feb a écrit :Bon maintenant il faut qu'on t'aide à trouver un nouveau film pour demain soirRick Blaine a écrit :Bon, je ne vais pas le laisser sur le feu plus longtemps...
Johnny Guitar (Nicholas Ray - 1954)
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- Les réserves que j’émettais quelques posts plus haut sur le cinéma de Ray, et que je maintient pour les films cités, volent en éclat sur ce titre. Elles laissent place à une splendide et intense peinture des passions humaines: l'orgueil, la fierté, l'envie et l'amour.
Je m'étais préconçu une fausse idée de Johnny Guitar. J'en avais lu beaucoup de bien ça et là, et notamment en ces lieux, mais je m'attendais à un western romantique, deux femmes et un troubadour, un truc un peu mielleux, c'était là, me disais-je l'atypisme de ce film. Pour du mielleux, je repasserais. Que de violence, que de tensions, que de passion dans le film de Ray. Une violence sèche, tranchante même, comme les remarquables dialogues, comme la superbe bande son traversée par le crissement de la roulette, par les chutes d'eau et par le crépitement des flammes, comme la très belle photo, qui tire admirablement profit des contrastes marqués du Trucolor.
Plutôt que sur une romance, le film se construit sur l'opposition entre deux femmes Vienna -magnifique Joan Crawford- et Emma -effrayante Mercedes MacCambridge, possédée par le rôle, sorte de Tommy Udo au féminin. (et encore, il a l'air sympa finalement...) - les deux seules femmes du film d'ailleurs, on n'y verra même pas une figurante, qui cristallisent l'ensemble des passions dans la ville: jalousie, amour et envie.
Autour d'elles gravitent une remarquable galerie de personnage, on y retrouve, au meilleur de leur talent, Ward Bond, John Carradine et Ernst Borgnine. On y retrouve surtout un extraordinaire Sterling Hayden, dans un très beau rôle, à la fois protecteur et destructeur. Grâce à lui, nous l'avons, d'ailleurs, notre histoire d'amour. Une belle, une flamboyante, une poignante, qui culmine lors de la discussion nocturne entre Crawford et Hayden poignante d'intensité.
Esthétiquement, j'attendais beaucoup du film car Ray ne me déçoit pas sur ce point. il s'est surpassé, l'ensemble est magnifique, ses choix de plans sont remarquable, et son utilisation de la couleur géniale (pour citer scène une parmi d'autre, le rendu de l'incendie est impressionnant). Il s’appuie également sur une excellente direction artistique, les choix des décors et des costumes sont à saluer, tant pour leur fonction esthétique que pour le sens du film. C'est dans la narration et dans son propos que Ray m'a surpris. pas de lourdeur ici, pas de lenteurs non plus, le rythme est soutenu, le film est spectaculaire, les personnages et leurs émotions sont vraies, rien ne vient forcer leurs colères ou leurs instincts.
Bref, je n'ai aucun reproche à faire à Johnny Guitar, bien au contraire, merci à tous pour cette recommandation collégiale, cette œuvre est magistrale. Voilà qui pourrait bien entrer dans mon Top western, et qui fera un beau film du mois.
