Notez les films d'aujourd'hui

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Grimmy
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Grimmy »

Pour être tombé dessus hier soir (je n'ai regardé que 15 minutes environ) j'ai trouvé la mise en scène complétement neurasthénique. Champ contrechamp, plans fixes, gros plans, c'est mou c'est mou, c'est triste, il n'y a pas beaucoup de cinéma la dedans. C'est vraiment tout un pan du cinéma français qui a très mal vieilli. Les Rouffio, Francis Girod et compagnie, c'est juste plus possible aujourd'hui. On dirait des téléfilms.
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cinéfile
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par cinéfile »

Souvenir lointain du Rouffio, mais globalement même sentiment que Grimmy... Le film m'avait paru très mal foutu, lourd, académique (très "dossier de l'écran") etc

Il faut dire que la VHS familiale - enregistrement parental datant des années 1980 - comprenait ce film-ci et Les Choses de la vie (que j'avais découvert au même moment). Autant dire que le monde entre les deux films n'avait sûrement pas arrangé ma réception de La Passante du Sans-souci.
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Zelda Zonk
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Zelda Zonk »

Revenge (Coralie Fargeat - 2018)

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Un Rape & Revenge appliqué dans sa mise en scène et léché dans son traitement de l'image, mais qui souffre d'un scénario complètement invraisemblable et en même temps ultra-balisé, sans réelle surprise dans son déroulé. Par ailleurs, la caractérisation des mâles en rut, outrée et sans aucune nuance, finit par desservir le propos féministe. Enfin, la surenchère dans l'hémoglobine et l'ultra-violence paraît souvent gratuite et programmée, comme s'il fallait absolument remplir le cahier des charges des codes du film de genre. Dommage, car Coralie Fargeat n'est pas dénuée de talent, loin de là, et démontre un vrai savoir-faire dans la composition des plans et le montage. Mais bon sang, qui peut sérieusement croire à une histoire pareille, truffée d'énormités de bout en bout ?!?

4/10
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Lohmann
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Lohmann »

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Petite contextualisation avant de parler du film lui-même. Je ne connaissais bien évidemment pas du tout ces deux réalisateurs, mais au travers d'une excellente interview de C.W. Winter j'ai appris qu'Anders Edström était un nom connu dans le monde de la photographie, réputé pour son esthétique brute, qui à rebours des photographes de mode classiques fige l'entre-deux, ces moments d'attentes ou ces petits accidents auquel nul autre ne s'intéresse. Cette esthétique infuse évidemment en profondeur Les Travaux et le Jours, projet sur lequel le duo planchait depuis une dizaine d'année, qui se sont totalement immergés dans le bassin de Shiotani afin de dépasser un regard qui pourrait se contenter de capter les faits et les lieux saillants comme pourrait le faire n'importe quel touriste, pour s'attacher aux petits rien qui rythme la vie de cette femme qui pendant une année passe l'essentiel de son temps à cultiver son jardin et accompagner son mari à l’hôpital. Autre détail d'importance, l'actrice principale (Tayoko Shiojiri) joue en fait son propre rôle (il s'agit de la belle-mère d'Anders Edström), elle y fait les mêmes gestes du quotidien que ceux de sa vie réelle et est amenée à revivre les moments charnières qui ont été les siens lors de cette année qui aura vu son mari disparaître. La frontière entre documentaire et fiction est donc extrêmement poreuse, un peu à la manière de cet autre grand film sorti plus tôt cette année qu'est Qui à part nous ? de Fernando Trueba.

