Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Bavhna
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Bavhna »

G.T.O a écrit :Image

Palme d'or pour Joe. A la lecture du palmarès, on ne pouvait que se réjouir de ce choix - récompenser l'audace, la radicalité, l'expérimentation. 2 heures après visionnage de la chose, c'est à un autre refrain. Une autre histoire, un autre sentiment qui étreint le cœur : celui d'avoir été escroqué. Par un mec malhabile, peu délicat, dénué de scrupule quant à la finalité de son flan arty, d'idée de cadrage, montage, de direction d'acteurs. Oncle Boonmee ,triomphe de l'art ?! Peut-être. Mais la question cardinale reste : est-ce intéressant ? On devrait bannir le critère dit de 'l'Art" pour juger d'une œuvre cinématographique. Alors, est-ce intéressant ? Non. Bien mise en scène : non. Envoutant : bof. Le montage est une catastrophe d'immobilisme. La collision entre le naturalisme plan-plan de Joe et son revêtement fantastique ne produit rien, si ce n'est le rire gêné par tant d'indigence, d'amateurisme, de prétention autour d'un pauvre argument surnaturel. Plus que la jungle thaïlandaise, c'est l'anémie qui étouffe le spectateur et le conduit à la léthargie. A ce compte là que l'on remette à Jean Rollin une palme, plusieurs même. :mrgreen:

PS : Syndrome and a century c'était d'un autre calibre !!! :roll:
Bien vu ! :wink:
Nikita a écrit :
Boubakar a écrit :

Pourquoi ?
Honoré a lui-même déclaré qu'il n'était pas destiné à être montré, ben ne le montre pas alors.
lol ! :P
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Thaddeus
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Thaddeus »

~ SPOILERS INSIDE ~


J’ai vu le film il y a deux jours, je l’ai laissé se décanter un peu avant d’en parler. Mais c’est toujours difficile de mettre des mots sur un cinéma qui, une fois de plus, joue à ce point sur l’indicible, l’infinitésimal, la sensation dans ce qu’elle a de plus intangible.

Oncle Boonmee m’apparaît sans doute comme le film le plus saisissable de son auteur d’un strict point de vue narratif : plusieurs parties assez nettes y enclenchent une logique d’évolution, du moins dans l’expérience des personnages. Bon après, avec Joe, tout est relatif, faut savoir rester bien ouvert des shakras, débrancher la logique événementielle et cueillir le tempo.
Car on y retrouve cette faculté assez unique à y capter les bruissements du monde, à ancrer le quotidien le plus prosaïque dans une forme de vibrato mystique qu’on ne trouve absolument nulle par ailleurs. De ce point de vue, Syndromes and a Century est sans doute le sommet de sa carrière. Ce cocon extatique, baigné de lumières iridescentes, de douces baignades et de brises dans les feuillages y était traversé par des envolées de pur mystère (l’enchaînement de travellings symétriques qui coupait le film en deux, ou encore l’extraordinaire plan du tuyau d’aspiration qui aspirait soudainement le récit dans une sourde angoisse).
Ce dernier film se place dans son sillage, sans pour autant retrouver tout à fait, à mes yeux, sa puissance d’évocation. Oui, S&AC reste pour moi un cran au-dessus, et peut-être Tropical Malady aussi d’ailleurs... Ce qui ne porte pas trop à conséquence vu ce que je vais dire ensuite.

