Merci, Music Man, pour ce portrait! Pour les amoureux de Cyd, il faut absolument se procurer le fabuleux volume de Jean-Claude Missiaen: Cyd Charisse du ballet classique à la comédie musicale (Henry Veyrier, 1978).
Le livre offre une somme iconographique époustouflante ainsi qu'une filmographie descriptive de premier ordre. Jean-Claude Missiaen a réalisé là un travail d'orfèvre et de chercheur. C'est à signaler car les ouvrages qui offre un texte et des images de cette qualité sont très rares. Il n'existe pas d'ouvrage équivalent en anglais.
Cyd Charisse est probablement plus connue des cinéphiles français (grâce à Party Girl) que des américains qui ne la connaissent pas autant, exceptés les amateurs de comédies musicales.
A noter, lors du prochain cycle de Patrick Brion consacré à la Warner, vous pourrez voir Cyd Charisse dans un petit cameo (en temps que danseuse classique) dans Mission to Moscow (1943) le 10 août. C'était son 1er film.
Dernière modification par Ann Harding le 19 juin 08, 15:40, modifié 2 fois.
Encore une actrice que je ne connais que peu, mais je vais profiter (malheureusement c est ce qu on doit dire... ) du spécial que ne manquera pas de faire TCM sur elle pour la découvrir un peu plus...
Finalement je ne la connais que pour Singin' in the rain et Brigadoon.
Dernière modification par someone1600 le 20 juin 08, 05:46, modifié 1 fois.
Parmi les sirènes fatales évoluant dans les films noirs mythiques des années 40, qui ont séduit des générations de cinéphiles, l’une des plus troublantes figures demeure la ravissante Lizabeth Scott, qu’on a eu souvent tendance à sous-estimer, car son personnage cinématographique s’inspirait beaucoup des vamps incarnées par Lauren Bacall et Veronika Lake et qu’elle a peu de très bons films à son actif. Pourtant, elle a davantage joué dans des polars que les deux comédiennes précitées et le plus souvent avec davantage de talent (c’est un avis personnel). En outre, si comme les deux stars, elle est souvent doublée pour les scènes de chant, dans les cabarets enfumés où elle évolue et interprète des airs jazzy et langoureux, l’actrice s’est vite prise au jeu, a pris des cours et s’est finalement lancée dans la chanson à la fin des années 50.
Née en 1922 en Pennsylvanie, Lizabeth Scott a été encouragée par ses parents dans sa carrière artistique. Après avoir suivi des cours de piano et de diction, elle fait un peu de mannequinat et obtient un job de girl dans la revue Hellzapoppin. En 1942, elle est engagée à Broadway comme doublure de Tallulah Bankhead : manque de chance, la star ne sera pas malade un seul jour. On raconte que le climat était plutôt glacial entre l’ambitieuse jeune actrice et la mythique star qui avait peur d’être supplantée, et que leurs antagonismes auraient inspiré le scénario ‘All about Eve’. Le producteur indépendant Hal Wallis, remarque sa photo sur un magazine et lui propose de le suivre à Hollywood. (Très loyale, elle lui gardera une reconnaissance éternelle et continue de venter ses mérites et son professionnalisme lors des interviews).
En effet, auparavant la Warner lui avait fait passer un screen test jugé catastrophique « elle ne sera jamais une star, au mieux une actrice de second rôle » avait déclaré Jack Warner. Parce qu’elle ressemble trop à sa star Lauren Bacall ?
Wallis lance Lizabeth à Paramount, avec force publicité, beaucoup de photos et un gingle : Lauren Bacall était « the look », Lizabeth devient la « menace » ! Menace pour l’autre star blonde du film noir Paramount Véronika Lake dont elle va vite reprendre la relève (en tous les cas, elle n'a pas de mal à joer mieux qu'elle) ? Dans les journaux français, on la présente comme la nouvelle Garbo (son coté mystérieux ?)
Après un morne mélo avec Robert Cummings »le prix du bonheur », Lizabeth crève l’écran dans « l’’emprise du crime » un excellent film noir de Lewis Milestone et parvient à tirer son épingle du jeu face à une Barbara Stanwyck machiavélique, en apportant beaucoup de sensibilité et de subtilité à son personnage de jeune fille innocente. Autre point d’orgue dans la carrière de Lizabeth, en marge de l’enquête (1947), où elle aborde pour la première fois un personnage de vamp dangereuse : elle attire dans ses filets Humphrey Bogart qui recherche le meurtrier de son ami : hors, c’est elle la criminelle et elle va tenter de tuer Bogart à présent.
Un thriller classique, et fort agréable, très bien joué par les deux stars.
Rares sont les films noirs tournés en technicolor, aussi la furie du désert (1948) avec Burt Lancaster fait figure de rareté : sans être objectivement excellent, c’est le genre de film qu’on regarde avec délice, tant il a un coté camp, aussi bien dans la forme que dans le fond (il faut voir Mary Astor en mère possessive et abusive, tenancière de cabaret). Il fut lancé avec le slogan suivant : « elle veut piquer l’homme de sa mère ! »
Lizabeth Scott est désormais abonnée aux rôles de vamp. Pour séduire son auditoire, la vamp a sa panoplie : des lèvres pulpeuses, des fourreaux comme Rita Haywoth dans Gilda, une voix à la fois suave et grave comme Lauren Bacall, et quelques mélodies langoureuses qu’elle interprète avec émotion. Dès son premier film, elle reprend un des gros succès de Bing Crosby "out of nowhere" qui se prête bien à sa voix de crooneuse. Elle chante ainsi dans En marge de l’enquête, l’homme aux abois, racket et surtout la main qui venge(beaucoup de refrains connus dans ce dernier, le premier film de Charlton Heston). Il semble néanmoins que l’actrice soit le plus souvent doublée pour le chant par Trudy Stevens (qui a notamment doublé Vera Ellen dans Noel blanc et Kim Novak dans Pal Joey), même si la voix chantée semble pourtant très proche de la sienne (De son coté Lauren Bacall se faisait doubler par…un homme, le crooner Andy Williams, afin d’avoir un coté un peu ambigu).
