Sa filmographie :
* 1983 : Kandawaga Wars
* 1985 : The Excitement of the Do Re Mi Fa Girl
* 1988 : They are back
* 1988 : Sweet Home
* 1991 : The Guard from the Underground
* 1995 : Suit Yourself or Shoot Yourself : The Turnaround
* 1996 : Door!! (DOOR)
* 1996 : Suit Yourself or Shoot Yourself : The Nouveau Riche
* 1996 : Suit Yourself or Shoot Yourself : The Hero
* 1996 : Revenge The Visitor of Fate
* 1996 : Revenge The Scar that never disappears
* 1997 : Cure
* 1997 : Serpent's Path
* 1997 : Eyes of the Spider
* 1998 : License to Live
* 1999 : Charisma
* 1999 : Ko-rei (titre américain : Seance)
* 2000 : Vaine Illusion
* 2000 : Kaïro (aussi appelé Pulse)
* 2002 : Doppelgänger
* 2003 : Jellyfish (titre américain : Bright Future)
* 2004 : Ghost Cop, (court métrage)
* 2007 : Loft
* 2007 : Rétribution
* 2008 : Tokyo Sonata
En espérant que ce topic ne fera pas un bide comme celui de MJ sur Zulawski.

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Dans la banlieue de Tokyo, un bruiteur (Koji Yakusho) et sa femme, médium (Jun Fubuki), vivent une vie calme, jusqu’au jour où la police, par l’intermédiaire d’un étudiant en psychologie spécialiste des sciences occultes, fait appel à ses talents de médium pour retrouver une fillette qui a été enlevée.
Un an avant Kaïro, Kiyoshi Kurosawa se confrontait déjà aux fantômes du Yurei Eiga que Hideo Nakata avait remis sur le devant de la scène avec le magistral Ring (1997). Avec cette Séance ma foi très réussie, qui semblera formellement plus modeste (format télévisé oblige) que le futur Kaïro mais un peu plus soutenue niveau rythme, le cinéaste mêle efficacement ressorts policiers et éléments horrifiques, avec ce style froid et pesant qui lui est propre. Moins étouffant que l'apocalyptique Kaïro (qui ne contait rien de moins que la disparition de toute une société), Séance se concentre presque entièrement sur un couple banal, sans histoires, et dont l'anonymat est de plus en plus mal vécu par l'épouse, médium aux facultés manifestes qui ne songe qu'à s'enfuir de sa condition vide. L'occasion qui lui est fournie (l'irruption de la fillette kidnappée dans sa vie, et l'instrumentalisation maladroite qu'elle désire en faire pour acquérir une reconnaissance sociale) sera la première manifestation d'une fatalité chère à Kurosawa qui frappera alors sans relâche le couple, coupable d'avoir convoité un statut défendu : telle une boîte de Pandore, l'ouverture du caisson du preneur de son précipite les deux personnages dans un engrenage inextricable, aux accents de film noir, dont l'issue libératrice semble passer par l'acceptation de leur destin funeste. Les apparitions fantomatiques de la fillette décédée par leur faute se lisent alors autant comme une vengeance propre au Yurei Eiga que comme la matérialisation psychanalytique d'une culpabilité partagée, comme semble nous l'indiquer l'étrange dialogue qui ouvre le film. Séance, ou le fantôme comme projection de ses propres tourments (voir cette scène pour le moins étrange où le mari se retrouve confronté à son doppelgänger, assis et immobile, et l'immole au son d'une cornemuse invisible). Techniquement, Kurosawa livre à nouveau une réalisation ciselée au millimètre, tirant parti du format 1.33. Il instaure très vite cette atmosphère pesante et spectrale qui caractérise également Kaïro, et manie brillamment l'épouvante, surgissant sans tambours, sans qu'on l'attende (la scène ô combien déstabilisante du café). Exploitant une logique que l'on retrouvera dans son film suivant, Kurosawa isole ses personnages dans des décors compartimentés, dont les ouvertures deviennent les centres de l'attention d'un spectateur guettant le surgissement de l'horreur. Le meilleur exemple de cette utilisation visuelle de l'espace serait cette séquence où la médium, au premier plan, s'affaire tandis que derrière elle, la lumière changeante du soleil "ouvre" une voie vers le couloir et la porte du garage, une voie vers le surnaturel, vers son destin (capture 2). Les rebondissements de l'intrigue, ainsi que l'efficacité de l'épouvante diffuse qui imprègne le film, font de Séance une très belle réussite, à nouveau révélatrice du talent de son auteur. Malgré une fin abrupte, je suis admiratif du résultat, qui mérite peut-être mieux que de vivre dans l'ombre du futur très gros œuvre qu'est Kaïro.