Car en effet, le film offre de très grands moments de cinéma. J’y ai retrouvé ces impressions de douce plénitude, consistant à capter la marche ultrasensible du monde. Il y a sans doute un rythme à saisir, une respiration à trouver, et je dis pas que c’est évident. Mais lorsqu’on la tient, alors l'orchidée fait son oeuvre et infuse les sens. Discussions tranquilles, marches ensoleillées sous les arbres, tests gustatifs de miel arômé... Difficile de bâtir un film sur ces plaisirs simples : Weerasethakul y parvient. Et puis, comme des percées chamaniques, des trouées surnaturelles qui ponctuent le métrage comme autant d’envolées poétiques, en s'inscrivant toujours dans l'ordre "normal" des choses.
En premier lieu, la longue séquence du dîner, où le merveilleux s’invite à la table avec une évidence enchanteresse. Le bourdonnement sourd des insectes nocturnes, quelques plans très "weerasethakuliens" sur les énormes générateurs électriques en néons qui illuminent la nuit (il adore ça, les néons dans la nuit, Api), le grondement kinétique de la bande-son, les deux yeux rouges qui surgissent et montent lentement l’escalier, puis le phrasé extrêmement calme du fils devenu singe-fantôme qui ouvre un flash-back envoûtant : découverte fascinée d'une photo, apparitions forestières, soleil couchant dans les branches. En quelques plans majestueux, le sorcier Apichatpong fait très, très fort, le film s’envole, et on comprend en cinq sec pourquoi il a raflé la Palme d’Or.
Des moments comme ça, il y en aura d’autres. Lorsque, vers la fin du film, on suit l’oncle Boonmee et ses proches s’aventurer dans la grotte originelle, le film touche au sublime. Faculté incroyable à remonter comme aux origines du monde. Le silence, le noir, quelques poissons archaïques vivotant dans une mare, impromptument dérangées par les visiteurs. Et en guise de voûte céleste, des pierres brillantes incrustées dans la roche, que la lumière de la torche transforme en figuration de l’univers. A cet instant, on est à l’exact point de rencontre de la fin de Tropical Malady, lorsque le soldat fait face au tigre dans une forêt nocturne de fin du monde, et que le film semble arriver au bout du bout, à la fin des temps. Mais ici, à l’aube, tandis que la lumière du jour découpe dans l’obscurité les jambes du corps mort de Boonmee et le réveil un peu saoûl de tante Jen, qui semble se réveiller d’un sommeil millénaire, Weerasathekul filme une nouvelle naissance (la métaphore de l'utérus est clairement énoncée est voix off). En contre-plongée, le jeune homme escalade l’ouverture de la grotte, figurant peut-être les prémices de l’évolution.
Le dîner, la grotte : grands moments de sidération hypnotique.

J’ai sans doute été moins emporté par quelques autres séquences (le montage-photo des adolescents-soldats, qui m’a un peu cassé le trip, ou encore la dernière partie, totalement cohérente mais moins forte à mes yeux). Mais bon, le cinéma de Weerasethakul est ainsi, sans doute : on flotte souvent tellement haut que lorsque parfois ça se dégonfle, on le sent passer davantage. De la même manière, tout n’est pas forcément à ma portée, notamment d’un point de vue spirituel. Pas difficile d’y déceler un bagage profondément oriental, et je n’ai sans doute pas toutes les clés en main. Mais dans l’ensemble, j’y ai lu une très belle fable sur la passage de l’autre côté, la relation des vivants et des morts, qui ne se départit jamais d’une sourde inquiétude (l’oncle Boonmee a peur comme au tant de ses exposés scolaires) mais invite à la confiance, à la magie, au voyage. Il y a quelque chose de profondément serein dans cette valse des hommes et des animaux, du présent et du passé, du concret et de l’abstrait. C’est assez unique quand même… Très belle expérience, et sans doute un film qui restera parmi les plus marquants de l’année.