Cependant, Lizabeth Scott tient à souligner qu’elle n’a pas joué que dans des films noirs et rappelle qu’on l’a vue aussi dans Noces rouges (1954, un très bon western d’Allan Dwan, où elle est très convaincante dans un rôle différent) ; Elle a beaucoup apprécié de tourner aussi dans le musical « Fais-moi peur « avec Dean Martin et Jerry Lewis, le duo protégé d’Hal Wallis. Une histoire de fantôme plutôt rigolote mais manquant cruellement de substance (sur un plan musical, une Carmen Miranda vieillissante vient faire son show). Pourtant, Lizabeth aurait adoré jouer à nouveau avec les deux zigotos !
L’occasion ne se présentera pas, et peu d’autres encore car un gros scandale va couler sa carrière du jour au lendemain : en effet, le magazine Confidential, spécialisé dans les ragots va sortir un papier qui va porter gravement préjudice à l’actrice, en insinuant qu’elle était lesbienne, menait une vie dissolue et participait dans une maison close à des orgies avec des prostituées. L’article comportait des sous-entendus particulièrement fielleux et dénotait d’une homophobie révoltante. En cette période de guerre froide, l’homosexualité passait en effet aux yeux de plusieurs sénateurs républicains pour une menace pour la morale et le gouvernement. On peut se demander pour quelles raisons les journalistes s’en sont ainsi pris à la pauvre actrice et pas à une autre. A-t-on voulu faire payer une comédienne qui n’avait jamais voulu se prêter au jeu hollywoodien en évitant soigneusement les soirées et les interviews des échotières d’Hollywood ? La Paramount n’a telle pas voulu aider une vedette dont la carrière battait déjà de l’aile ? En tous les cas, l’actrice va trainer le magazine en justice. D’aucuns prétendent qu’elle aurait plutôt du jouer l’indifférence car cela aurait fait beaucoup moins de bruit.
Avec Elvis Presley
Après ce scandale, Lizabeth ne tournera plus que 3 films dont un musical avec Elvis Presley « Amour frénétique » en 1957 (le King n’a pas souvent eu la chance de jouer avec de vraies actrices). Boudée par le producteurs en raison du scandale, l’actrice tente alors de se tourner vers la chanson, et enregistre un 33 tours avec une série de slows jazzy « cela faisait longtemps que j’en avais envie, mais la Paramount n’y tenait pas. J’ai enfin pris des cours de chant et me suis lancée : le seul risque que je cours est que personne n’achète mes disques ».. Le succès d’estime de l’album lui vaudra un contrat de 3 ans avec la firme de disques RCA Victor. De belles chansons, interprétées avec sensualité et une voix rauque et tendre : j’aime beaucoup.
Son disque en 1957 --------------------------------Lizabeth Scott aujourd'hui
Depuis, Lizabeth Scott a plus ou moins disparu du show business (hormis un come back dans un polar de 1972), ses exigences financières étant bien trop élevées pour les producteurs.
Elle donne encore des conférences sur le cinéma : même coiffure, même ligne, même classe. Une actrice fascinante qui mérite d’être redécouverte.
Lizabeth dans un de ses nombreux passages chantés à l’écran (en marge de l’enquête en 1947). On est sous le charme.
Lizabeth chante (avec sa vraie voix) à la télé en 1958
Dernière modification par Music Man le 25 juin 08, 08:08, modifié 8 fois.
Ah Lizabeth Scott... Un nom que l'on associe plus volontier au film noir qu'à la comédie musicale. Elle est un peu oubliée aujourd'hui et c'est dommage. Il faut dire aussi que ses films (noirs) disponibles en dvd ne sont pas très nombreux ou dans des éditions assez cheap. Messieurs les éditeurs, un petit effort, please. Merci, Music Man, pour ce portrait !
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
Imaginez deux sœurs jumelles, blondes, hyper sexy, douées pour la danse mais sachant également chanter à l’unisson. Avec de telles cartes en main, les Soeurs Kessler ont mené une carrière internationale, en enchaînant les comédies musicales en Allemagne, battant des records d’audimat dans des shows télévisés en Italie, descendant le grand escalier du Lido à Paris, ou dansant avec les crooners les plus fameux lors du Ed Sullivan show. Si on n’en parle plus du tout en France depuis des décennies, les plus de 40 ans n’ont pas oublié leur sex appeal et leur présence.
Alice et Ellen Kessler sont nées en 1936 près de Leipzig. Encouragées par leur papa, un ingénieur porté sur la bouteille, les deux gamines prennent des cours de danse classique à l’opéra de Leipzig dès 1947. Elle vont vite bifurquer vers le show business et trouver un engagement dans une revue au Palladium de Düsseldorf. Leur taille (1 m 76) et le fait qu’elles soient jumelles vont très vite attirer l’attention des producteurs et du public. Elles sont engagées au Lido, le fameux cabaret des Champs Elysées, et c’est le début d’une gloire qui va les mener dans toutes les grandes capitales. Le cinéma allemand qui à l’époque tournait en grandes quantités des films musicaux fait appel à leurs services pour Tant qu’il y aura de jolies filles, un film revue de Rabenalt, des heimatfilms (films folkloriques avec tyroliennes et paysages enchanteurs) comme 4 filles du Wachau (1957) où on les associe à deux autres jumelles, les sœurs Gunther.
Cependant, il n’est pas facile de trouver des intrigues valables pour les jumelles (les producteurs espagnols auront les même difficultés dans les années 60 avec les sœurs Pili et Mili), qui ne sont pas non plus spécialement douées pour la comédie, aussi les deux beautés vont-elles souvent apparaître dans des rôles secondaires pour faire ce qu’elles savent le mieux : danser. Évidemment la parfaite symétrie des mouvements et l’évidente complicité existant entre les deux sœurs garantit un joli spectacle.
