William A. Wellman (1896-1975)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Julien Léonard
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Julien Léonard »

Je comprends ton avis, mais pour ma part, j'avais ressenti un grand plaisir en regardant le film. J'aimé aimé son rythme, ses trouvailles à la Wellman, sa Barbara Stanwyck absolument magnifique, sa Joan Blondell sous-employée mais si craquante, et ses idées pre-code bien perverses... Il est clair que ce n'est pas un chef-d'oeuvre, mais tout de même un sacré petit morceau de pellicule ! :D
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Jeremy Fox
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Jeremy Fox »

Rick Blaine a écrit :
Midnight Mary: Un film très dynamique, avec un montage rapide, une utilisation du flashback intéressante et réussie, et cette fois une héroïne parfaitement convaincante. Loretta Young est parfaite, j'aime beaucoup cette actrice de manière générale, et entourée d'un casting remarquable, avec Richard Cortez et Franchot Tone, et surtout le génial et inimitable Andy Devine. Midnight Mary brille par une belle écriture, et quelques traits d'humour qui permettent d'éviter le ton trop tragique qui me semble plomber Frisco Jenny. Pas nécessairement un chef d’œuvre de Wellman, mais un excellent moment.
Oui, très bon film pre-code avec une Loretta Young belle comme jamais et brillante actrice.
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Rick Blaine
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :
Rick Blaine a écrit :
Midnight Mary: Un film très dynamique, avec un montage rapide, une utilisation du flashback intéressante et réussie, et cette fois une héroïne parfaitement convaincante. Loretta Young est parfaite, j'aime beaucoup cette actrice de manière générale, et entourée d'un casting remarquable, avec Richard Cortez et Franchot Tone, et surtout le génial et inimitable Andy Devine. Midnight Mary brille par une belle écriture, et quelques traits d'humour qui permettent d'éviter le ton trop tragique qui me semble plomber Frisco Jenny. Pas nécessairement un chef d’œuvre de Wellman, mais un excellent moment.
Oui, très bon film pre-code avec une Loretta Young belle comme jamais et brillante actrice.
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Federico »

Jeremy Fox a écrit :
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Rick Blaine a écrit :
Midnight Mary: Un film très dynamique, avec un montage rapide, une utilisation du flashback intéressante et réussie, et cette fois une héroïne parfaitement convaincante. Loretta Young est parfaite, j'aime beaucoup cette actrice de manière générale, et entourée d'un casting remarquable, avec Richard Cortez et Franchot Tone, et surtout le génial et inimitable Andy Devine. Midnight Mary brille par une belle écriture, et quelques traits d'humour qui permettent d'éviter le ton trop tragique qui me semble plomber Frisco Jenny. Pas nécessairement un chef d’œuvre de Wellman, mais un excellent moment.
Oui, très bon film pre-code avec une Loretta Young belle comme jamais et brillante actrice.
Et boum ! Encore un film qu'il faut donc que j'ajoute à la liste sans fin de ceux qu'il me faut découvrir rapidement... :)
Avant de mourir, je veux avoir vu TOUS les films tournés par la craquantissime Loretta dans les années 30.
Je n'en ai pour l'instant vu que 4... :oops:
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Alligator »

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Westward the Women (Convoi de femmes) (William A. Wellman, 1951)

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"Convoi de femmes" est un film étonnant. William Wellman est décidément un cinéaste surprenant, dans le sens où ses films se détachent souvent des autres productions de l'époque, tout en se maintenant en apparence dans les codes du genre auquel ils se rattachent.

On a là un western avec une histoire toute simple : quelques cowboys sont chargés de faire traverser l'ouest périlleux des États-Unis à plus d'une centaine de femmes qui rêvent de trouver un Californien pour mari.

La femme dans le far-west se prête le plus souvent aux caricatures d'usage : celle de la faible femme perdue dans un monde d'impomponabilité et de violence masculine, une proie, une victime, une charge et donc, quelque part toujours aliénée à des rôles systématiques de pute, de mère ou d'épouse soumise.

Le scénario de ce film que l'on doit à Charles Schnee (The Furies, The bad and the beautiful, They live by night) sur l'idée originale de Frank Capra lui même, ce scénario à la paternité magnifique convoque donc les trois figures féminines habituelles, mais va progressivement les orienter vers des directions inattendues pour le genre. Il va les anoblir. Il leur donne une force et une liberté nouvelle.

