Yoshimitsu Morita (1950-2011)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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bruce randylan
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Yoshimitsu Morita (1950-2011)

Message par bruce randylan »

Profitons de la 2ème partie de la grande rétrospective que lui consacre la MCJP (où il ne manque que ses films en 8mm) pour aborder ce cinéaste aussi atypique qu'anticonformiste et qui, malgré le cultissime Jeu de Famille (1983), n'a quasiment pas été distribué en occident avec notamment 0 titre à ma connaissance édité en DVD/blu-ray.

Je découvre véritablement moi-même le cinéaste à l'occasion et je n'avais pas pris le temps de parler des 4 films que j'avais pu voir l'automne dernier.
Alors pour commencer :

Ensuite (Sorekara - 1985)

Au début du 20ème siècle, Daisuke, fils d’un riche commerçant, n'a pas l'air de vouloir rentrer dans le rang : il refuse de travailler et décline toutes les propositions de mariage de sa famille. Pour aider un ami à rembourser ses dettes, il doit ainsi souvent emprunter de l'argent à sa famille qui commence à se lasser de cette situation.

D'après le critique d'Utamaru qui lui a consacré un livre, c'est avec cette adaptation de Natsume Soseki que Morita rentra vraiment dans la cour des grands et Sorekara récolta de nombreux récompenses dans son pays à sa sortie.

C'est une œuvre assez déstabilisante, faussement académique, et qui jouit d'une certaine liberté artistique, prenant son temps pour aborder le cœur de son récit, à savoir la relation entre Daisuke et la femme de son ami endetté. Le début semble être une manière d'esquisser la société de cette époque plutôt que de la reconstituer fidèlement. Morita semble presque s'amuser à souligner l'artificialité de sa peinture sociétale avec ses décors très réduits, ses costumes mondains trop chics, une photographie pas vraiment naturaliste ou encore un Chisu Ryu venant jouer le patriarche conservateur. Une manière de mieux montrer le décalage entre ce monde et son héros qui n'est pour autant jamais militant ou rebel par son mode de vie. Il semble témoigner avant tout d'une lassitude, d'une indifférence et plus générallement d'un spleen.
Comme le film avance sans définir d'emblée ses enjeux dramatiques, il m'a fallut un moment pour rentrer dans le film (pas aider par la fatigue). C'est grâce à un flash-back "semi-figé" qu'on saisit les liens plus complexes entre le trio principal.
A partir de là, on comprend mieux cette narration par non dits, suggestions et frustrations. La gestuelle y trouve une importante place à ce titre. Et puis, il y a un scénographie spécifique au cinéaste à ce stade de sa carrière qui multiplie les ellipses et faux raccords dans la topographie et l'espace : le héros se déplace sans logique temporelle ni géographique au début (tant d'un plan à l'autre que dans le même plan par l'utilisation de doublure silhouette), des objets se déplacent seul (littéralement collé à la caméra) ou changent discrètement d'emplacement dans la même séquence. Par exemple, lors d'un concert, Daisuke regarde la fille que ses parents voudrait qu'il épouse. Dans son regard et aux travers des 2 travellings se rapprochant d'elle, on sent qu'il éprouve une certaine attirance ou fascination... sauf que le père de cette dernière se retrouve systématiquement au premier plan, changeant donc de rangs et de sièges entre 2 plans, une manière de rappeler qu'il s'agit aussi d'un mariage d'intérêt avec pour ses parents. C'est plutôt subtil et ça traduit un trouble émotionnel qui fonctionne très bien, d'autant que la mise en scène peut s'avérer assez fragmentée (dans ce canevas académique dira-t-on) avec de fugaces accélérations dans le montage et des sorte d'interludes symboliques (les passages dans le tramway). A l'inverse, j'ai été moins touché par les longues scène du dernier tiers en plan-séquence qui m'ont paru trop théâtraux et parfois sur-explicatifs quant aux sentiments éprouvés même s'il faut admettre que quelques échanges autour des douleurs trop longtemps gardées secrètes sont très réussis à l'intérieur de ses "blocs".
Plusieurs connaisseurs du cinéaste cite souvent ce titre comme faisant partie du top 3 du cinéaste. Je reste au final moins enthousiaste car si je lui reconnais une véritable richesse formelle et thématique, je n'ai pas totalement été pris dans la valse des tourments, d'autant que certains partis pris se retournent contre eux puisqu'on se surprend parfois à scruter les possibles variations du mobiliers plutôt que suivre les personnages à l'écran.

Le trailer en japonais pour ce faire une idée
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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Profondo Rosso
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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

Message par Profondo Rosso »

Ah un de mes réalisateurs japonais favoris des années 80/90, grande découverte récente ! Je remets quelques avis tu topic cinéma aisatique

The Family Game de Yoshimitsu Morita (1983)

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Dans une famille typique de la classes moyenne japonaise, le fils cadet est rebelle aux études. Inquiets que leur enfant ne puisse entrer dans un bon lycée pour intégrer plus tard une bonne université, ses parents lui alloue un tuteur. Mais celui-ci a des méthodes très particulières d'enseignement et la vie de famille va s'en trouver bouleversée.

