Joan Fontaine (1917-2013)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Kimm
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Re: Joan Fontaine

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Vu ce jour L'EXTRAVAGANTE MADEMOISELLE DEE (H C Potter, 1948).

Le couple Stewart/Fontaine fonctionne très bien: Joan n'est pas sans rappeler Jean Arthur lorqu'elle se retrouve dans des comiques de situations, la voix légèrement éraillée.

Si on peut parler d'inégalité sur la longueur du film, certaines scènes n'en restent pas moins savoureuses:
-la première demi-heure est vraiment réjouissante, nous présentant notre héroïne indécise quand au mariage; puis après avoir dit oui durant la cérémonie, elle fuit la nuit de noce pour se retrouver dans une chambre voisine, en compagnie de James Stewart, qui se trouve bien encombré d'une telle invitée.

Il y a une scène de rapprochement des protagonistes, la caméra fixant leurs chaussures, celles-ci réagissant en fonction du dialogue: très efficace..!

C'est Joan Fontaine qui prend les initiatives à tous les niveaux, et elle va opérer un rapprochement pour un baiser, auquel James Stewart ne pourra résister...
Par ailleurs, le film est servi par un côté cartoonesque, lorsque James Stewart contrôle son avion, le viage amoureux de Joan Fontaine apparait à chaque fois qu'il braque sa lampe de poche.

Comme dit Cathy, une comèdie très sympa, assortie d'un couple au diapason.
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Re: Joan Fontaine

Message par someone1600 »

Bien apprécié moi aussi, bien que je me souvienne pas le film en entier. Faudrait que je regarde a nouveau. :wink:
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Cathy
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Re: Joan Fontaine

Message par Cathy »

Bigamie - The bigamist (1953) - Ida Lupino

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Un couple veut adopter un enfant, lors de l'enquête sociale destinée à voir si les parents sont aptes, l'enquêteur s'aperçoit que le mari a une double vie.

Ida Lupino n'aime pas les sujets simples, ce qui pourrait être une simple histoire d'adultère devient beaucoup plus complexe et plus tragique avec cette bigamie, qui paraît un thème encore tabou aujourd'hui. Le film est réalisé avec une extrême pudeur, la réalisatrice semble se contenter d'exposer les faits et ne prend pas partie pour quelconque des trois personnages que ce soit les deux femmes trompées ou le mari infidèle. Elle semble filmer avec une infinie tendresse cet homme lâche qui n'arrive pas à prendre de décision, car systématiquement dépassé par les évènements. Peut-être semble-t'elle plus proche du personnage qu'elle interprète, cette femme qui va faire tomber le mari dans son délit, que de la femme légitime, femme d'affaire peu sentimentale avec son mari. La femme forte est Joan Fontaine que pourtant la vie accable, malgré son aspect fragile, et la faible Ida Lupino qui pourtant semble mener sa vie comme elle l'entend. Les deux actrices sont parfaites dans leurs rôles respectifs. Edmund O'Brien est impeccable en homme partagé entre deux amours et qui finira par payer le simple prix de la bigamie, alors qu'un simple adultère serait sans conséquence. Un film simple, efficace, pudique.

La copie Wild Side offre parfois quelques défauts, notamment sur deux plans un trait vertical résistant, mais dans l'ensemble une copie plutôt propre.
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Re: Joan Fontaine

Message par Cathy »

Jane Eyre (1944) - Robert Stevenson

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Jane Eyre jeune orpheline de 10 ans est envoyée dans une institution pour jeunes filles difficiles par sa tante. Après dix ans, elle devient la gouvernante de la pupille d'Edward Rochester, homme inquiétant mais séduisant.