Il utilise pour marquer ce changement de statut un cowboy phallocrate, un solitaire un peu misanthrope sur les bords, un irréductible mâle bâti sur des certitudes qu'on devine arrachées à la poussière et à la poudre. Témoin, tout comme le spectateur, des forces insoupçonnées qui se cachent chez ces donzelles pas si faibles que ça, car déterminées, le cowboy (Robert Taylor) change petit à petit d'opinion. Au fur et à mesure que le convoi passe les pires épreuves, les femmes gagnent l'estime et le respect de cet homme. Seuls quelques-uns en sont pas capables finalement puisque la plupart ont fui dès les premières embuches.

Ce qui peut paraitre surprenant, c'est l'extrême gravité qui enferme le récit sur un parcours brutalement réaliste. Peu de place est laissée au bonheur naissant. On y tue des enfants, des mères restent inconsolables, de jeunes couples sont massacrés. Les coups portés sont rudes. Avouons qu'Hollywood ne nous habitue pas à pareille virulence pour l'époque! En ce sens, Wellman peut faire figure de cinéaste précurseur. La plupart des trajectoires obligées sont malmenées, voire fracassées pour certaines. Les dangers n'en deviennent que plus angoissants. Le spectateur est donc tenu en haleine, véritablement scotché par l'émotion. La tension ne se relâche qu'à peine sur la fin. Le rythme est bien maitrisé.

J'ai fini le film remué, agréablement, avec ce sentiment d'avoir assisté à un film soigneusement construit, un film puissant, sérieux, qui ne prend pas son spectateur pour un con.
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

Other men’s women (1931)

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Bill et Jack sont deux ingénieurs ferroviaires. Les choses se gâtent dès lors que premier commence à éprouver de l'attirance pour la femme du second...

Other men’s women est une grande réussite Pré-Code qui plus que par les audaces morales auquel on associe le genre brille surtout par une pureté narrative et émotionnelle donnant un récit à la fois poignant, juste et à la concision parfaite. Bill White (Grant Withers) est un agent ferroviaire jovial et attachant auquel il ne manque qu'un environnement idéal pour laisser s'exprimer ses qualités. En attendant, il court plutôt les filles de mauvaises vies et accumule les dérapages alcoolisé dans une existence sans but sorti de son travail. Après l'écart de trop il est expulsé de sa résidence mais son ami et partenaire Jack Kulper (Regis Toomey) le récupère en le logeant chez lui. Là l'environnement paisible et surtout les attentions de Lily (Mary Astor) l'épouse de Jack en font enfin un autre homme mais au prix d'un désir coupable et de la mise en péril d'une belle amitié.

Wellman fige avec une belle cohérence les caractères de ses personnages, en fonctionnant constamment dans le contraste. La vision quasi documentaire du travail ferroviaire installe l'amitié solide entre Bill et Jack à travers leur complicité et la confiance mutuelle nécessaire à la synchronisation de leur tâche. Ils ne font qu'un alors que Bill sorti de ce cadre semble une âme perdue (la scène d'expulsion quelque peu alcoolisée et hilarante avec la logeuse bègue colérique), un enfant sans repère. Des repères qu'il va trouver dans le doux foyer tenu par Lily où tout évoque une pureté absente du monde extérieur. La maison spacieuse toute blanche dans sa façade et ses intérieurs chaleureux s'oppose au bar de la gare encombré, les repas préparé avec amour par Lily sont bien plus appréciable que ceux quelconques dévorés en solitaire au comptoir. Et bien évidemment Lily est un pur pendant inversé de la vulgaire mais attachante Mary (Joan Blondell). Mary Astor mêle magnifiquement séduction et douceur qui font craquer dès sa première apparition où tout homme ne désirerait plus qu'être choyé par elle. C'est sa présence si douce qui permet à Wellman d'instaurer en quelques scènes à peine une inévitable tension érotique avec Bill qui n'a jamais connu tel quiétude.