Dans la catégorie film-revue (schlagerfilm pour les spécialistes), la Paloma(1959), film bien quelconque où elles dansent sur une sorte de ritournelle italienne aux paroles archi débiles. On les retrouve aussi dans des opérettes filmées comme l’étudiant pauvre (pas mal du tout avec un coté picaresque très film de cape et d’épée) ou le comte du Luxembourg (1958) et l’oiseleur (1962) ; des films qui sortiront en France, mais que les cahiers du cinéma, sans doute allergiques ne voudront même pas commenter. Leur seul ressort comique repose souvent sur des anachronismes et des adaptations twist ou yéyé des principaux morceaux musicaux ;
L’affiche du film insiste sur la présence des jumelles alors qu’en réalité elles n’ont que des rôles secondaires
Toujours présentes là où on ne les attend pas, les deux sœurs tentent l’aventure du disque et de la chanson, et participent au concours eurovision de 1959. Elles vont enregistrer pas mal de disque en français, allemand, italien et anglais durant toute la décennie (elles sont très à l’aise avec les langues étrangères). Les jolies sœurs sont fréquemment invitées dans les shows américains d’Ed Sullivan et, Dean Martin et les plus grandes stars d’Hollywood (John Wayne, Cary Grant, Fred Astaire) les congratulent. Elles côtoient dans leurs shows Harry Belafonte et Burt Lancaster et vivent leur rêve américain.
Si les sœurs jumelles triomphent partout, en Italie elles sont véritablement adulées comme des reines. Elles deviennent animatrices de shows télé aux cotés de Johnny Dorelli. Au milieu des shows, elles se réservent une longue scène de revue, où elles dansent légère et court vêtues : c’est quelque part aussi le début d’une certaine image de la présentatrice télé italienne, très sophistiquée et exagérément sexy, agaçant bien des féministes (ça ne s’est pas arrangé depuis).
Jamais les deux sœurs ne tenteront de faire carrière à part, même si les histoires de cœur ont sans doute provoqué quelques dissensions dans leur duo : Ellen sera longtemps fiancée à l’acteur Umberto Orsini qui la quittera pour une femme plus jeune, et Alice liée au célèbre chanteur Marcel Amont.
Dans les années 70, on voit encore un peu les deux sœurs à la télé (un show des Carpentier leur sera consacré) et elles posent nues ensemble dans l’édition italienne de playboy, pour monter qu’à 40 ans, elles sont encore dans le coup.
Néanmoins, dans ce métier et dans le monde de la revue, c’est surtout logiquement l’âge de passer à autre chose.
Aujourd’hui ; les deux sœurs continuent de vivre ensemble, dans la même maison comme un vieux couple. Cependant, elles ont chacune leurs pièces avec en commun la salle à manger où elles partagent leurs repas (avec un gros faible pour la cuisine chinoise). Un système de cloison leur permet de s’isoler quand elles se font la tête, mais cela ne dure jamais très longtemps. Elles partagent tout, y compris les liftings, en se faisant opérer en même temps ! On les retrouve à l’occasion dans des talk shows en Allemagne et évidemment en Italie où elles ont laissé un souvenir vivace.
Et vous, les connaissiez vous ?
Dernière modification par Music Man le 27 juin 08, 10:02, modifié 2 fois.
Music Man a écrit :(De son coté Lauren Bacall se faisait doubler par…un homme, le crooner Andy Williams, afin d’avoir un coté un peu ambigu).
Euh..., ça c'est du pipeau.... C'est un canular (qu'on voit encore repris d'ailleurs, sur la pochette certains CD)
Lauren Bacall chante elle même dans les films de Hawks
J'avais lu ça quelquepart. J'ai tort de ne pas vérifier mes sources, alors merci à Ballin de rectifier cet hoax.
Sur de nombreux sites, on prétend encore que le jeune Andy Williams a doublé l'actrice dans to have or have not.
Dans sa bio, Lauren Bacall précise qu'ele a enregistré la chanson et qu'Andy Williams est simplement venu rajouter les notes les plus hautes. Dans la biographie filmée d'Andy Williams, sortie en DVD, le légendaire crooner parle de ses débuts à Hollywood avec ses 3 frères. Il a assuré les choeurs pour Swinging on a star, le tube de Bing Crosby, et dans des films MGM comme la pluie qui chante ou les harvey girls. s'il avait doublé la Bacall, je pense en effet qu'il ne l'aurait pas passé sous silence. Pauline Kael was among the first to spread the myth that it's young Andy Williams dubbing for Lauren Bacall, and though Kael was made aware of the error, she never corrected it in later editions of 5001 Nights at the Movies. Those who still insist it's Andy Williams singing will not appreciate Todd McCarthy's thoroughly researched biography of Howard Hawks (page 377 of 756!):
"To find a singer who would match up plausibly with Bacall's husky tones was not easy, and quite a few were tried, including the deep-voiced black singer Lillian Randolph, Dolores Hope, and the teenaged Andy Williams. Williams finally prevailed, and it was his voice that emanated from the playback machine on May 1[1944] when Hawks at last came to filming "How Little We Know." As was customary, Bacall sang along while Carmichael tinkered away on the silent keyboard, and as she did, Hawks liked what he heard and told her to keep going. When she was done, he decided to record her again singing the song, so, despite the legend that has come down over the years that Andy Williams's voice was dubbed over Bacall's (a legend so generally accepted that it became a correct answer on Jeopardy), the truth is that Bacall sang her own numbers in To Have and Have Not."
- Bill Blackwell
Dernière modification par Music Man le 27 juin 08, 09:00, modifié 1 fois.
Jo Stafford, une des plus populaires chanteuses américaines des années 40-50 vient de nous quitter à plus de 90 ans.
Elle débute toute jeune dans un quatuor vocal, les « Pied pipers », qui interprète en parfaite harmonie des ballades romantiques dans l’orchestre de Tommy Dorsey et assure les chœurs derrière le tout jeune Frank Sinatra.
Au sein des Pied Pipers, Jo Stafford va paraître dans quelques films musicaux (Las Végas nights, Croisière mouvementée...) où ses interventions se limitent à quelques refrains.
Dans La du Barry était une dame, elle chante Katy went to Haïti, déguisée en marquise, dans la séquence se déroulant à la cour de louis XV.
