Jacques Tourneur (1904-1977)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Julien Léonard
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Message par Julien Léonard »

Et bien je vois qu'il y a des matrices de La féline et Vaudou : je suis content !!

Par contre, et même si je reconnais que c'est le plus faible, qu'avez-vous pensé de L'homme léopard ?? personne n'en parle jamais, et pourtant il a de mutliples qualités... Alala, c'est toujours le troisième épisode d'une trilogie qui se paye la plus mauvaise presse. :wink:
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Lylah Clare
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Message par Lylah Clare »

Julien Léonard a écrit :Et bien je vois qu'il y a des matrices de La féline et Vaudou : je suis content !!

Par contre, et même si je reconnais que c'est le plus faible, qu'avez-vous pensé de L'homme léopard ?? personne n'en parle jamais, et pourtant il a de mutliples qualités... Alala, c'est toujours le troisième épisode d'une trilogie qui se paye la plus mauvaise presse. :wink:
Le film est en effet plus faible, et plus disparate, du fait de la structure de film en 3 "sketches" différents (et qui ne renvoient d'ailleurs pas à la même réalité)
Spoiler (cliquez pour afficher)
La petite jeune fille du début est bien tuée par la panthère échappée mais pas les 2 autres femmes
mais il comporte d'excellents moments, dans chacun des trois et dans la séquence d'ouverture (la danseuse mexicaine qui agace, par ses castagnettes, la panthère que Kiki tient (pas assez bien) en laisse . Film très plaisant donc :)
Julien Léonard
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Message par Julien Léonard »

Oserais-je dire "vraie réussite" même... Il souffre de la comparaison avec les deux autres, mais son atmosphère réussit à nous convaincre je trouve. Mmoins bon, oui c'est sûr, mais mineur... je ne pense pas. :wink:
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Flol
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Message par Flol »

Mon film préféré de Tourneur, parmi les (seulement) 4 que j'ai vus, est The Comedy of Terror, avec l'irrésistible quatuor Price/Lorre/Karloff/Rathbone.
Eh oui je sais, j'aime bien me différencier de la masse ! :D
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Profondo Rosso
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Message par Profondo Rosso »

Berlin Express de Jacques Tourneur (1948)
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Un contexte politique à la croisée des chemins, post 2e guerre mondiale et pré guerre froide pour une intrigue bien tendue au traitement mêlant film noir, espionnage et documentaire. Une ambiance oppressante et bien parano où les alliés, les ennemis se manifestent de manière constamment innatendue avec un scénario reservant son lot de trahison surprenante en serie. Reprenant pas mal de d'effet de ses chef d'oeuvre dans le fantastique, Tourneur est ici à son sommet conférant une atmosphere unique au film, le fait d'avoir filmé sur les lieux même de L'Allemagne dévastée donnant au film un cachet réaliste et historique marquant (ainsi que des interludes en voix off commentant la situation économique et sociale désastreux du pays). Tourneur délivre également un message d'entraide entre les peuple avec cette association improbable entre citoyens de nations alliées mais radicalement opposées et rivales de nombreuse fois mis à mal durant le film et malgré le relatif optimisme du final dégageant plutôt une note amère quand on sais que va suivre la longue periode de tension de la guerre froide. 5/6
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Jeremy Fox
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Re: Jacques Tourneur

Message par Jeremy Fox »

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Le Passage du Canyon (Canyon Passage, 1946) de Jacques Tourneur
UNIVERSAL