L'adultère est amené avec une vraie retenue, aussi brièvement épanouissant que coupable aux regards des liens qu'a pris soin de tisser Wellman. Le drame s'instaure donc, ramenant chacun à une forme de statu quo qui ne peut plus être le même pour des raisons morales (Bill cédant à ses travers mais désormais rongé par la culpabilité), physique (Jack diminué) et en sentimentales avec Lily se sacrifiant au nom du devoir. Le rebondissement final permettant de réunir les amants (et permettant de garder la morale sauve) parait facile sur le papier mais d'une telle force dans son spectaculaire accomplissement que l'on en oublie vite les ficelles tant la scène est touchante. L'épilogue use d'ailleurs d'une délicatesse et d'une finesse brillante pour contrebalancer, suspendant par un échange final des retrouvailles que l'on sait inévitable. 5/6
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par xave44 »

Vu hier La Ville abandonnée (Yellow Sky).
Et une demi satisfaction car le film ne tient pas sur la durée les formidables promesses faites durant les premières séquences, en particulier au niveau de l'image.
Je trouve toute la 1ere partie très réussie: ouverture, vol de la banque, poursuite par la cavalerie (même si les chevaux ont l'air d'avoir pris des corticoïdes...) et toute la déambulation sur le lac de sel, superbe.
La photo noir et blanc est splendide et certains plans sont miraculeux (arrivée de la bande devant le saloon par exemple).
Mais je trouve la 2e partie (tout ce qui se passe dans la villa abandonnée) beaucoup moins réussie notamment les séquences semi-nocturnes et nocturnes (la restauration du DVD Sidonis montre ici ses limites), même si ça et là il y a quelques pépites (scènes entre Peck et baxter, scène de tentative de la noyade dans la source, scène de la découverte de l'or dans la mine, scène dans le final de la découverte des corps dans le saloon par Baxter).
Néanmoins, le film est porté par un casting formidable et je veux saluer la performance exceptionnelle de Anne Baxter dont l'interprétation suffit à justifier l'achat du dvd.
Mais il ne faudrait surtout pas oublier de parler de Richard Widmark qui campe magnifiquement un opportuniste sans états d’âme et qui aurait mérité plus de présence dans le cadre.
On peut regretter également le happy-end un peu rapidement envoyé, comme si Wellman avait eu tout à coup envie d'en finir.
En dépit de quelques réserves essentiellement formelles, ce film reste pour moi une excellente découverte.
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Profondo Rosso
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

Safe in Hell (1931)

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La Nouvelle-Orléans. Gilda, employée au service de Piet Van Saal, est renvoyée lorsque la femme de ce dernier découvre leur liaison. Piet lui rend visite et à la suite d'une violente dispute, Gilda l'assomme avec un vase. Croyant l'avoir tué, elle s'enfuit. Mais une lampe tombée accidentellement provoque un incendie dans l'appartement. Gilda, soupçonnée du meurtre, est recherchée par la police. Elle quitte la ville avec son ami, Carl. Le couple débarque sur une île, refuge de nombreux criminels...

Wellman signe avec ce Pré Code un mélodrame puissant au parfum de tragédie inéluctable. Cette tragédie pèse au-dessus de notre héroïne Gilda (Dorothy Mackaill) dont tous les rebondissements semblent vouer au malheur et à la perdition. Le film s'ouvre de façon fort crue où on découvre Gilda prostituée en route vers la chambre de son prochain client. La rencontre avec ce dernier va s'avérer explosif car il s'agit de Piet Van Saal (Ralf Harolde) le responsable de sa condition. Elle fut auparavant sa maîtresse et lorsque son épouse découvrit la liaison, la fit renvoyer et interdire d'embauche dans toute la ville ce qui la contraignit à vendre son corps. Toute cette amertume et colère ressurgit donc face à cet homme qui souhaite une nouvelle fois profiter d'elle et dans un accès de colère elle le tue accidentellement. Recherchée par la police, Gilda trouve le salut dans son amour de toujours, le marin Carl (Donald Cook) qui va lui pardonner ses errances et la sauver. Le refuge se trouvera dans une île des Caraïbes empêchant l'extradition et où ils pourront se marier.

