Les vedettes féminines des films musicaux

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

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Music Man
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Merci! :D
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Dans ses interviews, George Clooney rend souvent hommage à sa tante la grande chanteuse de jazz Rosemary Clooney (1928-2002), qui l’a beaucoup aidé à ses débuts. Flash back sur la carrière de celle-ci.
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Avec sa sœur Betty, Rosemary entame une carrière de chanteuse avec l’orchestre de Tony Pastor. Très vite, on lui propose une carrière en solo et le succès est quasiment instantané grâce à un répertoire composé de « novelties », chansons entraînantes et rythmées, mais souvent vides de sens comme « Come on a my house » ou « botch a me » (reprise en français par Tohama). Son fulgurant succès et sa photogénie lui valent en 1953 d’être embauchée par la Paramount, qui cherche une remplaçante pour sa vedette musicale fantaisiste Betty Hutton, renvoyée suite à de nombreux caprices.
Les étoiles chantent (1953) est un petit musical sympa relatant les mésaventures d’apprentis artistes : Rosemary y reprend son célèbre « Come on a my house ». Il y a aura toujours des femmes (1953) avec Bob Hope et Arlène Dahl, pastiche musical sans prétention se laisse regarder avec plaisir. Avec un look qui rappelle celui d’Alice Faye dans ses derniers films en technicolor, chante une sorte de mélopée arabisante, tentant vainement de dupliquer le succès de « come on a my house ». Ressorti en DVD, « Red garters » 1953 est plus original. Un western parodique dans des décors de théâtre. C’est plutôt bien enlevé et Rosemary déploie l’éventail de ses talents de chanteuse : chansons western exubérantes, blues subtils…Alors que sa chanson « Mambo italiano »1954 (reprise en français par Line Renaud) caracole au sommet des hit parades, Rosemary rejoint les nombreuses guest stars d’Au fond de mon cœur, la pesante bio de Sigmond Romberg éclairée par quelques brillants numéros (ceux de Cyd Charisse et d’Ann Miller notamment). Le duo de Rosie (son surnom) et son mari José Ferrer n’a rien de mémorable.
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Ce n’est pas le cas du film suivant, Noël Blanc (1954) qui fut longtemps rediffusé aux USA pour les fêtes de fin d’année. Hormis un coté patriotique un peu énervant, c’est un musical de bonne facture à l’affiche particulièrement prestigieuse : Bing Crosby, Vera Ellen, Danny Kaye. La voix de Rosemary s’accorde parfaitement avec celle de Bing pour les duos sentimentaux. Le solo de Rosie « love you didn’t do right by me » est également parfaitement réussi.
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Malgré cet énorme succès, la carrière cinématographique de Rosie s’arrêtera là, pour cause de maternité. En effet, entre 1955 et 1960, elle aura 5 enfants de José Ferrer (dont l’aîné Miguel, futur comédien). En revanche, si le fait d’être enceinte la prive de nombreux rôles, cela ne l’empêche pas d’animer des shows à la télé, et de continuer à enregistrer des disques : encore des novelties comme Mango (1957) son dernier gros tube ou des chansons d’une valeur artistique bien supérieure comme sur l’album magnifique gravé avec Duke Ellington.
La chaleur de l’interprétation et surtout l’émotion et un impeccable sens du rythme confèrent aux enregistrements de Miss Clooney une qualité indéniable et reconnue par des génies du jazz comme la grande Billie Holiday. Son contrat avec la firme Columbia vaudra également à Rosemary d’être la première à enregistrer « I could have danced tonight » de My fair Lady et « Tonight » de West Side Story. (En effet, c’est la Columbia qui co-produisait ces spectacles musicaux).