J'imagine que l'on pourrait rapprocher ce film de deux autres sortis récemment, Il Bucco et Memoria. Deux films emblématiques du Slow cinéma qui laisse au temps toute son importance, et dont le son est une donnée essentielle. Les Travaux et les Jours n'a rien à leur envier sur ce point (et encore moins sur d'autres), qui ouvre chacun de ces chapitres (il y en a 5) par un écran noir, d'une durée variable, où seuls les sons de la nature viennent habiter la salle. C'est au début déconcertant (j'ai forcément vu un spectateur se ruer au dehors de la salle au début du Chapitre 1, s'empressant j'imagine d'aller signaler qu'il y devait y avoir un problème avec la projection), mais on s'y fait très rapidement, et le mieux est alors de fermer les yeux et de glisser dans cette atmosphère sonore riche de croassement et autre stridulation, nous révélant un monde que l'activité frénétique de l'homme finit par oublier. C'est en quelque sorte un concentré du projet de Winter et Edström : le son prime sur l'image, et le cadre à la présence de l'homme en son sein. Ils inversent le temps d'une journée de labeur (les 8 heures que constituent le film) les rapports usuels au cinéma, le cadre (géographique et cinématographique) préexiste et c'est à l'humain de venir s'y insérer, le montage remplace le scénario (qui est pour ainsi dire totalement inexistant ici), la dramaturgie est réduite à sa portion la plus congrue (et essentiellement dans la 3ème partie) les scènes étant pour l'essentielles de longues captation de discussions alcoolisées, de rencontres de voisinage et d'heures passées à bêcher et sarcler.

L'absence de dramaturgie est probablement ce qui fait que le film est particulièrement déroutant, cotonneux, on ne sait pas trop par quel bout le prendre, ce qui en fait quelque chose digne d'intérêt. C'est en fait le temps long du film qui vient y apporter une réponse. Même avec des yeux à demi ouverts, on finit progressivement par s'immerger dans la vie de Tayoko Shiojiri, à vivre à son rythme, à habiter sa maison et in fine à observer l'indiscernable : l’âpreté de la vie de cultivateur (quand bien même la taille du lopin de terre est plutôt modeste), l'évolution de la société japonaise et la perte (du moins le relâchement) des liens de voisinage, et surtout la difficile condition de la femme. Les moments les plus beaux sont sûrement ceux où Tayoko converse avec son mari (conscient ou non, ce qui ne change pas grand chose vu qu'il ne parle jamais), revenant sur leur parcours, elle qui dû sacrifier sa carrière parce qu'elle était née avec le mauvais sexe, eux qui ont appris à s'entendre et s'aimer malgré un début de relation houleux, la lente agonie de Junji-san et la dévotion de Tayoko à ses côtés. Mais la beauté du film ne se circonscrit pas qu'à cela, tant il fourmille de trésors de mise en scène disséminés ça et là, tel ce moment où Tayoko déambule dans sa maison faisant glisser un à un les panneaux tel un puzzle coulissant, découvrant une maîtrise dans la captation de la compartimentation d'un espace intérieur rappelant le meilleur d'un Mizoguchi - séquence qui m'a fait penser aux Amants crucifiés.

5/6
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Profondo Rosso »

Fièvre à Columbus University de John Singleton (1995)

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Des jeunes gens de toutes régions, races, et origines sociales intègrent l'université de Columbus. Des problèmes pour chacun apparaissent, et ils doivent faire face à un sentiment de doute...

Avant de rentrer dans le rang et de devenir un faiseur plus anonyme dans les années 2000, John Singleton fut un des réalisateurs américains les plus prometteurs des années 90. Cela se manifestait par des œuvres engagées traitant de la condition de la communauté afro-américaine dans les ghettos de Los Angeles. Le film de la révélation fut Boyz N the Hood (1991) qui valut à Singleton d’être le plus jeune cinéaste à être nominé aux Oscars (et le premier afro-américain à l’être), suivit de Poetic Justice (1993). Fièvre à Colombus Univerty poursuit cette veine sociale mais élargit le spectre en passant des bas-fonds de LA au cadre prestigieux de l’université et traiter dans son ensemble les maux de la société américaine. John Singleton au scénario s’inspire grandement de sa propre expérience à l'université de Californie du Sud.

Le scénario dresse un récit choral où l’on va suivre différents personnages de milieux sociaux, sexe, orientation sexuelle différentes et observer les motifs de rapprochement mais avant tout de division de ce microcosme. Singleton a parfois la main un peu lourde dans sa caractérisation mais cela fixe immédiatement chaque protagoniste, nous permet d’identifier d’où il vient et anticiper comment il se perdra. La jeune oie blanche Kristen (Kristy Swanson) laisse deviner sa candeur par le seul fait de disposer les photos de sa famille dans sa chambre étudiante, la solitude et le nihilisme latent de Remy (Michael Rapaport) se ressent par la panoplie de petit wasp white-trash dans les posters de sa chambre et la bande-son durant son installation, metal et Beastie Boys à tue-tête. Singleton a la main moins lourde pour la communauté noire avec Malik (Omar Epps) certes sportif nonchalant et arrogant, mais qui semble vouloir dépasser cela, ou encore Fudge (Ice Cube) prototype de l’étudiant à conscience politique dont l’intelligence sert un certain communautarisme.