En 1943, Jo Stafford quitte les pied pipers pour entamer une carrière solo très prestigieuse. La grande rivale de Dinah Shore devient la chanteuse favorite des GI (d’où son surnom de GI Jo) et collectionne les tubes jusqu’à la fin des années 50 :
Sa version de Trolley song (1944) du chant de Missouri se classera bien mieux dans les charts que celle de Judy Garland. L’énorme succès de You belong to me en 1952 (2 millions d’exemplaires vendus !) lui vaudra de recevoir un disque de platine (le tout premier remis à une artiste). Parmi ses autres succès, des cantiques (sa voix est vraiment idéale pour ce genre) en duo avec l’acteur chanteur Gordon MacRae, une version variété de l'étude op. 10 en mi majeur de Chopin (40 ans avant le Lemon incest de Gainsbourg) , le fameux hit country Jambalaya en 1953 et des chansons tirées de films (long ago and far away de Cover girl, bo bidibo de Cendrillon…) . Réputée pour la justesse de ses interprétations (Sinatra était très impressionné par sa technique et son aptitude à tenir une note pendant plus de 20 secondes) et sa voix décontractée presque sans aucun vibrato, Jo Stafford va s’offrir une récréation en 1947 en enregistrant sous un faux nom (Cinderella J Stump) une version parodique et country de Temptation avec un accent hillbilly à couper au couteau : c’est un triomphe. Du coup, parallèlement à sa carrière, elle va s’amuser à massacrer quelques chansons en chantant complètement faux sous le pseudo de Darlène Edwards dans des parodies souvent désopilantes : un rare exemple de schizophrénie dans la chanson ! Après avoir animé quelques shows télé au début des années 60, Si Jo Stafford abandonne sa carrière principale vers 1966, Darlène Edwards va continuer à sévir pour le pire et pour le rire jusqu’en 1978 (à noter une version calamiteuse de staying alive des Bee Gees, qui montre bien l’humour de la chanteuse) ;
[youtube]8R4hZk-1fpo [/youtube]
Jo Stafford interprète de sa voix pure la chanson du film Etranges vacances (avec Ginger Rogers). Très émouvant. On imagine que beaucoup de femmes de soldats ont du être touchées en écoutant cet air nostalgique de 1944.
Dans un cabaret, un travesti fait un play back sur le Staying alive de Darlene Edwards (la face cachée de Jo Stafford) :
Et si on faisait à présent un petit passage à basse altitude sur le « cinéma de papa » des années 50 et ses nanars quasiment invisibles de nos jours en évoquant la troublante actrice argentine Tilda Thamar, la reine du navet, « la bombe atomique argentine », qui a aligné avec constance les polars sans âme et les musicals pâlichons : une vedette très médiatique, mais qui faisait beaucoup plus parler d’elle dans les cocktails mondains et dans les journaux à cancan que dans les revues sérieuses de cinéma.
Diplomée en 1937 de l’Académie des beaux arts de Buenos Aires, la blonde argentine se destinait à l’origine à une carrière de professeur de dessin. Si ses talents de graphiste sont vite reconnus, c’est sa grande beauté (ses yeux bleu clair et ses cheveux péroxidés ) qui va lui ouvrir les portes du cinéma : elle figure d’abord dans un documentaire puis pas mal de films dans les années 40, grâce auxquels elle va lentement mais sûrement gravir les échelons de la notoriété. On la retrouve au générique de 2 films de Pierre Chenal exilé en Argentine. Il lui faudra 10 ans pour décrocher un premier rôle (dans l’intervalle elle tient des rôles secondaires aux cotés d’Eva Duarte (future Eva Perron) ou Mirtha Legrand, dans des films souvent musicaux comme la Chaste Suzanne ou la Petite dame du Moulin Rouge).
Elle joue dans les remakes argentins du chapeau de paille d’Italie et de Mlle ma mère (où elle interprète hubba hubba un boléro de sa composition) dont certains passages sont censurés et fait scandale en paraissant en maillot de bain dans Adam et le serpent. En posant nue pour une célèbre photographe, elle ne craint pas d’aggraver sa situation : il est temps pour elle de tenter sa chance ailleurs.
Epouse du comte Ali Toptani, cousin du roi Zog d’Albanie, elle pénètre ainsi de plein pied dans la jet-set internationale : elle est vivement remarquée lors de son passage aux USA (où on la surnomme la bombe atomique) et en France où elle vient passer les fêtes du jour de l’an 1948-1949. Le producteur Claude Dolbert la rencontre lors d’une soirée et lui fait signer un contrat sur le champ : la blonde actrice est alors lancée avec forte publicité, ce qui va vite provoquer quelques sarcasmes qui remettent à juste titre en cause son statut de superstar argentine (sa notoriété dans son pays est bien inférieure à celle de Mirtha Legrand, Tita Merello …).
Avec Errol Flynn
L’actrice déclare dans les journaux qu’elle admire James Stewart et rêve de tourner avec Autant-Lara et Clouzot : elle va vite déchanter en ne jouant que dans de médiocres films mis en scènes par des tacherons. L’ange rouge de J Daniel Norman marque ses débuts en France : elle y incarne une vamp de cabaret amoureuse du gangster Paul Meurisse et chante deux airs de Francis Lopez. La critique sceptique souligne néanmoins la beauté de la nouvelle star. Dans ronde de nuit, elle est tour à tour marquise, gitane, prostituée et star(et entonne un air de Jose Sentis). Mieux vaut éviter Amour et Compagnie, un lamentable musical dont la vedette est Georges Guétary. C’est un ratage total, et Tilda, en mondaine capricieuse et « tempéramental », baragouinant le français, insupportable.
En dépit de la piètre qualité de ses films, le public séduit par sa grande beauté (le jeune François Truffaut la trouvait fort belle) et alpagué par le brouhaha médiatique dont elle fait l’objet (son court mariage avec un peintre mondain fait jaser, ses rencontres à Cannes avec Kirk Douglas, Errol Flynn) l’adopte. Pourtant rien ne viendra relever le niveau. Parmi ses prestations, pas mal de films musicaux comme Bouquet de joie (1951) avec Charles Trenet (qui y chante mes jeunes années, un de ses plus jolis succès) ou le chanteur de Mexico avec Luis Mariano (en star capricieuse encore une fois), seul film encore rediffusé de temps à autres, divertissement tout à fait honnête. Une nuit au moulin rouge (1956) est un film revue, vitrine clinquante d’un Paris de pacotille destiné surtout à la province et à l’exportation. Sœur Angélica, un mélo espagnol comme on n’ose plus les faire, avec scènes de cabaret.
L’autre spécialité de Tilda reste le polar, bas de gamme le plus souvent comme l’assommante femme à l’orchidée, lourdement mise en scène par Raymond Leboursier : ennui garanti, ou la suite des pépées font la loi (les pépées au service secret) avec Louise Carletti, autre star des polars de série Z (la maman d’Ariane du club Dorothée).
