Julien Duvivier (1896-1967)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

Image

The great waltz / Toute la ville danse
Le jeune et fiévreux compositeur Johan Strauss trouveras t’il le succès et fera t’il le bon choix entre la frêle boulangère Podli et la grande cantatrice Clara ? Suspense….

Ramené des USA le dvd Warner m’attendait depuis deja quelques semaines.

Pour l’admirateur de Duvivier le film est d’un intérêt limité. Il ne nous apprends rien qu’on ne sache déjà et malgré sa mise en scene souvent brillante, il ne présente pas l’interet et les qualités d’Anna Karenine, Lydia, Tales of Manhattan ou Flesh and Fantasy
Duvivier mets son grand talent au service d’une comédie musicale, pur produit hollywoodien, servi de plus par un directeur de la photo Joseph Ruttenberg (Fury, Three camarades, Brigadoon, entre autres) oscarisé pour l’occasion. Comme en plus Sternberg vient filer un coup de main sur la fin, on comprend que le film est d’une excellente tenue. Rien à dire de ce coté, la photo est superbe, les scènes dynamiques, les travellings brillants, le tout est bien entrainant comme il se doit. Ca se laisse regarder sans problème. Ou presque.
Car il faut de dire, malgré son art irréprochable, le genre ne sciait pas vraiment à Duvivier. D’ailleurs on le voit tout de suite: des que le film devient plus dramatique (la confrontation entre Mme Strauss et le conte Hohenfried) d’un coup ca décolle. On retrouve le grand Duvivier inspiré sur toute cette partie.
Je suis un peu severe car la longue scene du triomphe (on passe d’un restaurant vide à tout un quartier qui danse) est tres reussie et la scene de la fuite apres l’emeute suivi du passage enchanteur dans les bois est pas mal non plus. Et de fait tout est tres finement filmé.
Mais cela n’empêche pas un ennui sournois.
Le vrai problème est que Duvivier n’a pas la personnalité de Lubitsch. Et Miliza Korjus n’est vraiment pas, alors vraiment pas, Jeanette MacDonald. Alors quand elle chante (tres bien par ailleurs ) on s’emmerde un peu. Et elle chante souvent…. Et cadree en gros plans!
Non, la surprise pour moi est l’excellente Luise Rainer, servie par de beaux dialogues.
Elle incarne, sans niaiserie, une pureté et un amour simple et entier, qu’on ne voit pas forcément si souvent au cinéma. Son interprétation m’evoque le jeu tout en retenu, voire inexpressivité, des actrices japonaises (Hideo Takemine en tete).
Quand elle est devant la caméra il se passe quelquechose.
J’apprends qu’elle est morte en 2014 a 104 ans. Et qu’elle a recu l’oscar deux années de suite juste avant de tourner ce film.

En synthèse, une oeuvre de commande impeccablement réalisé, qui se laisse voir sans soucis, mais dont l’interet est limité (au scenes avec Luise Rainer, en ce qui me concerne).
Avatar de l’utilisateur
Cathy
Producteur Exécutif
Messages : 7321
Inscription : 10 août 04, 13:48
Contact :

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par Cathy »

Elle a eu l'oscar pour visage d'Orient et pour the Great Ziegfeld. La scène au téléphone aurait inspiré à Poulenc sa Voix humaine. Perso je trouve qu'elle joue souvent très faux. Elle a peu tourné. J'aime beaucoup "Toute la ville danse" et on sent Duvivier dans la mise en scène.
The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

Cathy a écrit : 25 nov. 23, 13:03 Elle a eu l'oscar pour visage d'Orient et pour the Great Ziegfeld. La scène au téléphone aurait inspiré à Poulenc sa Voix humaine. Perso je trouve qu'elle joue souvent très faux. Elle a peu tourné. J'aime beaucoup "Toute la ville danse" et on sent Duvivier dans la mise en scène.
Je ne sais si elle joue bien ou mal, mais les scènes où elle apparaît mon plus intéressaient / intriguaient que l’ensemble des passages chantés avec Korjus…

