Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?G.T.O a écrit :mannhunter a écrit :"Sorcerer" vu par Bertrand Tavernier:
"Je ne serai pas aussi enthousiaste que certains contributeurs sur SORCERER de William Friedkin. Je ne conteste pas l’énergie de la mise en scène, le brio de plusieurs séquences dans la deuxième partie et notamment le franchissement du pont de liane. Mais Friedkin qui, avec une arrogance très déplaisante, critiqua le film de Clouzot à la Cinémathèque et à plusieurs reprises, passe à côté de la dureté existentielle de la première version, qui provient aussi de l’époque du tournage, de ce qu’a dégusté Clouzot. Il y a quelque chose d’organique, de profondément ressenti dans l’âpreté du ton, ce qu’analyse magnifiquement le romancier Dennis Lehane (MYSTIC RIVER). Friedkin procède un peu comme ces cinéastes qui voulant rendre cinématographique une pièce de théâtre, ajoutaient des extérieurs, ce que raillait Guitry. Certes, il le fait brillamment, respecte les identités linguistiques et utilise fort bien les extérieurs. Mais il dilue le propos et rien de ce qu’on a vu – attentats, luttes raciales, escroqueries, ne pèsera par la suite sur le destin des personnages. De plus en rajoutant une révolution, il fait passer au second plan les responsabilités de la compagnie pétrolière américaine. Lehane raconte que Times et Newsweek dénoncèrent le Clouzot comme l’œuvre la plus violemment anti-américaine qui soit et le film dut attendre plus d’un avant de sortir amputé de 35 minutes. Cremer est excellent mais Roy Scheider passe à coté du personnage."Pas du tout d'accord avec le père Tavernier dont le point de vue est quand même très vieille école et atteste davantage d'une attente déçue et d'un désir à ne voir pas le film prévu que du film lui-même. La plus grosse erreur est quand même de lui reprocher son manque d'enjeux comme si le voyage manquait, par isolement des personnages par rapport au contexte ( d'où le sens de la remarque de Tavernier sur l'aspect théâtral du film), de réalisme, alors que le film joue clairement, à mon sens et comme le dit fort bien Strum, la carte de l'allégorie et du mythe. Le décor que ce soit le village et peut-être encore plus la jungle, est la représentation des enfers.
Pas besoin d'être Sherlock pour comprendre que les enjeux sociaux et politiques ( attentats, luttes raciales, révolution...) n'intéressent absolument pas Friedkin. Ce qui l'intéresse c'est l'odyssée que ces hommes effectuent. On retrouve bien là le souci pédagogique typique de Tavernier pour qui tout sujet doit avoir posséder un traitement le plus exhaustif possible. Je m'étais déjà fait la réflexion en lisant son dico à propos de Carpenter ou Kubrick. En un mot, il est quand même très vieille école dans son approche du cinéma et traitement scénaristique.
Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977)
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Le fait même d'attendre qu'on s'en "serve", c'est-à-dire dans un souci de corrélation cause/conséquence, atteste cette vision vieille école que pointe G.T.O.AtCloseRange a écrit :Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?
Pour moi, ce long prologue choral n'a pas à se répercuter littéralement sur les événements futurs. il est un film en soi, qui de son esthétique à sa contextualisation définit des personnages à un instant T (leur chute), dans une réalité qui n'aura JUSTEMENT plus jamais court dans la deuxième partie, définie comme un enfer et son antichambre.
Ça me rappelle un peu les discussions autour de l' "utilité" de la première heure de Deer Hunter... un film n'est heureusement pas une pelote de laine à dénouer. Il peut jouer de son découpage, de ses contrastes, pour exprimer et faire ressentir sans être littéral. En ce sens, je trouve le contraste énergie/esthétique de Sorcerer très fort et évocateur.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
La première heure de The Deer Hunter a un sens (dans ses silences, ses regards, la présentation d'une communauté, de relations d'amitié) et est complètement liée à ce qui sera montré par la suite. Il n'y a pas de rupture.Gounou a écrit :Le fait même d'attendre qu'on s'en "serve", c'est-à-dire dans un souci de corrélation cause/conséquence, atteste cette vision vieille école que pointe G.T.O.AtCloseRange a écrit :Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?