Sortie USA : 15 juillet 1946

Ce 15 juillet 1946 sortait sur les écrans américains, dans une sorte de relative indifférence, l’un des bijoux les plus parfaits jamais réalisés à Hollywood, le seul film que Jacques Tourneur réalisa en dehors de la RKO durant cette période, le premier budget confortable qu’il eut à sa disposition avec un beau Technicolor en supplément, formidablement bien utilisé par le chef opérateur Edward Cronjager. Malheureusement, non seulement Canyon Passage est loin d’avoir marqué l’histoire du cinéma ni les esprits mais il a été en son temps très sévèrement critiqué, sa franchise de ton et sa trop grande liberté n’ayant pas eu l’air de plaire à grand monde. Encore aujourd’hui, il est toujours relégué en arrière plan, oublié de la plupart des ouvrages généraux sur le cinéma, et plus décevant encore, négligé dans les livres consacrés spécifiquement au western. Presque seul, Jacques Lourcelles écrira en revanche un panégyrique flamboyant à son propos dans son dictionnaire du cinéma. Mais, ce qui laisse avant tout dubitatif, c’est de retrouver le plus souvent les termes de ‘conventionnel’ et de ‘classique’ dans les autres rares textes lus ici et là même sous la plume d’écrivains aussi honorables que Bertrand Tavernier, Jean-Pierre Coursodon ou Christian Viviani. Car même si ces qualificatifs, d’autant plus concernant un film de genre, ne devraient en principe rien avoir de péjoratifs (surtout le second), le premier western de Jacques Tourneur ne saurait se les voir attribuer. En effet si en le découvrant aujourd’hui Canyon Passage n’a rien de convenu, il devait sembler encore plus inhabituel à l’époque de sa sortie. Et avoir vu chronologiquement tous les classiques qui l’ont précédé peu de temps avant le confirme : même si en lisant le pitch, l’intrigue aura pu vous sembler banale, presque rien de ce que l’on pourra découvrir à l’écran durant ces sublimes 90 minutes n’a été vu auparavant que ce soit au niveau du scénario, de l’écriture des personnages ou des situations. Même le logo du studio Universal est inaccoutumé ! Quant aux paysages verdoyants de l’Oregon, on ne peut pas dire qu’ils aient été régulièrement utilisés jusqu’ici (hormis pour Les Tuniques écarlates de Cecil B.D Mille censé se dérouler… au Canada !) ; ils sont donc eux aussi sacrément dépaysants. Bref, en toute modestie, il est peut-être encore temps d’essayer de faire sortir de l’inadmissible oubli dans lequel elle est encore engluée, cette pure merveille à l’iconographie si riche et si nouvelle (à commencer par ce joli village de Jacksonville constitué de petites maisons en bois disséminées dans une forêt à flan de vallon).


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Oregon 1856. Logan Stewart (Dana Andrews), homme fidèle et intègre, est un commerçant qui a de grandes ambitions dans sa partie ; alors qu’il ne travaille qu’à l’aide de mulets pour l’acheminement de ses marchandises, il rêve de mettre sur pied une entreprise de transports sur route par diligence. A portland où il vient retirer son or, il rend visite à Lucy Overmire (Susan Hayward) ; il a promis à son ami George Camrose (Brian Donlevy) de la ramener à Jacksonville afin que ce dernier puisse enfin l’épouser. Dès le lendemain, après qu’un inconnu ait tenté dans la nuit de le voler, il entame son voyage de retour en compagnie de Lucy. En cours de route, ils font une halte chez leur ami Ben Dance (Andy Devine) ; ce dernier a recueilli Caroline Marsh (Patricia Roc), une jeune anglaise dont le père vient d’être tué par les Indiens à qui appartiennent encore les terres où se sont installés les pionniers. Logan n’est pas insensible au charme de la jeune femme qui, malgré les dangers que fait peser la menace indienne, compte bien rester s’établir dans la région. Arrivé à destination, Logan confie Lucy à son futur époux et constate l’arrivée récente en ville de Bragg (Ward Bond) qu’il soupçonnait avoir été son agresseur de Portland. Il n’en retourne pas moins à ses affaires, peu reluisantes d’après son associé et comptable qui lui reproche d’investir sans compter ; il reste néanmoins très optimiste. Il n’est cependant pas au bout de ses peines, tiraillé entre son amitié pour Camrose, banquier dévoré par la passion du jeu, son amour pour deux femmes promises à des amis qui éprouvent en retour une juste jalousie, la haine mortelle que lui voue Bragg et l’intimidation des tribus indiennes…