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Plutôt qu'un refuge ce cadre sera celui de l'expression définitive de l'aura de malheur qui poursuit Gilda. Le script manifeste cela dans ses situations (le mariage avorté mais improvisé dans une très jolie scène), par la symbolique (Gilda observant de nombreuses fois l'horizon déserte comme condamnée sur cette île) et bien sûr par l'environnement de plus en plus délétère des lieux. L'île est en effet le repère de divers criminels en fuite qui vont autant éveiller les bas-instincts de Gilda que la confronter à leurs désirs libidineux. Dorothy Mackaill est aussi fragile que provocante dans le regard de Wellman qui l'érotise à merveille (première apparition affolante en bas et nuisette, son changement de tenue lorsqu'elle s'apprête à se mêler à ses voisins) tout en faisant de ses atouts l'instrument de son malheur à travers une pureté, une virginité qu'on lui refuse de retrouver. Le titre du film s'avère explicite et l'île un ersatz confiné de l'enfer que représente le monde pour ses âmes perdues, peuplées de monstres à l'image de l'ignoble bourreau incarné par Morgan Wallace. Gilda retrouvera pourtant sa dignité tout en disant définitivement adieu au bonheur dans une conclusion poignant où Dorothy Mackaill définitivement libérée de ses afféteries s'abandonne enfin totalement. Son funeste sort final fait presque figure de libération dans l'ultime plan filmé par Wellman, la laissant enfin apaisée dans sa marche vers l'oubli. 5,5/6

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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par allen john »

The public enemy (William Wellman, 1931)

Des trois films de gangsters mythiques (Little Caesar de Le Roy et Scarface de Hawks étant bien sur les deux autres) qui entament la décennie, celui-ci est le plus fascinant; James Cagney y est incroyable, mais la grande force reste la mise en scène exemplaire, impeccable et plus qu'inspirée de Wellman. C'est l'un de ses très grands films, si ce n'est le plus grand, peu importe: c'est juste l'une des preuves de son génie. Il a su prendre un matériau bien de son temps, et inventer une manièe de faire, qui n'allait pas rester sans suite: Angels with dirty faces (Curtiz 1938) et The roaring twenties (Walsh, 1939) allaient tous deux reprendre la même structure chronologique, passant d'une exploration de l'Amérique populaire des débuts du siècle jusqu'aux années 30 en passant par les cassures de la première guerre mondiale et de la prohibition, deux évènements traumatiques qui ont sérieusement entaché cet âge de l'innocence qu'auraient été les années 20 sans elles. Bien sur, les deux films en question ajoutent aussi la crise de 1929, absente de ce film, mais le propos est ailleurs: dépeindre l'histoire d'un gangster comme une illustration du rêve Américain, un thème que The public enemy partage du reste avec Little Caesar, de Mervyn Le Roy.

Tom Powers (James cagney) est un jeune homme qui a de l'ambition, mais qui est surtout déterminé à les réaliser hors du giron de la loi: le souvenir des fessées paternelles, administrées quotidiennement par un père policier? Le fait qu'elles ont manifestement développé chez lui un plaisir masochiste de trangression et de défi? Quoi qu'il en soit, Powers est tellement motivé qu'il s'impose bien vite à ses employeurs, et va découvrir avec la prohibition un terrain de jeu qui lui permettra vite de devenir quelqu'un, et de tout avoir: pouvoir, ascendant sur les hommes et les femmes, et de multiples occasions de passer sa colère... La chute, bien sur, sera expéditive.

Dès le départ, Wellman plonge dans le coeur du sujet, littéralement, en multipliant les plans-séquences dans son exposition; la façon dont il nous prévient en nous montrant une rue peuplée de gens qui vont et viennent, dans laquelle les hommes qui véhiculent de l'alcool (Un camion encombré de tonneau, un homme qui transporte plusieurs seaux remplis de bière), croisant ironiquement une parade de l'armée du salut, nous installe dans un monde qui n'a pas encore affronté ses contradictions, et qui y viendra en 1919 avec le Volstead Act, la loi qui installera la prohibition sur l'ensemble du territoire Américain. dans ce monde de 1909, où il faut choisir son camp, Tom Powers, qui traine toujours avec son copain Matt, est déjà attiré par le crime, ne serait-ce que parce qu'il est en permanence en colère, contre son père surtout. Celui-ci ne dira pas un mot, mais la courte séquence qui le présente, figure silencieuse et menaçante qui se rend dans la cuisine pour décrocher du mur la ceinture de cuir qui lui sert à administrer de cuisantes corrections à son fils, ne laisse aucun doute: son fils est éduqué à la violence par la violence, et il va apprendre à aimer cela, comme le prouve le plan durant lquel le père hors champs le frappe, et le visage du jeune homme se transforme sous nos yeux, lorsqu'afin de supporter le traitement dont il est la victime, il s'efforce de regarder son géniteur dans une posture de défi.

