Notez les films naphtas décembre 2011

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Profondo Rosso
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Profondo Rosso »

Watership Down de Martin Rosen (1978)

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Pressentant un danger aussi implacable qu'imminent, un groupe de lapins aventureux sort de sa garenne à la recherche d'un territoire plus sûr. En chemin, ils vont rencontrer des situations extraordinaires qui vont les conduire à déployer des talents exceptionnels. Au bout d'aventures formidables au sein d'une garenne totalitaire, dans une ferme dangereuse, puis au terme d'une bataille fantastique, ils parviendront à établir leur garenne pacifique sur les hauteurs de Watership.

Un monument autant qu'un ovni du cinéma d'animation que ce déroutant Watership Down. A l'origine, on trouve tout d'abord un classique de la littérature anglaise paru en 1972 et écrit par Richard Adams dont ce fut le premier roman et le plus grand succès. L'histoire naît de l'imagination de l'auteur au cours de long trajet en voiture où pour distraire ses deux filles, il commence à leur raconter les curieuses aventures de ces lapins en exil. C'est donc au départ une série de courts récits au gré de voyages familiaux mais pressé par ses filles, Adams décide d'en tirer un roman. La publication sera de longue haleine avec le refus de pas moins de 13 éditeurs avant que Rex Collings ne l'accepte avec des pincettes. Le succès sera immense et le livre devient un véritable phénomène récompensé de nombreux prix littéraires prestigieux. Tout ça pour des histoires de lapins voyageurs ? Pas tout à fait... Dans la nature improvisée de son histoire, Adams aura inclut des sources d'inspirations inattendues où se retrouvent odyssée épique et mystique, symbolisme religieux, analogies guerrières (certains épisodes s'inspirent de récits de guerre rapportés à Adams par des amis ayant fait la bataille d'Arnhem en 1944), poésie et élément personnel, la fameuse destination des Watership Down (Les Garennes de Watership pour le titre français) se situant sur une colline du nord du Hampshire où l'auteur a grandi.

Tous ces éléments s'harmonisent de merveilleuse façon dans la périlleuse adaptation qui en est tiré en 1978. Martin Rosen tombé sous le charme du livre désirait au départ simplement produire la version cinéma mais s'improvisera réalisateur pour mener le projet à son terme (John Hubley le premier réalisateur envisagé décédant peu avant le tournage) et après moult hésitation (comme user de marionnettes...) optera pour l'animation pour approcher au plus près l'esthétique des illustrations du livre. Dès la magistrale scène d'ouverture on comprend que le pari est réussi et que ce qui va suivre n'a rien de commun. Dans une imagerie de dessins tribaux, voix off nous narre une sorte de livre de la Genèse lapine où ceux-ci sont désignés comme le peuple élu par leur Dieu Frith mais dont ils se montrent indignes de la bienveillance. Celui-ci fait donc de toutes les autres créatures animales des ennemis amenés à pourchasser les lapins, faisant désormais de la terre un lieu de danger permanent pour eux mais les dote des qualités pour y survivre au détour d'une mémorable tirade :

All the world will be your enemy, Prince with a Thousand Enemies. And whenever they catch you, they will kill you. But first, they must catch you: digger, listener, runner, prince with the swift warning. Be cunning and full of tricks, and your people will never be destroyed.

C'est ensuite le livre de l'Exode qui est convoqué lorsque l'histoire reprend au présent, avec le départ d'un groupe de lapin vers une hypothétique "terre promise" quand leur garenne se voit menacée de destruction par un chantier, une apocalypse vue en vision Fiver qui sera le guide et prophète des voyageurs. On alterne ensuite entre la nature ludique et enfantine attendue (le loufoque personnage de l'oiseau Kehaar) et une saisissante noirceur. Eléments naturels, chiens, chats et humain se placent en obstacle qui feront du périple un voyage au bout de la nuit pour nos lapins qui devront trouver les ressources héroïques pour arriver à destination. Les héros sont formidablement caractérisé (et anthropomorphisé juste ce qu'il faut notamment par l'expression du regard) avec chacun des qualités propres à mener la quête à terme : l'illuminé et innocent Fiver, Hazel son frère en forme d'Ulysse plein d'astuce, le courageux et combattif Bigwig et le poète et conteur Dandelion qui amène la dimension légendaire à leurs hauts faits. Le casting vocal haut de gamme rend d'autant plus fort la réalité des personnages avec notamment Ralph Richardson, John Hurt, Nigel Hawtorne ou encore Roy Kinnear. Les animateurs se nourriront de leur performances pour revoir leur copie et rendre encore plus intenses encore les réactions des lapins. L'animation masque brillamment ses limites de fluidité (cela reste tout à fait efficace et réussi tout de même) en renforçant cette dimension iconique qui donne peu à peu une dimension quasi mythologique aux lapins et à leurs aventures, tandis que l'arrière plan naturel foisonne de vie et de détail. Le sommet est atteint lors de ce sublime moment d'onirisme où Fiver part à la recherche de son frère blessé par un chasseur, guidé par le spectre de Frith tandis que s'entonne la chanson Bright Eyes d'Art Garfunkel (qui sera un immense tube et contribuera grandement au succès du film).