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Ce western est une sorte de chronique d’un petit village isolé du verdoyant Oregon au temps des pionniers alors que la menace indienne était encore bien présente ; si les tribus indiennes acceptaient que les hommes blancs traversent leurs terres, ils voyaient d’un mauvais œil le fait qu’ils s’y installent. Cependant les colons arrivaient à les calmer par quelques dons en objets ou nourriture ; le film le montre très bien par l’intermédiaire de cette splendide séquence du bal brutalement interrompu par la présence d’indiens que l’on découvre à traves le regard apeuré de Hoggy Carmichael qui arrête alors l’orchestre. Leur apparition à travers la lumière rougeoyante du feu est à la fois somptueuse et très inquiétante ; Jacques Tourneur avait encore en tête ses ficelles de mise en scène pour faire monter la tension et la peur à l’aide de petits riens, son art de la suggestion qu’il a développé dès ses premiers films (La Féline – Cat People) et qui l’a d’ailleurs rendu célèbre... Nous évoquions donc une chronique ; effectivement Jacques Tourneur et ses scénaristes prennent leur temps pour développer les moments en creux, les pauses, les séquences qui ne servent pas nécessairement à faire avancer l’intrigue mais à poser délicatement et intelligemment les situations, à décrire en profondeur une galerie de personnages tous aussi riches et fouillés les uns que les autres (‘héros’ comme seconds rôles), à exposer sans précipitation leurs préoccupations quotidiennes. Il y aurait donc peut-être bien un film précédent qui pourrait rappeler le western de Tourneur : Sur La Piste des Mohawks de John Ford ; sauf que ce dernier se déroulait quasiment deux siècles avant.


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Si John Ford magnifiait les paysages avec sa science innée du cadrage et son génial formalisme, Jacques Tourneur semble ne pas chercher à le faire ; chez lui, au travers de ce film, la beauté de la nature semble couler de source si bien qu’il n’y aurait plus qu’à laisser capter cette souveraineté par l’objectif de sa caméra sans chercher à l’embellir plus qu’elle ne l’est déjà. Si les deux films sont tout aussi somptueux plastiquement, dans Canyon Passage, nous avons l’impression que ça a été fait sans effort particulier. Evidemment il n’en est rien et cette apparente spontanéité a probablement nécessité un travail considérable ; cette fausse sobriété est démentie par les séquences en studio au cours desquelles on retrouve les fabuleuses recherches de Tourneur sur les ombres, le clair-obscur, les éclairages nocturnes. Bref, que l’action se déroule en extérieur ou en studio, il n’y a quasiment pas un plan esthétiquement bâclé ; c’est une véritable jouissance pour l’œil et ce, dès la première seconde du film qui nous démontre une envie du cinéaste de tirer vers un plus grand réalisme que ce que nous avait montré le western ces dernières années. On peut découvrir Portland sous une pluie diluvienne, une rue submergée par la boue au centre de laquelle des chevaux tirant une carriole de troncs d’arbres avancent difficilement. Puis les intérieurs de la banque, du magasin, du saloon et de l’hôtel sont remplis de détails insolites et extrêmement soignés ; les ellipses et la scène de l’attaque nocturne sont fulgurantes. Tout ceci en à peine cinq minutes. Et nous voilà transportés dans un flux tour à tour lent et majestueux, mouvementé et parfois drôle, émouvant et tragique, lyrique et surtout diablement intelligent tout en étant d'une profonde humanité.