Pour moi, ce long prologue choral n'a pas à se répercuter littéralement sur les événements futurs. il est un film en soi, qui de son esthétique à sa contextualisation définit des personnages à un instant T (leur chute), dans une réalité qui n'aura JUSTEMENT plus jamais court dans la deuxième partie, définie comme un enfer et son antichambre.
Ça me rappelle un peu les discussions autour de l' "utilité" de la première heure de Deer Hunter... un film n'est heureusement pas une pelote de laine à dénouer. Il peut jouer de son découpage, de ses contrastes, pour exprimer et faire ressentir sans être littéral. En ce sens, je trouve le contraste énergie/esthétique de Sorcerer très fort et évocateur.
D'accord pour dire que cette exposition, c'est un film en soi, voire 3 dans 3 lieux différents mais je ne vois pas ce que ça apporte au film (qui pour moi n'a de sens que dans lorsque les camions roulent).
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Tavernier suggère que Friedkin a la mémoire qui flanche , voilà ce qu'il rajoute à propos d'un autre opus du cinéaste...:AtCloseRange a écrit :Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?
'Je viens de voir un film méprisé que j’ai trouvé passionnant avec Tommy Lee Jones et Samuel Jackson, RULES OF ENGAGMENT que j’ai trouvé très personnel. Mais là je trouve que Friedkin a l’air d’oublier dans la deuxième partie 90% de ce qu’il a rajouté dans la première et qui du coup devient comme une excroissance, parfois brillante, mais dépourvue de sens organique. Je pense qu’il est souvent un meilleur cinéaste que scénariste"
Le film aurait donc été plus abouti sous forme de court ou moyen métrage?...ou du moins il se prête idéalement au chapitrage dvd/blu ray.AtCloseRange a écrit :film (qui pour moi n'a de sens que dans lorsque les camions roulent).
Dernière modification par mannhunter le 23 sept. 15, 11:45, modifié 5 fois.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
La vieillesse est un naufrage...mannhunter a écrit :Et Tavernier rajoute sur Friedkin...:
'Je viens de voir un film méprisé que j’ai trouvé passionnant avec Tommy Lee Jones et Samuel Jackson, RULES OF ENGAGMENT que j’ai trouvé très personnel. Mais là je trouve que Friedkin a l’air d’oublier dans la deuxième 90% de ce qu’il a rajouté dans la première et qui du coup devient comme une excroissance, parfois brillante, mais dépourvue de sens organique. Je pense qu’il souvent un méilleur cinéaste que scénariste"
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
AtCloseRange a écrit : Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?
