J'ai commencé le cycle avec
Le navires des hommes perdus (1929), dernier film muet du cinéaste qu'il tourna en Allemagne, avec Marlene Dietrich.
Pour compléter son équipage, un commandant organise une rafle dans un bar en embarquant malgré eux les clients trop avinés. Parmi eux se trouve un médecin qui n'est pas à sa place au milieu de criminels et marins peu fréquentables. Alors que les conditions à bord laissent craindre une révolte, un avion s'échoue à proximité de leur bateau et le médecin sauve de la noyade le pilote qui est en réalité une femme, riche héritière.
Un bon cru, splendide visuellement, avec un noir et blanc et un esthétisme sous une certaine influence de l'expressionnisme avec des ombres contrastés, des décors oppressants et parfois déformés (la maison au début) pour une atmosphère étouffante. Le film se déroule à 90% sur le navire, et bien que tout ne soit pas clair dans la gestion de l'espace où l'on dirait que le navire change de proportions selon les besoin des scènes, le film est palpitant.
Sur le papier ce n'est pas très original avec mutinerie, brutes sadiques et un personnage féminin déchaînant les passions pour de nombreux personnages sans réelle consistance, mais le scénario est bien construit et surtout la réalisation de Tourneur impose une tension permanente grâce à sa mise en scène fluide, de beaux mouvements d’appareil et un rythme nerveux qui multiplie les péripéties et tire un maximum de son budget. Le dernier tiers est même assez épique avec du suspens, du mouvement et beaucoup d'action.
Les différents comédiens, à défaut de donner vie des caractères stéréotypés, parviennent à les rendre imposant à l'écran.
Assez superficiel sur sur le fond, et loin d'être crédible, sur le forme c'est un excellent divertissement.
Je n'ai pas pu assisté à la conférence (faut bien manger
) mais j'étais présent pour les fragments de 3 films, datant tous de 1916.
The rail raider n'existe plus que dans sa première bobine assez prometteuse avec un cheminot qui mouille la chemise pour déblayer des voies endommagées. Sauf que la direction considère qu'il aurait du prévenir ses supérieurs avant d'agir et qu'il est pour cette raison suspendu pour un mois. Ses collègues lancent donc un mouvement de soutien pour lui financer un voyage au siège social de la compagnie pour qu'il s'explique au directeur.
Les touches sociales sont bien intégrées à la présentation des personnages avec un tournage en extérieur pour un résultat vivifiant et chaleureux. On sent un vrai amour du cinéaste pour ses personnages et leur quotidien (comme la locomotive en préparation en arrière plan d'un dialogue). Par contre, la suite, disparue donc, avait l'air plus conventionnelle : le responsable de la mise à pied est un subalterne corrompu tandis que le sympathique cheminot épouse la fille du patron qui s'avère un bon bougre.
The pawn of fate existe dans une forme presque intégrale de 40 minutes mais plusieurs segments sont fragmentaires et les transitions un peu rudes. Une petite reconstruction pourrait lui apporter une nouvelle jeunesse. Par exemple les quelques plans du dénouement sont situés au début de la 3ème bobine sur les 4 existantes (si je me trompe pas). En les ré-intégrant dans le bon ordre, et avec quelques cartons explicatifs, ça passerait comme une lettre à la poste.
Pour le film, c'est une comédie (dramatique) assez légère bien que totalement prévisible, et ce dès les premières minutes : un artiste de la ville vient trouver l'inspiration dans une bergerie et essaie de séduire la femme du fermier. Trouvant un croquis de ce dernier, le peintre lui fait croire qu'il a du talent et qu'il rencontrera un franc succès à la ville.
C'est surtout la première moitié, champêtre, qui en fait le charme avec de jolies extérieurs de collines moutonnantes et une belle photographie. Les personnages sont de bons vivants avec un jeu naturel et attachant. La suite se devine trop aisément donc et la tournure dramatique ne convainc qu'à moitié.
The closed road est peut-être le plus frustrant puisqu'il n'existe là encore que 10 minutes situées au début du film. En tant que telles, ces scènes qui font encore partie de l'exposition du film, ne sont pas foncièrement stimulantes ni inspirées visuellement. Par contre, le scénario annonçait un thriller très efficace où un homme se croyant condamné par une maladie incurable accepte d'endosser le meurtre commis accidentellement par son médecin, le frère de sa fiancée. Il invente donc des indices conduisant à sa culpabilité avant de découvrir qu'il n'est pas malade et que l'accident cache en fait un meurtre. Et sa fiancée va se démener pour l’innocenter et le sauver de la chaise électrique.
Maurice Tourneur était particulièrement fier de ce film semble-t-il. Difficile de juger en l'état mais comme ce dernier était très critique sur son œuvre en général, il ne reste plus qu'à espérer de trouver un jour une version intégrale.