Eric Rohmer (1920-2010)

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 12 sept. 07, 21:13

Nicolas Brulebois a écrit :
Y'aPlusd'Saisons a écrit :Arielle Dombasle
elle est formidable. On a rarement vu des rôles de "précieuse" aussi nuancés. Je ne comprends pas ce rejet et cet amalgamme un peu foireux que font beaucoup de gens, qui confondent le personnage et l'actrice

Ah oui mais pas moi, dame! A tout péter on doit être une poignée à l'aimer, ici...

Zelda Zonk · Message par **Zelda Zonk** » 13 sept. 07, 23:22

Revu Conte d'été ce soir sur Arte. Je l'ai encore préféré à ma première vision. Je n'accroche pas à TOUT Rohmer, mais celui-là je l'adore.
Tant de justesse et de finesse dans le marivaudage amoureux adolescent, thème pourtant archi rebattu par le cinéma français (souvent à côté de la plaque), c'est un réel bonheur. On se laisse bercer par le flot des marées de Dinar, par les promenades sur les plages bretonnes, par les dialogues savoureux servis par un formidable casting (Melvil Poulpaud parfait, Amanda Langlet formidable) et une mise en scène qui, l'air de ne pas y toucher, sert parfaitement son propos (longs plans séquence sur la plage notamment, et cadrages mettant très bien en valeur les actrices).
Ce film se laisse déguster en douceur, et, entre deux déambulations sur les galets de Dinar et les remparts de Saint Malo, l'espace de quelques instants, on aimerait tous être à la place de Gaspard, le coeur partagé entre ses trois conquêtes estivales, et finalement emporté par son plus grand amour : la musique.
Magnifique !

takezo · Message par **takezo** » 15 sept. 07, 19:22

Memento a écrit :Revu Conte d'été ce soir sur Arte. Je l'ai encore préféré à ma première vision. Je n'accroche pas à TOUT Rohmer, mais celui-là je l'adore.
Tant de justesse et de finesse dans le marivaudage amoureux adolescent, thème pourtant archi rebattu par le cinéma français (souvent à côté de la plaque), c'est un réel bonheur. On se laisse bercer par le flot des marées de Dinar, par les promenades sur les plages bretonnes, par les dialogues savoureux servis par un formidable casting (Melvil Poulpaud parfait, Amanda Langlet formidable) et une mise en scène qui, l'air de ne pas y toucher, sert parfaitement son propos (longs plans séquence sur la plage notamment, et cadrages mettant très bien en valeur les actrices).
Ce film se laisse déguster en douceur, et, entre deux déambulations sur les galets de Dinar et les remparts de Saint Malo, l'espace de quelques instants, on aimerait tous être à la place de Gaspard, le coeur partagé entre ses trois conquêtes estivales, et finalement emporté par son plus grand amour : la musique.
Magnifique !

Je te rejoins à 100%. Rohmer m'emmerde habituellement. Celui-ci me berce agréablement.

bruce randylan · Message par **bruce randylan** » 21 sept. 07, 12:31

Conte d'été
Bon ben comme d'hab !
Les personnages sont trés interressant, trés fouillés avec des relations qui se tissent de façon trés fine mais d'un autre coté j'ai vraiment du mal avec sa mise en scène que je trouve trés pauvre voire moche ou trés fausse ( la scène chez le marin qu'on dirait sorti d'un doc de Fr3 bretagne ). D'ailleurs, la réalisation n'apporte stricterement rien et on pourrait suivre le film uniquement avec le son.
Bon point cependant, les acteurs sonnent pour une fois "à peu près" naturel. Et Amanda Langlet est trés mignone.