Singleton montre comment des désagréments ordinaires d’un quotidien étudiant (une fraternité trop fêtarde dérangeant les autres) devient la voute d’une frustration et d’un ressentiment entretenus d’un côté par les origines sociales – Remy échappé de son Idaho sans répondant face à ses voisins noirs fêtards, Fudge ravi d’intimider ce petit blanc impressionnable – mais aussi par l’environnement de la fac reflet de la stigmatisation inhérente à la société américaine – les agents de police plus prompt à contrôler et asticoter les étudiants noirs. L’aspect intéressant est de prolonger cette problématique au sexisme avec une Kristen qui va subir une agression sexuelle dans une quasi-indifférence. L’institution et les codes sociaux de la fac se montre incapables de résoudre ces conflits que les personnages vont devoir régler par eux même. Cela se fait à petite échelle – un petit tabassage en règle pour le violeur – mais ne résout rien, ce mécanisme « d’autodéfense » prenant de plus en plus d’ampleur jusqu’au drame final.

Devant l’impuissance de l’institution, chaque communauté se replie vers ses semblables, pour le meilleur (Kristen se liant à la communauté féministe de la fac), pour le pire (Remy rejoignant un groupe de néonazi et suprématistes blanc) et parfois un peu des deux (les noirs politisés finissant par voir en tout blanc un ennemi potentiel sans distinction). Le spectateur européen ou français pourra voir quelques grossiers raccourcis et simplismes dans certaines situations aberrantes (le climax où la police laisse échapper l’assassin néonazi pour perdre du temps à tabasser un noir), mais qui sont finalement le triste reflet d’une réalité américaine des années 90 et encore vivace comme le montre l’actualité récente. Le problème est de ne s’arrêter qu’à cette condition sociale sans complètement faire exister les personnages. Ainsi on comprend que c’est une difficulté à se faire des amis, une maladresse liée à l’éducation violent de son père qui rend Remy si perméable à l’idéologie raciste, mais Singleton reste en surface et laisse croire que seuls les petits désagréments quotidiens causent sa bascule. De même l’engagement féministe de Kristen est très superficiel, tout comme sa bisexualité (Jennifer Connelly personnage prétexte à ces deux éléments intime et sociaux) alors que c’était une thématique originale dans un film grand public américain des années 90. La charismatique figure du professeur Phipps sert à dresser un trait d’union dans tout cela mais malgré la belle prestation de Laurence Fishburne, cela passe par de lourds dialogues sentencieux.

Singleton mets cependant tous les extrêmes dos à dos dans le culte du virilisme entretenu par la communauté noire et la notion de gang, les néonazi et leur crainte d’un « grand remplacement », et de manière générale les hommes avec la violence faite aux femmes. Chaque adversité doit se résoudre par la violence jusqu’au point de non-retour final visionnaire du drame de Columbine. Singleton parvient à l’exprimer par une belle idée formelle à la fin avec cette vue en plongée sur des escaliers que le néonazi descend après avoir commis l’irréparable et qu’un personnage noir monte pour l’en punir, les deux silhouettes étant réunies dans la même image. A l'inverse les deux personnages ayant signifié cette division dans la scène d'ouverture témoignent d'un timide rapprochement lors de l'épilogue, synonyme d'espoir et de moins d'incompréhension pour la suite. Malgré quelques gros sabots donc, une œuvre très intéressante, une véritable photographie d’une époque, alors qu’aujourd’hui les clivages d’alors se sont renforcés et que d’autres sont apparus. 4,5/6
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Flol
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Flol »

Miami Blues (George Armitage - 1990)