Robert Stevenson réalise ici une très belle adaptation du roman de Charlotte Bronté, même s'il élague certains passages, notamment toute la vie de Jane après sa fuite de Thornfield. Il se concentre essentiellement sur la relation Jane/Rochester, et on peut dire que c'est une réussite totale. D'abord sur le plan de l'esthétique, nous sommes dans cet univers gothique, inquiétant, angoissant avec ces paysages de manoir, de lande, le tout baigné dans une espèce de brume continuelle, ou alors de clairs obscurs, l'histoire se déroulant quasiment tout le temps en intérieur ou de nuit.
Par ailleurs, l'angoisse qu'inspirent Thornfield et le maître des lieux est particulièrement mise en valeur par la partition de Bernard Hermann. Sur le plan des acteurs, le casting est exemplaire, que ce soit au niveau des rôles secondaires, comme Agnes Moorehead tante sadique ou divaguante, Margaret O Brien, charmante petite pupille et naturellement le couple principal. Orson Welles est impressionnant en Rochester et on comprend fort aisément comment Jane Eyre peut succomber à un homme à la fois si inquiétant et si séduisant. Joan Fontaine est dans sa période héroïne "timide" mais forte, elle illumine l'écran de par la simplicité qu'elle semble dégager tant elle est Jane, la rebelle ou l'amoureuse. Il est évident que l'ambiance du film évoque aussi Rebecca, avec ce mystère, ces manoirs mystérieux, le couple qu'elle forme avec son partenaire fonctionne totalement.
Naturellement Charlotte Bronté a écrit un magnifique roman à l'histoire romanesque en diable et Stevenson est aidé par cela, mais nous sommes quand même devant un chef d'oeuvre du genre, avec cette tension permanente, et ce charme irradiant des interprètes.
Dernière modification par Cathy le 5 août 10, 10:07, modifié 1 fois.
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Re: Joan Fontaine

Message par Cathy »

From this day Forward (1946) - John Berry

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Un militaire démobilisé à la fin de la guerre doit trouver un emploi. A l'agence, il se remémoire sa vie conjugale d'avant la guerre.

John Berry signe une chronique qui sonne vraie de la vie d'un modeste tourneur fraiseur qui se marie avec l'employée d'une librairie, il va connaître le chomage de même que des ennuis judiciaires, mais il va aussi se montrer un homme heureux malgré tous les problèmes d'une vie quotidienne très sombre. Nous sommes dans ces films basés sur la réalité, et quelque part, la manière de filmer de John Berry annonce ce que va devenir un certain cinéma américain, même si le sujet a été de nombreuses fois abordées de manière plus mélodramatique. Car ici malgré les problèmes de tous les jours, jamais le film ne tombe dans le mélodrame. Avec sa galerie de personnages secondaires eux aussi d'une banalité confondante, il n'est pas misérabiliste non plus mais dépeint avec un certain réalisme cette vie quotidienne d'un couple ordinaire.

L'intérêt majeur du film réside dans la prestation de Joan Fontaine qui est très loin des héroines romantiques qu'elle incarne habituellement, mais est totalement crédible en jeune américaine moyenne, avec ses cheveux dénoués, son sourire lumineux, un charme qui irradie à l'écran. Elle semble vraiment être cette petite libraire, comme elle était Jane Eyre deux ans auparavant. Mark Stevens est lui aussi totalement convaincant en jeune mari qui traverse de nombreuses embuches. Le film assez finement n'évoque pas du tout la guerre, comme on pourrait le croire avec les flashbacks, mais aucune scène n'évoque ce que le jeune mari a vécu au front, juste son engagement et cette préparation de petit déjeuner, et la vie de tous les jours. Un film qui sonne juste même si ce n'est pas le cinéma qui m'emballe le plus.
Tom Peeping
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Re: Joan Fontaine

Message par Tom Peeping »

Les sorcières / The witches (Cyril Frankel, 1966)

Le dernier film de Joan Fontaine, une production Hammer (après elle n'a fait que de la télé).

L'histoire vous donnera une idée de pourquoi elle a décidé d'arrêter :
Joan Fontaine est une institutrice dans la jungle africaine et se fait envoûter par un marabout. Elle en fait une dépression nerveuse et s'envole pour l'Angleterre où elle se réfugie dans un petit village verdoyant. Le ciel lui tombe sur la tête quand elle réalise que ce coin de paradis est aux mains d'une sorcière bourgeoise qui entraîne les habitants dans des messes noires...

Au cours du film, Joan Fontaine (cinquante ans mais elle joue une trentenaire) se fait terroriser par des poupées vaudoues et des fétiches de toutes sortes, est piétinée par un troupeau de moutons affolés, est plongée dans la gadoue, est placée en maison psychiatrique, est initiée à un rituel satanique et assiste à une orgie. Entre autres.

Elle n'y croit pas, nous non plus. On rigole pas mal, pas elle.