Puis l'évolution de Tom Powers se fait sous la houlette de diverses autres figures paternelles, dont le louche putty Nose, un gangster de moindre envergure qui embauche Tom et Matt, avant de les lâcher en pleine crise, après qu'ils aient provoqué la mort d'un compl:ice lors d'une affaire, ou le "régulier" Paddy Ryan, un autre Irlandais qui les prend sous sa houlette. Putty nose est surtout vu à travers deux séquences qui le montrent jouer la même chanson au piano: dans la première, il en joue pour les gamins fascinés de la rue, et s'arrête de chanter sur un mot lorsq'il avise la présence de Matt et Tom, auxquels il souhaite confier une affaire. Lors de la séquence qui voit Tom supprimer son ancien patron, il joue la même chanson, et s'arrête sur ce même mot, touché à mort par la balle que vient de tirer Tom (Hors champ, bien entendu): l'inévitable meurtre du père, transgression qui est aussi une libération pour Tom. Paddy Ryan sera aussi pour Powers l'occasion d'affronter un complexe d'Oedipe fort mal vécu; réfugié chez Paddy, fin saoul, Powers couche sans même s'en apercevoir avec la compagne (Particulièrement gourmande, d'ailleurs) de son protecteur, ce qui lui occasionnera une grosse colère le lendemain... Mais ses rapports avec les femmes seront le plus souvent marqués soit par sa domination (Ce dont l'incroyable séquence dite 'du pamplemousse' se veut le témoin), soit par la recherche impossible d'une égale, et surtout par son ambition; ainsi, il se dabarrasse de Kitty, sa première petite amie, après qu'il ait commencé à s'ennuyer avec elle, et la remplace par Gwen une jeune femme qui a plus de classe (Et qui est jouée par Jean Harlow avant que celle-ci ne soit une actrice, comme en témoigne la scène parfois gênante durant laquelle elle lui sussure des "Oh, My bashful boy"). Tom Powers est la recherche de femmes avec lesquelles il puisse se sentir en confiance, mais son "métier" aura toujours le dessus. Ses rapports avec les hommes sont aussi riches et aussi bien évoqués dans le film, notamment son amitié pour le moins complexe avec le compagnon Matt: dès les premières séquences, nous voyons Powers choisir Matt plutôt que sa soeur (Celle-ci se consolera avec le frère de Tom, celui qui incarnera le versant honnête, mais aussi insipide, de la famille!); il passe son temps à tenter de rabaisser son copain, mais ils sont inséparables, et c'est après qu'une bande ait éliminé Matt que Powers va déclencher les impressionnantes hostilités de la fin du film. Il va se dépasser, dans une scène qui est aujourd'hui célèbre, parce que ellman, ntout simplement, nous en prive: il filme Powers qui entre dans un restaurant, et... le bruit d'une aletrcation musclée, suivie d'un plan qui aurait pu terminer le film, nous montrant Powers blessé tomber dans l'eau (Il pleut en abondance) en murmurant "I ain't so tough", je ne suis pas si dur.

Le mythe ne se referme pas sur cette scène, la fin nous montre un Tom qui a échappé de peu à la mort, et qui semble être sur la voie de la guérison, voire de l'honnêteté, renouant avec sa famille... Mais Wellman ne peut pas nous laisser sur un happy-ending, et la fin portera sa dose d'énigme, de non-dits, d'ellipse. elle sera visuelle, définitive et forte, marquée par une mise en scène sublime, dans laquelle le cinéaste nous montre une fois de plus, comme il l'aura fait durant l'ensemble des 83 minutes de son film, sa maîtrise absolue du mouvement, du placement de la caméra, de la composition, du rythme, de la profondeur de champ et du coup de théâtre, en un seul plan de quelques secondes, suivi de la vision d'un phonographe dont le disque tourne à vide. Fin: The public enemy est l'un des plus beaux films Américains de tous les temps.