The Family Game est une fable sacrément subversive sur le modèle familial japonais. Le récit (adapté d'un roman de Yohei Honma) fonctionne comme une sorte de pendant inversé du Théorème de Pasolini. Un élément perturbateur va se glisser dans la cellule d'une famille de classe moyenne japonaise non pas pour servir de révélateur de leurs tares et la faire imploser, mais au contraire les figer de plus belle dans les rôles que la société leur a assignés. Yoshimoto (Yūsaku Matsuda) est un professeur particulier engagé pour relever les notes catastrophiques de Shigeyuki (Ichirōta Miyagawa), enfant cadet de la famille Numata. Le réalisateur impose immédiatement un dispositif formel fondé sur la répétitivité des environnements, des inserts, cadrages et situations qui reviendront tout au long du récit. Au sein du foyer la salle à manger sert aux rares moments d'accalmie et de complicité, alternant avec la chambre de Shigeyuki et de son frère aîné Shinichi (Junichi Tsujita) théâtre des échappées rêveuses de ces derniers ou alors moments d'études studieux. A l'extérieur les scènes de classe travaillent cette même répétitivité avec une caméra parcourant les travées de la pièce où règne animosité, rivalité et humiliations (tant des élèves entre eux que des professeurs) aux moments douloureux de la restitution des copies du dernier examen. Les contre-plongées sur cours de sport, les plans larges du terrain abandonné où Shinichi subit les agressions de ses camarades après les cours, tout cela dessine un environnement figé où la jeunesse fait figure de pions perdants ou gagnant destinés à reproduire le modèle de leurs parents.

Le professeur Yoshimoto va constituer un vrai grain de sable dans ce cadre normé. La métronomie de la mise en scène de Morita instaure une forme d'étrangeté plutôt que de normalité où une attitude, un geste, un élément de décor ou une idée formelle (ce fondu enchaîné presque invisible faisant apparaître des mains sur le visage de Shigeyuki) installe une tonalité décalée. Les protagonistes sont anormalement "normaux" dans la bizarrerie de certaines situations. La mère de famille (Saori Yuki) reste étonnamment impassible lorsque Yoshimoto inflige une gifle retentissante faisant saigner du nez son élève récalcitrant de fils. C'est une sorte de cliché de la japonaise soumise et effacée tandis que le père (Juzo Itami) correspond à celui du salaryman usé et déserteur du foyer. Yoshimoto en devient ainsi tout puissant mais le film n'est pas là pour vanter les vertus d'une éducation à la dure. Au contraire le professeur flatte les bas-instincts du jeune Shigeyuki (Ichirota Miyagawa génialement perché et ahuri), cette violence ponctuelle étant un stimulus inhérent à un autre cliché du "management" sévère à la japonaise qui réveillera notre héros pour les mauvaises raisons. C'est en voyant la réaction contrariée de ses harceleurs face à ses notes en progrès que Shigeyuki met du cœur à l'ouvrage, mais son manque d'ambition et désintérêt pour les études n'ont pas changés au vu de ses choix d'orientations scolaires médiocres (et plus en adéquation avec son niveau désormais plus élevé). Tous les personnages semblent des pantins que Morita tire vers l'absurde dans les scènes intimes, où de manière distante à travers les nombreuses vues du panorama urbain où leur existence semble dérisoire.

Les situations donnent l'illusion d'une émancipation avec les supposés changements amenés par le mentor Yoshimoto, le dispositif filmique évoqué plus haut reste invariablement le même, donnant l'impression d'une agitation passagère, d'une illusion. Lorsqu'on échappe à ce carcan pour scruter la vérité des personnages, c'est pour constater que même la notion d'amour est très relative au sein de cette cellule familiale. Au détour d'une discussion on comprendra que le mariage tient à une grossesse non désirée et que la mère regrette l'amusement de sa jeunesse et des responsabilités prématurées. Le père y échappe par le prétexte de sa nature de salaryman, et la mère au foyer y est contrainte par sa présence constante obligatoire, mais de manière absente, désincarnée. Seul le personnage du frère aîné semble apte à s'émanciper, séchant les cours de sa classe préparatoire, errant sans but plutôt que de suivre la ligne toute tracée qui l'attend. Les parents ne manifestent d'ailleurs un semblant d'autorité que quand les enfants s'écartent où ne semblent pas capables de s'inscrire dans ce schéma social préétabli, d'où l'engagement du tuteur ou le sursaut de paternité plus affirmée envers Shinichi à la fin.