Concernant la mise en scène, on voit que l’on est chez Duvivier, c’est sur. L’exemple le plus frappant est la scene de l’orchestre feminin à la champagne :on demarre par un parcours typiquement Duvivier autour et millieu du groupe de musiciennes, ensuite longs travelling circulaires quand le couple commence danser autour du kiosque, avec enchaînement des prises de vue à différentes distances, puis on colle au couple qui tournoit, jusqu’à l’usage de transparences qui font carrément décollé le couple… (dejà vue dans Maria Chapedelaine entre autre)
Le film est comme beaucoup de Duvivier de cette décennie (pour pas parler des muets…) une leçon impressionnante de mise en scène.
The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

Image
Poil de carotte 1925
Chronique du calvaire d’un gamin, souffre douleur de sa mère au sein d’une famille désunie.

Mon problème avec ce film c’est d’avoir deja vu la version parlante. Qui du coup me semblé meilleure…
Ce drame a hauteur d’enfant oblige Duvivier à moderer un peu sa mise en scene volontiers enthousiaste .
Nous aurons donc moins de ses fameux travellings. Mais, en restant toujours au services de son propos, il exploite néanmoins avec succès quelques effets surprenants.
Par exemple cet étonnant et ingénieux split screen en live grace à un dispositif optique.
Ou ce passage marquant où le pere realise (enfin) la condition de son fils. Duvivier fait un plan audacieux où l’on voit le jeune Poil de carotte au quatre coins de l’image en train de trimer. Duvivier enchaîne avec une serie rapide de courts travellings avant sur le pere qui avance, qui traduit la determination montante de ce dernier.
On a aussi un festival d’incrustations, dont il faut le dire Duvivier abuse un peu.
Autre moment fort, la scene du banquet où le pere fraîchement elu maire se fait interpellé pendant son discours.
Cadrage plongeant, alternance de plans rapprochés,… Duvivier montre un fois de plus qu’il maitrise parfaitement son art.
Tres beaux passages aussi à la fete du village.
Ou dans le bouge au debut ( bouge comme seul le cinéma muet semble avoir ete capable de capter).

Le point faible du film est peut etre l’interprétation. Non pas celle du jeune x
André Heuzétres bon, qui vaut largement celle de Robert Lynen . Mais bien celle du couple Lepic. Henry Krauss n’a pas la présence d’Harry Baur. Quand à Charlotte Barbier-Krauss, avec sa moustache (qu’on espère fausse…) elle en fait trop. Elle n’est pas aidée par le personnage mais de memoire Catherine Fonteney était aussi odieuse, en plus garce, avec moins d’effets.
Le film démontre l’essence meme de la mise en scène de Duvivier, sa capacité à investir les lieux ou paysages, son audace au profit de l’emotion, sa science de la composition,…

Mais je continue de penser que la version parlante est meilleure…
Notre ami Allen John est de l’avis contraire : voir ici :

http://allenjohn.over-blog.com/2017/06/ ... -1925.html
Je lui emprunte la photo ci dessus.

Ps : j’ai profité d’un projection a la fondation Seydoux. J’y étais jamais allé (en raison de l’absence de projection en soiree).
Belle petite salle.
Quant à l’accompagnement au piano, il était tout à fait honorable mais j’accroche plus à ce style et préfère de loin voir les films sans musique ou alors avec une orchestration moderne.
allen john
Assistant opérateur
Messages : 2010
Inscription : 17 mai 06, 19:00
Localisation : Une maison bleue
Contact :

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par allen john »

The Eye Of Doom a écrit : 28 déc. 23, 21:08 Poil de carotte 1925
Chronique du calvaire d’un gamin, souffre douleur de sa mère au sein d’une famille désunie.