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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

Wild Boys of the Road (1933)

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Pendant la Grande Dépression des années 1930 aux USA des centaines de milliers d'adolescents miséreux, les Hobos, se retrouvent à errer sur les routes, tenaillés par la faim et traqués par la police ...

William A. Wellman scrute la Grande Dépression à travers le regard adolescent pour un résultat aussi naïf que cruel et sombre dans ce superbe Wild Boys of the Road. Le film démarre dans une photographie de vie américaine ordinaire avant que la réalité rattrape déjà cette jeunesse. Eddie (Frankie Darro) et Tommy (Edwin Phillips) sont deux adolescents de sortie avec leurs petites amies mais problème, ils sont fauchés et n'ont pas de quoi payer l'entrée à la soirée dansante où ils se rendent. Une astuce amusante et le tour est joué, ils se trouvent à l'intérieur mais démasqués ils en seront chassés. Ce premier rejet relativement anodin initie déjà la dimension de paria et de rejet que vont ressentir nos deux héros et par extension la jeunesse pauvre d'Amérique qu'ils représentent. On découvrira ainsi l'environnement démunis dans lequel les deux garçons évoluent, Tommy vivant seul avec sa mère sans travail tandis que le père d'Eddie vient de perdre le sien. La culpabilité du poids qu'ils représentent pour leur famille incitent les amis au sacrifice, en abandonnant ce qu'ils ont de plus cher d'abord d'un point de vu matériel (scène aussi simple que bouleversante quand Eddie vend sa voiture et peine à cacher ses larmes) puis en quittant le foyer pour chercher du travail.

Comme toujours dans les œuvres Pré-Code, la narration est limpide et efficace et les thématiques s'expriment dans l'action et par l'image le film durant à peine plus d'une heure. Eddie et Tommy deviennent ainsi des "hobos" précoces et si leurs aînés ne trouvent pas de job dans cette Amérique en crise, ils ne pourront guère faire mieux. Le film offre ainsi un road movie, une odyssée sans but où ils rencontreront d'autres laissés pour compte de leur âge pour former une communauté vivant au gré des voyages dans des wagons insalubres, de la fuite ou de l'affrontement des figures d'autorités (et plus généralement adultes comme le montrera un rebondissement final) néfastes que sont la police et/ou les contrôleurs, du volt et de la mendicité. Wellman instaure une tonalité faite d'extrême candeur (malgré leurs larcins ces jeunes restent des figures pures victimes des évènements) notamment grâce à la très attachante prestation de Frankie Darro en Eddie avec une bouille respirant la bonté et la détermination. Cet élan est régulièrement brisé par une noirceur où le monde qui les entoure se rappelle au souvenir des jeunes voyageurs lors de terrible moments : un protagoniste amputé après avoir eu la jambe écrasé par un train, une adolescente violée dans un wagon par un contrôleur de train concupiscent. La conclusion vient amener un peu de lumière et d'espoir, soulignant ainsi que même dans la tourmente l'Amérique n'oublie pas ses enfants. L'ultime échange entre Eddie et Tommy, soulignant cette amitié indéfectible en un regard clôt le film de la plus belle des façons. 5,5/6

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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par kiemavel »

Profondo Rosso a écrit :Wild Boys of the Road (1933)
Très bonne série de textes sur les Wellman des années 30...Mais euh...Y'en a encore un bon paquet tant le bougre a été actif au cours de cette décennie : 35 films en 10 ans !!!

Pour l'anecdote, le rôle féminin principal de Wild Boys était tenu par Dorothy Coonan (c'est elle qui se grime en garçon au tout début ? il me semble bien mais il y a longtemps que je ne l'ai pas revu). Elle fut la dernière femme de Wellman qu'elle épousa dès l'année suivante, en 1934 et ils eurent 7 enfants ! Elle a tenue le coup jusqu'à 95 ans, nous quittant il y a seulement 3 ans.
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

kiemavel a écrit :
Profondo Rosso a écrit :Wild Boys of the Road (1933)
Pour l'anecdote, le rôle féminin principal de Wild Boys était tenu par Dorothy Coonan (c'est elle qui se grime en garçon au tout début ? il me semble bien mais il y a longtemps que je ne l'ai pas revu). Elle fut la dernière femme de Wellman qu'elle épousa dès l'année suivante, en 1934 et ils eurent 7 enfants ! Elle a tenue le coup jusqu'à 95 ans, nous quittant il y a seulement 3 ans.
Oui c'est bien elle en garçon au début, d'ailleurs elle est plus âgée qu'il n'y parait dans le film j'ai vraiment cru que c'était une vraie adolescente, elle avait en fait la vingtaine.
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par kiemavel »