Yusaku Matsuda est fabuleux dans ce rôle de professeur pince sans rire, tour à tour père fouettard ou complice dont la mine placide et le phrasé rustre installe d'emblée cette tonalité "autre". Nagisa Oshima était un grand admirateur du film et effectivement cela rappelle la nature conceptuelle de ses brûlots les plus incisifs des années 60. C'est également amusant d'avoir Juzo Itami dans le rôle du père, puisque dans ses réalisations à venir (The Funeral (1984), Tampopo (1985) ou Minbo ou l'art subtil de l'extorsion (1992)) il usera aussi de cette veine nonsensique (mais avec un côté plus grand public) pour dénoncer certains maux de ses contemporains japonais. La conclusion est magistrale avec une scène de repas dont le dérèglement des comportements filmés en plan-séquence fixe en fait une "Cène" progressivement traversée par la démence pure. La dernière image de nouveau en plan-séquence traduit de façon littérale et audacieuse cette notion de pure illusion de ce que l'on a pris pour une rébellion, une affirmation. Un grand film qui anticipe les mentalités de la bulle économique japonaise (la réussite matérielle comme liberté illusoire alors que le modèle social reste le même) dans le microcosme familial. Le film sera un grand succès public et critique (élu Meilleur Film de l'Année par la critique japonaise) qui lancera la carrière de Yoshimitsu Morita. 5/6

And Then de Yoshimitsu Morita (1985)

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Daisuké, riche et indolent, fils de bonne famille, a déjà atteint la trentaine et persiste à demeurer célibataire, à n'exercer aucun métier ; son univers est intérieur, fait de rêve, d'esthétisme, de pensée pure. Jusqu'au jour où l'amour le frappe au coeur : il découvre qu'il aime Michiyo, l'épouse de son meilleur ami.

The Family Game (1983) avait révélé le talent du réalisateur Yoshimitsu Morita avec une comédie noire brillante fustigeant la cellule familiale japonaise moderne. And Then creuse le même sillon mais l'ironie de son prédécesseur laisse place à un drame feutré captivant. Dans The Family Game, le héros adolescent était bousculé dans son indolence à la fois par les exigences de sa famille et par un élément perturbateur extérieur qui lui faisait comprendre la nature vaine de cette course à la réussite dans la société japonaise matérialiste des 80's. L'intrigue de And Then se déplace au début du XIXe siècle mais également à une ère d'expansion politique et économique du Japon. Nous avons cette fois un protagoniste adulte, le trentenaire Daisuke (Yūsaku Matsuda), fils de bonne famille qui lui aussi déçoit les attentes sociales de son entourage. Sans métier, célibataire repoussant tous les bons partis, il se laisse vivre et préfère se plonger dans les plaisirs culturels divers, en dehors du monde et de ses obligations. Les retrouvailles avec son ami Hiraoka (Kaoru Kobayashi) vont pourtant lui rappeler les raisons de ce détachement. Daisuke a toujours été amoureux de Michiyo (Miwako Fujitani), épouse d'Hiraoka qui s'est déclaré avant lui et l'obligeant à se mettre en retrait.

Les retrouvailles des deux amis sont l'occasion de constater leurs différences. L'indifférence de Daisuke l'amène à mener une vie monotone qui lui convient quand Hiraoka justement dans cette course à la réussite sociale a connu de nombreuses déconvenues qui le mettent en difficultés financière. L'absence d'ambition amène l'un à se perdre dans une existence sans but, les rêves de grandeur de l'autre le mène à l'impasse et menace son couple. Michiyo est en effet la grande perdante de la situation, malheureuse avec un Hiraoka complexé qui la délaisse, et partageant les sentiments de Daisuke qui n'a jamais osé franchir le pas. Les femmes sont ici les jouets des décisions des hommes, y compris devant le recul de Daisuke quand il s'écartera du mariage de convenance que sa famille le pousse à faire avec la fille d'un ami nanti. Yoshimitsu Morita adopte dans sa mise en scène le caractère rêveur et dans l'attente de son héros, multipliant les longs plans fixes où dans les déambulations extérieures on sent son esprit divaguer. La dimension abstraite et stylisée des décors laisse supposer sa présence physique mais son absence mentale, tandis que les scènes de dialogues instaurent de longs silences où un geste, un regard, laissent espérer une réaction, une affirmation de Daisuke qui n'arrivera jamais.