Mon problème avec ce film c’est d’avoir deja vu la version parlante. Qui du coup me semblé meilleure…
Ce drame a hauteur d’enfant oblige Duvivier à moderer un peu sa mise en scene volontiers enthousiaste .
Nous aurons donc moins de ses fameux travellings. Mais, en restant toujours au services de son propos, il exploite néanmoins avec succès quelques effets surprenants.
Par exemple cet étonnant et ingénieux split screen en live grace à un dispositif optique.
Ou ce passage marquant où le pere realise (enfin) la condition de son fils. Duvivier fait un plan audacieux où l’on voit le jeune Poil de carotte au quatre coins de l’image en train de trimer. Duvivier enchaîne avec une serie rapide de courts travellings avant sur le pere qui avance, qui traduit la determination montante de ce dernier.
On a aussi un festival d’incrustations, dont il faut le dire Duvivier abuse un peu.
Autre moment fort, la scene du banquet où le pere fraîchement elu maire se fait interpellé pendant son discours.
Cadrage plongeant, alternance de plans rapprochés,… Duvivier montre un fois de plus qu’il maitrise parfaitement son art.
Tres beaux passages aussi à la fete du village.
Ou dans le bouge au debut ( bouge comme seul le cinéma muet semble avoir ete capable de capter).

Le point faible du film est peut etre l’interprétation. Non pas celle du jeune x
André Heuzétres bon, qui vaut largement celle de Robert Lynen . Mais bien celle du couple Lepic. Henry Krauss n’a pas la présence d’Harry Baur. Quand à Charlotte Barbier-Krauss, avec sa moustache (qu’on espère fausse…) elle en fait trop. Elle n’est pas aidée par le personnage mais de memoire Catherine Fonteney était aussi odieuse, en plus garce, avec moins d’effets.
Le film démontre l’essence meme de la mise en scène de Duvivier, sa capacité à investir les lieux ou paysages, son audace au profit de l’emotion, sa science de la composition,…

Mais je continue de penser que la version parlante est meilleure…
Notre ami Allen John est de l’avis contraire : voir ici :

http://allenjohn.over-blog.com/2017/06/ ... -1925.html


Ps : j’ai profité d’un projection a la fondation Seydoux. J’y étais jamais allé (en raison de l’absence de projection en soiree).
Belle petite salle.
Quant à l’accompagnement au piano, il était tout à fait honorable mais j’accroche plus à ce style et préfère de loin voir les films sans musique ou alors avec une orchestration moderne.
Hop! Je me permets, ayant déjà par la grâce de la citation un pied dans la pièce! Mon point de vue sur la version muette n'a pas changé, et je continue à le préférer. Je retournerai toujours vers ces deux films de toute façon.
Je pense que l'interprétation super chargée deCharlotte Barbier-Krauss, en vérité, est à interpréter comme une volonté "impressionniste" (le mot était à la mode à cette époque dans le cinéma Français) de véhiculer le point de vue du gamin... Mais les gouts, les couleurs, la culture de chacun... tout ça n'a pas tant d'importance: je te rejoins de toute façon sur l'idée essentielle, Duvivier est un grand cinéaste et ces deux films, chacun à leur façon, sont de très grands témoignages de son talent...
Ah, et sinon, la moustache, oui oui, elle est fausse. Dame Charlotte a joué un rôle de premier plan dans La Divine Croisière (également de Duvivier) et il n'y a pas un poil disgracieux en vue. Elle a un physique, disons, différent, mais sinon, pas de balai brosse sub-nasal.
The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

C’est marrant parce que c’est le seul film parmis les muets où je me suis dit par moment qu’il y avais un coté « cinéma muet ». C’est con comme remarque et ca ne vaut pas pour tout le film, mais des passages ont une esthétique « cinéma muet ». Cette réflexion ne m’a pas effleuré dans les autres films (alors que fondamentalement ca doit être pareil). Signe peut etre que je ne suis pas rentrer à fond dans l’ouvrage.
Comme indiqué, le piano m’a pas mal incommodé suf la 1ere moitié.
Ca m’intéresserais vraiment de lire un texte d’analyse de la mise en scene de Duvivier, qui me fascine tant. J’ai pas la culture analytique pour saisir ce qui en fait la singularité.
Et puis il y a clairement différentes periode. Je préfère nettement celle muette et avant 1940. Ensuite Duvivier semble préférer une forme plus « classique «  meme si il n’a rien perdu de son art dans Lydia, Anna Karenine, Pot bouille et memes les Don Camillo
Avatar de l’utilisateur
Duane Jones
Doublure lumière
Messages : 653
Inscription : 5 nov. 21, 13:43
Localisation : Pittsburgh
Contact :