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L’échec de son couple, le déclin de sa carrière de chanteuse avec l’arrivée du rock, l’assassinat de son grand ami Bobby Kennedy juste à coté d’elle, vont gravement jouer sur les nerfs de la chanteuse qui se réfugiera dans la drogue et se retrouvera internée à l’asile psychiatrique. Au milieu des années 70, Rosemary décide de tout redémarrer à zéro avec l’aide de Bing Crosby qui l’engage pour ses tournées. Ce sera l’occasion d’un retour très réussi dans le domaine de la chanson et surtout du jazz. Désormais libre de ses choix artistiques, la chanteuse va enregistrer de façon magistrale, avec une voix plus mure mais aussi plus sensible et chargée d’émotion les plus grands standards de la chanson américaine. Entre 1975 et 2001, elle sortira environ 1 album par an pour la firme Concord Jazz.
Sa biographie sera un best seller et donnera lieu à un téléfilm interprété par Sandra Locke.
A la fin de sa vie, Rosemary assistera à la formidable ascension de son neveu George Clooney. On la retrouvera (énormément grossie) dans deux épisodes de la série « urgences ».
Rosemary Clooney est décédée en 2002 d’un cancer.
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Rosie chante son tube Mambo italiano
Dernière modification par Music Man le 23 avr. 08, 22:08, modifié 1 fois.
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En Grande Bretagne, quasiment tous les films interprétés par Deanna Durbin sont sortis en DVD.
En France, beaucoup l’ont oublié, voire ignorent son existence, étant donné que, sauf erreur, ses films n’ont jamais été rediffusés au Cinéma de Minuit ou au Ciné Club. Alors, présentons la.
Née en 1922 au Canada, la jeune Deanna Durbin révèle très tôt ses talents pour l’art lyrique. Après des participations à des shows radiophoniques, elle est engagée par la MGM, toujours en quête de vedettes en herbe.
Celles-ci (Mickey Rooney, Jackie Cooper, Judy Garland…) suivent des cours auprès de professeurs à l’école du studio entre deux tournages ou bouts d’essai(à cette époque, Deanna est recalée pour le doublage vocal du personnage de Blanche Neige, car on trouve sa voix trop mure pour le personnage). Le court métrage « Every Sunday » confronte Deanna et Judy Garland les deux jeunes recrues du studio. Après avoir visionné le petit film, Louis B Mayer, qui préférait l’art lyrique aurait ordonné « de virer la grosse »(Judy). Mais dans son studio, beaucoup préféraient Judy et ce fut Deanna qui fut renvoyée. L’Universal lui signa immédiatement un contrat pour un petit film musical (Trois jeunes filles à la page 1936),plein de bons sentiments , où Deanna tâche de réconcilier ses parents divorcés. C’est très nunuche par moment, et Deanna est parfois un peu agaçante, mais le triomphe est au rendez vous :d’ailleurs le film sauvera la firme de la faillite !(et donnera lieu à deux suites : 3 jeunes filles ont grandi 1939 et liens éternels 1943). Agacé par le succès immédiat de Deanna et par les débuts sans éclat de judy Garland, Louis B Mayer, touché à vif, jurera de faire de Judy une star bien plus grande que Deanna : la suite prouvera qu’il savait ce qu’il voulait.
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Dans le film suivant Deanna et ses boys 1937, Deanna partage l’affiche avec le célèbre chef d’orchestre Stockovsky. Sa façon de chanter les arias de la Traviata laissait peut être un peu à désirer, mais personne ne lui en tint rigueur, tant le charme et la spontanéité de la jeune artiste enlevaient le morceau.