Je suis certainement un peu sévère avec les films de cette blonde platinée en me basant sur la poignée que j’ai pu voir en VHS et peut-être que certains méritent d’être revus (encore faudrait-il qu’ils soient diffusés quelque part !).
Avec la nouvelle vague, et la quarantaine, Tilda ne parvient plus à trouver des rôles à l’écran mais son immense fortune lui permet aisément de s’en passer : en outre, elle en profite pour retourner à ses chevalets et peindre des toiles un peu naïves et naturalistes, que le Douanier Rousseau n’aurait pas détestées. En 1966, elle fait un procès contre une firme de cosmétique argentine qui utilise son image sans sa permission pour une pub.
Dès ses débuts en France, la star précisait qu’elle avait écrit deux scénarii : compte tenu de sa fortune et de ses relations, il paraissait logique qu’elle tente sa chance derrière la caméra. Néanmoins les informations sur sa seule réalisation « l’appel » en 1974, avec Michel Lemoine, sont rares et laissent perplexe : s’agit-il d’un film fantastique sur un vaisseau fantôme ou tout bonnement d’un porno (avec des titres plus explicites pour l’exploitation à l’étranger)?
Pour finir sa carrière en toute logique quoi de mieux pour la reine du cinéma bis qu’un rôle secondaire dans les Prédateurs de la nuit, remake erotico-gore des yeux sans visage de Georges Franju avec Brigitte Lahaie, produit par René Château et réalisé par Jess Franco (un de ses meilleurs films selon les spécialistes)?
En 1989, Tilda Thamar décède dans un accident de voiture. Compte-tenu de la médiocrité d’une grande part de ses films que reste t’il de la Lana Turner argentine, hormis de jolies couvertures de Cinémonde et le vague souvenir chez les plus âgés d’une vamp renommée pour son parfum de scandale (Annie Cordy raconte qu’elle portait rarement une culotte). Cette artiste polyglotte et cultivée ne méritait-elle pas un peu mieux ?
Tilda Thamar peintre : pas mal du tout.
Bouche carnassière, regard pénétrant, silhouette parfaite, la brune chanteuse Margot Hielscher avait toutes les qualités pour incarner à l’écran les vamps vénéneuses. Hélas, il faut parfois savoir être là au bon endroit et au bon moment, et dans l’Allemagne de l’immédiat après guerre, années « tunnel » d’un cinéma bien sage et consensuel entre folklore et guimauve, la troublante star n’a pas eu l’opportunité de se voir proposer des rôles lui convenant vraiment.
Née à Berlin en 1918, la jeune Margot se destinait très tôt à une carrière artistique, hésitant entre le chant et la comédie. Néanmoins pour se conformer aux désirs de son père qui souhaitait qu’elle trouve une voie plus sérieuse et plus sûre, la jeune femme entame des études de styliste. Elle présente plusieurs modèles à l’exposition universelle de Paris en 1937 et est engagée en 1939 par les studios de cinéma UFA pour dessiner des costumes. Heinz Rühmann, séduit par ses créations l’engage pour dessiner les tenues de ses 4 prochains films. A la cantine du studio, le compositeur Théo Mackeben apprend que la jeune styliste sait aussi chanter et jouer la comédie : il lui déniche un petit rôle de dame de compagnie dans l’antibritannique Marie Stuart (1940) avec la célèbre Zarah Leander.
L’année suivante, elle tient un rôle secondaire dans le mélo sentimental Au revoir Franciska, où elle porte une de ses créations (pas géniale d’ailleurs…). Le succès du film booste sa carrière : Margot est engagée pour jouer dans l’adaptation filmée d’une opérette où avait brillé sur les scènes viennoises la fameuse Zarah, sorte de pastiche de la vie présumée de la solitaire Greta Garbo, avec la norvégienne Kirsten Heiberg en tête d’affiche (Zarah est déjà en disgrâce chez les nazis) : le film passe pour être le musical le plus couteux de l’ère nazie. Mais c’est en incarnant une vamp dans « les femmes ne sont pas des anges » que Margot triomphe en chantant de jolies compositions de Mackeben.
Son visage sensuel, la grande beauté de son regard et son immense sourire séduisent les spectateurs. Lors de la grande première de Voyage dans le passé 1943, pseudo-remake de carnet de bal de Duvivier, une alerte à la bombe retentit : les spectateurs aux abris s’empressent dès la fin de l’alerte de regagner leur fauteuil : le film est à nouveau un gros succès.
Une des plus grandes bouches du cinéma
A la fin de la guerre, Margot participe à des spectacles organisés pour les soldats américains basés en Allemagne. Le grand producteur du muet Erich Pommer, de retour dans son pays après des années d’exil, en tant qu’officier du gouvernement militaire est chargé de la réorganisation de l'industrie cinématographique. Il décide de bâtir un musical réaliste sur la vie d’une chanteuse, en tournée dans les bases militaires dont le cœur est déchiré entre un soldat américain et allemand : l’occasion pour la belle d’interpréter quelques airs très swing et très américanisés, mais surtout une sublime mélodie très prenante wenn die baumwollfelder, qu’elle met très bien en valeur avec sa belle voix prenante, qu’elle enregistre pour Télefunken : désormais sa carrière de chanteuse, ses émissions de radio (où elle rencontre Benny Goodman-qui deviendra un ami de longue date, Duke Ellington) et ses succès discographiques (une version jazzy de la comptine frère Jacques, absolument craquante, la version allemande de Domino…) vont peu à peu prendre le pas sur ses films (amour démoniaque, nostalgie…), des mélos souvent musicaux.
En 1953, Margot chante en duo avec Maurice Chevalier dans Schlagerparade, le film qui va déclencher la vogue en Allemagne des films de variétés, bourrés de chansons à la mode. Son décolleté très échancré fait jaser de même qu’une supposée liaison avec la célèbre star française (elle aurait pris la place de Patachou dans son cœur). On raconte qu’elle est aussi très amie avec Gary Cooper, qui adore ses chansons. A la même époque, elle hérite d’un petit rôle de chanteuse dans le diable fait le troisième de Gene Kelly et sympathise avec Léonard Bernstein avec lequel elle chante du Gerschwin lors d’un spectacle (le fameux compositeur déclarera qu’il n’avait jamais pensé qu’une jolie nazi-girl connaissait ce répertoire !)