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 21 sept. 07, 12:52

Fuis, malheureux! Edite ton message pendant qu'il en est encore temps (=pendant que Brulebois ne rôde pas dans les parages)!!!

bruce randylan · Message par **bruce randylan** » 21 sept. 07, 13:03

Même pas peur

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 21 sept. 07, 13:19

Je vois que tu as une belle paire de cojones pour te risquer ainsi dans cet endroit pas très sûr du forum.
Ton post précédent est assez interessant en ce qu'il désigne quelques fausses notes apparentes chez Rohmer, et que l'on peut déchiffrer lorsque son oeuvre nous devient un peu plus familière.
Ce côté FR3 régional, par exemple, signifie le lien très fort qu'entretient l'école Bazinienne avec le documentaire au sein de la fiction. Quant aux paroles, elles sont toujours séduisantes mais mensongères chez Rohmer: celui-ci déclare même faire du cinéma muet dans la mesure où il incite le spectateur à voir l'image et ne se fier qu'à elle, et ainsi apprécier le côté parfois comique de protagonistes qui se payent de mots.

Nicolas Brulebois · Message par **Nicolas Brulebois** » 21 sept. 07, 13:57

bruce randylan a écrit :Conte d'été
Bon ben comme d'hab !
Les personnages sont trés interressant, trés fouillés avec des relations qui se tissent de façon trés fine mais d'un autre coté j'ai vraiment du mal avec sa mise en scène que je trouve trés pauvre voire moche ou trés fausse ( la scène chez le marin qu'on dirait sorti d'un doc de Fr3 bretagne ). D'ailleurs, la réalisation n'apporte stricterement rien et on pourrait suivre le film uniquement avec le son.
Bon point cependant, les acteurs sonnent pour une fois "à peu près" naturel. Et Amanda Langlet est trés mignone.

C’est parce qu’il n’y a pas de mouvements d’appareil ultra-alambiqués que tu appelles ça « pauvre » ?
Qu’aurais-tu imaginé d’autre, comme mise en scène, au moment où l’étudiante en ethno Margot interviewe le marin ? un effet spécial ultra chiadé ? pour quoi faire ?

A mon sens, la « mise en scène » doit servir le propos, et ne pas être trop visible – car beaucoup de cinéastes confondent virtuosité et esbroufe démonstrative.
Il ne s’agit pas ici d’épater les étudiants en écoles de cinéma, mais de mettre en adéquation le fond et la forme. Rohmer a réussi à rendre frais et attrayant un film ne reposant (peu ou prou) que sur d'interminables balades/discussions. C’est plutôt une gageure.
Et je penses que tu as tort de dire que le film ne repose que sur le son : ici, la manière de filmer (et donc de « mettre en scène ») les personnages contribue au charme qui (tu l’as dit) s’en dégage. Que je sache, une bonne mise en scène inclut aussi le choix & la direction des acteurs : ici, comme tu l’as dit, malgré les tunnels de dialogues, tout est à peu près naturel. Il y a des films de Rohmer où l’on discute beaucoup et où c’est terriblement chiant (ex : Conte de Printemps, L'Amour l'Après-Midi). C’est donc que la mise en scène est ici parfaitement adéquate et réussie.

NOTE : je recommande la vision du documentaire « La Fabrique du Conte d’Eté », qui se trouve sur une édition DVD spéciale du film éditée par l’Education Nationale à l’attention des classes. On y voit la mise en place et le filmage de quelques scènes de ce Conte d’Eté, et c’est particulièrement instructif. En outre, ça prouve que la mise en scène de ce film est plutôt chiadée, contrairement à ce qu’imagine notre « ami ».

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 21 sept. 07, 14:02

Nicolas Brulebois a écrit :contrairement à ce qu’imagine notre « ami ».

J'en étais sûr!

bruce randylan · Message par **bruce randylan** » 21 sept. 07, 14:40

Nicolas Brulebois a écrit : NOTE : je recommande la vision du documentaire « La Fabrique du Conte d’Eté », qui se trouve sur une édition DVD spéciale du film éditée par l’Education Nationale à l’attention des classes. On y voit la mise en place et le filmage de quelques scènes de ce Conte d’Eté, et c’est particulièrement instructif. En outre, ça prouve que la mise en scène de ce film est plutôt chiadée

Comme quoi, il existe d'autre moyen d'épater les étudiants

Par ailleurs je fais une différence entre une bonne direction d'acteurs et de bons acteurs ( ou naturels ). Pour le coup, je ne suis pas sur que Rohmer soit un bon directeur d'acteur mais qu'il sait souvent choisir des acteurs qui correspondent à sa vision naturaliste du cinéma.