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J'ai eu l'impression de voir le film le plus cool du monde, avec le personnage le plus cool du monde. Comment ai-je pu ne jamais avoir entendu parler de ce film avant l'an 2023 ?
Parce que ce Miami Blues a tout du petit film culte qui mérite d'être connu, avec son humour noir limite méchant, ses ruptures de tons et ses petites bizarreries scénaristiques (Fred Ward et son dentier, par exemple) qui lui donnent des airs de néo-polar pré-Tarantino (tout en évoquant en même temps les Coen).
Et alors Alec Baldwin. Qu'est-ce qui s'est passé ? Seulement 2 ans après Beetlejuice, où il incarnait un type gentil et parfaitement lambda, il est ici "Junior", un malandrin au culot monstre, qui arnaque à peu près toutes les personnes croisant son chemin, se fait passer pour un flic pour braquer des voleurs, en a strictement rien à branler de tout...bref, il est extrêmement cool. Et c'est assez surprenant de retrouver Baldwin dans ce registre-là. En tout cas, perso je ne m'y attendais pas.

Et comme tout bon polar des 90's, le casting a de la gueule : en plus de Baldwin et Ward, on retrouve Jennifer Jason Leigh et un accent redneck incroyable, Charles Napier, Obba Babatundé (toujours l'un des meilleurs patronymes du monde), Paul Gleason et aussi un cameo de Martine Beswick (ancienne Bond Girl, passée aussi par la Hammer dans les années 70).

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Creed II (Steven Caple Jr. - 2018)

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Non décidément, je n'y arrive pas avec ce personnage. Ses doutes, ses peurs, ses désirs...j'en ai rien à battre. Je ne vois qu'un jeune mec arrogant qui se la pète, avec sa nana artiste un poil plus intéressante même si elle n'est qu'une sorte de sous-Janelle Monáe qui aurait surabusé de l'autotune (ça doit être lié à la surdité de son personnage), bref un mec auquel je n'ai absolument pas envie de m'intéresser.
Pourtant, on sent que le réalisateur et les scénaristes (dont Stallone, pourtant) cherchent à tout prix à l'iconiser, quitte à faire n'importe quoi (la séquence obligatoire de montage est tout sauf galvanisante), y compris musicalement : vouloir nous faire vibrer en utilisant le thème de Rocky, c'est non seulement inopérant mais c'est aussi et surtout complètement hors-sujet.
Et quand tu te surprends à vouloir que le perso principal donnant son titre au film soit le perdant du combat final, c'est bien qu'il y a un problème quelque part. Le film aurait en fait dû s'appeler Drago et s'intéresser davantage au rapport père/fils côté russe, dont l'arc narratif est infiniment plus touchant et impliquant.

Pas sûr que je tente le 3ème un jour, surtout si c'est Michael B. Jordan himself (histoire de se servir encore un peu plus la soupe) qui s'y colle.
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Alexandre Angel
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Alexandre Angel »

Flol a écrit : 16 mai 23, 18:33 Image
(Fred Ward et son dentier, par exemple)
Sur la photo, j'ai cru que c'était John Leguizamo j'te jure
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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AtCloseRange
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par AtCloseRange »

Flol a écrit : 16 mai 23, 18:33 Miami Blues (George Armitage - 1990)

Image

J'ai eu l'impression de voir le film le plus cool du monde, avec le personnage le plus cool du monde. Comment ai-je pu ne jamais avoir entendu parler de ce film avant l'an 2023 ?
Parce que ce Miami Blues a tout du petit film culte qui mérite d'être connu, avec son humour noir limite méchant, ses ruptures de tons et ses petites bizarreries scénaristiques (Fred Ward et son dentier, par exemple) qui lui donnent des airs de néo-polar pré-Tarantino (tout en évoquant en même temps les Coen).
Et alors Alec Baldwin. Qu'est-ce qui s'est passé ? Seulement 2 ans après Beetlejuice, où il incarnait un type gentil et parfaitement lambda, il est ici "Junior", un malandrin au culot monstre, qui arnaque à peu près toutes les personnes croisant son chemin, se fait passer pour un flic pour braquer des voleurs, en a strictement rien à branler de tout...bref, il est extrêmement cool. Et c'est assez surprenant de retrouver Baldwin dans ce registre-là. En tout cas, perso je ne m'y attendais pas.