Compte tenu du rôle que joua Théo Mackeben dans sa carrière, il est naturel que la vedette figure dans le biopic consacré à ce célèbre compositeur, Près de toi chérie (1954) : entourée de girls dénudées, margot y reprend son tube du film « les femmes ne sont pas des anges » ainsi que le fameux « bei dir war es immer so schön », la plus fameuse création de l’artiste.
Hormis les revues filmées, peu de rôles conviennent à la femme fatale du cinéma allemand. On la distribue pourtant dans la montagne qui chante (1957), un musical folklorique, entre tyroliennes et tcha tcha, où elle semble perdue.
Margot dans Salto Mortale (1953), un film de cirque (autre genre très prisé outre Rhin)
En 1957 et 1958, toujours curieusement accoutrée d’une robe de sa création, Margot représente l’Allemagne à l’eurovision. On la voit aussi dans la série télé américaine les vikings avec Edmond Purdom.
Dans les années 60, la chanteuse a surtout trouvé des rôles à la télévision dans des séries policières, grande spécialité locale.
Depuis la mort de son mari, le compositeur Friedrich Meyer dont elle partageait la vie depuis 4 décennies, la chanteuse s’est éloignée du show business. Margot Hielscher : un visage et un regard que l’on n’oublie pas. S’il est bien difficile de voir ses films de nos jours (à moins de les choper sur les chaînes allemandes de temps à autres), on peut toujours se délecter de ses enregistrements sur CD car c’était une excellente chanteuse de charme : Gary Cooper, Gene Kelly et Leonard Bernstein ne peuvent pas se tromper !
[youtube]ACyGo6NetP4 [/youtube]
Miss Hit Parade en 1957 à l’eurovision. : pas sa meilleure chanson !
Imaginez une créature de rêve, presque trop belle pour être vraie, pour laquelle le mot glamour aurait pu être inventé, susurrant d’une voix chaude et sensuelle des mélodies romantiques et jazzy…
Oui, cette femme a bien existé, il s’agit de la chanteuse de charme Julie London dont les 33 tours ont fait rêver beaucoup d’auditeurs dans les années 50 et 60, autant pour leur contenant (des pochettes illustrées de magnifiques portraits d’une femme belle à damner un saint), que leur contenu (des ballades à écouter autour de minuit). Evidemment, une aussi belle plante n’a pu échapper à l’industrie cinématographique, et si la ravissante chanteuse n'avait pas été si modeste, elle aurait pu s’enorgueillir d’avoir paru dans quelques très bons westerns et autres films à la fin des années 50.
Née en 1926 en Californie dans une famille d’artiste de vaudeville, la petite Julie suit très tôt ses parents dans les tournées, et chante en public dès l’âge de 3 ans puis dans le show animé à la radio par sa famille. Après des études à l’école professionnelle d’Hollywood, et plusieurs petits jobs (dont celui de liftière dans l’ascenseur d’un hôtel), elle est remarquée par Sue Carol, ex-star du muet devenue agent à Hollywood et épouse d’Alan Ladd : Julie fait ses débuts de comédienne dans Nabonga (1944), un King Kong de série B, à réserver plutôt aux amateurs de second degré.
Très, très sexy…
Après moult photos de pin-up pour les soldats (nous sommes alors en pleine guerre) et quelques petits rôles dans divers films de seconde zone (notamment un musical avec Jack Oakie) ou de la figuration dans des films à gros budgets (Broadway en folie avec Betty Grable), elle paraît dans un ou deux bons polars (la maison rouge ressorti en DVD) et déjà des westerns comme le cavalier masqué avec le chanteur Gordon Mac Rae (pourtant ni l’un ni l’autre ne fredonne le moindre refrain dans le film), avant de quitter les studios de cinéma pour épouser l’acteur Jack Webb (connu alors pour ses rôles à la radio) et élever leurs 2 filles.
Après leur divorce en 1954, l’artiste, encouragée par le musicien Bobby Troup, décide de se recentrer plutôt sur sa carrière de chanteuse et fait mouche en enregistrant l’album Julie is her name, une collection de ballades murmurées d’une voix sensuelle, comme un soupir, avec tout juste deux guitares en accompagnement.
Le disque remporte un gros succès (3 millions de copies), notamment la chanson cry me a river, qui deviendra un vrai standard et connaîtra moult reprises (Shirley Bassey, Mari Wilson, Annie Fratellini, Ella Fitzgerald, Joe Cocker, Viktor Lazlo, Diana Krall, Justin Timberlake et ce n’est pas fini…). Je ne surprendrai personne en affirmant que rien ne vaut l’original.
Dans l’amusant musical de Frank Tashlin, la blonde et moi (1956), la belle Julie chante son fameux tube dans une séquence très réussie où Tom Ewell, ivre, croit l’apercevoir à chaque coin de la maison, toujours plus sexy et glamoureuse comme sur ses pochettes de disques. (L’idée sera reprise dans le clip de la reprise assurée par Viktor Lazlo dans les années 80).
Nominée 3 années de suite chanteuse de l’année, Julie profite de se succès discographique et médiatique pour reprendre le chemin des studios : mais dans des films de série A désormais : le plus souvent des westerns et pas des moindres (les dernières grandes années du genre) : l’homme de l’ouest d’Anthony Mann (1958) avec Gary Cooper, sorte de huis clos shakespearien, prenant et angoissant, (la fameuse scène où Julie est contrainte d’effectuer un strip-tease (innocent) sous la menace d’un revolver a frappé les imaginations) ; libre comme le vent de John Sturges, encore un très beau film où deux hommes se disputent les faveurs de l’envoutante Julie (elle interprète aussi la fort belle chanson du générique) ; l’aventurier du Rio grande (1959 de Robert Parrish avec Robert Mitchum) encore un western magnifique mélangeant habilement l'action, la romance et l'aventure.
A la même époque, on a vu Julie dans des drames moins marquants comme le dernier damier (1959 avec le chanteur Nat King Cole), un drame un peu lourdingue sur le racisme, où l’actrice s’en sort encore avec les honneurs. Celle qui déclarait ne pas être Sarah Bernhardt n’était pas qu’une présence ensorcelante d’une beauté à couper le souffle, mais une actrice, certes passive mais tout à fait convaincante.