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Les règles immuables du genre ne sont plus de mises ici ; elles ont fait place à un western psychologique riche mais jamais pesant mettant en scène des personnages instables et bougrement attachants, un récit sinueux et accidenté préférant les chemins de traverse, bifurquant là où on ne l’attendait pas. Ce dernier est d’ailleurs tiré d’une histoire de l’auteur de Stagecoach, Ernest Haycox et le film a beau ressembler à une chronique, il n’en regorge pas moins d’action et de romances ayant par là de fortes chances de plaire à un public très large, bien en dehors du cadre strict des aficionados du genre ; qu’on se le dise ! Les pauses sont nombreuses (et oh combien merveilleuses grâce à des dialogues absolument splendides) mais font souvent place à des séquences plus tourmentées ; nous assistons ainsi à une bagarre à poings nus entre Dana Andrews et Ward Bond d’une sécheresse et d’une violence assez rare, à des poursuites en forêts, à des attaques indiennes sur les maisons des pionniers, à des meurtres et autres "réjouissances". Tout ceci évidemment filmé de main de maître par un Jacques Tourneur virtuose. Virtuosité qui nous estomaque dès le début par un sens de l’ellipse remarquable, une maîtrise incontestable du hors-champ (les meurtres), une parfaite science du montage, des éclairages et des mouvements de caméra (voire à ce propos celui qui débute la séquence des noces et qui, sans esbroufe, nous laisse pourtant admiratif). Quant aux idées de mise en scène, elles pullulent ; nous voudrions tous les citer mais nous nous contenterons de décrire brièvement la scène de traque de Ward Bond par les indiens après qu’il ait tué deux squaws. Il se fait donc courser à travers les fougères et plus les indiens se rapprochent de lui (et donc la mort certaine au bout) plus on le voit passer au milieu de fougères aux couleurs de plus en plus rouges.

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Mais si Canyon Passage n’était que virtuose ! Il sait aussi faire jeu égal avec un King Vidor concernant le lyrisme lors par exemple de la séquence de construction de la maison par tout le village venu aider le jeune couple à s’établir ou avec ce plan final où la caméra caracole aux côtés du couple s'envolant vers de nouvelles contrées. Il se paie également le luxe d’être foncièrement touchant, d’une formidable richesse et d’une grande intelligence dans la description de ses personnages. Il faut dire que le casting se révèle à la hauteur du reste. Si Dana Andrews est le personnage principal, Jacques Tourneur et son scénariste Ernest Pascal n’ont pas oublié de l’entourer de tout un panel de seconds rôles tous aussi bien écrits ; et ce beau western de nous offrir, outre des situations pour le moins originales, tant de personnages intéressants aux caractères très fouillés avec deux très beaux protagonistes féminins aussi différents l’un que l’autre, ceux interprétés par Susan Hayward et la charmante Patricia Roc. Brian Donlevy trouve ici probablement l’un de ses rôles les plus poignants, Hoggy Carmichael et sa mandoline amène sa bonne humeur jamais forcée (et ses deux chansons vite entêtantes et en tout cas très belles), Andy Devine prouve à ses détracteurs qu’il était capable d’être autre chose que le clown de service et Ward Bond possède la carrure et ‘la gueule’ du ‘Bad Guy’ qu’il incarne ici ; la séquence du pugilat qui l’oppose à Dana Andrews est d’une brutalité assez impressionnante comme nous l’avions déjà dit mais elle égratigne au passage le statut de voyeur des spectateurs ; Ward Bond nous touche à ce moment là quand il se rend compte qu’il est ridiculisé par tous ces concitoyens ("You Yellow Dogs"). Jacques Tourneur réussit le tour de force de nous le faire prendre en pitié en dépit du fait qu’il nous l’ait présenté comme une brute épaisse et violente.