En 2 films, Deanna est devenue une adolescente superstar (elle recevra un oscar miniature en 1938). On décline son image sur des livres à colorier, poupées, etc…Un fan club est ouvert avec cadeaux distribués aux jeunes fans pouvant justifier, tickets à l’appui, d’avoir vu plusieurs fois chaque film de Deanna.
Sa popularité est immense et dépasse de loin les frontières des USA (ce qui est loin d’être le cas pour toutes les vedettes d’Hollywood). En Grande Bretagne, elle est si célèbre qu’en 1942, un festival Deanna sera organisé dans tout l’état ! Tous les cinémas vont projeter tous ses films pendant la même semaine, en s’échangeant les bobines ! En Espagne, c’est tout simplement la vedette hollywoodienne LA plus populaire. En Italie, dans une lettre ouverte publiée sur un quotidien, Mussolini lui même( !) aurait demandé à Deanna de quitter Hollywood pour l’Italie fascite. Autre preuve, émouvante, de l’immense popularité de Deanna. A Amsterdam, dans le petit local où Anne Franck fut cachée deux ans avant d’être capturée par les nazis, on trouve une photo de Deanna au mur.
Le premier baiser de Deanna à l’écran (à Robert Stack) fera la une des journaux.
Parmi ses films les plus sympathiques, on retiendra « Chanson d’avril 1940 » délicieux musical léger comme une viennoiserie, et surtout « Eve a commencé » 1941, où Deanna devenue entre temps une jeune adulte au charme lumineux forme un tandem épatant avec Charles Laughton.
Globalement, les films sont des comédies très légères qui ne valent que par le charme indéniable de son interprète. Sa voix de soprano claire et naturelle (très loin de la voix grinçante ou pisse vinaigre des autres soprano de l’époque : Jeanette Mac Donald ou Irène Dunne) leur confère un atout supplémentaire, bien évidemment.
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Jeune mariée, Deanna envisage de quitter le cinéma en pleine gloire en 1942, mais on lui fait comprendre qu’en pleine seconde guerre mondiale, des films comme les siens sont utiles pour le moral des troupes et de la nation.
Elle signe à nouveau avec l’Universal pour un contrat juteux. Jean Renoir, ni plus ni moins est engagé pour diriger son nouveau film « la femme du commodore »1943, qui raconte l’histoire d’orphelins chinois pris dans la tourmente de la guerre, mais celui-ci après avoir tourné quelques scènes abandonne le film. Le résultat est bancal. En revanche, la sœur de son valet(1943) habilement réalisé par Frank Borzage est une réussite. La fraîcheur et la spontanéité de Deanna font merveille dans cette délicieuse comédie. Quant aux chansons, du medley russe au merveilleux aria de Turandot, elles sont divinement chantées.
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Après une opérette « la Caravane d’Amour » filmée en couleurs, en décors naturels (qui annonce déjà Oklahoma), Deanna s’essaie au drame avec « Vacances de Noël » de Siodmak. Abandonnant son personnage de conte de fées, on la retrouve entraîneuse dans un cabaret, menacée par un mari violent et psychopathe. C’est très réussi. La remarquable performance de Gene Kelly y est pour beaucoup.
Le producteur Felix Jackson, son deuxième mari (bien plus âgé qu’elle), prend alors en mains sa carrière. Il oriente Deanna vers les comédies (en réduisant le nombre de chansons), lui donne un look extrêmement sophistiqué, ce qui ne sera pas un choix judicieux. Deanna mène l’enquête (1945), un pastiche de film noir très agréable sera son dernier succès commercial. Il semble qu’à la fin, Deanna Durbin se soit totalement désintéressée de son travail d’actrice. Elle interrompait les tournages pour organiser des buffets campagnards dans sa loge avec tous les machinistes . Ne sachant quelle robe choisir pour le numéro final de « Caravane d’amour », elle optera pour les deux ! Ainsi, on voit Deanna descendre les escaliers en robe noire et finir sa chanson en robe blanche ! « on s’en fiche, c’est une comédie musicale », aurait elle indiqué au metteur en scène.
Sa carrière s’arrête en 1949, et elle ne refera plus jamais de cinéma ni parler d’elle.(malgré des propositions venues d’Italie et de la MGM qui aurait voulu l’engager pour un film avec Mario Lanza). Remariée pour la 3ème fois avec Charles Henri David, le réalisateur de Deanna mène l’enquête, elle s’installe à Neauphle le château dans les Yvelines. En 1978, elle accorde une unique interview à Ciné revue dans laquelle elle déclare adorer vivre en France, où elle peut garder l’incognito. Cette même année, elle eut un voisin célèbre : l’ayatollah Khomeiny venu trouver refuge en France.
Deanna Durbin a refusé d’être interviewée par Frédéric Mitterrand pour « Etoiles et toiles ». En revanche, elle est restée loyale à ses fans auxquels elle ne refuse pas de photos dédicacées.
Si vous voulez (re)découvrir cette lumineuse chanteuse des années 40, je vous suggère le coffret sorti aux USA « sweetheart pack », car il est sous-titré en français.
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Deanna Durbin dans les années 80