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par Duane Jones »

J'avais préféré la version muette de Poil de carotte mais j'ai dû mal à me souvenir de la raison... :|
Je crois que je l'avais trouvé le film mieux écrit et je n'ai pas trouvé de grosses différences d'interprétation entre Henry Krauss et Harry Baur (de même avec Robert Lynen et André Heuzé).
The Eye Of Doom a écrit : 28 déc. 23, 21:47 Ca m’intéresserais vraiment de lire un texte d’analyse de la mise en scene de Duvivier, qui me fascine tant
Pareil. Je suis toujours fasciné par sa mise en scène. Ses films sont tous formellement très travaillés même dans ceux que j'aime le moins, je trouve toujours des séquences qui m'impressionnent.
Avatar de l’utilisateur
cinephage
C'est du harfang
Messages : 23921
Inscription : 13 oct. 05, 17:50

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par cinephage »

Duane Jones a écrit : 29 déc. 23, 11:11 J'avais préféré la version muette de Poil de carotte mais j'ai dû mal à me souvenir de la raison... :|
Je crois que je l'avais trouvé le film mieux écrit et je n'ai pas trouvé de grosses différences d'interprétation entre Henry Krauss et Harry Baur (de même avec Robert Lynen et André Heuzé).
The Eye Of Doom a écrit : 28 déc. 23, 21:47 Ca m’intéresserais vraiment de lire un texte d’analyse de la mise en scene de Duvivier, qui me fascine tant
Pareil. Je suis toujours fasciné par sa mise en scène. Ses films sont tous formellement très travaillés même dans ceux que j'aime le moins, je trouve toujours des séquences qui m'impressionnent.
Clairement l'utilisation des extérieurs et des décors. J'imagine que le son était plus contraignant et qu'il n'a pas eu la même liberté. Les deux films restent honorables, cela dit.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
Avatar de l’utilisateur
Julia-Nicole
Stagiaire
Messages : 34
Inscription : 23 déc. 17, 15:51

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par Julia-Nicole »

The Eye Of Doom a écrit : 28 déc. 23, 21:47
Ca m’intéresserais vraiment de lire un texte d’analyse de la mise en scene de Duvivier, qui me fascine tant. J’ai pas la culture analytique pour saisir ce qui en fait la singularité.
L'excellente biographie d'Eric Bonnefille Julien Duvivier - Le mal aimant du cinéma français, parue en 2002, devrait répondre, au moins en partie, à vos interrogations.
The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

Julia-Nicole a écrit :
The Eye Of Doom a écrit :
Ca m’intéresserais vraiment de lire un texte d’analyse de la mise en scene de Duvivier, qui me fascine tant. J’ai pas la culture analytique pour saisir ce qui en fait la singularité.
L'excellente biographie d'Eric Bonnefille Julien Duvivier - Le mal aimant du cinéma français, parue en 2002, devrait répondre, au moins en partie, à vos interrogations.
Merci mais l’ouvrage, indispensable, est un biographie et non un ouvrage d’analyse critique .
Dernière modification par The Eye Of Doom le 18 avr. 24, 21:55, modifié 1 fois.
The Eye Of Doom
Régisseur
Messages : 3128
Inscription : 29 sept. 04, 22:18
Localisation : West of Zanzibar

Re: Julien Duvivier (1896-1967)

Message par The Eye Of Doom »

Image

La femme et le pantin
Durant la feria de Seville, une belle blonde francaise croise du regard d’un quadra beau gosse, riche et tombeur. Qui sera la proie de l’autre ?