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Car le voilà surtout le secret de la magie de ce Passage du Canyon ; Tourneur aime tous ses personnages aussi complexes soient-ils et nous les fait aimer à notre tour. Nous aimerions pouvoir les décrire un par un : Dana Andrews fidèle en amitié au point de sauver son ami de la potence alors qu’il le sait coupable de meurtre ; Brian Donlevy, fou d’amour mais encore plus fou de jeu (à la question qui lui est posée "Uh, are you feeling lucky tonight ? " il rétorque conscient d’être victime de son extrême faiblesse "I always feel lucky. That's my trouble ") au point de se retrouver dans une situation inextricable ; Hoggy Carmichael, sorte de troubadour faisant office de chœur grec, observant et commentant l’action avec une tendre ironie, se défendant d’espionner mais au contraire se félicitant d’avoir du temps pour observer ("Well, Logan, you got a big store and no time. And I got a little store and lots of time.") ; Patricia Roc préférant refuser les avances de Dana Andrews car sachant très bien qu’ils ne pourraient pas s’entendre à la longue au vu de leurs caractères et leurs attentes fortement opposés ; Susan Hayward ne sachant pas choisir entre deux hommes pour qui elle éprouve une immense tendresse, deux grands amis qui plus est ; mais encore tous les personnages de mère n’ayant rien à envier à ceux de John Ford, celui du joueur nihiliste Jack Lestrade qui ne croit plus en rien ni en personne (goûtez à l’intelligence des dialogues ! George Camrose : “You have strange friends, Jack.” - Jack Lestrade : “I didn't say that I like him or that I trust him.” - George Camrose : “What's your idea of a friend ?” - Jack Lestrade : “Any man, I suppose, who believes as I do that the human race is a horrible mistake”. ), celui de la tenancière du saloon, mystérieuse et semblant cacher un secret mais aussi une grande tendresse envers tous ceux qui viennent perdre leur argent dans son établissement. Une galerie de personnages inoubliables au sein d’un film qui ne l’est pas moins ! Un immense chef-d’œuvre qui mérite plusieurs visions tellement il regorge de richesses qui ne se révèleront pas toutes à la première !


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"Désormais, le western, affinant son réalisme, pulvérisant ses mythes et son manichéisme ancestral, ne va plus cesser de réfléchir sur lui-même, sur ses valeurs, sur les névroses et la soif d’équilibre de des personnages. Les dialogues, sans être abondants y seront d’une importance extrême. A y regarder de près, c’est ici que cette réflexion, cette révolution commencent : Canyon Passage, 1946. Date essentielle, film essentiel !" Jacques Lourcelles Dictionnaire du cinéma


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J'ai retrouvé ça par la même occasion :

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Wichita (Un jeu risqué) 1956

Combien de pépites du western méritent-elles encore d'être mises à jour ou tout du moins d'intégrer les classiques du genre ? Tant mieux pour nous spectateurs qui avons encore de quoi nous émerveiller.
81 minutes d'un western à la fois sobre, doux, intelligent et passionnant. La rigueur du réalisateur nous tient en haleine tout du long alors que l'intrigue ne comporte que peu d'action ou de coups de théâtre. C'est plutôt une réflexion sur ce que doit être le loi, comment faire respecter l'ordre... Un film qui nous montre ce que faisaint Wyatt Earp avant d'être le célèbre Marshall de Tombstone et de devenir le héros du fameux gunfight de OK Corral.
Joel McCrea est parfait dans le rôle de cet homme de loi qui le devient par fatalité alors qu'il rêvait d'être tranquille. Vera Miles est parfaite elle aussi et toute la galerie de personnages qui les entoure est admirablement croquée sans jamais avoir recours au pittoresque.
Splendide utilisation du scope, belle musique, belle photo et scénario admirable. La série B vient une nouvelle fois d'accoucher d'un chef-d’œuvre.
homerwell
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Re: Jacques Tourneur

Message par homerwell »

:D Sympa, j'avais déjà entendu parler de ce Wichita, mais il n'y a pas encore d'édition dvd à ma connaissance ?
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Jeremy Fox
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Re: Jacques Tourneur

Message par Jeremy Fox »

homerwell a écrit ::D Sympa, j'avais déjà entendu parler de ce Wichita, mais il n'y a pas encore d'édition dvd à ma connaissance ?
Malheureusement non. Ni d'ailleurs les autres westerns de Tourneur que sont le non moins excellent L'or et l'amour (Great day in the morning) ni pour ce chef d'oeuvre qu'est Stars in my crown. Si ça pouvait donner des idées aux éditeurs
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Re: Jacques Tourneur

Message par Alligator »

Out of the Past (La griffe du passé) (L'étreinte du passé) (Jacques Tourneur, 1947) :