Profondo Rosso a écrit :
kiemavel a écrit :Pour l'anecdote, le rôle féminin principal de Wild Boys était tenu par Dorothy Coonan (c'est elle qui se grime en garçon au tout début ? il me semble bien mais il y a longtemps que je ne l'ai pas revu). Elle fut la dernière femme de Wellman qu'elle épousa dès l'année suivante, en 1934 et ils eurent 7 enfants ! Elle a tenue le coup jusqu'à 95 ans, nous quittant il y a seulement 3 ans.
Oui c'est bien elle en garçon au début, d'ailleurs elle est plus âgée qu'il n'y parait dans le film j'ai vraiment cru que c'était une vraie adolescente, elle avait en fait la vingtaine.
Même impression pour moi. Intrigué par cette actrice qui ne me disait rien, mais que j'avais vu sans le savoir dans d'autres films découverts précédemment sans l'avoir particulièrement remarqué, j'étais allé sur imdb et j'avais été étonné de découvrir son âge. Dans le topic "Films Noirs à petits budgets...", je viens de poster un texte sur un Wellman étrange mais intéressant "The Hatchet Man" et le film critiqué juste avant est un autre film des années 30...avec Rochelle Hudson, la seconde fille des " Wild Boys of the road ".
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

Frisco Jenny (1932)

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Frisco Jenny est devenue orpheline durant le tremblement de terre de San Francisco en 1906. Plus tard, elle se retrouve patronne d'une maison de débauche. Ayant mis son fils dans une famille d'adoption, celui-ci, après avoir suivi des études de droit, devient procureur et est désigné pour instruire un procès afin d'éradiquer la prostitution dans la ville…

Un très grand mélodrame qui affirme définitivement Wellman comme un des maîtres du genre en ce début des années 30, lui qui signera l'un des plus grands de la décennie avec sa première version de une étoile est née en 1937. Avec Frisco Jenny il réalise en quelque sorte la matrice de quelques grands mélodrames "maternels" à venir comme À chacun son destin de Mitchell Leisen (1946) ou encore Madame X (1966) (encore que pour ce dernier le script de Wilson Mizner sur Frisco Jenny doit sans doute déjà pas mal à la pièce originale et antérieure de Alexandre Bisson) mais ici rehaussé par la provocation Pré-Code et le sens de la tragédie qu'instaure Wellman.

Le récit est celui d'une femme dont la maternité perdue représente le seul îlot d'une existence scandaleuse aux yeux des autres. Le début du film voit la jeune Jenny Sandoval (Ruth Chaterton) tout perdre dans le tragique tremblement de terre de 1906, sa situation, son père et son fiancé. Quelque chose a cependant survécu des décombres et constituera son seul lien émotionnel désormais : elle est enceinte. Ce fils deviendra l'objet de bien des renoncements et sacrifices pour Jenny, l'immoralité apparente du personnage (en plein ascension par la réussite dans le proxénétisme et le trafic d'alcool) contrebalançant constamment avec la mère dévouée que tout le monde ignore. Le scénario la fait ainsi constamment naviguer entre deux eaux, le stupre et la pureté d'âme, la seconde provoquant cruellement le basculement dans la première. En début de film, ses fiançailles lui promettraient un horizon plus noble que le commerce douteux de son père mais le tremblement de terre vient briser ces beaux projets. Devenue mère, la pauvreté l'obligera à se prostituer puis à développer un talent certain dans le crime. Cette facette prendra un tour tragique dans la dernière partie où c'est celui auquel elle a tout sacrifié qui la conduira à perte, le fils adopté et devenu procureur se faisant l'inquisiteur impitoyable de sa propre mère.