Le film n’a pas bonne réputation et je m’attendais à trouver un comparse à Boulevard au fond du fond de la filmo de Duvivier.
Il n’en ait rien.
Attention le film n’en est pas un chef d’oeuvre pour autant mais il a, je trouve, une belle personnalité et des qualités.

Tout d’abord plastique.
La surprise c’est la couleur.
Sauf erreur de ma part c’est le premier film de Duvivier en couleur (le seul autre sera son dernier, Diaboliquement votre) et franchement pour un « novice », Duvivier s’en tire tres bien! La photo est chaude, vives, et Duvivier exploite bien ambiance, decors et costumes, en toutes circonstances. Sans donner dans le decoratif plus que ne requiert l’intrigue.
Le coté « carte postale » de Seville devait faire partie du cahier des charges et Duvivier s’en acquitte avec finesse.
Les scenes « folkloriques » abondent mais, mais Duvivier nous les montrent pour ce qu’elles sont : un spectacle, un artifice. On n’en sort d’ailleurs assez peu, du spectacle et de l’artifice…
Le ton est donné d’entrée par le commentaire assez cynique livré sur la Feria.
Au delà du folklorique imposé, l’art du cadrage et de la mise en scène est bien constant, notamment dans quelques scènes anodines (le tenancier du cabaret bas gamme nourrissant ses volailles, la sortie du commissariat, l’echapée à cheval,…).
Sur le fond, ce qui surprend c’est deux choses:
D’abord la crudité et la dureté du propos. Duvivier et ses scénaristes, ont à coeur de rendre compte de la réalité des situations et des personnages, au delà de la chatoyance des couleurs et la beauté de l’artifice. Réalité de la prostitution et du metier d’artistes, fatuité de hidalgo, … jusqu’au personnage du père, ancien collabo antisemite condamné à l’exil. Tres beau personnage aussi de l’épouse handicapée,… Et dans un autre registre pour le patron de cabaret incarné par un Dario Moreno excellent. Ses dialogues avec Matteo sont tres bons.
Bref on est bien 100% chez Duvivier!

Ensuite le personnage central.
Je ne connais du roman que l’adaptation de Sternberg, qui n’a rien à voir avec celle de Duvivier.
Ici Eva est une jeune femme qui n’a rien d’une « femme fatale ». Elle est évidemment tres belle, le sait et n’hésite pas à s’en servir. Mais son vrai statut, qui donne tout le sens dramatique du film, est :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Qu’elle est vierge
On peut dire que ce film est le long recit du chemin vers la perte de la virginité.
Tres beau final d’ailleurs avec la clé et l’escalier.
On comprend qu’Eva est profondément amoureuse de Matteo et que si elle le mène en bourrique c’est dans une jeu qui n’a de pervers que l’apparence.
Ici bien sur arrive la question Bardot….
Bonne actrice, mauvaise actrice,…. Qu’aurait donné le film avec une autre ? Un film meilleur ? Peut etre.
Mais disons que 80% du temps je l’ai trouvé plutot bonne et en tout bien investi dans le personnage, rendant compte de son coté « nature » et fantasque.
On peut lire sur la page Wikipedia les excellent souvenir de BB sur le tournage. Tres drôle !

In fine un film beaucoup intéressant que sa réputation, 100% Duvivier. Un film qu’on a envie de défendre.

Une inattendue bonne surprise.

Je cite pour conclure (source wikipedia):

« L'Espagne aidant, La Femme et le Pantin est un film extraordinairement pudique.[...] Cette beauté classique, à la fois morale et physique, faite d'élégance, de spontanéité et d'exigence presque abstraite, Duvivier la rejoint plus directement que Vadim, ne l'envisageant que dans ce qu'elle a de plus épuré. »
— Luc Moullet, Cahiers du cinéma, n°94, avril 1959
Répondre