Redacted (Brian De Palma - 2007)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Major Tom
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Message par Major Tom »

Bon. Il y aura des déçus, mais Brian De Palma ne viendra pas demain. J'ai parlé à son assistante et à l'attachée de presse, apparemment il est "fatigué" et n'a pas pu faire le voyage jusqu'à Paris. Espèrons qu'il s'en remette. :(
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Major Tom
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Message par Major Tom »

Par ailleurs, certaines personnes l'auraient vu à la sortie du Publicis, à la projection de Suspiria, mais on m'a averti que ce n'était pas confirmé...
Spoiler (cliquez pour afficher)
:mrgreen:
Frank Einstein
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Message par Frank Einstein »

Major Tom a écrit :Bon. Il y aura des déçus, mais Brian De Palma ne viendra pas demain. J'ai parlé à son assistante et à l'attachée de presse, apparemment il est "fatigué" et n'a pas pu faire le voyage jusqu'à Paris. Espèrons qu'il s'en remette. :(
C'est une info sérieuse ?
Je pensais qu'il habitait Paris en France depuis quelques années !? :shock:

Zut... pour une fois qu'on pouvait le rencontrer. :?
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Major Tom
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Message par Major Tom »

Frank Einstein a écrit :C'est une info sérieuse ?
Je pensais qu'il habitait Paris en France depuis quelques années !? :shock:
Après la sortie de Femme Fatale, il est reparti vivre aux Etats-Unis. Et l'info est sérieuse, oui.
Ben Castellano
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Message par Ben Castellano »

De Palma n'a qu'à espérer que son film change la politique US en VOD, car en salle sa moyenne est calamiteuse depuis deux week-end...
7swans
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Message par 7swans »

Sortie DVD US le 19 février. La cover :

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Megalomanu
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Message par Megalomanu »

"De Palma makes me proud to be an American." : une des meilleures accroches que j'ai lu je crois :lol:
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MJ
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Message par MJ »

Ca va être chaud.
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2501
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Message par 2501 »

Enfin ! Il était temps que Brian De Palma se ressaisisse après un "Mission to Mars" qu’on préfère oublier, un "Femme fatale" sympathique mais trop proche de l'auto parodie pour satisfaire pleinement, et un "Dahlia Noir" dont on a encore l’amer sentiment de déception en travers de la gorge (quel matériau idéal allégrement gâché...). Avec "Redacted", le cinéaste nous revient avec son film le plus expérimental à ce jour, et sans doute aussi le plus énervé. Et ça fait du bien.

Dans la grande tradition des documenteurs où ont entre autres officié William Karel et Woody Allen, "Redacted" est composé d'un patchwork de représentations ayant pour but de donner une illusion de réalité, première oeuvre à l’adapter aux nouvelles technologies. Caméra DV, de surveillance, documentaire, reportage, youtube, blogs... Jamais le film ne sort de ce concept, habile moyen de représenter une guerre à la fois si médiatisée et si lointaine, en poussant à l’extrême cette idée de narration-collage, allant plus loin que le simple faux documentaire. Un haut degré de manipulation, un certain idéal de cinéma. La mise en scène par des médias quotidiens d'une histoire vraie, le viol et le meurtre d’une jeune fille par des soldats américains à Samarra, n'est pas sans rappeler celle d'un de ses précédents films : Outrages. Une manière de se faire écho sans pour autant jouer le remake, de rappeler par un sujet similaire la présence d'un cinéaste à la fois absent de chaque point de vue isolé, mais aussi totalement omniscient. C'est là le tour de force de ce genre de film puzzle : retrouver la marque du cinéaste derrière la mosaïque d'oeuvres signées d'auteurs fictifs, qui ont pourtant chacun leur propre style. Effet bénéfique pour le cinéaste qui peut s'éloigner des passages obligés de sa mise en scène, tout en disséminant tout de même ça et là quelques petites touches personnelles : une manière de construire un suspense typiquement hitchcockien en juxtaposant deux informations sur deux vidéos distinctes, ou cette façon de faire des plans-séquences et des split screens l'air de rien avec les moyens du reportage, de la prise de vue amateur en "one shot" ou de la communication virtuelle. En revenant aux sources de chaque média, à leur utilisation première, le réalisateur fait un idéal usage du numérique, loin des trucs crades servis depuis Blair Witch. A la fois évident et diablement efficace.