Et comme tout bon polar des 90's, le casting a de la gueule : en plus de Baldwin et Ward, on retrouve Jennifer Jason Leigh et un accent redneck incroyable, Charles Napier, Obba Babatundé (toujours l'un des meilleurs patronymes du monde), Paul Gleason et aussi un cameo de Martine Beswick (ancienne Bond Girl, passée aussi par la Hammer dans les années 70).
Tu n'avais jamais entendu Tarantino parler de la scène des doigts?
En tout cas, après Ricochet, j'ai l'impression que tu nous fais un ninetiesite aigue qui fait de sympathiques produits de leur époque des films super cools en 2023.
ça dit sans doute plus de chose sur l'état de la série B aujourd'hui qu'autre chose.
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par The Eye Of Doom »

Flol a écrit : 16 mai 23, 18:33 Image
(Fred Ward et son dentier, par exemple)
Il est fort probable que le film doive beaucoup à l’excellent roman de Charles Willeford dont il est tiré, et dont Willeford assurera lui même l’adaptation.
Pas vu pour ma part.
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Flol
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Flol »

AtCloseRange a écrit : 16 mai 23, 19:21 Tu n'avais jamais entendu Tarantino parler de la scène des doigts?
Etrangement, non.
AtCloseRange a écrit : 16 mai 23, 19:21 En tout cas, après Ricochet, j'ai l'impression que tu nous fais un ninetiesite aigue qui fait de sympathiques produits de leur époque des films super cools en 2023.
ça dit sans doute plus de chose sur l'état de la série B aujourd'hui qu'autre chose.
J'ai le plus sincèrement du monde eu l'impression de me retrouver face à d'authentiques bons films, 90's ou pas, découvertes tardives ou pas. Evidemment, j'aurais pu rajouter pour chacun de ces titres "Ahlala, on n'en fait définitivement plus des comme ça", ce qui est vrai ; mais au-delà de ça, j'estime réellement que Miami Blues et Ricochet, c'est de la série B de très bonne facture.
J'y ai vu de la prise de risques, des ruptures de tons, des idées de mise en scène...vu de 2023 effectivement ça fait tout drôle, mais je ne peux pas croire que tout le monde soit passé à côté de ça il y a 30 ans.
Alors j'en fais peut-être un peu trop (même si je n'en ai pas l'impression, si je me fie au plaisir très premier degré que j'ai pris devant chacun de ces films), c'est mon côté enjoué et enthousiaste qui veut ça. Je vois parfois de bons films, j'en suis moi-même surpris et j'ai envie d'en parler par ici. Quitte à ce que certains, les découvrant suite à mes petites reviews, soient déçus par ce qu'ils ont vu. J'en suis désolé.

Mais je peux très bien parler de Adèle Haenel et Johnny Depp, si tu préfères.
Dernière modification par Flol le 18 mai 23, 23:18, modifié 2 fois.
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par manuma »

Flol a écrit : 17 mai 23, 14:46 Image

J'y ai vu de la prise de risques, des ruptures de tons, des idées de mise en scène...vu de 2023 effectivement ça fait tout drôle, mais je ne peux pas croire que tout le monde soit passé à côté de ça il y a 30 ans.
Loupé au ciné à l'époque (sorti au beau milieu de l'été, de mémoire), découvert sur Canal+ et fan de la première heure, de mon côté. Le casting, l'ambiance décalée, la réalisation à la cool, l'empreinte de Jonathan Demme (producteur), l'enrobage musicale (Gary Chang et le "Spirit in the sky" de Norman Greenbaum, qu'il me semblait entendre pour la première fois dans un film). Revu 3 ou 4 fois depuis, avec le même plaisir. Sinon, j'aurais juré que Kevin avait ouvert un topic George Armitage...
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Profondo Rosso »

La Proie d'une ombre de David Bruckner (2021)

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Beth vient récemment de perdre son mari. Elle vit désormais dans la maison qu'il avait construite pour eux, tout près d'un lac. Beth commence à avoir des visions d'une étrange présence. Elle va alors découvrir les secrets de son défunt époux.

