Le dernier titre du coffret Bergman, celui que j'ai trouvé le plus intéressant.
Juninatten (Quand la chair est faible, 1940) de Per Lindberg avec Ingrid Bergman, Marianne Löfgren et Olof Widgren
Kerstin Nörbac (I. Bergman) se fait tirer dessus par son amant, un marin. Gravement blessée au coeur, elle en réchappe miraculeusement. Après un procès spectaculaire, elle part pour Stockholm refaire sa vie sous un faux-nom...
Ce dernier film de Bergman en Suède avant son départ pour Hollywood comporte les éléments habituels du mélodrame. Mais, contrairement aux deux films de Molander, le scénario offre des personnages complexes et moins artificiels. Kerstin Nörbac est à priori une jeune fille sans histoire, élevée dans une famille de placement. En fait, on découvre lors du procès qu'elle entretenait une liaison avec un marin. Cette histoire fait immédiatement la une des journaux en quête de gros titres. On découvre petit à petit les motivations de cette jeune fille malheureuse qui recherchait l'affection dans les bras de ce marin avant de se rendre compte de son erreur. Alors qu'elle voulait le quitter, il a tiré sur elle. Il était fou d'elle et ne pouvait supporter son départ. De son côté, elle n'avait pas mesuré les conséquences de sa liaison. Le film en dit finalement pas mal sur la moralité telle qu'on l'envisageait en Suède à l'époque. Les hommes sont immédiatement attirés par cette fille qui a osé avoir un amant. Quand Kerstin, changeant d'identité, devient Sara, elle rencontre d'autres jeunes femmes, comme elle, célibataires. Elles sont toutes confrontées au même dilemme : elles ont un petit ami qui voudrait bien coucher avec elle sans pour cela leur passer la bague au doigt. A l'occasion de ces 'Nuits de Juin' du titre, les pulsions vont se conjuguer et dénouer brutalement les frustrations des différents personnages. J'ai particulièrement apprécié les personnages féminins du film telle que la petite standardiste du journal à scandal qui flirte avec un jeune reporter sans scrupules. Le film dépeint habilement le milieu professionnel des jeunes femmes: l'hôpital où Åsa travaille comme infirmière et la rédaction où travaille la standardiste. Il y a même une pointe d'humour bienvenue qui met en place leurs rapports. Ingrid offre un portrait intéressant de cette jeune fille à l'air innocent, qui suscite l'intérêt des hommes. Elle reste jusqu'au bout assez ambiguë. Le rythme rapide du film tranche avec la lenteur bavarde des films de Molander. Au total, un film intéressant, mais bien loin de l'âge dor du cinéma suédois des années 10.