De Palma sait mener sa barque et semble retrouver une certaine vitalité créative derrière tous ces semblants de réalité. Ce cinéaste de la reconstruction, de la grosse imposture y trouve un terrain de jeu idéal, sans oublier pour autant la gravité des faits exposés. Dans cet entre-deux entre le propos du réalisateur et ceux des faux auteurs, on retrouve une marge assez abstraite et agréablement (ou désagréablement, tout dépend si vous aimez être manipulés) trouble. A qui attribuer l’hommage à Kubrick ? Sur les épaules des documentaristes français caricaturés le procédé passe pour une critique ironique d’une solennité pompière, sur celles du cinéaste cela paraît tout de suite plus lourdingue. Sans doute un mélange des deux, dans l’humeur perverse de tonton Brian.
Cela n’excuse pas tout pour autant, le trait est parfois grossier, comme ce commentaire du documentaire français, digne d'un exposé d'école primaire, ou la prise d'otage en direct, un peu too much. Mais la prise de position est là, la colère du cinéaste constamment palpable.

On aurait peut-être aimé que ce magma singulier de nouvelles technologies soit plus poussé. De ce fait le film reste plutôt abordable pour le grand public, bien que certaines scènes montrent sans détour une violence que l’on nous cache d’ordinaire dans ces médias. Si Redacted reste sur des thématiques habituelles du film de guerre, il apporte cependant dans la confrontation de ces points de vue, même si passés par le prisme de la fiction, un angle nouveau et contemporain, où l’actualité des médias rencontre l’actualité du conflit dans un jeu de miroirs fascinant.

Sous une forme originale et prenante, Redacted est le genre de film coup de poing dont on n’avait plus l’habitude, sans aucun doute le meilleur film sur la guerre en Irak réalisé à ce jour et le retour en forme d’un cinéaste qu’on ne croyait plus capable d’une telle prouesse.

8/10
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Boubakar
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Message par Boubakar »

L'affiche française :

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Ben Castellano
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Message par Ben Castellano »

"un magma en fusion" :lol:
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Message par G.T.O »

Ben Castellano a écrit :"un magma en fusion" :lol:
Expression piquée à Gérard Lefort ! :lol:
mannhunter
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Message par mannhunter »

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Message par Griff Bonnell »

2501 a écrit :(...)A qui attribuer l’hommage à Kubrick ? Sur les épaules des documentaristes français caricaturés le procédé passe pour une critique ironique d’une solennité pompière, sur celles du cinéaste cela paraît tout de suite plus lourdingue. Sans doute un mélange des deux, dans l’humeur perverse de tonton Brian.(...)
J'ai eu du mal à piger ça aussi. Déjà de savoir s'il s'agit bien d'un hommage et pourquoi. Mais je crois qu'il va me falloir plusieurs visions du film pour en saisir ne serait-ce que la moitié des subtilités.
Sinon, assez raccord avec ta vision du film. Pour moi c'est un des tout meilleurs de son auteur, des plus aboutis et complexes qu'il ait fait sur son terrain thématique (et c'est peu dire que je n'attendais plus grand chose du père De Palma).
Un film important (et pas que pour son auteur).
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Major Tom
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Message par Major Tom »

Alors que je craignais le pire du nouveau De Palma, je suis au contraire très très satisfait de son dernier film. J'ai attendu presqu'un mois avant de commencer à écrire sur ce film, le temps de me rendre compte de son ampleur et son importance.
Copié-collé de ma critique sur mon site.

r e d a c t e d (2007)

Une nouvelle fois, un film de Brian De Palma déclenche une controverse (une des plus importantes de sa carrière) outre-Atlantique. En dehors d'être un drame de guerre d'un style tout à fait nouveau, Redacted est à cent mille lieux de l'académisme et ne respecte aucune convention cinématographique. Brian De Palma, 67 ans, a réalisé un film actuel, neuf, engagé, puissant et qui dérange (beaucoup)...

De Palma prend un sujet encore d'actualité, le conflit en Iraq, et fait de son film une charge violente envers les autorités américaines et leurs mensonges concernant cette guerre. A l'instar du faux happening "Be Black Baby" dans Hi! Mom (1970), Redacted est un docu-fiction contestataire, tourné en HD avec 5 millions de dollars de budget. Il raconte une histoire fictive inspirée de faits réels (le viol d'une jeune Irakienne, assassinée avec sa famille par des soldats américains). Plus précisément, le film reste centré sur un groupe de GI, issus de différentes catégories sociales, à un poste de contrôle en Irak, en alternant les points de vue de chaque protagoniste (les soldats, parfois acteurs parfois victimes, filment, photographient, et racontent leur histoire sur Internet).