Au bout d'une heure de film, un ami recommande à l'héroïne Beth (Rebecca Hall) de trouver un autre moyen de combler le vide que provoque en elle la douleur du suicide de son mari. C'est la verbalisation d'un sentiment qui court depuis le début du récit, dans les thèmes et l'esthétique du film. Beth ressent une douleur profonde face à la disparition aussi violente qu'inattendue et inexplicable de son époux, et David Bruckner traduit cette absence par le sentiment de deuil et d'autres éléments plus étranges. Les compositions de plan montrant Beth déambuler dans sa vaste maison où elle est désormais seule laissent constamment un espace vide traduisant cette absence, en divisant l'image en deux, en réduisant la silhouette du personnage. L'autre vide à combler est celui du mystère du geste fatal du mari, et de la double vie étrange que découvre Beth dans ses affaires. Le film creuse le sillon du drame psychologique avec une Rebecca Hall à la dérive et seule à l'écran la plupart du temps, passant par l'abattement, le désespoir et la colère. Progressivement ce vide à combler s'avère reposer sur un argument surnaturel, ou alors est-ce la santé mentale de Beth qui vacille ? Le doute s'immisce et les vides à combler prennent un tour plus inquiétant, façonnant un monde et espace double de plus en plus cauchemardesque. Les rêves de Beth dressent un envers halluciné et glaçant de son quotidien, une silhouette menaçante semble se dessiner dans les interstices de la maison en jouant sur l'ambiguïté entre le fantastique et l'illusion d'optique. Le film souffre tout de même de longueurs en travaillant essentiellement l'ambiance et la mise en place mais la récompense est là avec un climax haletant quand vient l'heure des explications. Onirisme, récit de possession ou de fantômes, cauchemar dépressif, toutes les interprétations restent possibles dans une conclusion osant la bascule dans la pure imagerie baroque. La photo de Elisha Christian, le décor glissant sont bien servi par la mise en scène efficace de David Bruckner mais c'est bien l'impressionnante prestation de Rebecca Hall qui porte l'émotion de l'ensemble. Un joli film fantastique contemporain. 4,5/6
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Flol
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Message par Flol »

Quelques trucs que j'ai vus récemment :

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Full Contact (Ringo Lam - 1992)

Qu'y a-t-il de plus cool que Chow Yun-Fat chevauchant sa moto et s'éloignant comme un boss sous la pluie et en pleine nuit, le tout dans un éclairage bleuté hyper chiadé ? Pas grand-chose...si ce n'est tout ce qui précède ce plan final qui déboite, dans un film qui déboite tout autant !

Un pur polar HK nihiliste, sans concession (dès la séquence de braquage inaugurale, j'étais estomaqué par tant de violence) et plein de twists narratifs : tu penses tout d'abord mater un film sur une bande de truands, avant de virer au film de mafia, pour finalement se transformer en pur revenge-movie avec un Chow Yun-Fat ultra vénère.
Et on le comprend, après tout les saletés qu'on lui a fait subir - notamment le fait que son pote (le toujours aussi crapoteux Anthony Wong) lui pique sa meuf (la pourtant sublime Ann Bridgewater).
On a même droit à une séquence de montage le voyant préparer sa vengeance, à base d'entrainement, de remise en forme, de maniement d'armes...mais aussi de petit chien trop mignon (un bulldog français, si vous voulez tout savoir) que notre héros shampouine affectueusement - à partir de ce moment-là, je savais que j'étais prêt à le suivre jusqu'au bout du monde, ce perso.
Et puis il y a la mise en scène de Ringo Lam, toujours aussi percutante et inventive, notamment lorsqu'il s'agit de filmer les gunfights et qu'il a comme idée de le faire du point de vue des balles (!?). Jusqu'à un final grandiloquent, où des bagnoles explosent à la chaîne dans de joyeuses gerbes de feu et qu'une punchline extraordinaire ("Va te branler en enfer !") ne vienne vriller ma tête, pour me hanter encore aujourd'hui 24h après sa découverte.

Un film de dingue, du concentré de bonheur.

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Bumblebee (Travis Knight - 2018)

Visiblement, Travis Knight et la personne en charge du scénario sont très fans de The Iron Giant (comment leur en vouloir). Et de E.T. (comment leur en vouloir). Et de How to Train Your Dragon (comment leur en vouloir). Et de Mighty Joe Young* (comment leur en vouloir). Et de Mac et moi (comment leur en vou.....ah ben là si).