Ni plus ni moins qu'à poser la situation et indiquer au spectateur qu'ils sont déjà tous en sursis. Condamnés. Le style de Friedkin a beau être réaliste ( caractérisation, la façon dont la situation est posée, le sens du détail vie villageoise...) l'expérience proposée n'en demeure pas moins abstraite et allégorique. Le film devient rapidement autre chose qu'une exploration patiente et scolaire du passé des personnages ou une analyse des interactions entre des personnages avec leur vécu et un contexte politique et social déterminé. Rapidement, il devient une épreuve. Une espèce d'odyssée.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
et ça charcle Roy Scheider dans les commentaires du blog... All That Jazz, Les Dents de la Mer, Marathon Man, French Connection, etc... Ok, dans les années 80, il n'est plus très bon mais ses années 70, c'est difficilement attaquable.AtCloseRange a écrit :La vieillesse est un naufrage...mannhunter a écrit :Et Tavernier rajoute sur Friedkin...:
'Je viens de voir un film méprisé que j’ai trouvé passionnant avec Tommy Lee Jones et Samuel Jackson, RULES OF ENGAGMENT que j’ai trouvé très personnel. Mais là je trouve que Friedkin a l’air d’oublier dans la deuxième 90% de ce qu’il a rajouté dans la première et qui du coup devient comme une excroissance, parfois brillante, mais dépourvue de sens organique. Je pense qu’il souvent un méilleur cinéaste que scénariste"
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Le prologue du film a une utilité : il montre comment les personnages meurent (métaphoriquement) et pourquoi ils sont fichus : il n'y a pas pour eux de retour possible à une vie normale. Sans ce prologue, on accepterait moins facilement le ton et l'atmosphère du reste du film qui se passe dans un cercle de l'enfer et montre les personnages comme étant déjà morts.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Même pas. Entre le financier menacé de prison, le terroriste ou le gangster, ils ne sont pas tous dans la même situation.Strum a écrit :Le prologue du film a une utilité : il montre comment les personnages meurent (métaphoriquement) et pourquoi ils sont fichus : il n'y a pas pour eux de retour possible à une vie normale. Sans ce prologue, on accepterait moins facilement le ton et l'atmosphère du reste du film qui se passe dans un cercle de l'enfer et montre les personnages comme étant déjà morts.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
A propos de Deer Hunter :
Bah si, il y a une rupture contextuelle et structurelle... et pas des moindres. Elle donne d'ailleurs lieu à l'un des cuts elliptique les plus saisissant que je connaisse. Et cette rupture ne serait pas aussi forte si ce qui précède n'avait pas duré de la sorte, au point d'être presque un film en soi. Friedkin, lui, s'appuie moins sur la durée que sur l'esthétique et l'énergie (documentaire) mais il y a dans les deux cas un avant et un après qui évoquent au final moins par leur liant narratif que par leur contraste, précisément.AtCloseRange a écrit :Il n'y a pas de rupture.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Ce que je veux dire, c'est qu'on ne passe pas d'un film à l'autre, ce sont les mêmes personnages avec les mêmes relations entre eux modifiées par l'effet de la guerre. La première partie interagit avec la 2ème et vice versa. Il n'y a rien de tel dans le Friedkin. Ok, je veux bien que ce soit un choix mais il ne me convainc pas dramatiquement parlant.Gounou a écrit :Bah si, il y a une rupture contextuelle et structurelle... et pas des moindres. Elle donne d'ailleurs lieu à l'un des cuts elliptique les plus saisissant que je connaisse. Et cette rupture ne serait pas aussi forte si ce qui précède n'avait pas duré de la sorte, au point d'être presque un film en soi. Friedkin, lui, s'appuie moins sur la durée que sur l'esthétique et l'énergie (documentaire) mais il y a dans les deux cas un avant et un après qui évoquent au final moins par leur liant narratif que par leur contraste, précisément.AtCloseRange a écrit :Il n'y a pas de rupture.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Ma lecture du prologue est qu'ils sont tous les trois fichus quoi qu'ils fassent, pour des raisons différentes certes. Sans ce prologue, le film ne fonctionnerait pas. On ne comprendrait pas pourquoi ils se conduisent comme s'ils étaient déjà morts. Je pense que c'est une erreur d'analyser le Friedkin à la lumière du Clouzot. Les deux cinéastes ne poursuivaient manifestement pas le même objectif. Clouzot avait beau être un cinéaste désabusé, ce n'était pas un cinéaste nihiliste comme Friedkin.AtCloseRange a écrit :Même pas. Entre le financier menacé de prison, le terroriste ou le gangster, ils ne sont pas tous dans la même situation.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
mannhunter a écrit :Tavernier suggère que Friedkin a la mémoire qui flanche , voilà ce qu'il rajoute à propos d'un autre opus du cinéaste...:AtCloseRange a écrit :Alors à quoi bon faire cette présentation des personnages/ de leur passé/ de leurs origines si c'est pour ne s'en servir à absolument aucun moment après?