Beau geste avisé de la part de Jury cannois, et vivement la semaine prochaine pour le film de Xavier Beauvois !
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G.T.O
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par G.T.O »

Belle critique Stark !!! :wink: Vraiment, tu donnes envie ! Une critique qui cerne bien son objet : d'un film hautement volatile. Quel dommage qu'il soit aussi mal réalisé... Et puis le recours désormais rédhibitoire de la narration avec charpente apparente, de l'écart, de la discontinuité, devient une facilite... A croire que c'est precisement de cet écart entre des scènes hétérogènes que provient l'interet -relatif - dudit film...
Joe Wilson
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Joe Wilson »

J'ai perçu Oncle Boonmee... comme un aboutissement pour Weerasethakul, poursuivant le chemin tracé par ses précédents films. Mais la sensation de plénitude et les fulgurances poétiques m'ont semblé ici plus denses et plus tenaces.
Le travail sur le son me laisse particulièrement admiratif. Dès l'ouverture, il y a l'impression d'être absorbé par un univers, et immergé dans un ailleurs offrant tant de perspectives de liberté. Les bruitages insaisissables, le souffle d'une respiration, un silence reflétant l'angoisse ou la sérénité...autant d'instants de vie reflétant des émotions contrastées, dans l'inquiétude ou l'apaisement.
L'obsession de l'obscurité est également source de mystère et de fascination. Que ce soit par la magie du conte, l'évidence d'un rêve ou l'éternité d'un souvenir, l'ombre semble suspendre le temps, révèle Boonmee à lui-même dans sa confrontation au passé. Weerasethakul évoque alors une lucidité qui communique la nécessité d'un émerveillement.
Et dans sa continuité, le rythme de la mise en scène exprime une torpeur délicate, d'une douceur infinie. Les échanges du quotidien sont aussi indispensables que les racines de ce périple intime, transcendant la persistance d'une mémoire face à la disparition.
Comme fil conducteur, l''attachement du cinéaste à la médecine se manifeste avec beaucoup de sensibilité. C'est le témoignage d'une attention et d'une ouverture à l'autre, jusque dans cette bouleversante étreinte entre Boonmee et sa femme. Si Weerasethakul demeure lié à la culture et l'histoire thailandaise (l'image des enfants-soldats, parce que liée à la séquence la plus troublée du récit, est remarquablement pertinente), il parvient à greffer cette conscience à sa démarche artistique. Et par cette voie, Oncle Boonmee... trouve une très belle cohérence.
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monk
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par monk »

très belle surprise pour moi. premier film de Joe en ce qui me concerne, et j'avais un peu peur du coté "arty", de l'enscencement des inroks etc. au final j'ai trouvé le film honnête - c'est à dire réalisé avec honnêteté et sincérité - touchant, fort réussi. les scènes du repas et de la grotte sont envoutantes au plus haut point, inoubliables ! les apparitions des singes-fantomes sont exceptionnelles, bien plus fortes et réussies que ce à quoi je m'attendais. le son a une importance primordiale, l'environnement et les drones ont une présence réellement physique, immergeant totalement le spectateur (qui veut bien s'y laiser prendre :wink: ) dans le film.
comme pour joe wilson et stark, une très belle expérience - car il ne s'agit pas d'avoir un film juste à regarder et à comprendre, il s'agit pleinement d'un film à (re)sentir avant tout - et sans doute un des films les plus marquants de cette année.
Beref
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Beref »

Oui, à mon avis, le passage de la grotte constitue un sommet d'intensité comme on en a pas vu depuis bien longtemps !
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Mama Grande!
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Mama Grande! »

Etrange sensation que de voir un film comme celui-ci dans la grande salle de l'UGC des Halles. Mais à ma grande surprise peu de spectateurs sont partis avant la fin.