Bref. C'est complètement sur des rails du début à la fin, la vibe 80's est un poil forcée (il n'y a strictement aucune raison scénaristique pour justifier le fait que l'action se passe en 1987), mais il y a un ton indéniablement léger et optimiste, rappelant bien sûr les prods Amblin remises au goût du jour par ce put*** de Stranger Things...qui doit finalement être la seule et unique raison pour laquelle ce film se situe en 1987 !
Mais sa plus grande qualité est de nous faire oublier les 4 derniers films Transformers réalisés par Bay, tant Travis Knight parvient ici à retrouver un juste équilibre entre l'action, l'émotion et l'aventure. Alors c'est tellement prévisible que j'ai par moments eu du mal à m'intéresser pleinement à ce que je voyais, mais j'applaudis la volonté de revenir aux bases, avec un divertissement familial bien foutu (les CGI sont à 99% excellents) et bien dosé.
Et mention spéciale à Hailee Steinfeld, qui grandit décidément très bien.

*je parle de la version de 1998, évidemment.

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The Wrath of Becky ( - 2023)

Si je devais décrire ce film avec une image, ce serait probablement avec quelque chose comme ça.

Ça commence pas trop mal (même s'il faut se taper une voix-off surexplicative et extrêmement ringarde à base de "ça, c'est moi !" suivi d'un freeze frame, soit le type de gimmicks officiellement interdit depuis 2003), avant de devenir petit à petit de plus en plus naze, pour finalement se révéler complètement naze.
Hé film : c'est pas parce que tu multiplies les clins d'œil et parce que tu fais de ta gamine de 15 ans une héroïne trop badass (en mode forceur) qui éclate des bonhommes qui font 3 fois son poids, mais qui est tellement badass qu'elle fait ça tranquillement, sans trop se fatiguer, mais en faisant des regards caméra après avoir enlevé ses lunettes de soleil trop badass, que ça fait forcément de toi un film cool. Non, t'es juste pénible en fait.
C'était déjà un peu le cas dans le film précédent, mais c'est encore pire dans celui-là - qui a donc le culot de remplacer Kevin James, dans un incroyable contre-emploi qui fera date dans l'histoire du cinéma, par...Seann William Scott avec une barbe.

Hé film : je crois que je te hais.



Et à bientôt pour de nouvelles chroniques toujours aussi passionnantes. :D
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Message par cinephage »

The Wrath of Becky, effectivement, c'est assez gratigné, comme nanard... Même moi qui surnote tout, je lui avais mis 3,5/10...
Mon avis lors du visionnage :
Film pulsionnel mal torché, qui suit Becky, une ado hargneuse, dans le massacre de MAGA préparant un attentat. La seule vraie surprise est de croiser Seann William Scott dans un pareil nanard...
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films d'aujourd'hui

Message par Profondo Rosso »

Suburbia de Penelope Spheeris (1984)

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Dans une banlieue pavillonnaire américaine, un fugueur d'une quinzaine d'années rencontre une bande de punks qui squattent une vieille maison, échappant ainsi à une vie de famille franchement malsaine ou à un ennui profond. Pendant ce temps là, dans les rues, des hordes de chiens errants agressent les passants. Une milice citoyenne s'organise…


Suburbia est considéré comme une des fictions les plus justes sur le mouvement punk, et de plus s'inscrit parfaitement dans l'observation de la jeunesse américaine white trash au sein de la filmographie de Penelope Spheeris, qui l'abordera sous l'angle du thriller dans l'excellent The Boys Next Door (1985) puis sur le mode potache avec Wayne's World (1992). Penelope Spheeris sait de quoi elle parle puisqu'elle baigne dans ce milieu depuis plusieurs années au moment de réaliser le film. Après ses études de cinéma, elle devient une des pionnières dans la réalisation et production du vidéoclip naissant et côtoie alors toute la scène musicale de l'époque, des gros artistes populaires qu'elle n'affectionne guère à la scène punk à laquelle elle s'identifie totalement. Cela va l'inciter à réaliser The Decline of Western Civilization (1981), un documentaire sur la scène punk de Los Angeles qui faute de distribution conséquente, sera un échec. Elle se dit alors que la fiction est l'angle le plus pertinent pour attirer une audience plus conséquente sur le sujet et écrit le script de Suburbia. Elle va réunir avec difficulté un mince budget de 500 000 dollars, en partie apporté par ce vieux filou de Roger Corman qui voit dans Suburbia un potentiellement lucratif teensploitation plutôt que le manifeste social et culturel voulut par la réalisatrice. Il n'interfèrera pas outre mesure sur le film, si ce n'est par l'exigence d'avoir toutes les dix minutes une scène de sexe et/ou de violence pour satisfaire les attentes du public de cinéma d'exploitation - ce qui n'altère pas le film mais rend certains moments incongrus et superficiels comme la scène d'ouverture semblant échappée d'un film d'horreur. Un autre sujet de discorde sera le choix de Spheeris de tourner avec de vrais punks plutôt que des acteurs, le casting sauvage se faisant dans les clubs ou les files d'attentes de concert.

