Jerry Lewis (1926-2017)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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hansolo
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Re: Jerry Lewis (1926-2017)

Message par hansolo »

Conclusion de
« Quand je fais du cinéma » de Jerry Lewis (1971).

Retrouvé par Alexandre Tylski

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Le grand saut - Joel & Ethan Coen (1994)
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Jack Carter
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Re: Jerry Lewis (1926-2017)

Message par Jack Carter »

Jerry Lewis cineaste du 8 au 25 novembre à la Cinematheque Française

https://www.cinematheque.fr/cycle/jerry ... -1123.html
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Thaddeus
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Re: Jerry Lewis (1926-2017)

Message par Thaddeus »

Merci à Jack (et à la Cinémathèque Française) pour ce tir groupé, qui me permet d'actualiser encore un peu davantage tout ce fatras...

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Le dingue du palace
Dans un silence tendu, religieusement observé par un public admiratif, un golfeur s’apprête à exécuter le putt final. Après deux minutes de manipulation, le héros muet et maladroit actionne le flash de son appareil photo, faisant alors manquer son coup au champion. Ceci est un gag, dont on ne sait ce qui l’emporte de la pauvreté ou de la prévisibilité. Si certaines idées s’élèvent un peu au-dessus de la médiocrité, le premier film de Lewis témoigne de curieuses limites. C’est une loi d’airain que la réception du burlesque par le spectateur se joue à quitte ou double : à titre personnel, pas un début de sourire n’est venu émailler cette suite disloquée de saynètes brouillonnes empilées au petit bonheur, où le fondu au noir vient systématiquement sceller une chute improbable, et dont il ne retombe aucun débris solide. 2/6

Le tombeur de ces dames
Si le précédent film pouvait s’appréhender comme une étude inquiétante et austère du gag, sans le moindre artifice de scénario, celui-ci se présente sous un apprêt de civilisation qui le rend plus accessible. De pimpantes couleurs y soulignent outrageusement l’arbitraire d’un immense décor filmé en coupe, qui tient de la maison de poupée et de la ruche bourdonnante. Obligeant à gober les changements à vue, l’auteur substitue la dilatation du détail au raccord explicatif, torture sa création avec acharnement, traite les stéréotypes à l’acide pour mieux exorciser sans doute l’angoisse d’une rupture irrémédiable avec une société dont il ressent toutes les distorsions tératologiques, mais qu’il ne peut renier sans subir le châtiment de solitude. Ainsi l’éternel ado attardé devient-il le fou de notre royaume. 4/6

Docteur Jerry et mister Love
Le roman de Stevenson fait l’objet ici d’un traitement parodique exerçant une entreprise de destruction systématique et s’aventurant derrière le miroir pour oser explorer, par-delà l’extravagance de la comédie et des gags, un univers presque angoissant, proche de Kafka et de Borges. L’inversion du thème originel, qui voit un professeur de chimie myope, bossu, bredouillant et maladivement complexé se transformer en un play-boy prétentieux, goujat, dont la muflerie n’égale que la dose de gomina, favorise une satire qui tire à boulets rouges et non sans cruauté sur plusieurs institutions américaines. Mais c’est surtout par son achèvement plastique et certaines lumineuses idées formelles que l’œuvre dépasse l’aspect somme toute assez consensuel d’une morale voulant que la vraie beauté soit intérieure. 4/6

Jerry souffre-douleur
En racontant l’histoire de ce groom programmé par quelques producteurs désemparés pour devenir une star, l’auteur nourrit un thème éprouvé : l’ascension d’un minable et sa rencontre avec une célébrité fragile et trompeuse. L’univers de Jerry-comique-qui-pense réapparaît ainsi dans toute son identité mais également toutes ses limites : la destruction incessante d’une mise en scène élégante par un script inégal, la mièvrerie des séquences-confessions, la contradiction flagrante entre une vision du monde prétendument rigoureuse et la fragmentation du récit en une suite de sketches qui en éloignent. Or on peut attendre de lui mieux que des morceaux ni trop solides ni trop fragiles, que des pitreries plus ou moins riches d’intentions latentes, bref mieux qu’un perpétuel et précaire équilibre entre deux chaises. 3/6


Mon top :

1. Le tombeur de ces dames (1961)
2. Docteur Jerry et mister Love (1963)
3. Jerry souffre-douleur (1964)
4. Le dingue du palace (1960)

Son comique grimacier et ses pitreries outrancières sont hérités de la tradition burlesque, celle des Marx brothers en premier lieu. Son image de maladroit et d’inadapté représente le type du Schlemiel de la tradition yiddish, victime de la vie et poursuivi par une malchance qui lui colle à la peau. En soudant ces deux aspects à la faveur d’une forme élaborée, fertile en inventions surréalistes et en glissements oniriques, Jerry Lewis s’est taillée (selon une certaine mouvance critique française, en tout cas) une place privilégiée dans l’histoire de la comédie américaine. On peut en reconnaître les qualités, voire les apprécier, sans y goûter pleinement.
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