Deanna dans la soeur de son valet (1943)
Dernière modification par Music Man le 23 avr. 08, 22:18, modifié 1 fois.
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Commissaire Juve
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Message par Commissaire Juve »

J'ai découvert récemment que Shirley MacLaine dansait vachement bien. :o Dans Madame croque-maris, elle a un numéro avec Gene Kelly qui fait plaisir à voir.
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Message par Sailor G.Kelly »

Deanna Durbin, dans les années 80...On dirait qu'elle a 30 ans...ça doit être la photo...
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Message par Sailor G.Kelly »

Commissaire Juve a écrit :J'ai découvert récemment que Shirley MacLaine dansait vachement bien. :o Dans Madame croque-maris, elle a un numéro avec Gene Kelly qui fait plaisir à voir.
Ha oui, vachement bien, c'est le cas de le dire! Je l'adore également dans ce film, elle est très sensuelle dans l'une des séquences de la danse avec Gene Kelly :D
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Message par Music Man »

Shirley Mac Laine a également été brillante dans un film musical du génial Bob Fosse "Sweet Charity" d'après le chef d'oeuvre de Fellini "les nuits de Cabiria". Evidemment sans atteindre la magie du film de Fellini, ce film vaut pour les passages musicaux et toute l'inventivité du chorégraphe, qui se rode quelques années avant son incoutournable "Cabaret".

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Sailor, comme toi, j'ai été étonné par cette photo de Deanna récupérée jadis sur un site qui lui était consacré, et où il était mentionné qu'elle datait des années 80! cela dit cela paraît crédible : à voir le pull qu'elle porte, on sent plus la mode des années 70-80 que celle des années 40-50. Je souhaite pour elle qu'elle conserve encore cette miraculeuse jeunesse!
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Message par Sailor G.Kelly »

Music Man a écrit : Sailor, comme toi, j'ai été étonné par cette photo de Deanna récupérée jadis sur un site qui lui était consacré, et où il était mentionné qu'elle datait des années 80! cela dit cela paraît crédible : à voir le pull qu'elle porte, on sent plus la mode des années 70-80 que celle des années 40-50. Je souhaite pour elle qu'elle conserve encore cette miraculeuse jeunesse!
Oui, et ça me fait déjà tout bizarre de la voir habiller comme ça...On dirait presque une photo d'aujourd'hui :uhuh:



Et pour revenir à Shirley McLaine, je l'aime beaucoup que ça soit dans Comme un torrent, La Garçonnière ou encore Madame croque-maris Elle est pétillante!
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Message par JaimzHatefield »

Merci Music Man pour ce passionnant topic que je suis régulièrement. Et de surcroît c'est toujours très bien raconté. Image
Music Man
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Merci, JaimzHatefield! :D :D :D
Superbes, ces photos des chaussons rouges. Quel film admirable!
devenquest
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Message par devenquest »

mais aujourd'hui c'est pas pareil ;).... ahhh la mode lol....En fait je l'ai rencontré l'an dernier en France pendant mes vacances en Europe....( Je vis au Canada ).....Voici la photo de moi et Leslie en 2005
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Lord Henry a écrit :Un style différent auquel je n'offre pas plus de résistance:

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Message par Sibylle »

Music Man a écrit :Image
Superbes biographies, merci beaucoup ! J'ai enfin tout lu, c'était passionnant, et ça donne drôlement envie même si c'est un des genres que j'apprécie le moins...

Cette photo de Deanna est splendide :)
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LORELAI: It's a religion.

~Gilmore Girls, 2000-2007~
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Message par Music Man »

Merci beaucoup! Cette photo de Deanna est en effet fort belle.
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Message par Music Man »