Elle joue le rôle d’une chanteuse de cabaret dans Allo l’assassin vous parle (1960) et dompteur de femmes (biopic sur George Raft), qui comprend pas mal de bons numéros musicaux.
Durant toutes les années 60, Julie va poursuivre l’enregistrement d’une série de 33T aux titres évocateurs (your number please, make love to me…) qui feront les délices des amateurs d’easy listening et de jazz vocal. Qu’elle soit entourée d’une grande formation, tout cuivres dehors (comme pour Daddy composée par son nouveau mari Bobby Troup), du minimum comme pour blue moon, qu’elle chante la bossa nova (girl from Ipanema), des airs exotiques (besame mucho, sway, reprise 50 ans après par Diam’s : laisse moi kiffer), des chansons de films (comme hello Dolly, Harlow, the days of wine and roses, moon river, l’ombre sous la mer), ses interprétations sont toujours excellentes et je ne saurais quel titre conseiller à qui voudrait la découvrir (sa version hyper sensuelle de round midnight peut-être, ou de « danser sur moi » du film Harlow, reprise chez nous par Nougaro, ou encore le délicieux nice girls don’t stay for breakfast).
Loin d’avoir la grosse tête, la chanteuse très introvertie semblait méconnaître son propre talent : « je n’ai qu’un filet de voix, c’est pourquoi je chante tout près du micro », « ma voix est rauque car je fume trop », « on a passé plus de temps sur la réalisation des pochettes que sur les chansons » (au sujet des splendides couvertures de ses disques dont le célèbre calender girl, où elle joue les pin up dévêtues pour tous les mois de l’année, avec une chanson pour chaque mois) ;
Le fameux Calendar girl et son treizième mois, au milieu de l’album !
A lire ses déclarations lors des interviews, on peut se demander si la chanteuse n’avait réellement aucune confiance en elle ni aucune estime pour ce qu’elle faisait, où s’il s’agissait d’une hyper sensible qui se dévalorisait elle-même pour couper l’herbe sous le pied à un journaliste qui aurait pu la critiquer.
Dans les années 60, Julie apparaît en guest star dans de nombreuses séries télé comme les espions avec Bill Cosby ou la grande vallée. Elle enregistre son dernier album en 1968, juste avant que sa firme de disque liberty ne fasse faillite. Le concept du disque (la reprise de chansons rock du moment des Doors, les Beatles en version easy-listening) est trop en avance : les critiques pleuvent.
En 1972, l’ex-mari de Julie, Jack Webb lui propose un rôle d’infirmière le soap opéra « emergency » : un gros succès dans un programme probablement pas terrible (où l'actrice à 45 ans présente une étonnante ressemblance avec Sue Ellen de Dallas): c’est triste mais aux USA, il semble que les gens se souviennent plus de sa prestation dans ce feuilleton à l’eau de rose que du reste de sa carrière.
Victime d’une crise cardiaque en 1995, les dernières années de la chanteuse seront très pénibles : elle nous a quittés en 2000. Mais sa voix sensuelle, son répertoire intimiste et son image ultra glamour n’ont pas fini de faire rêver.
Cry me a river dans le film la blonde et moi
Tout comme Mary Pickford dans les films muets des années 20, l’actrice hongroise Franciska Gaal joua les jeunes filles naïves et innocentes dont elle n’avait plus l’âge dans une série de comédies musicales légères et charmantes tournées en Allemagne puis en Autriche jusqu’au milieu des années 30. Ces films remportèrent à l’époque un énorme succès. Pourtant le souvenir de la jeune fille naïve aux grands yeux rêveurs s’est estompé dans les mémoires. La carrière florissante de la comédienne juive a en effet été extrêmement contrariée par l’arrivée au pouvoir d’Hitler.
Née Fanny Zilveritch en 1895, treizième enfant d’une famille juive, la petite Franceska prend quelques cours de comédie à l’académie de Budapest avant d’être renvoyée pour son manque de ponctualité. Après la première guerre mondiale, celle-ci parvient à se faire un nom sur les scènes hongroises, grâce au soutien de Ferenc Molnar, célèbre romancier et dramaturge hongrois, dont la pièce à succès Liliom connaîtra en Europe et à Hollywood moult adaptations. Dès 1921, on retrouve son nom au générique de 3 films muets hongrois (perdus ?), mais l’essentiel de sa carrière se déroule alors sur les planches et dans les cabarets (en 1927, l’artiste fait même une tournée à Broadway).
L’avènement du cinéma parlant attise l’intérêt des producteurs berlinois vers les artistes de théâtre confirmés pour les nombreux films allemands, souvent tournés en versions multiples, qui sont mis en chantier et séduisent toute l’Europe. Son compatriote Joe Pasternak, futur grand producteur de la MGM (où il lancera Mario Lanza et Kathryn Grayson), est alors chargé de la filiale allemande de la firme Universal. Il propose un premier rôle à Franciska, celui d’une toute jeune fille dans Paprika, un musical folklorique alors qu’elle ne connait quasiment pas un mot d’allemand. L’actrice a alors 37 ans, on déclare à la presse qu’elle en a 28, ce qui parait plus adéquat pour jouer les jeunes filles de 16 ans ! Par la suite, elle retardera même sa date de naissance jusqu’en 1909. Mais de toute façon, elle est crédible. La spontanéité et le regard naïf de la comédienne font mouche et séduisent immédiatement le public allemand. La presse allemande claironne que « la soubrette hongroise a ravi tous les cœurs avec ses mimiques, sa bonne humeur et son insolence, sa jolie voix, son petit accent, sa façon passionnée de danser : une petite personne racée avec du paprika dans le sang. »
Dans Véronika (1932) de Carl Boese, elle incarne une jeune fleuriste éprise de son patron, qui sème involontairement la panique dans un couple marié, en glissant une lettre d’amour dans un bouquet. La chanson principale du film, qu’elle enregistre sur 78 T est sur toutes les lèvres. A vrai dire, elle chante de façon vraiment quelconque et c’est surtout sa personnalité fraiche et innocente qui retient l’attention. Tourné en versions hongroises et allemandes par Geza von Bolvary, Scandale à Budapest (1933) remporte un succès international.