Le récit nous plonge ainsi dans une langueur aussi fascinante qu'agaçante et qui n'est pas sans rappeler les sentiments qui peuvent nous traverser à la lecture d'un roman d'Henry James. Le film est d'ailleurs adapté du roman Et puis de Natsume Sōseki (paru en 1909) et l'auteur, diplômé au département d'anglais de l'université de Tokyo était bilingue et spécialiste de la littérature anglaise sur laquelle il publia plusieurs articles notamment Laurence Sterne ou Tristram Shandy. Il enseigna la également littérature anglaise et vécu à Londres de 1900 à 1903 Du coup on peut soupçonner l'influence d'un Henry James dans cette description d'un microcosme aux codes contraignants, à la nature dont ils brisent les personnalités ne s'y inscrivant pas et la manière scruter un caractère introverti. Tout cela se ressent en tout cas dans le film à la fausse froideur dissimulant une profonde sensibilité. Les manifestations des sentiments n'en deviennent que plus fortes comme cette magnifique scène où les déclarations mutuelles de Daisuke et Michiyo se font tout en retenue, chacun se reprochant la punition son triste sort par le manque de courage au moment où tout était encore possible. Les personnages semblent ainsi tous des morts en sursis, poursuivant dans une rêverie récurrente (la scène de flashback sous la pluie et son entêtant leitmotiv musical de Shigeru Umebayashi est hypnotique dans ses redites) où une réalité vouée à l'échec un espoir vain d'accomplissement matériel ou sentimental. La photo cotonneuse de Yonezô Maeda capture parfaitement cet entre-deux fataliste d'attente déçue et de futur résigné. Le trio d'acteur est excellent pour porter ces thèmes dans un registre de retenue complexe, notamment Yūsaku Matsuda aux antipodes de son rôle de professeur manipulateur et exubérant de The Family Game. Une belle réussite (qui passé par la Quinzaine des réalisateurs cannoise en 1986) qui donne envie de voir d'autres œuvres de Morita, cinéaste injustement méconnu en occident semble-t-il. 4,5/6
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Profondo Rosso
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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

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Lost Paradise de Yoshimitsu Morita (1997)

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Dans un Japon en voie de changements économique et social, Shoishiro réalise que sa dévotion pour l'entreprise qui l'emploie n'a servi à rien. Il rencontre Rinko, qui subit un mariage forcé. Ils tombent amoureux et retrouvent dans cette relation un enthousiasme depuis longtemps perdu. Mais leur entourage voit la chose d'un mauvais oeil...

Yoshimitsu Morita signe un mélodrame bouleversant avec ce Lost Paradise qui explore des thèmes déjà explorés dans sa filmographie, tels que les amours impossibles de And Then (1985) ou le carcan oppressant de la cellule familiale dans The Family Game (1983). Dans ces deux films s'exprimait une critique virulente de la société japonaise dont les codes assignant les individus à un rôle, une voie toute tracée, les paralysaient et les conduisaient à leur perte. Après la comédie noire de The Family Game et le drame historique de And Then il trouve un nouveau mode d'expression pour exprimer ces questionnements. Il adapte là un roman de Junichi Watanabe qui fut un best-seller au Japon en 1997 et qui connut en plus du film de Morita une transposition en série. Watanabe était spécialisé pour ses romans traitant souvent de l'adultère chez les adultes d'âge mûr. Morita y trouve là un écrin idéal puisque cet âge mûr des personnages de Watanabe correspond aussi à l'ultime de moment de résignation ou à l'inverse au fol et désespéré espoir de trouver la flamme.

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L'histoire dans son point de départ parait assez simple. Shoichiro (Kōji Yakusho) est un cinquantenaire rangé marié et père, qui va tomber amoureux de Rinko (Hitomi Kuroki), une jeune femme engoncée dans un mariage arrangé. Tous deux ont suivis les règles sociales implicites, un métier solide, fonder un foyer, sans y trouver bonheur ou accomplissement. On comprend que Shoichiro est sur une voie de garage dans son travail d'éditeur qu'il effectue sans passion, et que le métier de professeur de calligraphie de Rinko n'est qu'un prétexte pour échapper quelques heures de son sinistre foyer et du contact de son époux distant. Yoshimitsu Morita filme tous les lieux sans lien avec cette passion amoureuse comme des environnement de passage, dont les protagonistes sont justement les marionnettes de ce système, les salarymen affairés que côtoie Shoichiro au bureau, sa femme en silhouette dévouée qu'il se contente de retrouver ou quitter sans ne plus rien partager avec elle. La photo Hiroshi Takase capture parfaitement la neutralité de ces lieux où contraints, les personnages sont physiquement présents mais totalement absent intérieurement, toutes les pensées étant obnubilées par les retrouvailles prochaines avec l'autre.

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Le contraste s'avère saisissant entre les êtres éteints durant ces moments où ils doivent jouer leur rôle, est l'incroyable fièvre des scènes d'amour. C'est particulièrement frappant chez la silencieuse et effacée Rinko qui laisse se dévoiler son âme et se déchaîner son corps dans les intenses et nombreuses scène de sexe. Hitomi Kuroki et Kōji Yakusho font preuve d'un abandon assez stupéfiant qui traduit bien à quel point ce sont là les moments où les personnages sont vivants, incarnés, en tant que couple. La grisaille des environnement urbain s'estompe dans ces instants pour laisser voir des paysages majestueux dans lesquels le couple s'échappe. C'est finalement un état auquel aspire tous les protagonistes sans l'atteindre, faute d'avoir fait la bonne rencontre, ou d'avoir déjà renoncé au bonheur. Morita l'exprime lors de scènes presque triviales comme lorsque durant un dîner entre collègues, ces hommes mûrs imaginent rieur ce qu'ils feraient s'ils avaient une aventure avec une femme plus jeune, dans quel hôtel ils l'emmèneraient. Une vraie attente se niche sous cette désinvolture, tout comme chez cette amie divorcée de Rinko semblant chercher un parti chez un bel étranger après avoir été mariée à un français.

