Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Ender
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par Ender »

Alexandre Angel a écrit : 2 oct. 23, 09:16 Mais malgré ça, ça ne me donne pas envie de retenter :| .
Il faudrait un système de séances obligatoires sur classik. :idea:

Je l'avais vu deux fois auparavant, une fois en salle, une fois à sa sortie en vidéo, et c'est vrai que pour ma part, il m'en était toujours resté qqchose d'insistant et la sensation de film habitable. Elle m'a saisi dès les premières minutes à nouveau. C'est que le film est loin du cynisme qu'on lui prête ou de l'exercice post-post... encore une fois il est généreux en amour et pas que du cinéma, mais pour la faune des morts-vivants fabriquée par le parage d'Hollywood et le monde truqué qu'il incarne.

Dernier argument marketing pour emballer la foule : le film grandit à chaque vision.
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EliWallou
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par EliWallou »

Je l'ai pas revu mais je suis du même avis qu'Enders.
J'ai de la peine à voir où est le nihilisme ou le cynisme dans le film, au contraire.

Sans prétendre pouvoir aller aussi loin que vous et le "décoder", dans mon souvenir-impression, le film est dans une dialectique qui critique les effets de la pop culture (ou ce que fabrique Hollywood comme le dit Enders) sans pour autant jeter le bébé avec l'eau du bain.
(Sinon le film se tirerait une balle dans le pied)

Je retiens notamment la scène avec la fille au ballon qui se moque gentiment de sa quête complotiste obsessionnelle, l'invite plutôt à profiter du moment présent et coucher avec elle.
Et celle chez le compositeur, mais que je ne lis visiblement pas comme les autres. Dans cette scène, au final
Spoiler (cliquez pour afficher)
il tue le cynisme.
C'est à dire que le discours "la musique rebelle que tu idolatres c'est un produit marketé pour des jeunes comme toi qui enrichit des mecs en costard blabla" y a évidemment une part de vérité, mais c'est l'équivalent de "on vit dans une sociéter"…
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Ender
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par Ender »

Merci pour le renfort ! :)
EliWallou a écrit : 2 oct. 23, 15:17Et celle chez le compositeur, mais que je ne lis visiblement pas comme les autres. Dans cette scène, au final
Spoiler (cliquez pour afficher)
il tue le cynisme.
C'est à dire que le discours "la musique rebelle que tu idolatres c'est un produit marketé pour des jeunes comme toi qui enrichit des mecs en costard blabla" y a évidemment une part de vérité, mais c'est l'équivalent de "on vit dans une sociéter"…
Ça me semble intéressant de se demander s'il sort affranchi de cette confrontation. Le compositeur correspond à la fois à la materialisation de son désir - qu'existe une vérité définitive, incontestable à découvrir cachée sous le chaos des apparences - en même temps qu'il frustre définitivement cette illusion. La clé que le démiurge lui apporte, c'est rien de plus qu'une espèce d'arbitraire royal, rien qui donne un sens stable au monde ; et ni d'autre révélation que l'hypothèse dont Garfield était lui-même parti : qu'on vit dans une société, comme tu dis, et qu'il existe une loi du profit, la petite sagesse des cyniques.
Bref il tue le père et aussi bien dieu le père et pour aller dans le jargon psychanalytique, le sujet supposé avoir. La vanité de sa quête des lois cachées lui est révélée. On pourrait se dire qu'après ça, il ne lui reste qu'à découvrir la liberté humaine, la construction active du sens... mais ce n'est pas si évident que ça, puisqu'il n'est pas encore défait de l'autre animal freudien, la mère ; que pour finir il se jette même dans ses bras la fleur au fusil. Vivement Under the Silver Lake 2. :twisted:

Je profite de ton intervention pour un HS : je crois me souvenir que tu parlais de regarder le film Désordres récemment dans un topic : est-ce que tu l'as vu et si oui, qu'en as-tu pensé ? Il est dans le haut de ma watchlist également.
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EliWallou
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par EliWallou »

Ender a écrit : 2 oct. 23, 16:10 Ça me semble intéressant de se demander s'il sort affranchi de cette confrontation. Le compositeur correspond à la fois à la materialisation de son désir - qu'existe une vérité définitive, incontestable à découvrir cachée sous le chaos des apparences - en même temps qu'il frustre définitivement cette illusion. La clé que le démiurge lui apporte, c'est rien de plus qu'une espèce d'arbitraire royal, rien qui donne un sens stable au monde ; et ni d'autre révélation que l'hypothèse dont Garfield était lui-même parti : qu'on vit dans une société, comme tu dis, et qu'il existe une loi du profit, la petite sagesse des cyniques.
Bref il tue le père et aussi bien dieu le père et pour aller dans le jargon psychanalytique, le sujet supposé avoir. La vanité de sa quête des lois cachées lui est révélée. On pourrait se dire qu'après ça, il ne lui reste qu'à découvrir la liberté humaine, la construction active du sens... mais ce n'est pas si évident que ça, puisqu'il n'est pas encore défait de l'autre animal freudien, la mère ; que pour finir il se jette même dans ses bras la fleur au fusil. Vivement Under the Silver Lake 2. :twisted:
Je ne pense pas, car il me semble qu'à ce moment il n'a toujours pas compris la vanité de sa quête. Derrière le compositeur il y a d'autres verités cachées, "qui sont ses commanditaires ?".
L'enquête continue, en bonne logique du mille-feuille complotiste.
C'est seulement après avoir couché avec cette femme à la fin qu'il y a un apaisement il me semble ?

