le pied. Bref tout ça pour dire qu'il y a dans ces films un travail esthétique qui peut paraître très fonctionnel ou basique mais qui agit quand même à sa manière, par son épure, cette espèce de proximité tendre (je vois pas comment mieux le dire) avec la chose filmée. C'est la raison pour laquelle je trouve la plupart des films de Rohmer terriblement sensitifs et sensuels.