La plus grande audace surgit dans la dernière partie et accentuant l'analogie lapin/humain puisque le plus grand péril pour les lapins viendra de leur propres congénères ayant établit une société tyranniques. Cela tient autant de la métaphore sur la dictature et le libre arbitre que du pur film de guerre et d'évasion se terminant sur un final sanglant et épique, General Woundwort constituant un méchant d'anthologie. Une belle et poétique dernière scène fige magnifiquement la magie de l'ensemble sur le score somptueux d'Angela Morley. Triomphe inattendu à sa sortie, le film est aujourd'hui considéré comme un classique et figura à la 86e place des plus grands films d'animations de tout les temps dans un récent documentaire britannique. Grand film où on peut deviner une des influence de Zack Snyder sur son très bon Royaume de Ga'Hoole voire de Nick Park pour Chicken Run. 5,5/6 et sûrement un super film du mois pour finir 2011.
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Flol
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Flol »

Profondo Rosso a écrit :Le sommet est atteint lors de ce sublime moment d'onirisme où Fiver part à la recherche de son frère blessé par un chasseur, guidé par le spectre de Frith tandis que s'entonne la chanson Bright Eyes d'Art Garfunkel (qui sera un immense tube et contribuera grandement au succès du film).
Rien que de repenser à cette scène, j'en ai des frissons.
Et oui, la musique composée par Angela Morley (jamais entendu parler d'elle auparavant) est superbe.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par julien »

Ils ont été trois en fait à composer la musique même si Angela Morley a écrit l'essentiel. Il y a aussi Mak batt, l'auteur de la chanson d'Art Garfunkel (j'aime pas beaucoup personnellement mais l'arrangement est pas mal) et un compositeur australien que j'aime bien : Malcolm Williamson, qui devait initialement composer l'intégralité de la bo.
Dernière modification par julien le 21 déc. 11, 14:58, modifié 1 fois.
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Profondo Rosso »

julien a écrit :I Malcolm Williamson, qui devait initialement composer l'intégralité de la bo.
Oui on lui doit le très beau main theme, Angela Morley l'a enrichi de plusieurs variations et a composé le reste du score...
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par julien »

Voila exactement. Je crois que Williamson est tombé malade et qu'il n'a pas eu le temps d'écrire la suite. Il a signé aussi quelques musiques de films pour la Hammer même si ce n'est pas ce qu'il a fait de plus intéressant. Son œuvre pour orchestre et ses opéras comme "Julius Caesar Jones" sont beaucoup plus significatifs. Angela Morley elle est surtout connue comme arrangeuse et orchestratrice mais elle a aussi composé d'autres musiques pour le cinéma comme Captain Nemo And The Underwater City qui a été édité il y a quelques années en cd et qui est vraiment très bien également.
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Message par Miss Nobody »

Profondo Rosso a écrit :Watership Down de Martin Rosen (1978)
Je n'avais jamais entendu parler de ce film auparavant, mais tout ça est très alléchant.
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Kevin95
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Kevin95 »

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The Flight of the Phoenix (Robert Aldrich) Image

Petite réévaluation du film d'Aldrich qui restait dans mon souvenir comme une huit-clos pavé de bonnes intentions mais qui au final n’évitait jamais l'ennui. Certes, The Flight of the Phoenix est définitivement trop long (imaginez 2h15 dans le désert... ça parait difficile de garder une tension) mais il vaut bien mieux que la case mineur dans laquelle je l'avais rangé.
Car en se focalisant sur l'aspect grand spectacle du film on passe à coté du sujet réel qu'aborde le metteur en scène, à savoir un conflit d'ego. C'est surprenant de voir à quel point Aldrich déshumanise ses personnages, les rends odieux et moches quand bien même ils vont devoir effectuer un acte de bravoure. Il faut voir avec quel sadisme, le réalisateur traite cette bande d’égoïstes, de prétentieux et de lâches symbolisée par le combat de coqs opposant Stewart et Krüger.
On ne peut pas dire que le gentil James Stewart soit particulièrement ménagé dans ce film-ci, il apparait comme un vieux pilote bourru et imbu de lui-même. Face à son équivalent plus jeune (donc Krüger) le personnage (héros) va petit à petit devenir violent et fou à son contact (ça en devient presque drôle quand le scénario multiplie les échanges houleux entre le pilote et l'intellectuel). Là où chez Anthony Mann, Stewart apparaissait ambiguë pour mieux faire ressortir son humanité, chez Aldrich il fait clairement partie de la galerie de monstres dépeins et son héroïsme final est moins un rachat qu'un moyen comme un autre de se montrer supérieur au groupe (Aldrich a beau insérer des scènes illustrant la culpabilité du personnage, c'est bien son ego-centriste qui ressort tout le long du film). Les autres hommes ne sont pas mieux, on trouve des tyrans, des lâches et des violents. Bizarrement le seul qui trouve grâce à la mise en scène très critique d'Aldrich, c'est celui que l'on fait passer pour fou. Interprété par Ernest Borgnine, le personnage émeut car c'est le seul qui ne se mesure pas aux autres (même si comme les autres il abrite une violence latente) alors que celui-ci est vu tout en bas de la hiérarchie humaine du groupe.
Un film étrange, bizarre, à la croisé du Hollywood classique et celui moderne des années 70. The Flight of the Phoenix est à l'image des films d'Aldrich de la décennie 60 amorcée par le génial The Last Sunset, une œuvre monstrueuse (au sens émotionnel), malade et passionnante où l'on voit un cinéaste talentueux essayant d’expulser une rage et violence perceptible, et ce avant son décomplexé The Dirty Dozen en 1967.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Rick Blaine »