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Pour continuer sur le cinéma de genre, visitez mon blog : http://sniffandpuff.blogspot.com/
Julien Léonard
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Re: Joan Fontaine

Message par Julien Léonard »

Tom Peeping a écrit :Les sorcières / The witches (Cyril Frankel, 1966)

Le dernier film de Joan Fontaine, une production Hammer (après elle n'a fait que de la télé).
C'est bien dommage d'ailleurs... Le film en lui-même n'est pas mauvais durant sa première heure, il ménage même de bons moments d'inquiètudes et d'interrogations. Mais dès la séquence suivant la sortie de l'hôpital psychiatrique, le réalisateur perd les pédales et finit son récit sur un tas d'inepties scénaristiques du plus mauvais goût. Du coup, on sort totalement de l'intrigue et on regrette complètement le traitement infligé à ce dénouement. Pourtant, sans promettre monts et merveilles, les 50 ou 60 premières minutes faisaient efficacement illusion.
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Ann Harding
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Re: Joan Fontaine

Message par Ann Harding »

The Constant Nymph (Tessa, la nymphe au coeur fidèle, 1943) avec J. Fontaine, Charles Boyer et Alexis Smith

Le compositeur Lewis Dodd (C. Boyer) est l'ami du compositeur Albert Sanger (M. Love) qui vit dans les montagnes suisses avec ses filles. L'une d'elles Tessa (J. Fontaine) est secrètement amoureuse de Dodd sans qu'il s'en doute. Suite à la mort de leur père, les filles partent en Angleterre pour un pensionnat tandis que Lewis épouse la richissime Florence Creighton (A. Smith)...

En 1943, Goulding réalise la troisième version cinématographique du roman de Margaret Kennedy. Les deux premières versions sont britanniques. La première de 1928 (muette) doit être fort intéressante car tournée en Autriche avec l'icone du cinéma anglais de l'époque Ivor Novello et la jeune Mabel Poulton. Par contre, Goulding doit se contenter de filmer le film entier en studio. Cela réduit singulièrement l'ampleur qu'il pourrait avoir. Mais, Goulding utilise la grue et les mouvements de caméra pour tenter de compenser cette claustrophobie. Joan Fontaine est une adolescente très crédible comme elle le sera dans Letter from an Unknown Woman pour Ophüls en 1948. Ce qui donne au film un charme tout particulier -en tous cas, pour moi!- c'est la superbe partition signée Erich Wolfgang Korngold. Il réutilisera la musique (comme il en avait le droit dans son contrat avec la Warner) pour une pièce symphonique intitulée Tomorrow Op. 33. Cette histoire d'amour entre une jeune adolescente et un homme d'âge mur semble avoir subi quelques coupes dues à la censure. Il n'est pas question de suggérer que Dodd ait eu de quelconque rapports avec Tessa (contrairement au film muet de 1928). Ici, nous restons dans les limites de la censure. Néanmoins, le film a beaucoup de charme grâce à Joan Fontaine. Alexis Smith a par contre un rôle assez stéréotypé en femme jalouse. Boyer est bon comme à son habitude. J'ai passé un bon moment avec ce film où de nombreux seconds rôles sont tenus par des piliers d'Hollywood comme Charles Coburn ou Montagu Love (un méchant des films muets que je n'ai pas du tout reconnu sous sa barbe blanche). Il est bien dommage que ce film soit quasiment invisible depuis des années. La copie que j'ai vue était assez médiocre et ne permet pas d'apprécier le travail de Tony Gaudio.
Voici quelques infos supplémentaires sur l'oeuvre qui devraient intéresser Francesco et Kimm. :wink: Pour ceux qui classent le roman de Margaret Kennedy dans le rayon 'bibliothèque rose', sachez qu'il a été adapté en français par Jean Giraudoux en 1934 pour une pièce qui fut interprétée par rien moins que Louis Jouvet et Madeleine Ozeray. Je crois que j'aurais couru immédiatement au théâtre pour voir la pièce à l'époque !
ImageL. Dodd (L. Jouvet ) et Tessa (M. Ozeray)
Pour complèter tout cela, voici quelques captures de la version muette de 1928 réalisée par Adrian Brunel. Il y a un court extrait du film dans le documentaire Cinema Europe de Brownlow et Gill.
ImageImage Ivor Novello
ImageImage Mabel Poulton
Ces quelques captures font drôlement envie. 8) J'espère qu'un jour j'arriverai à voir ce film. Ce fut le plus gros succès au box-office de 1928 en Grande-Bretagne.
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Re: Joan Fontaine

Message par francesco »

Bon Kennedy c'est pas très digeste quand même (en tout cas en traduction). Si l'intrigue fonctionne bien en général (ça ne m'étonnerait pas que ça passe mieux à la scène), des longueurs ont tendance à plomber le texte, d'autant qu'il se prend très au sérieux. J'avais été très impressionné par la réussite d'un roman comme La Fête en revanche, beaucoup plus concis. Mais Tessa et sa suite l'Idiot de la famille, ce n'est pas pour moi ...