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Du très beau travail de Tourneur qu'il me faudra à tout prix examiner de plus près. Je veux parler de l'oeuvre de Tourneur dans son ensemble. Tant que faire se peut, évidemment.
Il semble que ce film-là soit en très grande partie abouti. J'ai l'impression que la trame scénaristique est un poil trop compliquée, ou qu'elle n'est pas suffisament resserrée. Pourtant le film ne souffre d'aucune longueur. Paradoxe qui me perturbe. Difficile de bien souligner le problème que j'ai ressenti au visionnage. Perdu dans les subtilités d'avant la fin, j'ai pourtant l'impression que l'essentiel ne pouvait autoriser des coupes franches, qu'il fallait en passer par toutes les scènes. Alors peut-être que les dialogues auraient pu amener un peu plus de clarté dans ces doubles, voire triples jeux dans lesquels les personnages nous emmêlent un peu?

Au-delà de ces troubles, somme toute d'une légèreté quasi discrète, le film respire le noir, se confond avec le genre tout entier. Et le gouffre et les chimères sont là, bien illustrés par les fantômes du passé, les plaies mal refermées et les personnages sans auréole qui plantent le décor. Panard terrible du spectateur.

Mitchum et Douglas, encore jeunes et frais laissent passer dans leur regard un voile de désillusion et d'effondrement, avec une finesse d'interprétation qui fascine autant qu'elle émeut. Chapeau à ceux-là.
Ma libido s'active quand Rhonda Flemming apparait. Trop vite, elle disparait, en femme fatale. A côté d'elle, Jane Greer, sauf pour les scènes d'effroi où ses yeux excellent, comme Virginia Huston passent un peu pour de frêles estomacs. Rhonda t'as du chien!

Excellente photo de Musuraca encore une fois.
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Watkinssien
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Re: Jacques Tourneur

Message par Watkinssien »

Jeremy Fox a écrit :
Le Passage du Canyon (Canyon Passage) 1946

Le film narre la chronique au milieu du 19ème siècle d’un village du verdoyant Orégon au temps des pionniers alors que la menace indienne était encore bien présente. Si Dana Andrews, dans la peau d’un modeste aventurier dirigeant une entreprise de diligence, est le personnage principal, Tourneur et son scénariste Ernest Pascal (d’après un roman de Ernest ‘Stagecoach’ Haycox) n’ont pas oublié de l’entourer de tout un panel de seconds rôles tous aussi richement décrits ; à une période où le western n’est pas franchement entré dans sa maturité et n’est encore représenté en majorité que par des films de purs divertissements, c’est la première grande qualité de ce beau western que de nous offrir, outre des situations pour le moins originales, tant de personnages intéressants aux caractères très fouillés avec deux très beaux protagonistes féminins aussi différentes l’un que l’autre, ceux interprétés par Susan Hayward et la charmante Patricia Roc. Brian Donlevy trouve ici l’un de ses rôles les plus attachants, Hoggy Carmichael et sa mandoline amène sa bonne humeur jamais forcée et Ward Bond possède la carrure et ‘la gueule’ du ‘Bad Guy’ qu’il incarne ici ; la séquence du pugilat qui l’oppose à Dana Andrews est d’une brutalité assez impressionnante. Passage Canyon fut le premier film en couleur du cinéaste et on peut dire que ce qu’a accompli le chef-opérateur Edward Cronjager pour l’occasion est splendide d’autant plus que, la production disposant d’un budget confortable (le plus élevé de la carrière de Tourneur), il a pu filmer en Technicolor d’innombrables extérieurs tous aussi majestueux les uns que les autres. Un régal pour les yeux, un magnifique scénario, un casting parfaitement choisi, une réalisation hors-pair, le tout non dénué non plus d’action ni de l’imagerie westernienne traditionnelle pour les amateurs de conventions qui voudraient néanmoins retrouver leurs marques. Bref, un western qui pourrait facilement plaire au plus grand nombre y compris aux non-amateurs du genre.
Absolument d'accord, j'ai trouvé que Canyon Passage déployait une certaine majesté, une ampleur visuelle pleine de grâce, un formidable regard sur un monde qui demande autant une ouverture d'esprit qu'une ouverture géographique.
Tourneur réussit à maintenir une mise en scène impressionnante, qui formalise avec talent un très beau scénario.
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Re: Jacques Tourneur

