C'est parti pour la rétro !
Le curriculum vitae des liaisons sexuelles (1965)
A la découverte du cadavre d'un homme dans un appartement, la police soupçonne la maitresse de celui-ci. Interrogée, elle raconte son passée tout en niant être la coupable.
Un drame qui se veut avant tout un double portrait : celui d'une femme et celui d'une société machiste qui utilise les femmes comme des objets par des hommes pour leurs bons plaisirs et quand bon leurs semblent,
En gros, des étudiants à l'homme d'affaire en passant par les yakuzas ou les patrons d'entreprises, tous la violent sans scrupule et par égoïsme, Même les policiers aimeraient bien profiter d'elle.
Le problème est que le film en devient très répétitif même si au final toutes les scènes sont justifiées et n'ont rien de racoleur, Wakamatsu a beau essayer de renouveler la réalisation durant ces séquences (images déformées, contrastes plus violents, très gros plan sur la peau etc...), au bout de la 4ème scènes du genre, on commence à décrocher de l'histoire qui n'est pas non plus exempt de passages inutiles qui rappellent la dimension engagée du cinéaste (le passage où l'étudiant communiste se lance dans un monologue)
Les allées et retour dans le passé via de nombreux flash-back lassent aussi rapidement même si la structure permet de mieux saisir le cynisme de l'héroïne au début du film qui tranche avec celui des hommes de plus en plus pathétiques et ridicules. Meurtri et désensibilisé, elle va à son tour se servir de la faiblesse des hommes pour se venger
Donc sur le principe, c'est une charge très violente contre la situation des femmes dans le Japon contemporain, mais ça donne un film trop long, parfois confus et qui tourne un peu en rond sans être bien-sûr un film raté.
Mention spéciale à l'actrice Midori Chigusa, parfaite du début à la fin, qu'elle soit une jeune fille pure, une amoureuse transie ou une beauté glaciale.
la tombe de plomb (1965)
Wakamatsu tourne le dos au pinku eiga et livre un film entre le policier façon yakuza et le drame sous forme d'étude de mœurs.
Il suit l'arrivisme d'une jeune frappe prêt à tout pour intégrer un clan, puis pour se faire bien voir du Boss, Après avoir assassiné deux personnes sans vraiment le vouloir, il devient désormais le tueur officiel du clan,
C'est un film étonnement travaillé et bien écrit qui surprend assez avec ses films un peu « fourre-tout » et presque expérimentaux de la même époque. La mise en scène est solide et plutôt sobre, le film est dénué d'expérimentations ou de discours subversifs. Wakamatsu reste centré sur son histoire et son personnage avec une rigueur qui surprend sans décevoir d'autant que le film est bien mené même si la dernière partie s'avère prévisible sur de nombreux points,
La force du film vient de cette violence froide et dérangeante des scènes de meurtres filmées sans excès de style ni musique : seulement un bon sens du cadre et du noir et blanc,
Cette violence fonctionne car l'évolution du personnage fonctionne sans être superficiel aidé en cela par une excellente interprétation,
Les 2 scènes érotiques sont par ailleurs réussis, logique dans la psychologie mais peut-être vite oublié narrativement parlant.
Un drame qui prend donc des allures de tragédie moderne pour Wakamatsu qui règle ses comptes avec un milieu qu'il a fréquenté et auquel il voue une grande haine. On sent qu'il veut tordre le coup à l'image un peu romantique des yakuza qu'on peut trouver à la même époque,
C'est aussi toujours l'occasion d'en faire une parabole sociale assez forte sur la schizophrénie d'une certaine jeunesse sauf que cette fois il l'a fait sans abstraction, ni excercice de style ou de métaphore (juste l'image récurrente un peu trop facile du Boss, « décapitant » des branches d'arbres).
Un bon film, plus classique donc, qui surprend agréablement dans la filmographie du cinéaste,
Relations perverses (1965)
Celui-ci est très proche du
curriculum vitae des liaisons sexuelles : même introduction autour d'un cadavre filmé sous toutes ses coutures durant le générique du début, même structure en flash-back autour d'une enquête policière,
A la différence que relations perverses est bien plus réussi : la raison ? Wakamatsu opte pour une approche plus légère voire même humoristique par moment avec des seconds rôles bien amusant et une approche décalée sûr les quelques scènes sexuelles qui sont là aussi très bien intégré à l'intrigue. La sexualité est même le moteur (et les conséquences) des actions des personnages... presque ce qui les définit. Sauf qu'elle est régulièrement ridiculisé par la manière dont Wakamatsu oppose les points de vue comme dans les moments où le mari observe sa femme s'envoyant en l'air avec un étudiant depuis une vitre sans teint.
C'est bien-sûr à une cinglante satire des mentalités et des mœurs japonais auquel se livre Wakamatsu pour l'un de ses films les plus accessible même si on trouve fugacement plusieurs de ses signatures expérimentales : images sur-exposées, superpositions, musique dissonantes, images qui se dégradent etc...
Il y a là, je trouve, une forme de maturité dans sa façon d'aborder un sujet avec recul, ironie, intelligence, une certaine virtuosité, une excellente direction d'acteur et un bon rythme.
Du moins durant la première heure, les 20 dernières minutes en donnant une réponse à son « wodunit » fait un peu baisser l'intérêt car le réalisateur prend soin de nous détailler les zones d'ombres qu'on arrivait pourtant facilement à combler une fois le coupable connu. Il se rattrape avec une machination bien tordue qui va bien au bout de sa logique et de son humour noire pour quelques séquences mémorables.
C'est bien-sûr moins radical et intransigeant que ses films édités en France mais on prend vraiment du plaisir à ce règlement de compte en règle des japonais et leurs libidos. Une excellente surprise.