:D
Un de mes Aldrich préférés! D'ailleurs je ne le trouve pas trop long, la tension tient.
Comme tu le dis, il ne s'agit pas d'un film à grand spectacle. Et contrairement à ce qu'indiquent les étendues qui entourent les protagonistes, il s'agit d'un huis clos, dans lequel nait effectivement une guerre d'égos dans une sorte de micro-société reconstruite par Aldrich.
Dans ce petit jeu, Aldrich fait démonstration de la bassesse de ces êtres humains à l'exception peut-être, comme tu le dit du personnage de Borgnine. Façon peut-être de montrer pour Aldrich que celui qui apparait comme le moins 'normal', c'est à dire le moins conforme à la norme, n'est peut-être pas le plus mauvais des humains.
Dernière modification par Rick Blaine le 29 déc. 11, 13:43, modifié 2 fois.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par daniel gregg »

Vous m'avez rendu curieux avec cet Aldrich tous les deux !
Je vais essayer de me procurer çà dans les prochains jours.
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Kevin95
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Kevin95 »

Ce qui est génial dans le film c'est son introduction. Une fois le logo de la Fox passé, en rentre tout de suite dans le récit... enfin presque, Aldrich présente les personnages calmement, tous sont d'une sérénité et d'une droiture à la limite de l'hypocrisie. Ainsi Stewart est comme cul et chemise avec son co-pilote, les passagers rigolent bien, on se passe une bouteille, on raconte sa vie et on se moque gentillement du benêt Borgnine. Puis arrive l'accident et là commence le générique avec le nom des acteurs s’inscrivant sur une image figée des personnages en panique, comme si pour Aldrich (et comme le veut une idée répandue) on ne se définit que dans l'action et plus particulièrement quand il y a un danger de mort.

Ce générique m'a rappelé celui de The Dirty Dozen avec ces soldats définies selon un vice particulier (voleur, menteur, arrogant etc...) mais c'est une fois insérés dans le conflit que leurs héroïsme peut se développer. Comme l'a justement dit Jean-Baptiste Thoret, les héros chez Aldrich, ne le sont que lorsqu'ils sont en action. Quand ils sont immobilisés comme dans The Flight of the Phoenix, ils ne sont que des hommes, donc avec des défauts.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Lord Henry »

J'aurais bien dit un mot de Destination Moon, mais l'état de la copie proposée par Ciné Classic m'a dissuadé d'en voir plus de dix minutes.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par daniel gregg »

Lord Henry a écrit :J'aurais bien dit un mot de Destination Moon, mais l'état de la copie proposée par Ciné Classic m'a dissuadé d'en voir plus de dix minutes.

Ah oui ?
Enregistré mais pas encore eu le temps de le voir, ni de jeter un oeil, du coup si je t'en crois, je risque d'en laisser au moins un.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Federico »

Destination Moon est un classique toujours très plaisant à revoir et qui m'a à nouveau bluffé par le soin accordé aux effets spéciaux. Normal, puisqu'il fut produit par l'immense George Pal, un des plus grands maestros de l'animation et des trucages de l’Âge d'Or hollywoodien. Je me demanderai toujours comment l'équipe technique est parvenue à rendre les effets de l'impesanteur et surtout ceux des G d'accélération lors du décollage, séquence qui a du estomaquer les spectateurs de 1950.
Je pense que sa conception a du +/- fortement influencer l'oeuvre d'un autre grand créateur d'univers graphiques prénommé lui aussi Georges et qui commençait à s’atteler au même moment à un fameux diptyque lunaire. Alors, bien sûr, des tas de détails ont mal vieillis (le jeu des acteurs et surtout l'improbable décor lunaire) mais le spectacle est là.
Alors, si il faut mettre une note et en se replaçant dans le contexte de l'époque, ce sera 8/10.

