La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
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La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Pas trouvé de topic consacré à ce film qui le mérite.
De Serrador, l'homme aux deux films, les amateurs de fantastique connaissent sans doute plus son remarquable ¿Quién puede matar a un niño?, que Wild Side a rendu accessible et quasi incontournable pour tout fan de ciné de genre qui se respecte. Mais j'ai l'impression qu'on connaît moins La Résidence, qui est pourtant plus "visionnaire" et tout aussi digne d'intérêt.
Découvrir ce film, c'est prendre conscience de l'avance que Serrador avait sur des tas de registres. Tout en s'inscrivant dans une tradition d'épouvante gothique (Bava ou la Hammer), le réalisateur espagnol manipule ici, l'air de rien, des idées et des figures appelées à connaître une belle descendance. Le cadre (un pensionnat de filles gouverné d'une main de fer par une marâtre et dans lequel erre une ombre armée d'un rasoir) anticipe totalement sur Suspiria et l'allégorie sur la virginité constituant un important nœud dramatique, on décèle ça et là bien des résonances futures, de Carrie (même scène de douches collectives) en passant plus largement par le giallo et le slasher. Du coup, on a le sentiment d'être face à un film matriciel. Mais pas un truc moisi comme La fille qui en savait trop qui ne vaut que pour son statut d'ouvreur de file... non, un film vraiment carré et bien foutu, résistant admirablement au temps, d'une modernité et d'une audace thématiques qui en font une œuvre riche, subtile. Car ce qui fait le sel de ce film, c'est son côté foncièrement vicelard, la malice qu'il prend à créer un décalage de plus en plus malsain entre la raideur victorienne qui règne dans l'établissement et tout ce qui macère derrière, les désirs sexuels et les déviances que laissent progressivement éclater les différents personnages. Il faut toute la finesse et la dextérité de Serrador pour manipuler de manière lancinante, et pourtant essentielle, toutes les perversités que cachent les protagonistes derrière leurs corsets. C'est un film loin d'être con sur la frustration. En dire plus serait un crime mais on peut quand même convenir que le film propose quelque chose d'assez singulier voire innovant dans son écriture... il y a de vraies surprises. Et les personnages féminins sont très bien croqués (et campés, mention au minois de la perverse Mary Maude).
La mise en scène n'est d'ailleurs pas en reste. Très belle, elle tire judicieusement parti de l'écran large. La photo est de qualité, ça ne pétarade pas mais il y a une ambiance opaque dont saura se souvenir Amenabar pour Les Autres. Le temps de quelques scènes-clés, le montage se révèle souvent inspiré, tout comme la musique de Waldo de los Rios, qui fait parfois penser à du Komeda. Bref, du très bon cinoche de genre espagnol.
De Serrador, l'homme aux deux films, les amateurs de fantastique connaissent sans doute plus son remarquable ¿Quién puede matar a un niño?, que Wild Side a rendu accessible et quasi incontournable pour tout fan de ciné de genre qui se respecte. Mais j'ai l'impression qu'on connaît moins La Résidence, qui est pourtant plus "visionnaire" et tout aussi digne d'intérêt.
Découvrir ce film, c'est prendre conscience de l'avance que Serrador avait sur des tas de registres. Tout en s'inscrivant dans une tradition d'épouvante gothique (Bava ou la Hammer), le réalisateur espagnol manipule ici, l'air de rien, des idées et des figures appelées à connaître une belle descendance. Le cadre (un pensionnat de filles gouverné d'une main de fer par une marâtre et dans lequel erre une ombre armée d'un rasoir) anticipe totalement sur Suspiria et l'allégorie sur la virginité constituant un important nœud dramatique, on décèle ça et là bien des résonances futures, de Carrie (même scène de douches collectives) en passant plus largement par le giallo et le slasher. Du coup, on a le sentiment d'être face à un film matriciel. Mais pas un truc moisi comme La fille qui en savait trop qui ne vaut que pour son statut d'ouvreur de file... non, un film vraiment carré et bien foutu, résistant admirablement au temps, d'une modernité et d'une audace thématiques qui en font une œuvre riche, subtile. Car ce qui fait le sel de ce film, c'est son côté foncièrement vicelard, la malice qu'il prend à créer un décalage de plus en plus malsain entre la raideur victorienne qui règne dans l'établissement et tout ce qui macère derrière, les désirs sexuels et les déviances que laissent progressivement éclater les différents personnages. Il faut toute la finesse et la dextérité de Serrador pour manipuler de manière lancinante, et pourtant essentielle, toutes les perversités que cachent les protagonistes derrière leurs corsets. C'est un film loin d'être con sur la frustration. En dire plus serait un crime mais on peut quand même convenir que le film propose quelque chose d'assez singulier voire innovant dans son écriture... il y a de vraies surprises. Et les personnages féminins sont très bien croqués (et campés, mention au minois de la perverse Mary Maude).