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Concrètement aucun obstacle ne semble empêcher Rinko et Shoichiro de quitter leur situation malheureuse pour vivre ensemble. Mais Morita diffuse en creux un climat anxiogène et culpabilisant ou tout appelle à éloigner le couple. La dépendance matérielle encore forte de la femme japonaise envers son époux, le poids des conventions et surtout une hypocrisie qui rend, une fois connue, la liaison des personnages répréhensibles envers leur famille pour Rinko (sa mère ancienne femme quittée qui voit dans sa fille une réminiscence de son mari absent) ou ajoute à la disgrâce en milieu professionnel pour Shoichiro. L'échappée belle ne peut se faire que dans ces étreintes à la dérobée, mais la pression du conformisme s'avère insupportable sur la durée. Tout au long du film court le thème de l'amour passionnel et morbide, les personnages ayant des discussions les amours funestes comme celle de Abe Sada ou d'autres couples littéraires de suicidés. Peut-être est-ce là le seul moyen de s'aimer sans contrainte, le film basculant dans sa dernière partie dans une épure encore plus marquée où le monde extérieur n'existe plus, la "petite mort" de l'orgasme devenant celle concrète de la dévotion amoureuse ultime. Tout en se montrant très feutré, Morita atteint une intensité dramatique et un romantisme désespéré marquant qui rappelle justement la retenue en plus la dualité Eros/Thanatos qu'on trouve dans La Véritable histoire d'Abe Sada de Noboru Tanaka ou L'Empire des sens de Nagisa Oshima mais dans un cadre contemporain - et supposé plus libre. Un très beau et captivant film qui confirme le talent de Morita et donne envie de creuser encore sa filmographie. 5/6

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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

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Haru de Yoshimitsu Morita (1996)

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Un homme avec le pseudo "Haru" chats en ligne avec un autre homme "Hoshi" avec l'idée que "Hoshi" est un homme. Ils discutent de la relation de "Haru" avec sa petite-amie entre autres. Mais en réalité, "Hoshi" est une jeune femme utilisant un pseudo masculin pour éviter les avances d'autres hommes...

L'émergence et la démocratisation progressive d'internet dans les foyers amènent des bouleversements sociaux dont le cinéma allait très vite s'emparer. Le cinéma américain dans ses tentatives initiales se contente de prolonger des formules et genres bien installés en y ajoutant l'élément internet, mais sans intégrer les spécificités de ce nouveau média au récit comme dans le thriller Traque sur internet (1995) ou la comédie romantique Vous avez un message (1998) qui vieillissent assez mal. Le Japon a au contraire très vite su saisir le nouvel espace social et intime que constitue internet, mais surtout dans des œuvres sombres comme la chronique adolescente All About Lily Chou-Chou de Shunji Iwai (2001) ou l'épouvante de Kaïro de Kiyoshi Kurosawa (2001). Haru les précède tous et s'avère un petit bijou toujours pertinent malgré les évolutions technologiques et la place encore plus grande d'internet dans notre quotidien aujourd'hui.

Le postulat est très simple et consiste à suivre le dialogue et la relation par mail d'un homme, Haru (Seiyô Uchino), et d'une femme, Hoshi (Eri Fukatsu), qui correspondent par mail tout au long du récit après avoir sympathisé sur un forum de discussion. Le dispositif est également assez simple, le montage alternant écran noir où l'on lit les mails échangés avec le quotidien réel des personnages. Cependant Yoshimitsu Morita dans ce va et vient nous fait dès la scène d'ouverture ressentir qu'il ira du magma du collectif vers l'intime sur ces deux espaces narratifs. Le début du film noue noie sous les messages en ligne sans que l'on puisse identifier un interlocuteur, envahissant un paysage urbain où les protagonistes sont tout aussi anonymes et étrangers les uns des autres. Progressivement Haru et Hoshi sympathisent, les intervenants se réduisent, les messages s'estompent pour ne plus concerner que nos deux personnages. Les messages sur fond noir ou carrément plaqués sur l'image réelle indiquent la plupart du temps qui parle, mais Morita par sa caractérisation subtile rend peu à peu ce renseignement inutile. Plus les personnages échangent sur leur vie et révèlent un pan de leur personnalité, plus la connaissance et l'attachement du spectateur pour eux se développe et laisse comprendre qui est qui.