Pour ce qui est du film, Weerasetakhul est égal à lui-même: pour qui a apprécié ses précédentes oeuvres, il n'y aura pas de déception. Toujours, cet univers et ce style unique, qui répond à ses propres critères, qui se fiche trop du qu'en dira-t-on pour que l'on puisse le qualifier de prétentieux. Tropical Malady suivait une ligne relativement "classique" (pour qui a vu Mulholland Drive précisons :mrgreen: ), l'originalité venait du mélange entre chronique amoureuse fleur bleue et fantastique de série Z. Syndromes and a century, dans mes souvenirs, ne cherchait pas tellement à dérouter, même s'il laissait transparaitre des soupçons de fantastique. Mais dans sa dernière oeuvre, il laisse libre cours à la narration. Mélange de chronique sociale et familiale, de légendes thaïlandaises, de fantastique, de SF...une sorte de patchwork qui trouve son unité dans le ton et les personnages. Pour ma part, sans que l'envoutement soit aussi constant que dans les autres, j'ai énormément apprécié. Car il y a toujours l'essentiel, ce qui fait le sel de son cinéma: la liberté de ton et la convivialité. Les scènes où il ne se passe rien d'autre que des discussions banales sur une terrasse ou dans un champ sont je trouve d'une douceur et d'un apaisement communicatifs, qui empêchent son cinéma de tomber dans le conceptuel froid et agaçant (même si beaucoup penseront le contraire). Je ne vais pas nier qu'à un moment j'ai senti quelques longueurs, mais elles sont vite rattrapées par des moments de toute beauté, comme la métamorphose, le passage de la grotte et tout ce qui suit.

Weerasetakhul est toujours une bouffée d'air frais, une voix qui ne ressemble à aucune autre. De ceux qui provoquent et interrogent le spectateur, remettent en question ses propres critères. Ce n'est pas pour autant mon cinéaste contemporain préféré, mais à mon sens, il s'agit d'un grand.
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Re: Oncle Boonmee ( Apichatpong Weerasethakul , 2010)

Message par Blue »

G.T.O a écrit :Quel dommage qu'il soit aussi mal réalisé...
Je vois deux grandes qualités cinématographiques à ce film :
- La réussite des scènes de nuit, du point de vue de la photo
- Le travail sur le son, hypnotisant, notamment dans les passages de jungle (mais OK, on a vu ça en mieux dans Tropical Malady)
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tenia
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par tenia »

Vu hier après midi.

Je ne m'expliquerai pas complètement sur le sujet, car je pense qu'il vaut mieux que je laisse décanter.

Mais c'était très beau, et en même temps très froid. A l'exception d'une ou 2 scènes, je n'ai pas ressenti grand chose. C'est esthète dans l'épure, c'est assez décalé et en même temps en plans fixes 99% du temps. On dirait Ozu qui rencontre Lynch.

Mais ça se permet des digressions assez opaques qui rendent l'ensemble trop arty, comme si c'était fait exprès, dans la surenchère d'images-métaphores (enfin, je suppose, parce que 2 minutes dans de l'eau qui bulle...).

Donc ça souffle le chaud et le froid, c'est étiré au possible, et puis, on sort tout de même en se demandant où tout cela voulait en venir, pour ce qui n'est tout de même rien de plus qu'un homme face à la mort.

Si ça me reste dans la tête, ce sera bon signe. Sinon, il est probable que ce soit vite oublié.

Par contre, la pop-rock-FM pré-générique, c'était obligé ?
Nan parce qu'à moins qu'il y ait des paroles rapportant au film (j'avais pas de sous-titres pour la chanson, et comme je ne parle pas (encore) thailandais :mrgreen: ), ça m'a un peu ultra choqué. Après 2h de rivières qui coulent et de cascades qui tombent, faut dire... :mrgreen:
Beref
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par Beref »

Petit papier...

Elle a fait du bruit, cette Palme d'Or. Qu'importe ; le cinéaste thaïlandais continue de filmer l'étrangeté du monde, sa beauté, son caractère fantastique, parfois irrationnel, d'en traquer la trace avec une maîtrise déconcertante. Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures est un ultime voyage hallucinatoire qui propose une expérience originale et originaire, qui tend à différer et dissoudre la sémiotique pour retrouver une sorte de émotion ancestrale, que l'on ne croyait plus possible.