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Il y a une quinzaine d’année je suis allé voir à la cinémathèque du palais de Chaillot, une projection du « chemin du paradis » comédie musicale franco-allemande de 1930. D’emblée, je fus étonné par le public qui différait profondément des habituels cinéphiles et étudiants que l’on rencontrait dans cette salle. La salle était remplie de spectateurs du 3ème ou plutôt 4ème âge venus retrouver leur jeunesse et l’idole de leur adolescence, Lilian Harvey. Née à Londres d’un père allemand, Lilian Harvey grandit en Allemagne. Après fréquenté l’école de danse de l’opéra et décroché son baccalauréat, elle entame une carrière de danseuse en Autriche. Dès 1924, elle débute dans les studios de cinéma berlinois grâce au réalisateur Richard Eiberg, séduit par la grande beauté de la jeune femme. Curieusement, ces films bien que muets comportent moult scènes de danse. Avec La Chaste Suzanne (1926), elle devient une vedette de tout premier plan, connue dans toute l’Europe.
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C’est bien évidemment avec l’arrivée du parlant que la carrière de Lilian Harvey prendra tout son essors : d’une part, ses films « musicaux » avant la lettre ne demandaient que l’arrivée du son, et son don pour les langues lui permet de jouer dans les multiples versions de ses films. En effet, en 1929, les techniques de doublage n’étaient pas encore au point, et les films allemands étaient tournés, scènes après scènes, en plusieurs versions, avec des acteurs français, anglais, allemands, espagnols pour permettre une exploitation internationale (A Hollywood, c’était la même chose). Polyglotte, Lilian Harvey joue dans les versions françaises, allemandes et anglaises, ce qui va confirmer son succès international. En revanche, ses partenaires varient en fonction du pays : Henri Garat pour la France, Willy Fritsch pour l’Allemagne, et différents acteurs (dont Laurence Olivier) pour la Grande Bretagne.
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Le chemin du paradis (1930), qui nous narre l’histoire toute simple de 3 garagistes amoureux de la même fille, remporte un véritable triomphe. L’ambiance est décontractée, Lilian danse avec la légèreté et la fragilité d’un elfe (bien que les chorégraphies soient rudimentaires), quant aux chansons (avoir un bon copain), elles marqueront durablement les mémoires. Il est émouvant à posteriori de revoir ce type de film, qui a énormément vieilli, car il s’en dégage beaucoup de naïveté : c’est toute l’enfance du cinéma parlant. Le congrès s’amuse (1931), opérette au charme suranné, aura tout autant de succès. Si Lilian est une chanteuse plus que moyenne (elle ne possède qu’un frêle et hésitant filet de voix aiguë), elle joue de façon charmante (et un peu forcée comme beaucoup de comédiens du début du parlant). Les numéros musicaux s’enchaînent à merveille et démontrent que juste avant l’arrivée du nazisme, l’Allemagne était le pays champion de la comédie musicale. Calais Douvres (1931) possède un charme indéniable et de superbes chansons .Lilian est au faite de sa beauté, et le film est un régal (à condition de faire l’effort de son plonger dans cette atmosphère très datée). En France, les spectateurs se passionnent pour le couple Harvey - Henri Garat, tandis qu’en Allemagne où personne ne connaît Garat, les spectateurs se demandent si Willy Fritsch va l’épouser. En réalité, Lilian est amoureuse de Paul Martin, un technicien qui grâce à elle deviendra réalisateur (pour entamer une longue carrière dans la comédie musicale). Il signe le rêve blond (1932) un autre gros succès populaire (peut être encore plus démodé que les autres films déjà cités).
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Hollywood a toujours été intéressé par les artistes qui remportaient de gros succès à l’étranger et la Fox ne tarde pas à faire des propositions à Lilian qui les accepte volontiers :
En 1933, l’Allemagne bascule dans le nazisme et comme beaucoup d’autres artistes, Lilian quitte l’Allemagne pour les USA (avec Paul Martin dans ses bagages). Néanmoins, les premiers films qu’elle y tourne sont si mauvais qu’ils sont fraîchement accueillis par le public. Le quatrième « Suzanne, c’est moi »1934 qui conte l’histoire d’amour d’une chanteuse pour un marionnettiste comporte certaines scènes qui font penser au futur Lili avec Leslie Caron. Alors que ce film commence en fin à remporter un certain succès, Lilian claque la porte des studios Fox : le rôle qu’on lui propose dans « George White Scandals » lui parait trop mince. Regrettable décision : une chanteuse de radio, Alice Faye, la remplace et devient une star du jour au lendemain.