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La linéarité de ce dispositif correspond aussi à la place d'internet dans nos vies à cette période des années 90 où le schisme entre le quotidien (la journée, le travail, les sorties) et les activités en ligne (seul le soir chez soit devant le PC) existe, c'est une photographie des usages à cette période. Ce qui empêche le film de vieillir, c'est dans le fait de s'attacher aux comportements humains que cela génère et qui persistent encore aujourd'hui même si la technologie a évolué. Les échanges badins initiaux voient ainsi Haru et Hoshi exposer une image déformée d'eux même. C'est notamment vrai de la part d'Hoshi qui ne révèle pas immédiatement être une femme, et surtout recherche l'attention des autres en exprimant sa passion pour le cinéma. Haru la démasque accidentellement (sa description des snacks d'une salle de cinéma de Tokyo dont ils avaient parlé étant erronée), ce qui amène un échange plus sincère où Haru avoue être une femme, et ne pas voir beaucoup de films puisqu'elle vit en province. Chaque petit aveu mutuel de ce type amène à en voir plus de leurs vies respectives, Hoshi végétant dans un poste de cadre commercial, Haru enchaînant les jobs divers et variés. Hoshi s'englue dans le marasme urbain après la rupture avec sa fiancée, Haru en deuil de son compagnon tragiquement disparu multiplie les expériences professionnelles pour ne pas sombrer dans ses pensées.

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Les aveux intimes entraînent paradoxalement les mensonges quand la vie de l'un prend un tour plus palpitant par une rencontre amoureuse et force l'autre à affabuler pour cacher son désarroi. C'est l'occasion d'explorer d'autres personnalités online et excentriques que notre "couple", notamment lorsque Hoshi rencontre une dénommée Rose aussi entreprenante dans le virtuel que chaste dans la réalité où elle recherche avant tout une amitié. Internet est un lieu de tous les possibles où le peut se façonner une personnalité plus grande que soit, mais la réalité nous expose dans nos petits travers. Yoshimitsu Morita se montre d'une limpidité exemplaire et ne lasse jamais dans son procédé, trouvant nombres d'idées pour dynamiser dramatiquement ces écrans où s'enchaînent les messages virtuels, et faisant montre du brio de ses précédents films pour saisir en contrepoint des paysages reflétant l'état d'esprit des personnages - porté par le spleen de la bande originale de Souichi Noriki et Toshihiko Sahashi. Le fourmillement de l'urbanité Tokyoïte, la froideur et la métronomie des transports en commun traduisent l'étouffement et le spleen de Hoshi. A l'inverse, les espaces provinciaux et ruraux vide, ainsi que la multitude des environnements de travail de Haru expriment sa solitude et son absence de perspectives idée qui fonctionne aussi avec leur intérieur, encombré et qui noie Haru, espacé et qui isole Hoshi. Parfois les échanges virtuels font figure d'espace de confidence et reflète la réalité que l'on voit d'eux, ou alors ils affabulent le 2.0 prolongent le quotidien solitaire où il ne fait pas bon exposer sa détresse. Plus les personnages deviennent proches, plus il leur est difficile d'assumer la médiocrité de leur existence aux yeux de l'autre. D'ailleurs lorsqu'un rebondissement fait se rejoindre leur deux "réalités" Morita use d'une sorte d'effet de glitch, de bug dans ce réel comme si l'harmonie était rompue.

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On est ainsi happé par cette narration singulière, cet espace-temps suranné et sans réseaux sociaux qui auraient accélérés en quelques clics la révélation/demande du physique de chacun. Là on garde encore une forme de mystère épistolaire et la vraie/fausse première rencontre donne une scène d'un romantisme et d'une poésie magnifique, lorsque Haru et Hoshi se donne "rendez-vous". Il est dans un train qui traverse sa région, elle le film depuis l'extérieur dans son wagon où lui la prend en photo. C'est une idée un pied dans le rétro par les technologies utilisées (caméscope, appareil photo instantané) et l'autre dans la modernité vue comme l'immortalisation filmée et photographiée se fera plus envahissante, moins particulière, avec l'irruption des smartphones 15 ans plus tard. En définitive on observe grâce à cette relation virtuelle chacun des personnages se reconstruire dans sa vie personnelle et être ainsi apte à affronter une vraie rencontre qui donnera une dernière scène poignante et inventive. Alors que le couple se voit enfin en chair et en os, Morita coupe l'image et le son lors des premiers mots échangés qu'il fait apparaître sous forme de conversation virtuelle. Pas besoin d'en voir plus, la boucle est bouclée. Un petit bijou de romance, porté par une interprétation touchante, en particulier Eri Fukatsu en Hoshi. 5/6





The Black House de Yoshimitsu Morita (1999)

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Un agent d’assurance de la compagnie Showa reçoit un appel d’une cliente qui projette de se suicider et qui aimerait savoir si sa police couvre ce cas de figure. Ne pouvant se résigner à la laisser commettre pareil acte, il décide de lui rendre visite…