'Je viens de voir un film méprisé que j’ai trouvé passionnant avec Tommy Lee Jones et Samuel Jackson, RULES OF ENGAGMENT que j’ai trouvé très personnel. Mais là je trouve que Friedkin a l’air d’oublier dans la deuxième partie 90% de ce qu’il a rajouté dans la première et qui du coup devient comme une excroissance, parfois brillante, mais dépourvue de sens organique. Je pense qu’il est souvent un meilleur cinéaste que scénariste"
ça se confirme.. Meilleur réalisateur que scénariste le Friedkin, Tavernier a probablement raison. Heureusement pour nous...car, c'est au prix d'un regard, de choix qu'un réalisateur effectue qu'on mesure son talent et originalité. Il fait du cinéma; il n'organise pas des films pour sorties scolaires ! Pour le coup, je trouve le point de vue de Tavernier très réducteur. Il n'a apparemment pas saisi la nature de la proposition. Il reste très littéral, pour ne pas dire au ras du bitume dans son analyse. Il accuse un manque de cohérence et de conséquence. T'imagines le carnage avec un Lynch ou un Argento...
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Je suis désolé mais Cremer n'est pas "mort". Je sais bien que c'était une époque différente et que la déchéance de la prison pour un financier était sans doute vécue différemment à l'époque (voir le personnage de Bideau) mais "fichu", c'est un bien grand mot par rapport au cas de Scheider et d'Amidou.Strum a écrit :Ma lecture du prologue est qu'ils sont tous les trois fichus quoi qu'ils fassent, pour des raisons différentes certes. Sans ce prologue, le film ne fonctionnerait pas. On ne comprendrait pas pourquoi ils se conduisent comme s'ils étaient déjà morts. Je pense que c'est une erreur d'analyser le Friedkin à la lumière du Clouzot. Les deux cinéastes ne poursuivaient manifestement pas le même objectif. Clouzot avait beau être un cinéaste désabusé, ce n'était pas un cinéaste nihiliste comme Friedkin.AtCloseRange a écrit :Même pas. Entre le financier menacé de prison, le terroriste ou le gangster, ils ne sont pas tous dans la même situation.
Mais bon, on est en boucle là.
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Re: Le Convoi de la peur - Sorcerer (William Friedkin - 1977
Il parle d'un film pourri là. Regarde mieux. Et c'est évident que Friedkin est un piètre scénariste. Enfin, ça n'est pas sale, il a beaucoup d'autres qualités.G.T.O a écrit :mannhunter a écrit : Tavernier suggère que Friedkin a la mémoire qui flanche , voilà ce qu'il rajoute à propos d'un autre opus du cinéaste...:
'Je viens de voir un film méprisé que j’ai trouvé passionnant avec Tommy Lee Jones et Samuel Jackson, RULES OF ENGAGMENT que j’ai trouvé très personnel. Mais là je trouve que Friedkin a l’air d’oublier dans la deuxième partie 90% de ce qu’il a rajouté dans la première et qui du coup devient comme une excroissance, parfois brillante, mais dépourvue de sens organique. Je pense qu’il est souvent un meilleur cinéaste que scénariste"ça se confirme.. Meilleur réalisateur que scénariste le Friedkin, Tavernier a probablement raison. Heureusement pour nous...car, c'est au prix d'un regard, de choix qu'un réalisateur effectue qu'on mesure son talent et originalité. Il fait du cinéma; il n'organise pas des films pour sorties scolaires ! Pour le coup, je trouve le point de vue de Tavernier très réducteur. Il n'a apparemment pas saisi la nature de la proposition. Il reste très littéral, pour ne pas dire au ras du bitume dans son analyse. Il accuse un manque de cohérence et de conséquence. T'imagines le carnage avec un Lynch ou un Argento...
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