LES HOMMES
Dr Armstrong, Sepp, Steuben
les trois premiers personnages masculins de Stroheim dans
Blind Husbands sont intéressants par leur variété, et par les rapports qu'ils entretiennent: ils sont le drame, et le fait qu'il tourne en apparence autour de Mrs Armstrong ne doit pas nous éloigner du véritable sujet: la loyauté, et le courage des hommes; la loyauté de Sepp, et celle du Docteur à l'égard de celle qu'il tend à négliger. Mais aussi le courage de celui qui fanfaronne et se dégonfle comme une baudruche(Juché au sommet, seul et hésitant, Stroheim ressemble par sa gestuelle à... Stan Laurel, celui d'avant Hardy). Dans ce petit monde, si Steuben et le Docteur apportent une subtilité inédite, Sepp est le plus involontairement ridicule des personnages de l'auteur, et Stroheim ainsi que Gowland feront beaucoup mieux, on le sait.
Karamzin, Hughes
Dans Foolish Wives, Karamzin est bien sur l'objet de toutes les attentions, mais les intentions de Stroheim de révéler progressivement Hughes comme un parangon de droiture et fondamentalement "un homme, un vrai", ont été torpillées hélas par la mort du comédien; mais dans
Foolish Wives, il opposait clairement le vrai, le solide(Mr Hughes)au factice("A counterfeit", dit un titre final: Karamzin est un rôle). Du reste, la situation castratrice du faux comte(Il n'est pas le maître chez lui, il n'est finalement qu'un employé, et doit partager sa maîtresse avec une femme...)vient sérieusement entamer la masculinité du personnage, qui à force d'être mené par ses attributs génitaux finira à l'égout.
Mac, Marcus
Mac, le centre de
Greed, est bien sur trop bête pour comprendre ce qui arrive autour de lui, mais il est aussi sentimental(L'oiseau, sa force de caractère qui se révèle à la perspective de"gagner" Trina... mais surtout incapable de penser à long terme: "I've got her", dit-il, lorsqu'il a obtenu un baiser de Trina, et il ne fera plus rien pour la garder. Il ne comprend pas les changements, et ne peut comprendre qu'il lui faille se battre de temps en temps pour conserver sa femme. Mais Marcus, lui, souffre d'un excès d'intelligence: il aime son copain("For life", dit il lorsqu'il lui abandonne Trina)mais va laisser la rancoeur s'installer au point de se délester de tout sentiment. Et lorsque il n' a plus que cela, il utilise des moyens déloyaux: la dénonciation de Mac pour exercice illégal du métier de dentiste est un geste que Mac n'aurait as pu imaginer. Ces deux là, pour résumer, ils ne font qu'un.
Mirko, Danilo, Franz, Wolfram
Lorsqu'on observe d'un oeil distrait ses films, les princes de l'oeuvre de Stroheim sont considérés comme une entité à part entière, et pourtant ils sont tous différents. (J'ai exclu de cette liste Nicki, puisque je n'ai toujours pas vu
The Wedding march) Les deux premiers, comme Mac et Marcus, sont à nouveau les deux uniques pièces d'un puzzle, et se complètent d'autant que c'est souligné en permanence par la mise en scène, le rang des personnages, leur costumes, et le fait que finalement l'un ne va pas sans l'autre: partout ou Danilo se trouve, Mirko n'est pas loin; une façon de rappeler que derrière tout homme il y a un cochon qui sommeille? Il est vrai qu'avec Mirko, on est arrivé à bon porc.
Franz est joué par Norman Kerry, il n'ya donc pas grand chose de subtil à en tirer, mais il s'agit d'un effort de Stroheim pour construire un personnage plus complexe, qui incorpore des passages, des évolutions, qui attire la sympathie tout en ayant des mauvaises habitudes, etc... La fin le montre plus humain, grâce à son parcours, justement.
Quant à Wolfram, le peu de choses dont on dispose sur lui font de son personnage un homme-objet, en même temps qu'un enième variation sur le personnage de Franz Von Hohenegg. A propos de Franz Von Hohenegg, y aurait-il un Germaniste qui puisse nous dire s'il ya la-dedans un jeu de mots sur "Sans" egg? Egg pouvant être un symbole de progéniture, ou plus encore un symbole ironique de masculinité...