La mise en scène n'est d'ailleurs pas en reste. Très belle, elle tire judicieusement parti de l'écran large. La photo est de qualité, ça ne pétarade pas mais il y a une ambiance opaque dont saura se souvenir Amenabar pour Les Autres. Le temps de quelques scènes-clés, le montage se révèle souvent inspiré, tout comme la musique de Waldo de los Rios, qui fait parfois penser à du Komeda. Bref, du très bon cinoche de genre espagnol.
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Oui, très bon film et qui anticipe clairement sur "Suspiria" (qui l'a même "pompé" au niveau de la thématique) : peut être que le film de Serrador a mieux vieilli d'ailleurs mais cela ferait débat ...
Dommage que le dvd français (rené Château) soit carrément dégueulasse ...
Dommage que le dvd français (rené Château) soit carrément dégueulasse ...
- Demi-Lune
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Je ne sais pas ce que vaut le dvd, j'ai visionné le film sur Youtube dans une copie au format respecté, en version uncut et en anglais. Les couleurs m'ont paru honnêtes.jacques 2 a écrit :Dommage que le dvd français (rené Château) soit carrément dégueulasse ...
Le film intégral en playlist ici :
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
j'aimerais bien le revoir je l'avais en vhs et la copie était très sombre...une scène m'avait marqué c'était un meurtre dans une serre (je crois?) au ralenti...et la révélation finale, assez terrible.
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
C'est bien le problème du dvd : scènes sombres illisibles ...mannhunter a écrit :j'aimerais bien le revoir je l'avais en vhs et la copie était très sombre...
Visiblement, un "portage" de la VHS ...
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Demi-Lune a écrit :un film vraiment carré et bien foutu, résistant admirablement au temps, d'une modernité et d'une audace thématiques qui en font une œuvre riche, subtile
Revu sur le dvd pas top de René Chateau...vraiment frustrant qu'il n'y ait pas d'édition plus correcte car le film gagnerait vraiment au passage à la HD vu sa beauté plastique...décors et cadrages en Scope superbes, ambiance étouffante, musique et (rares!) meurtres entêtants, dénouement glaçant ...un drame gothique de grande classe.
On y pense en effet via l'exposition le personnage de la directrice, certains plans même si les traitements sont différents, le Serrador étantDemi-Lune a écrit :Le cadre (un pensionnat de filles gouverné d'une main de fer par une marâtre et dans lequel erre une ombre armée d'un rasoir) anticipe totalement sur Suspiria
psychologique et loin du déchainement baroque d'Argento.
Oui, et le film de Serrador rappelle parfois thématiquement et visuellement le modèle "les innocents" de Clayton.Demi-Lune a écrit :il y a une ambiance opaque dont saura se souvenir Amenabar pour Les Autres.