Dans les années 60, Brian De Palma a commencé à réaliser des films documentaires comme The Responsive Eye, une expérience qui le conduira petit à petit vers des films plus expérimentaux comme Dyonisus in '69... Il devient vite une figure importante du cinéma underground américain. A l'époque, De Palma évite tout juste d'entrer dans l'armée américaine pour combattre au Vietnam, et fait un film antimilitariste : Greetings. Quarante ans ont passé. Entre-temps, Brian De Palma est devenu plus connu grâce à sa virtuosité technique, d'une précision chirurgicale, et à des choix plus commerciaux. Mais dans chaque film, il y a toujours une grande part d'ironie et de satyrisme (à peine dissimulé) sur la société et la politique. Dans Casualties of War, réalisé bien après la fin de guerre du Vietnam, le réalisateur raconte un drame inspiré de faits réels similaires à ceux de Redacted sur le viol et le meurtre d'une jeune vietnamienne, qui l'ont obsédé durant des années. Le film, réalisé après Les Incorruptibles, surprend.

Cette fois-ci, De Palma va beaucoup plus loin avec Redacted. Le film nous plonge vite dans l'enfer du conflit Irakien crûment éclairé par le réalisateur, insistant avant tout sur les dommages collatéraux causés par l'occupation militaire américaine. Et au fil de son récit fragmenté, De Palma montre le désoeuvrement et la faiblesse physique et psychique des jeunes soldats US inexpérimentés, la peur les détruisant moralement ou les transformant en bêtes haineuses sur le terrain, et les civils irakiens, principales victimes innocentes de cette guerre.

Le pouvoir de l'image, un des thèmes chers à De Palma que l'on retrouve dans quasiment toute sa filmographie, n'est plus ici un thème mais un des sujets importants du film. Cette guerre très médiatisée en Irak est présentée de la façon la plus actuelle et la plus réaliste qui soit. En l'occurrence, De Palma utilise des procédés non cinématographiques pour reconstituer le parcours barbare de ses personnages principaux. Le réalisateur va même jusqu'à placer des transitions graphiques facilement trouvables sur des logiciels de montage pour amateurs, insistant ainsi sur la mise en abyme.

Les images de l'Irak de De Palma font écho à une avalanche de sources d'informations qui se multiplient dans le monde, et qui finissent par nous submerger. Images de la caméra DV des soldats ou des terroristes, images d'une caméra de surveillance, d'un documentaire par des journalistes français, images d'une page de Youtube, d'un Blog avec le discours de la femme d'un GI, etc. Le réalisateur donne une épaisseur à cet assemblage judicieux d'images, et parvient à redonner un sens à ces fragments d'histoires qui augmentent chaque jour. Pour aller au bout de sa démonstration, le réalisateur n'engage pas d'acteurs célèbres pour interpréter les jeunes soldats.

On peut insister sur la réalisation technique absolument neuve, inédite et novatrice, d'autant que cette méthode de collage vidéos est donc justifiée par le choix du sujet. Et on peut être sûr que l'on parlera en mieux de Redacted d'ici quelques années. Car bien sûr, cette véritable réflexion sur l’actualité politique et la nature humaine a remis en question le patriotisme du réalisateur. Une importante polémique aux USA a donc été lancée par des journalistes qui ont lourdement critiqué le film et surtout son réalisateur, parfois en direct à la télévision. Un Blog de boycott anti-Redacted a même été créé. Et De Palma n'est pas au bout de ses peines puisqu'un dirigeant de Magnolia, la société qui a produit le film, a censuré certains passages du film. Le titre "Redacted" qui n'a pas été choisi involontairement, prend soudain une dimension ironique. Le réalisateur qui voulait montrer une violence crue, celle qui est censurée dans les médias, se retrouve avec un film où des scènes sont barrées au feutre noir (les yeux des victimes dans les photos finales, les noms sur les pages Youtube, etc.).

Le film garde néanmoins toute sa force et reste un témoignage important, témoignage pour les générations à venir, témoignage contre la bêtise humaine, témoignage d'un cinéaste traité d'affreux jojo ou de communiste. On ressort de ce documentaire fictionnel profondément et durablement marqué, et scandalisé. Parmi toutes les images du film, on peut remarquer celle où De Palma résume ce qu'il pense de la guerre en Irak en un seul gros plan, issu d'une caméra d'un GI, dans le début du film, où l'on voit un scorpion qui meurt sous les attaques de fourmis, petites mais nombreuses. C'est une expérience unique, où De Palma oblige le spectateur à réexaminer sérieusement la façon dont il voit et accepte les événements diffusés dans les médias. Redacted est un film majeur de sa filmographie.
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