Par ailleurs, le charme que j'évoque proviens des personnages plus que la mise en scène. Je ne demande pas à ce que le film soit tourné dans le genre de la soif du mal ( tu parles à un fan de Ozu ou Pagnol ) mais qu'elle ne repose pas uniquement sur les dialogues... En gros de servir de sa réalisation ( qui ne se compose pas que de mouvement d'appareil, il y a le montage, la photo, les ellipses, le cadrage, le rythme etc... ) pour exprimer certaine chose sur les motivations et l'esprit des personnages que de se réduire à des échanges verbaux ( aussi virtuoses et bien interprété soit il ). Les moments où je me suis dit, "tiens, voilà un plan qui fonctionne sur et pour lui-lême" étaient trés rares.
Rohmer Scénariste oui, Rohmer cinéaste un peu moins ( même si d'autres comme le genou de claire sont bien sur plus écrit cinématographiquement ).

Pour la scène où Ethno margot interviewe le marin, je trouve ça plus maladroit que raté. On sent clairement que Rohmer l'a interviewé lui-même puis rajoute un pauvre contre-champ sur les 2 vrais acteurs pour faire "illusion" de leur présence. La scène manque d'interaction en même qu'elle s'intègre trés mal narrativement et visuellement parlant dans le film ( les autres scènes de dialogues n'ont pas du tout cette manière de filmer et découper ). Les propos du marin sont trés interressant mais cette ce passage casse à mes yeux la crédibilité du cinéaste.

ce qu’imagine notre « ami »

Content de voir que je suis votre ami et donc le tiens

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 21 sept. 07, 15:10

En effet, et pourtant, dans Conte d'été, il y a de nombreuses parties "non-parlées" (peut-être davantage que dans d'autres films); quant aux dialogues il faut d'abord savoir les filmer si l'on ne souhaite pas ennuyer le spectateur sur tout un film: j'en veux pour preuve un nombre impressionnant d'adaptations littéraires manquées au cinéma.

Donc pour moi Rohmer est un cinéaste à part entière: je ne sais pas si Brialy, Luchini ou Trintignant trouvèrent des rôles plus significatifs et marquants que dans "Le genou de Claire", "Les nuits de la pleine lune" ou encore "Ma nuit chez Maud" (quoique "Rouge" puisse le faire aussi).
Je ne pense pas que leur performance tienne dans le seul fait que Rohmer les ait choisis; il y a autant de direction d'acteurs ici qu'ailleurs, et autant de parti-pris esthétique qu'ailleurs -à ceci près que ce n'est pas au "naturalisme" et tout le fétichisme du réel, du "vécu" que cela se réfère, mais bien au "naturel" avec le prosaïque et parfois, la poésie lyrique inhérents: un beau dialogue, une belle image, un mouvement gracieux, ou la conjonction des trois ou encore tout ce qui produit une émotion neuve .

Et je n'ai pas trouvé que l'interview un peu bidon du marin s'intégrait mal dans l'ensemble, mais tu m'as mis la puce à l'oreille et je vais essayer d'être plus attentif à cela quand je le reverrai...

Nicolas Brulebois · Message par **Nicolas Brulebois** » 21 sept. 07, 15:31

bruce randylan a écrit : (que la mise en scène) ne repose pas uniquement sur les dialogues... En gros de servir de sa réalisation ( qui ne se compose pas que de mouvement d'appareil, il y a le montage, la photo, les ellipses, le cadrage, le rythme etc... ) pour exprimer certaine chose sur les motivations et l'esprit des personnages que de se réduire à des échanges verbaux ( aussi virtuoses et bien interprété soit il ). Les moments où je me suis dit, "tiens, voilà un plan qui fonctionne sur et pour lui-lême" étaient trés rares.
Rohmer Scénariste oui, Rohmer cinéaste un peu moins

Je ne crois pas qu’une mise en scène qui donnerait – par une grammaire quelconque – des clés trop visibles sur les motivations des personnages serait très intéressante (on n’est clairement pas dans Citizen Kane, et c’est tant mieux). L’intérêt du cinéma de Rohmer est d’être extrêmement retors sous une apparence faussement lisse.
Ici, c’est au spectateur de chercher la p’tite bête et se « faire son propre film », réfléchir sur ce qu’il a vu et sur les motivations ou l’état d’esprit des personnages.