J'ai pu voir le film moi aussi, sur youtube, dans les conditions qu'on imagine. J'avais lu il y a peu que Warner cherchait à régler le problème de droit qui coincait toujours la publication de Tessa. C'est dommage parce que si on admet que Goulding est avant tout un cinéaste du détails et de la direction d'acteurs (et d'actrices) c'est sans doute un de ses plus beaux films (mais je n'ai pas vu ses essais du tout début du parlant, qui ont bonne presse : The Devil's Holiday, The Trespasser ...). Je crois qu'avec Lettre d'une inconnue et Rebecca c'est le meilleur rôle de Fontaine (elle fut d'ailleurs nommée aux oscars), en effet incroyablement crédible, alors qu'elle est censée avoir 13 ou 14 ans. C'est d'ailleurs étonnant comme elle arrive à rendre son personnage vraie, sans miévrerie mais très délicat comme si il n'était pas tout à fait né pour ce monde. Goulding l'accompagne magistralement et la dernière séquence est stupéfiante dans sa réserve.
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On a vraiment l'impression que l'âme de Tessa s'envole.
. Très belle partition, c'est vrai, spectaculaire même, qui rend vraissemblable le génie du personnage de compositeur de Boyer (comme dans Déception/Jalousie de Rapper). Un vraie beau film romantique où la règle semble être "glissons, n'appuyons pas"
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Re: Joan Fontaine

Message par francesco »

A noter que la suite L'Idiot de la famille ("Escape me never") a également été adapté à plusieurs reprises. Au moins deux fois du temps du parlant : avec Elisabeth Bergner en 1935, avec Flynn, Lupino et Parker en 47. Encore des raretés.
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Re: Joan Fontaine

Message par Ann Harding »

Merci pour toutes ces infos, Francesco. :) Le Escape Me Never de 1947 a aussi une partition signée Korngold. :wink:

Pour ce qui est de jouer un rôle d'enfant, la meilleure composition de que j'ai jamais vue est celle de Lois Moran dans le Stella Dallas (1925) d'Henry King. Elle avait seize ans alors, mais elle réussit à être totalement convaincante en enfant de 12 ans au début du film. (Lois Moran a été le modèle de Scott Fitzgerald pour le personnage de Rosemary dans Tendre est la nuit.)
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Re: Joan Fontaine

Message par Cathy »

Lettre d'une inconnue, Letter from an unknown woman (1948) - Max Ophuls

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Quelques heures avant de se battre en duel, et en réalité de fuir par lâcheté, un pianiste reçoit la lettre d'une inconnue sur le point de mourir et qui lui raconte sa vie.

Max Ophuls réalise ici un chef d'oeuvre, tout simplement. Il adapte avec ce film, une nouvelle de Zweig, changeant les personnages, l'écrivain devient pianiste, Innsbruck se transforme en Vienne. L'intrigue est un sombre mélodrame, très lourd, très kitsch quelque part : une jeune fille tombe follement amoureuse d'un pianiste prodige, elle finit par avoir une aventure d'un soir avec lui dont nait un enfant qui va naturellement mourir et tout cela sans que l'homme ne se souvienne de cette femme qui n'a été pour lui qu'une simple amourette. Quel argument sirupeux, lourd qui pourrait donner dans le mélo larmoyant, et pourtant Ophuls en réalise un mélodrame subtil illuminé par la beauté de Joan Fontaine. Elle illumine le rôle de sa pureté, de sa simplicité, mais aussi de sa sophistication. Elle est aussi crédible en gamine de 15 ans qu'en jeune femme de 30 ans !
Et puis Louis Jourdan est parfait dans son rôle d'espèce de débauché, noceur qui ne vit que pour les plaisirs de la vie. On comprend en le voyant comment cette jeune fille peut en tomber si follement amoureuse et ne pas se rendre compte de son réel caractère. Bien que tourné aux USA, on croit à cette Vienne typiquement Zweigienne, avec cet éclairage systématiquement nocturne, cette vision d'une VIenne heureuse avec son Prater enneigé, sa musique légère, son Opéra (seule faute de goût, faire écouter Die Zauberflöte en italien à un public autrichien), mais qu'importe.