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En réalité, Lilian n’a qu’une idée : suivre son compagnon Paul Martin, désireux de rentrer en Allemagne après l’échec du film qu’il vient de réaliser. C’est ainsi qu’en 1935, après un film tourné en Grande Bretagne, Lilian Harvey fait son retour dans une Allemagne qui a bien changé depuis son départ. Le pouvoir nazi et en particulier Goebbels, chargé de la propagande, supervisent l’ensemble des productions cinématographiques. Roses noires (1935), sur une musique de Sibelius, sera le dernier film de la UFA tourné en 3 versions (allemandes, française et anglaises). Les gais lurons (1936), une comédie policière trépidante dont le style s’apparente aux screwballs comédies américaines est vraiment réussie. On retiendra des 7 gifles (1937) la chanson « ich tanze mit dir », un succès durable en Allemagne, que l’on entend encore dans les shows télé outre Rhin. Dans son journal, avec sa dureté et son cynisme habituel, Goebbels note que Lilian Harvey (31 ans seulement !) est à présent vieille et que sa carrière est sur la fin. Il est vrai que Lilian ressemble déjà à une fleur fanée et qu’elle semble avoir perdu tout son entrain dans ses derniers films. Peut être l’actrice ressentait elle dans quel piège elle était tombée et regrettait elle amèrement d’avoir tourné le dos à Hollywood pour un homme qui en fait menait une double vie et le trompait depuis des années. Pour avoir aidé quelques amis juifs à quitter le pays, elle commence à être inquiétée par la Gestapo. Enfin, sa cote de popularité est en chute libre.
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En 1939, Lilian quitte l’Allemagne pour la France où elle finance elle-même les films qui seront les derniers de sa carrière : Sérénade (1939) avec Louis Jouvet (qui a vu ce film ?) et Miquette (1940) avec Daniel Gélin. Hélas, Miquette sort quelques jours avant l’arrivée des allemands en France et la débâcle qui a suivi. Lilian, qui a soutenu les troupes françaises pendant la drôle de guerre, se sauve alors dans le sud de la France, puis la Suisse avant d’arriver à gagner les USA via le Portugal en 1941. A Hollywood, on lui propose des petits rôles d’espionne nazie qu’elle refuse afin d’éviter tout amalgame. Bette Davis refuse qu’elle apparaisse en guest star dans « Remerciez votre bonne étoile ». On lui reproche à la fois d’avoir quitté brutalement les studios américains en 1934 et d’avoir joué dans des films allemands de 1935 à 1939(la photo où Lilian souriante pose à coté d’Hitler lors d’une soirée de 1936 lui a t’elle porté tort ?). Après avoir travaillé bénévolement comme infirmière pour la croix rouge, Lilian participe à des tournées théâtrales (blithe spirit de Noël Coward). Après guerre, elle ne parvient pas à retrouver le succès en Europe. Elle se produit sur scène avec Laurel et Hardy et Henri Garat, au bout du rouleau comme elle. Réfugiée dans ses souvenirs, elle sombre dans l’alcool et la dépression. Elle parvient néanmoins à être dédommagée pour la perte de l’immense propriété qu’elle avait acheté en Hongrie à la fin des années 30, et que les nazis avaient confisqué. De nouveau très riche, elle épouse un agent de change, amateur de casinos et de jeunes femmes et divorce peu après. Else–Pitty Wirth sera la compagne de ses derniers jours. Certains biographes se sont demandés si cette femme était réellement amoureuse de Lilian ou si elle avait profité de la détresse d’une star déchue et alcoolique pour utiliser sa fortune. Lilian est décédée d’une jaunisse en 1968.
Cette vedette qui avait été si populaire avant guerre et dont nos arrières grands parents raffolaient, n’est plus du tout évoquée de nos jours. Pourtant son nom reste familier, malgré tout, sans qu’on sache trop qui elle était et dans quel film elle a tourné, comme s’il subsistait malgré tout encore un peu de lumière de la brillante étoile qu’elle fut.
On se replonge avec plaisir dans ses vieux films, comme si l’on regardait les photos jaunies d’un très vieil album de famille, à condition d’avoir un goût certain pour ce qui est désuet.


Lilian dans le chemin du paradis (1930)
Dernière modification par Music Man le 23 avr. 08, 22:37, modifié 3 fois.
Sailor G.Kelly
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Message par Sailor G.Kelly »

devenquest a écrit :mais aujourd'hui c'est pas pareil ;).... ahhh la mode lol....En fait je l'ai rencontré l'an dernier en France pendant mes vacances en Europe....( Je vis au Canada ).....Voici la photo de moi et Leslie en 2005
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HOOOO, la chanceuse! :o :D :D :D Merci de nous faire partager cette photo :wink:
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