"Cracher dans la soupe", c'est comme pour les "prises d'otage" par les grévistes, un élément de langage de droite pour qualifier l'action de personnes qui ne font que faire usage de leur liberté, en l'occurence pour Molly Ringwald, celle d'exercer son esprit critique.AtCloseRange a écrit :Je n'avais pas voulu partager cet article vu ce que j'en pense.
Elle n'existerait peut-être pas sans John Hughes (elle n'a d'ailleurs quasiment rien fait d'autre d'identifiable) et de ce point de vue c'est indéfendable.
Elle a le droit de le penser (et d'être en partie dans le vrai) mais pas de cracher dans la soupe.
Dans son article elle rend plusieurs hommages appuyés à John Hughes, son apport au cinéma et son importance dans sa vie à elle. En même temps elle n'est pas simplement la bénéficiaire du casting de Hughes et du succès des films, elle est une contributrice de ces œuvres qui sans elle n'existeraient pas telles que nous les connaissons, et pour certaines n'existeraient pas du tout. Rien de plus normal que de faire retour sur une œuvre sur laquelle on a travaillé, qu'on a aidé à façonner.
Je suis loin de partager toutes les orientations du, disons, "néo-féminisme à l'américaine" et notamment les tendances à la normalisation culturelle, à la limite on en trouve trace dans l'article de Ringwald avec des qualificatifs comme "appropriate/inappropriate" pour désigner non seulement des comportements mais aussi de sujets traités dans des œuvres. En même temps dans l'analyse des films de Hughes en question, elle est rigoureuse. On dirait pour certains d'entre vous que le simple fait de se pencher sur des films avec des outils critiques féministes revient à faire du révisionnisme, à mutiler les films.
Au terme de son propos Molly Ringwald a parfaitement raison de regretter un "blind spot" dans la sensibilité du cinéaste. Reproduire des clichés sexistes et racistes dans une œuvre n'est pas avant tout affaire de faute morale, citoyenne ou que sais-je, mais d'art et de rétrecissement de la vision artistique. Typiquement dans Sixteen Candles, Hughes ne voit pas le personnage du correspondant asiatique, il n'est qu'un ressort comique ambulant (à base de clichés racistes grossiers). A comparer avec la densité des personnages de Molly Ringwald ou Anthony Michael Hall. Dans leurs cas il parvient à malmener les clichés, en jouer, les retourner, etc. Il faut bien des personnages secondaires, mais leur caractérisation compte.
Il me semblait que la nullité raciste et sexiste de certains passages de Sixteen Candles est évidente, que cet avis est largement partagé aujourd'hui. Il faut vraiment une réaction épidermique pour reprocher à Molly Ringwald de s'emparer du sujet.
Pour élargir, je me réjouis de la nouvelle vague globale du féminisme. Elle engendre nécessairement des contradictions, part dans des courants contraires etc. Le dépassement des contractions passe par des solutions elles-mêmes féministes, pas je-ne-sais-quel contre-courant fantasmé et réactionnaire.
PS : excuse l'entrée en matière brutale, je me trouve moi-même malpoli de te qualifier de droite (au passage bisous à yaplusdsaisons si tu passes encore par ici) ! Je n'ai pas posté sur ce forum depuis très longtemps, mais ça fait quelques mois je vous relis régulièrement et les différents topics qui discutent féminisme me donnent depuis un moment envie d'intervenir.