Message par someone1600 »

Alligator a écrit :Out of the Past (La griffe du passé) (L'étreinte du passé) (Jacques Tourneur, 1947) :
Excellent film noir en tout cas... mon préféré du coffret Warner Film Noir volume 1. :wink:
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Sybille
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Re: Jacques Tourneur

Message par Sybille »

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I walked with a zombi / Vaudou
Jacques Tourneur (1943 ) :

Un film qui relate en premier lieu une subtile histoire d'amour, où plutôt l'histoire de deux amours, celui unissant Wesley Rand à Jessica demeurant ambigu et destructeur, tandis que celui de l'infirmière Betsy envers son employeur Paul Holland parvient à être délicatement purifié grâce à la compassion de la jeune femme. C'est par la voix-off de cette dernière que le spectateur découvre les Antilles, ces "West Indies", un lieu au climat inquiètant et malsain instauré par les chants et les danses de la population locale, le plus souvent rythmés par les battements des tambours. Une mélopée lancinante qui fait sans cesse émerger le passé à la surface, qui interrompt avec brusquerie des personnages alors quelque peu effrayés, brisant le fragile équilibre apporté par des confessions aussitôt regrettées. Un film étrange à souhait, empreint de douceur et de mélancolie, où l'on écoute le vent faire bruisser les feuilles dans les plantations de canne à sucre, un animal mort pendu à un arbre. Un mélange de beauté et de répugnance qui, à l'instar de Betsy, exerce une fascination durable chez le spectateur. 8/10

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Anne of the Indies / La flibustière des Antilles
Jacques Tourneur (1951) :

Déception que ce film de pirates que j'attendais de voir depuis un certain temps. Jean Peters est superbe en femme pirate pleine de fougue et de sensualité mêlées, mais le scénario et les péripéties ne m'ont pas entièrement convaincue, en particulier dans la seconde moitié du film. Je m'attendais à autre chose, et le retournement moral d'Anne à l'encontre de Pierre-François et sa femme m'est apparu comme très injuste, présent uniquement pour satisfaire la morale hollywoodienne. Les premières minutes montrent une femme autoritaire, décrite comme capable de s'imposer, et même de gouverner dans un monde d'hommes. L'arrivée imprévue d'un beau prisonnier français vient évidemment bouleverser cette situation, où le spectateur se doute, et même attend le début d'une romance. Le film évite finalement de développer cet aspect pour des raisons ultérieures, ce que j'ai trouvé plutôt habile et audacieux, mais la fin est selon moi horriblement prétentieuse. Le personnage d'Anne Providence force l'admiration par son énergie et sa promptitude lors des combats ou des duels au sabre et à l'épée, avant d'émouvoir lorsqu'elle découvre qu'elle est peu à peu en train de tomber amoureuse. Mais l'épilogue laisse l'impression qu'elle n'était en fin de compte qu'une créature sentimentale, et dont le sacrifice, sous couvert de racheter sa conduite passée, est surtout bien pratique pour les personnages restants, qui ne semblent quant à eux souffrir d'aucun opprobre malgré des comportements guère plus reluisants. Comme si on nous expliquait, après avoir décrit le contraire, qu'une femme doit "rester à sa place" sous peine d'en subir les fâcheuses conséquences (la différence de traitement entre les personnages de Peters et Debra Paget est à ce sujet assez significative). Sinon, Louis Jourdan m'a paru exécrable dans son interprétation d'un officier de marine : vêtue d'un bel uniforme dans un salon élégant, oui il est à sa place, mais sur le pont d'un navire en pleine d'explosion, c'est une autre histoire. A noter autrement, et pour sauver un tant soit peu le film à mes yeux, la mise en scène efficace de Tourneur, une musique au joli parfum d'aventure, et une utilisation pointue du Technicolor, ici particulièrement "flamboyant". 5/10
Dernière modification par Sybille le 11 avr. 09, 05:04, modifié 2 fois.
Tom Peeping
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Re: Jacques Tourneur