Et je ne suis pas d’accord avec l’aspect uniquement « dialoguiste » que tu lui trouves. Au contraire, la grande fluidité de la mise en scène contribue à ce que ce film extrêmement dialogué ne se résume justement pas à un long tunnel verbeux, mais bien aussi à des jeux entre les corps et les visages. Je trouve d’ailleurs le film très réussi, visuellement, et il m’arrive de faire abstraction du son pour me rincer l’œil en mode muet.

Cela dit, j’ai tout de même une ou deux réticences sur le film : la longue scène de dispute avec la dénommée Léna me semble trop longue, et l’énervement hystérique de la jeune fille un peu mal emmené.
De plus, je trouve que le film papillonne peut-être un peu trop de lieux en lieux, de décor en décor, sans se focaliser sur un seul. Alors que le cinéaste prend d’habitude plus le temps de poser un décor principal et de le faire « vivre » par interaction avec les personnages (ex : les maisons & jardins du Genou de Claire ou de Conte d’Automne, le parc des Buttes-Chaumont dans la Femme de l’Aviateur, le chemin de hallage dans l’Ami de mon Amie, etc.), ici, on va et on vient sans que ce qu’il y a autour n’ait beaucoup d’incidence sur la discussion. Je trouve ça un peu moyen. Il disait d’ailleurs, dans une interview accordée aux Cahiers en 96, que ses personnages étaient très déconnectés du paysage et évoquaient surtout leur propre intériorité. Je trouve ça assez juste – et assez dommageable. Je préfère, pour ma part, ses films dans lesquels les paysages ou décors ont plus de « personnalité », si j’ose dire, et influent un tant soit peu sur "l'action".

Nicolas Brulebois · Message par **Nicolas Brulebois** » 21 sept. 07, 15:55

Au fait, Y'aplusd'saisons... tu disais récemment que la revoyure du film t'avait un peu déçu, sans savoir pourquoi...
Est-ce que tu as, depuis, réussi à mettre des mots sur ta (relative) déception)

Pour ma part, autre réticence (en + des 2 déjà exprimées ci-haut): je trouve le film presque trop "bon", trop uniformément "séduisant".
A mesure que j'avance dans l'âge (et dans l'aigreur, peut-être aussi

), j'ai tendance à préférer les Rohmer un peu plus méchants et/ou vicelards et/ou ambigus.

Nomorereasons · Message par **Nomorereasons** » 21 sept. 07, 16:10

La réponse est en effet dans la question: je le trouve aussi un peu trop séduisant comme tu le dis.
Et comme toi je préfère les Rohmer plus anticonformistes, avec des sujets à prori intraitables comme "L'Arbre, le maire, la médiathèque" (toujours lui!); de plus j'avoue qu'il m'a manqué ici un de ces personnages délectables dont Rohmer a le secret -ceux que Paul Gégauff aurait influencés notamment.
Comme quoi ce que j'aime chez Rohmer peut se réduire à quelques trucs et ne touche que d'assez loin la cinéphilie pure et dure, mais que veux-tu: après Belmondo ou James Bond: Féodor Atkine, Daniel Pommereulle ou François-Marie Banier sont devenus mes nouveaux héros!

Nicolas Brulebois · Message par **Nicolas Brulebois** » 21 sept. 07, 16:16

... et puis, il y a aussi une petite part d'élitisme/snobisme (appelle ça comme tu le veux): à partir du moment où TOUT LE MONDE aime ce Conte d'Eté, ça me gave et j'ai tendance à m'en détacher un peu, pour chérir certains films plus "secrets" (Les Rendez-Vous de Paris ou Reinette & Mirabelle)