Va falloir que je prenne le temps de traîner sur leur site (mais je trouve la navigation horrible. Le rangement et la base de donnée est totalement bordélique je trouve).Ann Harding a écrit : Bertuccio (Gaston Modot) et l'abbé Busoni (Léon Mathot)
Le Comte de Monte-Cristo (1918, Henri Pouctal) Le récit original qui était réparti sur 8 épisodes n'est malheureusement maintenant disponible que sous la forme d'une version réduite à 3 heures dans la copie présentée par la Cinémathèque Royale de Belgique sur le site European Film Gateway
Sinon, il y a une mini rétrospective sur André Antoine à la Fondation Pathé avec 6 des 8 films qu'il a réalisé.
Seul manque à l'appel Israel (copie uniquement disponible Italie) et les frères corses (justement découvert il y a deux mois à la cinémathèque via l'unique copie qui se trouve au Japon et qui ne sort pas souvent ).
Ca a commencé avec Les travailleurs de la mer (1919)
Un asocial vivant en dehors d'un petit village de pêcheur est amoureux de la fille d'un propriétaire d'un navire à moteur. Quand celui-ci disparaît sur un récif dangereux, il promet la main de sa fille à celui qui lui ramènera.
Troisième long-métrage pour Antoine qui délaisse les environs de Paris pour les extérieurs bretons afin d'adapter cette œuvre de Hugo le plus fidèlement possible. Une fidélité pas évidente quand il s'agit de montrer la lutte du héros contre une pieuvre géante et que Antoine, partisan du naturalisme, ne souhaite pas avoir recours aux trucages... Il doit ainsi se contenter d'un mollusque de quelques dizaines de centimètres qui n'a pas grand chose d'effrayant ramené à l'échelle humaine. Son découpage parvient à éviter heureusement le ridicule en excluant les plans larges, privilégiant ceux courts et les réactions de l’agressé. La scène fonctionne aussi grâce à la présentation de la menace qui s'avère inquiétante quand on la voit se faufiler entre les roches.
Ca reste la scène la plus problématique, le reste du film étant évidement bien plus traditionnel et classique dans le fond comme dans la forme.
Dans l'ensemble, l'histoire (d'amour) autour du héros fonctionne plutôt bien mais la structure du film possède plusieurs faiblesses comme le fait d'avoir 2 voleurs, ce qui alourdit considérablement et inutilement la narration, en évacuant trop longtemps les véritables personnages centraux, voire en négligeant certain (le rival amoureux). Cela dit cette dimension sérial n'est pas déplaisante (le meurtre près de la falaise et le face à face qui s'en suit) mais le gros problème demeure l’interprétation inégale. Ainsi Romual Joubé peut se montrer tour à tour touchant et émouvant puis ridicule et maladroit.
Au niveau de la forme, c'est en revanche bien plus convainquant, sans être renversant, mais les plans sont composés avec goût, il y a travail sur la profondeur de champ. Le naturalisme se drape de jolis moments qui évoque forcément le documentaire (qui n'existait alors pas encore).
Bilan en demi teinte donc.
Le coupable (1917), sa deuxième réalisation est bien plus réussie avec une écriture bien plus rigoureuse.
Lors du procès d'un jeune homme, inculpé pour meurtre, l'avocat général annonce que le présumé coupable est son fils. Il explique son parcours pour lui trouver des circonstances atténuantes.
Bien que plutôt idiot dans son intrigue (encore que cette vision sociétale de la peine de mort devait être audacieuse), le film surprend par sa construction dramatique puisque l'histoire se déroule en une succession de flash-backs chronologiques, procédés peu exploités à l'époque.
Non, seulement, le film multiplie les allers-retours du présent à différentes étapes du passé, mais Antoine se permet même d'intégrer un court flash-back dans un des flash-back (le récit de la brodeuse).
Sa narration n'a rien de brouillonne, elle est au contraire d'une fluidité exemplaire et d'une maîtrise du rythme très moderne. Pour bien faire la différence des changements époques, le cinéaste stylise la photographie des scènes à procès où l'éclairage isole les protagonistes dans l'espace où ils se trouvent. Il met ainsi l'accent sur les visages et la psychologie avec un travail qui rappelle le fameux Forfaiture qu'Antoine n'avait pas vu alors. Il fut surtout très déçu de constater qu'en même temps que lui, Abel Gance avait également développés ce type de recherche, mais avec un meilleur résultat et une meilleure direction artistique.
Antoine était sans doute un peu trop sévère avec lui car son film, son montage et son découpage demeurent exemplaires et parfaitement construits. Il y a de surcroît de très beaux plans du paris des années 1910 et sa dimension sociale n'a pas trop vieillie.
Passionnant durant sa première heure, le film souffre en revanche d'un dernier tiers assez ennuyant et redondant puisque le scénario explique également les événements proches de ce procès et détaille les états d'âme de l'avocat alors que l'intrigue en flash-back rendait tous ses éléments largement explicites.
Dommage de finir sur une telle fausse note après tant de qualités.