Alors que ce succès annonçait un avenir brillant, l'arrivée au pouvoir d'Hitler va complètement bouleverser la carrière de la nouvelle coqueluche des studios berlinois. Du jour au lendemain, l’actrice devient persona non grata en Allemagne en raison de ses origines juives, ainsi qu’une bonne partie de la communauté cinématographique. Le producteur Pasternak se réfugie en Autriche où il n’existait pas encore de politique officielle antisémite et entraine avec lui toute une équipe de réalisateurs et d’artistes juifs qui dans le meilleur des cas feront carrière ensuite à Hollywood (Henry Koster, Felix Jackson). Un documentaire récent, sorti en DVD Unerwünschtes Kino. Der deutschsprachige Emigrantenfilm 1934-1937 s’attarde sur cette période particulièrement intéressante avec de rares documents super 8 d'Henry Koster.
Les films que Gaal tourne en Autriche ont tous des allures de conte de fée : des romances où de pauvres soubrettes rencontrent le richissime prince charmant : des messages d’espoir sous un ciel couvert.
Dans parade de printemps (1934), qui sera primé à Venise, Gaal est une jolie boulangère amoureuse d’un soldat (Wolf Albach le papa de Romy Schneider), ce qui la contrarie beaucoup car une bohémienne lui a prédit qu’elle ferait un riche mariage. Tout s’arrange quand le jeune homme fait fortune en composant une valse à succès. C’est léger et sucré comme une pâtisserie viennoise.
Le film, très apprécié, fera l’objet d’un charmant remake hollywoodien avec Deanna Durbin. Le scénariste du film, Ernst Marishka en fera à son tour une adaptation très culcul, Mamzelle Cricri avec une Romy Schneider super nunuche.
Toujours abonnée aux rôles d’adolescentes alors qu’elle atteint la quarantaine, Franciska se fait carrément passer pour un enfant dans le fruit vert (1935), pour que sa maman, une star de théâtre, paraisse plus jeune (le film fera l’objet d’un remake à Hollywood avec la pauvre Diana Barrymore et Kay Francis) ;
Réalisé par Henry Koster (le futur réalisateur de la tunique) avec le scénariste Felix Jackson (futur producteur de l’Universal et mari de Deanna Durbin) sous la houlette de Pasternak, petite maman (1935) est un film 100% émigrants avec une intrigue amusante et fraiche. L’innocente Franciska trouve un bébé devant un orphelinat mais tout le monde le prend pour le sien.
Dans Peter (1935), elle se fait passer pour un garçon pour décrocher un job de vendeur de journaux (on note quelques similitudes avec Viktor Viktoria). Elle arrive malgré tout à séduire un riche docteur (incarné par Hans Jaray, grand séducteur du début des années 30 et amant de Marlène Dietrich qui lui aussi ne pouvait plus tourner en Allemagne).
Après l’Anschluss de 1938, les artistes juifs qui avaient trouvé refuge en Autriche sentent l’étau se refermer sur eux : Comme Joe Pasternak, Henry Koster, Hans Jaray, Martha Eggerth, Franciska accepte à cœur joie les propositions d’Hollywood : Cecil B de Mille l’a choisi pour le film les Flibustiers en visionnant Scandale à Budapest. Un film de pirates, que j’avais trouvé bien quelconque. Il faudrait que je me rafraîchisse la mémoire !
Avec Fredric March dans les flibustiers
La comédie musicale qu’elle joue au coté de Bing Crosby est qualifiée par les critiques de production « la plus idiote de l’année ».
Dans the girl downstairs (1939) elle hérite d’un rôle proche de ses romances européennes : une pauvre servante courtisée par le soupirant de sa patronne, qui l’utilise mais finit par succomber à son charme naturel.
L’accent hongrois de la star ne plait pas au public américain et l’équipe Pasternak/Koster/Jackson confie systématiquement à la très jeune Deanna Durbin le rôle principal dans les remakes américains des films de l’actrice. On raconte aussi que son tempérament indépendant ne parvenait pas à s’adapter au système rigide des studios ; aussi en 1940, alors que beaucoup auraient payé cher pour gagner les Etats-Unis, Franciska retourne en Hongrie au chevet de sa maman malade. Une décision risquée et lourde de conséquence, car la star va très vite être obligée de se cacher pendant toute la guerre dans la cave de la villa de son deuxième mari pour échapper aux persécutions et à la déportation (alors que la plupart des membres de sa famille seront assassinés). C'est là que l'armée rouge va la retrouver. Franciska est invitée en Russie où son film petite maman avait triomphé naguère. Première star étrangère conviée dans ce pays, elle y est fêtée comme une reine.
Après guerre, Franciska est engagée comme tête d’affiche pour un film hongrois réunissant à son générique quelques stars du 3èem reisch qui ont tourné sans discontinuer de 1933 à 1945 comme Hans Moser ou Johannes Heesters. Mais des problèmes financiers ne permettront pas de poursuivre le tournage. Mal vue par les communistes suite à des remarques que la comédienne aurait formulées dans une lettre interceptée, l’actrice quitte son pays natal en 1947 pour les USA. Si elle joue à nouveau à Broadway en 1951 pour remplacer Eva Gabor dans the happy time, elle ne parvient pas à trouver sa place dans le show business américain.
Ruinée et seule (elle a perdu son mari dans les années 60), elle décède en 1973 dans un hôpital psychiatrique américain pour les pauvres. Son décès avait été annoncé, par erreur, des années avant.
Franciska dans son dernier film américain, the girl downstairs, où elle reprend une scène d’un de ses films autrichiens.
On l’aura compris, à moins de fréquenter assidument la cinémathèque de Vienne, peu de chance de voir les films de cette actrice et c’est regrettable. Aussi, si par miracle, vous possédez un DVD du fruit vert ou de scandale à Budapest, contactez moi !
Et merci à Katalin pour ses traductions qui m'ont permis de compléter ce portrait!
Bonjour,
Je désire vous féliciter et vous remercier pour la qualité des pages consacrées aux vedettes, aux starlettes et aux stars de la comédie musicale du monde entier.
Je me suis permis de vous emprunter quelques extraits de commentaires et de fiches biographiques si bien tournées et joliment illustrées pour des billets sur mon blog. http://www.pour15minutesdamour.net/
Très cordialement et à bientôt, j'espère.