Le brio narratif de Wellman fait merveille pour dépeindre cette destinée tragique, le récit fonctionnant ainsi par ellipse où nous faisant presque à chaque fois redécouvrir Jenny et son environnement toujours plus luxueux et scandaleux le rebondissement concluant la séquence précédente déterminant toujours un peu plus la dépravation croissante de la suivante. Drame et perdition morale sont toujours constamment liés dans la trajectoire de notre héroïne, culminant lors de la formidable scène du tribunal. Le montage alternant la diatribe du procureur, le visage désapprobateur des jurés et le visage accablé de Jenny fait sonner chaque mot comme un coup de poignard quand on connaît les raisons de ses méfaits. Ruth Chaterton (qui avait expérimenté justement ce type de personnage avec une version de Madam X en 1929) est bouleversante, visage de poupée de porcelaine progressivement altéré par la vie, tout aussi digne et déterminée des bouges sordides à la solitude de sa prison en conclusion. Dans magnifique idée visuelle finale, Wellman illustre symboliquement sa mort avec la brûlure des photos de son fils, la faisant disparaitre avec les images de celui pour lequel elle s'est tant raccrochée à la vie. 5/6
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Profondo Rosso
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

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The Purchase Price (1932)

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Joan Gordon travaille à Broadway depuis qu'elle a quinze ans, chanteuse et danseuse, elle est lassée de cette vie et rêve du grand amour loin des illusions nocturnes. Pour échapper à un homme de la nuit qui ne cesse de la convoiter elle décide de partir à Montréal poursuivre sa carrière. Mais l'homme qui la convoite la retrouve vite. Sa femme de chambre a trouvé un homme à marier par petite annonce, un fermier canadien. Alors qu'elle avoue à Joan qu'elle a envoyé à l'homme une de ses photos, Joan décide de sauter sur l'occasion et de partir elle-même à la rencontre de cet inconnu.

The Purchase Price n'est pas la meilleure production Pre Code de Wellman mais offre néanmoins un joli moment, en grand partie dû à la touchant prestation de Barbara Stanwyck. Celle-ci incarne Joan, chanteuse et danseuse à Broadway depuis ses quinze et qui aspire à une vie plus authentique que cette superficielle existence nocturne. Seulement cette profession lui ferme l'accès à des prétendants plus respectable et au contraire attire les individus douteux tel que le gangster Eddie Fields (Lyle Talbot), ancien amant qui la poursuit de ses assiduités et la couvre de cadeau. Elle va donc fuir à Montréal où un concours de circonstance va la faire se substituer à sa femme de chambre ayant utilisée une de ses photos pour se présenter à son futur époux fermier qu'elle n'a pas encore rencontrée.

Le film souffre pas mal d'un certain manque de liant dramatique dans son déroulement donnant plutôt l'impression d'assister à une suite de scène détachées les unes des autres, aussi réussies soit-elles. Ainsi la description du monde de la nuit dont Joan est si lasse est bien trop brève et pas suffisamment montré sous son jour négatif (si ce n'est dans le regard des autres avec le riche fiancé qui va la rejeter) et du coup la différence avec les séquences à la ferme se déroulant dans un quotidien plus terre à terre n'est pas assez marquée. Autre souci George Brent en fermier bourru et taiseux s'avère quelque peu monolithique et peu attachant finalement. Seulement atout de taille, une Barbara Stanwyck à la présence lumineuse qui enchante de bout en bout. Toutes les émotions et le plaisir de la découverte passe par ses sourire et son regard. Effrayée puis séduite par la rudesse de son époux, charmeuse (cette manière d'aguicher cet ours de George Brent en petite tenue le bougre restant de marbre) et obstinée dans sa volonté de se faire à la vie de la campagne, elle dégage un charme qui relève totalement le film. Wellman ne s'y trompe pas, la mettant au centre de presque toute les scènes et sa seule prestation souligne bien mieux les thèmes que le script ne fait qu'effleurer, la solidarité et la camaraderie de la campagne montrée dans une scène clichée de beuverie est ainsi rattrapée par une visite de Joan parti aider une voisine ayant accouché seul lors d'un moment très touchant. Il y a les excellents acteurs qui vampirisent des très bons scripts et altèrent la qualité des films par leur égo, et il y a les autres qui au contraire transcendent un matériau boiteux par leur seule grâce. Barbara Stanwyck est de cette trempe. 4/6
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