L'histoire nous fait suivre un groupe de marginaux adolescents et punk se faisant appeler les TR (The Rejected) et vivant en communauté dans une vieille maison abandonnée. Les confidences des uns ou l'aperçu de la vie "d'avant" des autres nous fait comprendre la réalité sordide que certains ont dû fuir (parents violents, pauvreté...) et à quel point les TR constituent un refuge paisible pour eux. L'environnement n'en est pas moins périlleux pour autant, que ce soit l'hostilité de la communauté pavillonnaire environnante qui les rejette mais subit aussi leurs larcins, ou encore la violence même de ce milieu punk. Comme l'explique un dialogue, le terme Suburbia est la fusion des termes suburb (banlieue en anglais) et utopia, la banlieue constituant à l'époque justement l'utopie d'une vie paisible pour la classe moyenne WASP loin du tumulte des centres-villes. Cet idéal est vicié désormais, la crise économique laissant cette population sans emploi et gangrenant ce paradis pavillonnaire avec des pans de quartier à l'abandon et désormais le nid d'un "engeance" urbaine qu'ils ont cru fuir. Les punks issus de milieux défavorisés rejettent cette communauté qui de son côté en fait les bouc-émissaires parfaits de leurs maux. Tout le film développe une lente montée de tension entre les deux, jusqu'à l'explosion de violence finale aux tragiques conséquences.

Le quota sexe/violence, tout racoleur qu'il soit, permet de traduire le danger, l'adrénaline et l'urgence de cette scène punk à travers de furieuses scènes de concert parfaitement servies par le passif de Penelope Spheeris. Sur scène, les apparitions de vrais groupes (D.I., T.S.O.L. et The Vandals) donnent un cachet d'authenticité tandis que dans le public, les inserts sur les looks excentriques des spectateurs, les pogos sauvages et les bagarres nous placent au cœur de l'évènement. Parallèlement à cela, sous l'aspect choral Spheeris capture une mélancolie, le passé douloureux et l'innocence intacte de certains protagonistes - la très belle scène où Sheila lit le conte Hansel et Gretel pour ses amies. Le personnage de Sheila (Jennifer Clay) est par exemple très touchant, jamais remis des abus incestueux de son père, et d'autres traînent avec eux les préjugés de l'époque (l'un ayant fui le foyer car sa mère a épousé un noir, un autre car son père est gay). Cette vie au jour le jour est aussi insouciante que sans issue, le décor insalubre du squat témoignant de cette impasse, lieu de communion mais véritable taudis. Penelope Spheeris partage beaucoup avec ses protagonistes, elle qui perdit son père très jeune et vit défiler les compagnons violents de sa mère toute son adolescence, dans un conflit permanent. On ressent donc une vraie authenticité dans cette caractérisation, d'autant qu'elle pioche certaines anecdotes personnelles qu'elle retranscrit dans le film comme cette jeune fille morte d'overdose dont les amis rapportent le cadavre chez ses parents. Il y a certes un petit côté décousu inhérent aux contraintes économiques du film, mais l'ensemble est vraiment tenu et Penelope Spheeris montrera un versant plus virtuose et formaliste avec The Boys Next Door qui suivra et doté d'un plus gros budget. En l'état un très joli film et le vrai portrait d'un lieu et d'une époque. 4,5/6
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