The Black House est un thriller assez inclassable qui montre une nouvelle corde à l'arc de Yoshimitsu Morita. Il adapte là un roman de Yûsuke Kishi maître de la littérature horrifique japonaise. On va suivre Masaaki (Seiyô Uchino) jeune agent d'assurance se morfondant dans les remous de son métier où il doit traquer les fraudes des assurés. Toute la première partie du film retrouve la veine de satire et de comédie noire de Morita dans The Family Game, tirant en longueur les situations absurdes de cette environnement professionnels, tant au niveau des fraudeurs haut en couleurs que de l'aspect normés et déshumanisé du la vie de bureau. Lorsqu'une cliente anonyme va l'appeler pour lui demander si le suicide est couvert par la police d'assurance, Masaaki va remonter le fil d'une enquête nébuleuse et faire face au mal absolu. Le film est inégal, un peu trop long et souvent déstabilisant dans ses ruptures de ton humoristique et une ambiance qui se fait progressivement plus oppressante. La personnalité timorée et anxieuse de Maasaki et la musique particulière qu'elle apporte à toute ces variations, notamment dans le montage (entre la torpeur du bureau et la frénésie de ses séances de natation) nous happe cependant peu à peu. Maasaki représente la face qui subit la norme et la pression de cette société contemporaine courant à la performance, tandis que la terrifiante psychopathe (Shinobu Ôtake) incarne le versant monstrueux, déshumanisé et violent qui a décidé de manifester de façon frontale cette cupidité.

La première partie un peu longuette caractérise Maasaki dans son monde tout en dessinant en creux le portrait-robot du meurtrier qui s'avérera une meurtrière et dont l'univers prend le dessus dans le fond et la forme durant la seconde partie. Là c'est un pur climat de cauchemar et de démence qui nous prend au piège, portée par une performance proprement hallucinante de Shinobu Ôtake. Elle manifeste par son regard dément, sa férocité et la froideur de ses traits quand elle commet l'innommable toute la froideur de la sociopathe sans inhibitions. Morita définit par l'image cette société déshumanisée dans sa manière de capturer les environnements extérieurs tout en architecture industrielle brutaliste, où se ressent la désolation. Il nous prend au piège ensuite avec cette plongée dans un esprit torturé, et orchestre quelques purs moments de cauchemar notamment la scène où Maasaki s'introduit dans une maison après le passage sanglant de sa Némésis. Il y a un côté Giallo revisité par le prisme esthétique des 90's, des idées aussi originales que dévastatrice (dont un usage peu commun d'une boule de bowling) et un suspense qui va crescendo presque jusque-là dernière minute. On sent qu'un part de la fébrilité, de l'humanité de Maasaki s'est perdue en route et que pour survivre il a endossé une part de la démence de son adversaire, une ambiguïté que soulève la dernière séquence. Malgré ses petites scories, une œuvre très singulière et marquante, surtout dans le paysage de l'horreur japonaise de l'époque. 4,5/6
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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

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Love and Action in Osaka de Yoshimitsu Morita (1988)

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Un jeune banquier convainc son père yakuza de se ranger et d’investir dans les casinos pour faire Osaka un nouveau Las Vegas. Les clans rivaux vont contrecarrer ses plans.

Tout au long de sa filmographie, Yoshimitsu Morita semble vouloir capturer dans ses intrigues et personnages une sorte de conflit entre intérêt matériels et questionnements existentiels. Sa manière d’aborder cet aspect oscille entre une approche ironique, stylisée et distanciée et au contraire une tonalité de mélodrame au choix flamboyant ou feutré. La première tendance paraît davantage s’inscrire dans ses films des années 80. La comédie noire The Family Game (1983) fait exploser le modèle de la famille japonaise traditionnelle, Sorobanzuku (1986) pose un regard outré et moqueur de la bulle économique par sa description farfelue d’une agence économique, et Kitchen (1989) semble détourner le premier degré du roman de Yoshimoto Banana qu’il adapte pour quelque chose de plus décalé dans l’imagerie et l’interprétation. Les années 90 sont au contraire le théâtre de drame poignants et osant le romantisme le plus appuyé dans des films comme Haru (1996) et Lost Paradise (1997). Cette interprétation n’est cependant pas figée puisque And Then (1985) est un somptueux mélo historique situé dans ces années 80 sardonique, quant au contraire le thriller Black House (1999) déchaîne une folie sidérante.

