► Film du mois

► Films vus
* La joyeuse divorcée (Sandrich) ●●●○○
Le second film du couple Astaire-Rogers possède une intrigue vaudevillesque amusante et des numéros musicaux - tantôt enlevés tantôt charmants- de qualité (on retiendra notamment « Night and Day » et la très vaporeuse robe de Ginger Rogers, et la très gentiment grivoise chanson « Let’s knock knee » avec Betty Grable). Malheureusement, alors que le film se déroule délicieusement pendant toute sa première heure, il se trouve complétement plombé par le très long numéro musical « The continental » : près de 20 minutes de danse pour promouvoir sa chanson éponyme (la première de l’histoire à recevoir un oscar), avec une chorégraphie peu inventive, très répétitive et ponctuée par des incongruités singeant Busby Berkeley (des chorus girls coincées dans des tourniquets, d’autres plongeant –littéralement- dans les bras de leurs partenaires…). Malgré cela, on ne boude pas tout à fait son plaisir…
* Le géant de fer (Bird) ●●●●○ ♡ FILM DU MOIS ♡
Brad Bird, avant de rejoindre la maison Pixar, réalisait ce petit bijou animé, un film à la simplicité désarmante et bouleversante, plein de tendresse et d’émotions pures, apte à conquérir les cœurs des petits et des grands. Il est vrai que les thématiques sont très classiques et souvent vues et revues (l’enfant solitaire qui se trouve un ami surnaturel, la machine qui pourrait avoir une âme, l’arme qui n’est meurtrière que lorsqu’on lui commande, la question du choix entre le bien et le mal, la guerre froide et sa paranoïa comme toile de fond…) mais elles sont traitées ici sans fausse note et sans lourdeur. Bon, peut-être aussi que l’épilogue n’était pas tout à fait nécessaire, mais si cela peut sécher quelques larmes d’enfants inconsolables… je le pardonne aussi. Le « Géant de fer » reste un film d’animation diablement touchant et hautement recommandable. La seule véritable ombre au tableau étant le design des personnages humains (dans un style cartoon daté et cheap) qui sape légérement le soin apporté au contraire sur les décors et sur l’animation du géant.
* L'emprise du crime (Milestone) ●●○○○
Le mélange du film noir et du mélodrame, dans les années 40, n’aura pas donné que des cocktails heureux. En dépit d’un casting séduisant où se côtoient Barbara Stanwyck et un tout jeune Kirk Douglas, et de thèmes supposément palpitants (amours passionnés, culpabilité empoisonnante…) le film laisse globalement indifférent : bavard, assez académique, suscitant peu d’empathie, il ennuie poliment. Le final, tragique et excessif, qui a un peu le goût de cheveu sur la soupe, relève étrangement l’ensemble.
* Le sergent noir (Ford) ●●●○○
Film de procès « à l’ancienne », avec ses personnages stéréotypés et ses petites manières (ficelles scénaristiques assez grosses, flashbacks à répétition dans des fondus au noir marqués, résolution de l’intrigue par une révélation finale improbable mais opportune), qui reste néanmoins appréciable et offre des respirations bienvenues, en mode western, dans une Monument Valley en technicolor (décor dont on ne se lasse définitivement pas, John Ford non plus). Le film offre également un beau rôle à l’acteur noir Woody Strode qui incarne ici un coupable idéal et un héros sacrifié. Heureuse surprise également, tout en restant le nœud du film, les questions de races et racisme sont plutôt subtilement évoquées : un éclat de voix du procureur, quelques réflexions à cheval sur la place des hommes noirs dans une « guerre de blancs » et, bien sûr, la ségrégation comme état de fait ... Les temps changent, les bons films restent.