Il faut que je creuse la psychanalyse, c'est un sujet auquel je me suis pas beaucoup intéressé.
Ne serait-ce que pour mieux comprendre les films qui reposent là-dessus.

Je n'ai pas vu 7th Heaven, mais n'est-ce pas une clé du film qui ferait de l'amour, la connexion à l'autre, ce qui donne sens à la vie, tout simplement ?
Car jusque là dans le film il est particulièrement déconnecté des autres, notamment de celle avec qui il couche.
Ender a écrit : 2 oct. 23, 16:10Je profite de ton intervention pour un HS : je crois me souvenir que tu parlais de regarder le film Désordres récemment dans un topic : est-ce que tu l'as vu et si oui, qu'en as-tu pensé ? Il est dans le haut de ma watchlist également.
J'ai vu les 15 premières minutes, ça me plaisait, mais je suis trop fatigué pour un film au rythme aussi particulier ces derniers temps.
Je suis en plein revisionnage de Breaking Bad, soit l'extrême opposé, ça n'aide pas.
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Ender
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par Ender »

EliWallou a écrit : 2 oct. 23, 19:28Car jusque là dans le film il est particulièrement déconnecté des autres, notamment de celle avec qui il couche.
Oui et je pense qu'il y a des éléments précis à grappiller dans les différents films cités. L'appartement tapissé d'affiches de films d'horreur centrés sur un personnage doublé d'un prédateur nocturne, qui éventuellement s'ignore : Jekyll, Dracula... The Wolf Man en particulier, tout part d'une scène de voyeurisme au moyen d'un télescope qui éveille le désir de Chaney Jr. Beaucoup de correspondances à trouver avec Sam, le mystère du "dog killer", avec l'ami et son drone, etc.

Je ne voudrais pas énumérer trop de choses sur 7th Heaven si tu ne l'as pas encore vu, il y a tout un tas de motifs pas anodins. Pour en citer un évident au regard de la fin de Silver Lake : l'intrigue se noue autour de Janet Gaynor qui se retrouve à la rue et Charles Farrell qui l'accueille chez lui.

Je pense que Mitchell s'est employé et amusé à reproduire la structure du délire de son héros dans l'arrière-plan cinéphile du film : il y a une myriade d'indices à collecter, de pistes à suivre, et le plus diabolique, c'est que tout colle parfaitement, aussi bien que la carte Nintendo avec les cornflakes avec la topographie de Silver Lake. De la logique interne des délires. En creux, ça raconte aussi quelque chose de la pathologie des cinéphiles !

Mais je te rejoins, 7th Heaven pointe aussi vers une porte de sortie. Je ne suis pas si optimiste que ça pour le personnage au stade où on le laisse, le film fait une quasi-boucle, un cercle pas tout à fait parfait puisqu'il est dans l'appartement d'en face ; il s'est tiré de pressantes ornières (et notamment extrait du rang des mauvais pères et des prédateurs), a trouvé une ouverture, mais à mon avis, il est parti pour autre tour de pistes dans d'autres sphères (régression vers le premier objet de son désir, etc.), avant de toucher du doigt son "paradis". Dans le lit de sa voisine, il en voit les ombres portées sur le rideau.

Il y a une analogie intéressante entre la situation où se trouvent Riley Keough et Andrew Garfield à la fin. Elle sous l'emprise du père abusif, lui réfugié auprès de la figure peut-être plus sympathique, mais quand même, de la mère nourricière. Là le film touche vraiment le nerf de l'époque : il est bon de sortir de l'enfer de la loi des pères, mais des purgatoires différents attendent éventuellement à la sortie, et il faudra "encore un effort".
EliWallou a écrit : 2 oct. 23, 19:28 c'est un sujet auquel je me suis pas beaucoup intéressé.
Au cas où, il y a un bon livre sur la filmo d'Hitchcock décortiquée avec des concepts de la psychanalyse, le bien titré Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Lacan sans jamais oser le demander à Hitchcock.

PS merci pour le retour sur le quart d'heure de Désordres ! :mrgreen: J'essayerai de le voir prochainement.
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shubby
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Re: Under the Silver Lake (David Robert Mitchell - 2018)

Message par shubby »

Retenté après un nouveau kiffage de It Follows. Y'a pas moyen, j'abandonne vers les 45mn. C'est du free style prétentieux. Ds ses meilleurs moments il approche le OUATIH de QT, voire même Le privé de Altman, mais les pires l'emportent et rappellent eux les errances délétères d'un Richard Kelly post-Donnie Darko. La solution pour un auteur paumé après un coup d'éclat serait-elle peut-être de se chercher le temps d'une œuvre de commande ?
Nota : je n'avais pas non plus accroché au délire de PTH Inherent Vice, aussi abscons pour moi.
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