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
J'écrivais en 2010 :
La Residence (Narciso Ibanez Serrador)
L'impression d'avoir découvert un film absolument essentiel dans le genre, tout comme le sont "6 femmes pour l'assassin" de Mario Bava et "Black Christmas" de Bob Clark. Grosse baffe dans ma gueule. On peut lire ci et là que Dario Argento s'en est inspiré pour Suspiria, mais très honnêtement, le film de Serrador touche à des thématiques beaucoup plus complexes et le tout sans complexe (relation mère/fils à la limite de l'inceste, humiliations qui n'ont rien à envier à "Carrie" et désirs sexuels d'adolescentes). La construction du film est d'une efficacité redoutable, amenant à un final où les motivations de l'assassin paraissent là aussi complètement modernes (par rapport aux films de l'époque j'entends). Et que dire de la mise en scène de Serrador... les meurtres sont filmés avec la maestria des maîtres italiens (slow motion avec surimpressions pendant un poignardage, zoom puis arrêt sur image avant un tranchage de gorge). Bref, celui-là il se pose aux portes de mon top 100 et j'ai hâte de découvrir "Les révoltés de l'an 2000" du coup.
8/10
La Residence (Narciso Ibanez Serrador)
L'impression d'avoir découvert un film absolument essentiel dans le genre, tout comme le sont "6 femmes pour l'assassin" de Mario Bava et "Black Christmas" de Bob Clark. Grosse baffe dans ma gueule. On peut lire ci et là que Dario Argento s'en est inspiré pour Suspiria, mais très honnêtement, le film de Serrador touche à des thématiques beaucoup plus complexes et le tout sans complexe (relation mère/fils à la limite de l'inceste, humiliations qui n'ont rien à envier à "Carrie" et désirs sexuels d'adolescentes). La construction du film est d'une efficacité redoutable, amenant à un final où les motivations de l'assassin paraissent là aussi complètement modernes (par rapport aux films de l'époque j'entends). Et que dire de la mise en scène de Serrador... les meurtres sont filmés avec la maestria des maîtres italiens (slow motion avec surimpressions pendant un poignardage, zoom puis arrêt sur image avant un tranchage de gorge). Bref, celui-là il se pose aux portes de mon top 100 et j'ai hâte de découvrir "Les révoltés de l'an 2000" du coup.
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Ça m'a beaucoup marqué aussi, cette scène. C'est l'image dont je me souviens en premier.mannhunter a écrit :une scène m'avait marqué c'était un meurtre dans une serre (je crois?) au ralenti...
Le thème de Waldo de Los Rios est gravé aussi dans ma mémoire, comme celui qu'il avait composé pour l'autre film de Serrador, ¿Quién puede matar a un niño? aka Les révoltés de l'an 2000 (film meilleur que La résidence et plus traumatisant).
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
vu au cinema de quartier il y a une dizaine d'années, beaucoup apprecié egalement.Père Jules a écrit :Vous me mettez l'eau à la bouche !
J'aimerai bien le revoir mais le dvd RC n'est pas top apparemment, donc attendons une meilleure edition (Chat qui fume, Ecstasy of films, Artus, si vous nous lisez )
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1969)
Demi-Lune a écrit :Ça m'a beaucoup marqué aussi, cette scène. C'est l'image dont je me souviens en premier.mannhunter a écrit :une scène m'avait marqué c'était un meurtre dans une serre (je crois?) au ralenti...
Encore un Serrador à revoir ...j'en ai un bon souvenir même s'il m'avait paru un peu plus inégal que, dans un tout autre genre certes, "la résidence".Demi-Lune a écrit :Les révoltés de l'an 2000[/b][/i] (film meilleur que La résidence et plus traumatisant).
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
Pareil, j'ai acheté le DVD RC peu de temps après (à peu de frais), je ne l'ai toujours pas revu. Me reste en tête la présence de Lilli Palmer, sa rigidité toute allemande et son gout implicite pour les jeunes filles.Jack Carter a écrit :vu au cinema de quartier il y a une dizaine d'années, beaucoup apprecié egalement.Père Jules a écrit :Vous me mettez l'eau à la bouche !
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
Annoncé en Blu Ray par Scream Factory, parmi d'autres titres!!
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
Il y a meme le Willard original, ça m'avait fait flipper gamin (vu sur tf1 je pense)
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Re: La Résidence (Narciso Ibáñez Serrador - 1970)
on a dû le voir à la même époque.Jack Carter a écrit :Il y a meme le Willard original, ça m'avait fait flipper gamin (vu sur tf1 je pense)
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