Il y a aussi cette maestria du réalisateur qui joue de ces clairs-obscurs, de cette blondeur angélique de l'actrice souligné par des vêtements toujours sombres. Il y a aussi une forte symbolique des costumes, la blancheur et la lumière symptomatique du bonheur que l'héroïne refuse, quand elle vit à Linz, ou quand elle est avec son mari où elle porte une superbe robe blanche, et la noirceur quand elle croit enfin toucher au grand amour, le tout relevé de roses naturellement blanches et éphèmères.
Il y a aussi les habitudes d'Ophuls avec ces escaliers si importants dans tous ses films et qui sont de nombreux plans. Toute la grande scène entre les deux héros est superbe, avec cette succession de sorties "clichés", la pomme d'amour, le bal musette où ils sont naturellement les derniers danseurs, la calèche, bref cette Vienne d'Opérette avec aussi cette discussion dans ce "train" qui le fait voyager. Ce film annonce cet autre chef d'oeuvre absolu qu'est Madame de, avec cette légèreté mêlée à cette noirceur de la vie et la futilité des sentiments humains !


Lettre d'une inconnue est un véritable chef d'oeuvre romantique, porté par ses deux interprètes et notamment Joan Fontaine, éblouissante dans le rôle de cette femme finalement si sotte dans son amour irraisonné.
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Re: Joan Fontaine

Message par someone1600 »

Ca fait longtemps que je veux voir ce film, il faut décidemment que je le trouve quelque part.
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Re: Joan Fontaine

Message par Cathy »

Une ile au soleil, Island in the sun (1957) - Robert Rossen

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Sur Santa Marta, une ile imaginaire des Caraibes, les destins croisés et contrariés d'un jeune noir et d'un homme blanc qui briguent tous les deux la magistrature de leur ile, tout cela sur fond de racisme, avec de nombreuses liaisons inter-raciales.

Apparemment le film fit scandale à sa sortie, mais aujourd'hui on a du mal à comprendre comment. Evidemment il y a cette jeune fille de famille qui couche très, trop facilement avec son amant (mais la morale est sauve vu qu'elle l'épouse), il y a cette famille bien installée sur l'Ile mais dont les origines noires jettent l'opprobre sur elle, cette liaison entre un écrivain et une secrétaire métisse (là aussi, il l'épousera), des relations adultérines, un meurtre, un époux qui semble abuser de sa femme mais rien de bien scandaleux ni de véritablement osé. Evidemment pour les mentalités de l'époque tout cela put choquer énormément. Le film a du mal à démarrer et traine au départ un ennui poli avant de finir par s'emballer avec le crime.
Robert Rossen semble aussi réaliser une très belle carte postale exotique avec de superbes paysages noyés sous le soleil, de jolies images, comme celle de cet arbre rouge et ses fleurs au sol qui évoquent certainement la perte de virginité de le la jeune fille, évocation de la pêche à la tortue, du Carnaval qui permet débauche de couleur, et image très sensuelle voir trop de Dorothy Dandrige filmée en train de danser le limbo. Tous les plans de l'Ilé sont absolument superbes, notamment en raison d'un très beau technicolor.
Il y a aussi les acteurs, James Mason en époux torturé, jaloux maladif persuadé que sa femme le trompe qui ressert un peu la même composition que pour son personnage d'une étoile est né, Harry Belafonte magnifiquement filmé par le réalisateur, mais antipathique, Joan Fontaine qui est un peu au second plan dans le rôle de ce personnage assez fade et inutile, Joan Collins en jeune fille un peu trop facile, Dorothy Dandridge magnifique métisse et John Williams parfait en policier se prenant pour Porphyre de Crime et Châtiment sans oublier Michael Rennie.
Robert Rossen illustre sans génie cette saga familiale sur fond de racisme et qui évoque ouvertement le problème multi-racial des Iles, où dans tout planteur blanc peut sommeiller des racines noires. Un film au charme exotique avec de belles images, mais sans doute trop convenu, les personnages ne suscitant quasiment aucune empathie.
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hansolo
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Re: Joan Fontaine

Message par hansolo »

Cathy a écrit :Une ile au soleil, Island in the sun (1957) - Robert Rossen
Tu oublies de parler de la chanson titre inoubliable interprétée par Belafonte et en français par John William!
- What do you do if the envelope is too big for the slot?
- Well, if you fold 'em, they fire you. I usually throw 'em out.

Le grand saut - Joel & Ethan Coen (1994)
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