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Love and Action in Osaka constitue un intéressant entre-deux sur cette tonalité changeante de Morita. Il s’agit d’un film de yakuza, genre codifié s’il en est mais qui a déjà opéré sa mue, notamment dans les années 70 lorsqu’un Kinji Fukasaku a brisé l’image romantique du yakuza dans sa saga Combat sans code d’honneur. Durant les années 80, un Hideo Gosha tente aussi d’adapter les passages obligés du genre à des problématiques plus contemporaines, aux évolutions sociétales (l’importance stratégique des femmes dans Femmes de yakuzas (1986)). Creusant de nouveau cette problématique du matériel et de l’existentiel, Yoshimitsu Morita surprend encore dans Love and Action in Osaka. Les éléments classiques du film de yakuza, les rivalités et guerres de clans, sont bien présent mais comme étouffés, en sourdine tout au long du récit. Aux guerres d’égo et affrontements fratricides s’oppose un intérêt autrement supérieur, le profit financier. Le héros Toru (Toru Nakamura) est le fils d’un boss yakuza cherchant à se retirer du milieu. Toru est devenu un respectable banquier dont l’héritage familial ressurgit par intermittence lorsque la situation se tend, faisant presque figure de surhomme. Son passif lui sert à être sobrement mais fermement plus convaincant durant ses transactions, mais néanmoins il n’a pas suivi le chemin criminel. Dès lors il va choisir de reprendre les affaires et les membres du clan pour le démanteler et le faire muer en business respectable. Son rêve ? Façonner un Las Vegas japonais à Osaka. Il va se heurter à l’ancien clan rival Miike qui, fonctionnant selon les anciens codes, va chercher à contrecarrer ses plans sans même réfléchir au propre profit qu’il pourrait tirer d’un tel projet.

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Sans forcément se montrer condescendant envers les petites mains yakuzas, Morita montre un conditionnement au crime, un déterminisme insurmontable pour eux. Les anciens hommes de main et désormais employé de Toru ne peuvent s’empêcher de monter un trafic de drogue à son insu au sein du casino, Kirimiya (Masahiro Takashima) membre du clan Miike et ami d’enfance de Toru refuse les propositions de travail légal de ce dernier en se sentant redevable à sa « famille ». Morita exprime cette dualité à travers l’esthétique du film. D’un côté nous avons des décors transpirant le luxe et la superficialité « bling-bling » de cette opulence vulgaire de la bulle économique. De l’autre la photo de Yonezo Maeda gorge le film d’une teinte et de filtres violet constituant dans une sorte d’espace mental la prison et spirale inéluctable qui piège les protagonistes.

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On retrouve le brio de Morita pour capturer magnifiquement les espaces urbains, ici avec les vues nocturnes et omniscientes de la ville d’Osaka, notamment la réminiscence de ces travellings avant sur le fleuve Yodo-gawa entouré de néons représentant l’avancée inéluctable d’un destin tragique tracé - - le tout porté par le tube City Pop Osaka Bay Blues de Masaki Ueda. L’interprétation est remarquable, particulièrement Toru Nakamura sortant de ses rôles de chiens fous adolescents (dans la série Bebop High School ou The Shinjuku Love Story (1987)) pour incarner un élégant ambitieux, taciturne et charismatique. L’ironie de Morita par rapport au genre et codes yakuza se joue dans le duo aussi sournois qu’abstrait de chefs du clan Miike, et par certains éclats de violence aux excès dont le grotesque laisse apparaître la vacuité de ces batailles mafieuses. 4,5/6
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Profondo Rosso
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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

Message par Profondo Rosso »

Et pour avoir peut-être plus d'info sur la carrière du réalisateur, j'avais eu l'occasion d'effectuer un entretien avec sa femme et productrice Kazuko Misawa, à lire ici http://eastasia.fr/2023/05/25/mcjp-entr ... wa-kazuko/
bruce randylan
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Re: Yoshimitsu Morita (1950-2011)

Message par bruce randylan »

Et je complète pour le moment avec mon avis de 2019 de :

Something like it (Yoshimitsu Morita - 1981)

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Plusieurs amis agés d'une vingtaine d'années espèrent devenir rakugoka, conteur d'histoires drôles débitées très rapidement. Entre leurs histoires d'amour et un rapprochement avec une chaîne de télévision locale, ils se rendent doucement compte que cet art ne s'improvise pas.

Première découverte pour moi du cinéaste (en attendant de découvrir un jour le réputé Jeux de famille) pour un sentiment mitigé. Il y a d'un côté une indéniable personnalité dans la narration et l'univers, avec des scènes très courtes, un montage soutenu, beaucoup d'ellipses, un traitement décalé, des personnages de losers attachants. Les 20 premières minutes fonctionnent très bien à ce titre avec sa narration éclatée, une liberté de ton jamais vulgaire et des protagonistes haut en couleur.
Sauf que de l'autre côté, cette approche s'avère rapidement contre-productive et donne un film sans réelle progression où les héros n'évoluent pas vraiment et dont l'intérêt très inégal finit par décliner doucement mais sûrement. Il y a bien encore scènes qui retrouvent ce ton moqueur et chaleureux du premier tiers (la rencontre avec le père de la nouvelle copine) mais ça intervient trop tardivement pour redresser la barre.
Très frustrant de se sentir sur le bas de la route. Pour une œuvre de jeunesse, ça reste tout de même prometteur.
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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