* Voyage à travers le cinéma français (Tavernier) ●●●○○
Guidé par Tavernier, ses souvenirs, ses auteurs favoris, ses coups de cœurs, ses rencontres, le voyage est fortement subjectif, forcément non exhaustif mais tout à fait prenant… Erudit, toujours passionnant, et visiblement très enthousiaste à l’idée de transmettre, le cinéaste livre un documentaire long et foisonnant, nous fait notamment replonger avec délice dans le cinéma des années 30, redécouvrir des noms peu connus (Edmond T.Greville), nous invite à réapprécier la musique de film (notamment celle de Jaubert et Kosma)... Bien sûr, l’intérêt peut être inégal selon les sensibilités : pour ma part, j’ai été totalement happée par la première partie (le cinéma d’avant guerre, la déclaration d’admiration à Becker), puis ai ressenti un léger coup de mou au moment où arrivent les années 60 et l’évocation d’Eddie Constantine. Mais c’est globalement un document riche, très intéressant, qui en appelle beaucoup d’autres.
* Association criminelle - The big combo (Lewis) ●●●●○
Une très bonne série B, dotée d’une belle atmosphère en noir-et-brume et d’un personnage de « big méchant » mémorable : l’inquiétant Mr Brown, impassible et sadique, qui débite sa philosophie de surhomme avant de perdre finalement son sang froid. Cornel Wilde, malgré son manque de charisme, campe un détective plutôt convaincant. Les personnages féminins sont moins marquants, même si ce sont bien eux qui, comme souvent, affaiblissent les hommes. On retiendra néanmoins le charme froid et le port de tête altier de Jean Wallace, digne d'une Carole Bouquet blonde. On se délectera également de quelques scènes osées ou suggestives : un homme qui pleure (littléralement et face caméra) la perte de sa petite amie, une scène de torture plutôt brutale, un cunnilingus suggéré par un subtil hors-champ, l’évocation à peine voilée de l’homosexualité de deux malfrats…
* La vallée de la peur - Pursued (Walsh) ●●●○○
Dans un beau noir et blanc contrasté, au son d’une musique ultra romantique, Robert Mitchum (qui aura rarement été aussi séduisant) cherche à se délivrer de ses tourments et de son passé en lambeaux. Western tragique et psychologique, le film est tantôt fascinant, tantôt décevant, et recèle quelques lourdeurs malheureuses : sa construction en flash-back laborieuse pour commencer, mais surtout sa série de révélations finales aux tournures psychanalytiques beaucoup trop tortueuses (même dans une atmosphère de tragédie antique!).
* Rambo (Kotcheff) ●●●○○
Rambo, monstre de guerre surentraîné, retourne au pays. Tout à fait inapte à se réinsérer dans la vie civile, il traîne sa carcasse et ses traumatismes jusque dans une petite ville de province assez inhospitalière qu’il finit par transformer en nouveau Vietnam. Bloc de muscles aux yeux tristes, le vétéran devient une bête traquée dont les humiliations ravivent les instincts vengeurs et destructeurs. Un film d’action assez réussi et plus subtil qu’attendu, qui construit un personnage solide (et bientôt culte) tout en délivrant un message concis et efficace jamais complétement univoque ou simpliste. A l’exception de deux-trois gimmicks d’actionner semés ici et là, l’ensemble reste sobre et bien dosé. Et puis… il y a cette fin… où après avoir saccagé la petite ville de son ennemi autoproclamé, Rambo effondré, recroquevillé et sanglotant, révèle la profondeur de sa dépression nerveuse dans une tirade assez hallucinante. Quand la machine de guerre déréglée redevient un être humain.
* Satyricon (Fellini) ●●○○○
Il y a dans « Satyricon » des images assez magnifiques (surtout quand elles vont vers l’épure), des beautés laides et de la laideur sublimée, ainsi qu’un parfum entêtant de décadence. Il y a dans « Satyricon » une représentation de la Rome Antique singulière et mémorable, quelques segments de pellicule qui impriment durablement notre rétine et notre imaginaire. Il y a dans « Satyricon » des personnages qui errent mais que rien n’arrête, des quêtes existentielles floues, un hédonisme fou. Il y a dans « Satyricon » des fragments et des vides, beaucoup de frustration et de l’ennui aussi. Le film est tout de même fort déconcertant dans son ensemble, inégal et déroutant, parfois pénible. Sans doute trop cartésienne, je retiendrais surtout de ce long voyage sibyllin, proche du trip psychadélique à quelques égards, les récits enchâssés (celui de la veuve, le suicide des patriciens, la légende d’Oenothée…). Le reste m’a semblé un peu assommant.
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