Même sujet mais traitement ô combien différent : j'ai découvert Rocket to the Moon (Le Grand Départ vers la Lune), très libre adaptation de Jules Verne réalisée en 1967 par le récemment disparu Don Sharp. Eh ben, c'est un régal de comédie farfelue avec un délicieux humour british et une chouette galerie de personnages brindezingues (la palme aux deux jolies blondes excentriques semblant échappées de la famille foldingue de Vous ne l'emporterez pas avec vous).
Allez, c'est Noël, donc je lui colle un bienveillant 8/10 itou. :wink:
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Lord Henry »

The Time Travelers (1964)
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Dans le laboratoire d'une université, une équipe de scientifiques met au point un portail temporel. A la suite d'un dysfonctionnement, ils se retrouvent dans un futur lointain sur une Terre dévastée par une guerre nucléaire. Pourchassés par une horde de mutants, ils trouvent refuge auprès de la communauté des derniers humains, lesquels travaillent au voyage intersidéral qui les conduira sur Alpha Centauri afin de rebâtir une civilisation.

Production singulièrement fauchée et réalisée sans invention, The Time Travelers tient plutôt la route en dépit d'un humour désastreux. L'amateur sera enclin à l'indulgence en y retrouvant tout un imaginaire bonifié par la patine du temps – et quelques moments d'une réelle efficacité. Il saura gré aussi au réalisateur-scénariste Ib Melchior d'avoir su garder le meilleur pour la fin; tout en répondant astucieusement à l'habituelle question du paradoxe temporel, il condamne l'humanité au vertige sans fin d'un infernal recommencement.
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Re: Notez les films naphtas décembre 2011

Message par Rick Blaine »

Vu hier deux films très différents, mais tout aussi passionnants:

An American In Paris (Un Américain à Paris, Vincente Minnelli - 1951)

Je n'avais jamais vu ce grand classique de la comédie musicale (genre que je connais encore bien mal,) et ce fut un ravissement. Dès les premières images, la présentation des protagonistes par une caméra virevoltante est un ravissement pour les yeux. Avec humour et légèreté, Minnelli nous rends immédiatement attachant ses personnages portés par un Gene Kelly sublime - décidément je trouve cet acteur génial - et par un excellent Oscar Levant, que j'avais déjà beaucoup aimé dans Romance à Rio de Curtiz. Le reste du film conserve ce ton léger en décrivant la belle romance entre Jerry Mulligan et Lise interprétée par une adorable Leslie Caron. On pourra éventuellement noter une légère baisse de tension dramatique aux 2/3 du film, mais tout cela est oublié grâce au sublime ballet final.
Sans atteindre l'incroyable réussite de Chantons sous la pluie, qui est pour le moment mon mètre-étalon du genre, Un Américain à Paris est une vrai réussite, un de ces films qui font se sentir bien, et impriment un sourire béat sur le visage.


Meurtres (Richard Pottier - 1950)

Les membres d'une respectable famille s'entendent pour faire interner l'un des leurs qui, par pitié et par amour, s'est résolu à tuer sa femme, atteinte d'un cancer.

Voici certainement un film très atypique dans la carrière de Fernandel. L'affiche lance d'ailleurs "un Fernandel inconnu de vous" tout à fait à propos, puisque l'acteur quitte ici son habituel registre comique pour un film très noir et un rôle dramatique qui lui va à merveille. Sans en faire le cœur de son sujet, le film aborde dans sa première partie le thème de l'euthanasie, sujet plutôt tabou à l'époque, avec une grande dignité (malgré peut-être quelques excès mélodramatiques) en nous montrant Fernandel se résoudre à abréger les souffrances de sa femme. Mais le cœur du film sera l’opposition entre son personnage, simple et droit, un "type plutôt pas mal" comme il le dit et sa famille, menée par ses frères Hervé et Blaise (excellent Raymond Souplex) arrivistes et détestables, qui compte bien étouffer le scandale qui pourrait barrer leur ascension dans la société. Fernandel sera rejoint dans sa lutte par sa nièce Martine (Jeanne Moreau dans un de ses premiers rôles) pour triompher de ses méprisables parents. Le film prend un ton que Guitry n'aurait sans doute pas renié, en égratignant certaines institutions, dont la justice et les personnages soit disant respectables que crée la société. Le tout est fort bien mis en scène, sans grande fioritures toutefois, par Richard Pottier dont j'avais déjà vu un excellent Maigret (Picpus) pour un film prenant et touchant. Une très belle découverte!
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