Je ne connaissais pas cet opéra, et j'ai été cueilli. Entre monodies et chant lyrique, des instrumentations qui passent du dépouillé au dense, des suspensions impossibles quand il s'agit de dire sa tristesse ou des élans vifs quand il s'agit de dire sa joie, c'était un vrai bonheur, et la mise en scène fellinienne avec ces allers-retours entre réalité et représentation n'a rien gâché, au contraire. A la hauteur de "L'Odyssée" !
Il faut peut-être souligner qu'il s'agit de films d'opéra et non de représentations, et qu'il faut faire avec un playback de qualité parfois assez relative.
Non je ne le souligne pas, l'expérience esthétique est hors-normes, il n'y a pas besoin de souligner les quelques faiblesses de synchronisation. La poésie n'est pas que synchronisation et harmonie.
C'est pas tellement une histoire de petits défauts, ce que je veux souligner c'est que le film d'opéra est un peu un genre à part entière, d'une grande artificialité, c'est tout à fait autre chose qu'une vraie représentation d'opéra (qui comporte aussi son lot de défauts bien sûr), il y a des gens qui y sont rétifs, ça peut se comprendre.
Pour ma part je ne suis pas contre, il y a un certain nombre de réussites, mais je préfère globalement de vraies représentations filmées.
Je suis plutôt d'accord avec toi, dans le sens où je ne trouve pas que le "Don Giovanni" de Losey ou le "Figaro" de Ponnelle par exemple soient très réussis du point de vue esthétique, avec leur photographie assez sèche et des décors parfois trop sommaires et gris. Ce que j'ai aimé dans ces Monteverdi justement, c'est d'être à la croisée de la représentation filmée (puisque l'action est clairement située dans une salle de spectacle) et du film (avec des mouvements d'appareil, des plans rapprochés, du montage et des participations incongrues), avec une photographie chaleureuse et des décors riches. Et ce que j'ai aimé encore plus, c'est le caractère archaïque de l'atmosphère restituée par des costumes et des décors qui ramènent à la fois à l'Antiquité et à la Renaissance, sans ajout d'éléments modernes (hormis la présence de ce quatrième mur qui est parfois brisé - par exemple lorsque c'est Harnoncourt lui-même qui fournit le couteau au bouffon du "Retour d'Ulysse" pour qu'il se suicide). Ce choix de mise en scène plus la musique, c'est un vrai voyage dans le temps !
Je me suis refait hier ( en bluray ) les TROYENS de Berlioz, 2ème partie dans l enregistrement de J.Eliott Gardiner au châtelet et je suis resté , comme d' habitude, en extase devant le duo entre Enée et Didon, scène blanche et bleue ( nous sommes sur un balcon dominant la méditerranée ), avec une Susan Graham !!!!