Le film débute avec une douceur délicieuse. Peu à peu, l'ouverture au noire dévoile une silhouette lumineuse, musclée, presque fantasmatique : dans la forêt, un buffle est attaché à un arbre ; il se débat avec violence ; enfin, la bête parvient à s'enfuir. Il suffit également de tendre l'oreille pour se sentir habité, traversé par les doux bruissements de la forêt, de la vie qui croît, grouille, s'agite, envahit l'espace et le temps dans sa profusion, sa luxuriance, sa prodigalité. En substance, ce premier plan, sublime, contient déjà tout le film.

Apichatpong Weerasethakul s'est particulièrement attaché à la temporalité. Il restitue au plan sa dimension temporelle, sa capacité à accueillir le temps comme Oncle Boonmee invite, avec un naturel confondant, les fantômes de sa femme et de son fils à se joindre au repas ; il restitue à la caméra son pouvoir de filmer des corps, des paroles, des gestes, des rires, des émerveillements, des angoisses. Les procédés eux-mêmes ont un parfum archaïques : ainsi la surimpression ou le costume grotesque. Le plan est comme un lieu de passages, de transitions, de fulgurances tranquilles ; il dure, il prend le temps nécessaire pour déployer l'humain, et par là même en restaure la dignité. En bref ; il revitalise le cinéma, dans ce qu'il a d'organique, de total. Définitivement, Apichatpong Weerasethakul est un cinéaste du temps et de l'humain. Aujourd'hui, il n'y a rien de plus précieux.

La mort, motif centrale, fait bien sûr l'objet d'un traitement spécifique. Le moment venu, Oncle Boonmee entreprend une ultime marche. La séquence, d'une perfection absolue, est sans doute la plus intense de l'année. Elle permet également de varier les formes cinématographiques : après la fable étonnante de la princesse et du poisson-chat (moment d'anthologie), le film lorgne vers le film d'horreur l'espace de quelques minutes (tension croissante, fureur du cadre, du son, des battements de cœur, restriction de l'espace). Il existe un territoire pour mourir. Ce motif est également redoublé par quelques souvenirs, politiques cette fois-ci. Dans les deux cas, existentiel et politique, il est question de soin : soin discursif, à travers le dialogue social (ne pas oublier), et artistique, à travers le geste pour autrui que l'on filme (la croyance que l'on peut éduquer le regard). Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures est poétique, magique, tragique, drôle, enchanteur. En un mot : merveilleux.

Adrien Berafta
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par riqueuniee »

Pour en revenir à Oncle Boonmee,moi j'ai aimé ce film,qualifié sur un blog de "trip doux".C'est effectivement un trip,marqué par la culture thailandaise,dans lequel on peut ne pas entrer.Il faut se laisser porter par ce film,qui mêle réalisme et surnaturel,et aussi passé ,présent et avenir,comme si de rien n'était.
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monk
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par monk »

Sortie du DVD le 16 février, à un prix vraiment très...compétitif ! A la fois :shock: , :o et :x
mannhunter
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par mannhunter »

monk a écrit :Sortie du DVD le 16 février, à un prix vraiment très...compétitif ! A la fois :shock: , :o et :x
on croirait être revenu dix ans en arrière... :|
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par Amarcord »

Quelqu'un a-t-il eu l'occasion de visionner le BD anglais du film ? Quid de l'image, des bonus éventuels... ?
Je n'arrive pas à trouver de tests, d'avis... Merci d'avance ! :wink:

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El Dadal
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Re: Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul - 2010)

Message par El Dadal »

L'image m'est apparue d'excellente qualité et ce tout du long. J'ai trouvé à ce disque un côté démo assez bluffant.
En ce qui concerne les suppléments, on trouve une assez courte interview de Weerasethakul, le court Letter to Uncle Boonmee, quelques scènes coupées ainsi qu'un livret de quelques pages rédigé par le réalisateur lui-même en 2009, contextualisant un peu plus son film. En soi, une valeur sure.
STA.
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