Message par Tom Peeping »

Je viens de voir Canyon Passage (Le Passage du Canyon), splendide film de pionniers en Technicolor. Mais je n'ai pas vraiment compris le sens du titre du film. Comme il n'y a pas de canyon, j'en déduis que c'est une métaphore ? La canyon serait ce qui sépare la nature sauvage de la civilisation, les forêts peuplées d'indiens de San Francisco, l'ancien monde du nouveau ? Etrange titre...
... and Barbara Stanwyck feels the same way !

Pour continuer sur le cinéma de genre, visitez mon blog : http://sniffandpuff.blogspot.com/
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Sybille
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Re: Jacques Tourneur (1904-1977)

Message par Sybille »

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Experiment perilous / Angoisse
Jacques Tourneur (1944) :

Un couple en apparence mal assorti : un homme âgé, probablement jaloux, marié à une femme jeune, belle et attirante, soi-disant maladive. Un médecin intrigué qui se fait fort de découvrir les secrets qui se cachent... L'histoire de "Experiment perilous" aborde ainsi un sujet, des personnages et une manière propres à un certain type de films, le plus souvent hollywoodiens et datant des années 1940. Mais qu'en est-il de celui-ci ? Eh bien, il s'avère largement moyen. Le scénario n'est pas à moitié aussi intriguant que ne pouvait le laisser supposer la trame de base du récit. Le film ne met jamais mal à l'aise, ne fait jamais se questionner le spectateur sur les personnages ou leurs agissements. Les quelques flash-back qui viennent s'ajouter en cours de route sont surexplicatifs et ne font qu'alourdir l'ensemble. Tout est plat : l'histoire, les acteurs (pas trop mauvais, mais en même temps peu expressifs). La photographie en noir et blanc, ainsi que la mise en scène de Tourneur, ne présentent rien de spécial. On évite l'ennui de justesse, tout en finissant par s'apercevoir qu'il s'agit d'un film où il ne passe pour ainsi dire rien. 5,5/10
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AtCloseRange
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Re: Jacques Tourneur

Message par AtCloseRange »

Jeremy Fox a écrit :Image

Wichita (Un jeu risqué) 1956

Combien de pépites du western méritent-elles encore d'être mises à jour ou tout du moins d'intégrer les classiques du genre ? Tant mieux pour nous spectateurs qui avons encore de quoi nous émerveiller.
81 minutes d'un western à la fois sobre, doux, intelligent et passionnant. La rigueur du réalisateur nous tient en haleine tout du long alors que l'intrigue ne comporte que peu d'action ou de coups de théâtre. C'est plutôt une réflexion sur ce que doit être le loi, comment faire respecter l'ordre... Un film qui nous montre ce que faisaint Wyatt Earp avant d'être le célèbre Marshall de Tombstone et de devenir le héros du fameux gunfight de OK Corral.
Joel McCrea est parfait dans le rôle de cet homme de loi qui le devient par fatalité alors qu'il rêvait d'être tranquille. Vera Miles est parfaite elle aussi et toute la galerie de personnages qui les entoure est admirablement croquée sans jamais avoir recours au pittoresque.
Splendide utilisation du scope, belle musique, belle photo et scénario admirable. La série B vient une nouvelle fois d'accoucher d'un chef-d’œuvre.
Je n'irai pas jusqu'au chef d'oeuvre (parce que je n'aime pas les westerns autant que Jeremy) mais c'est un joli film. Beau scope, interprétation impeccable de Joel McCrae. Une belle réflexion sur la loi et la violence.
La copie qui passe sur TCM est très belle et laisse espérer un prochain DVD.
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