J'ai aimé
Three Billboards non pas parcequ'il serait révolutionnaire, novateur, qu'il ferait substantiellement avancer le schmilblick, ce genre de choses.
Ni même et surtout pas parcequ'il serait parfait (le film peine à trouver son point de fuite et la fin piétine et achoppe un tantinet).
Mais le film a néanmoins sa personnalité, que j'ai trouvée forte, caractérisée et roborative. Et McDonagh fait montre d'une espèce d'ampleur qui élève
Three Billboards, lui confère une hauteur, une charpente que consolide l'alliage inédit d'états d'esprit devenus rares dans le cinéma américain contemporain.
Beaucoup plus que le patronage superficiel des frères Coen (Frances Mc Dormand et Carter Burwell n'y suffisent pas), c'est à Robert Altman que l'on songe, mais un Altman revisité par Russell Banks.
J'ai trouvé originale la tenue visuelle du film : sobre, grisâtre mais trouée d'éclats baroques. Et surtout, j'ai ressenti le regard européen de McDonagh, et très anglais dans dans cette manière de souffler le chaud et le froid, de faire fuser une répartie qui sophistique de manière inattendue les ploucs que la bourgade d'Ebbing nous offre sur le plateau de la fiction.
Dans
Three Billboards, on rentre comme dans un moulin, on se connait, on s'invective, on se violente, on s'écrit des lettres. L'être y a sa traçabilité. Les flics emmerdent Martha? Qu'à cela ne tienne, Martha ira emmerder les flics.
Ce que le film a de beau tient tout entier dans le point de vue surprenant de McDonagh sur son
americana, qui rappelle à notre bon souvenir ce qu'a insufflé l'imagination anglaise, de Mackendrick à Frears, de James Whale à John Schlesinger (en passant par qui vous savez), au cinéma américain.