
La Tragédie d'un homme ridicule (Bernardo Bertolucci)

C'est un vrai paradoxe que cette Tragédie d'un homme ridicule, déjà dans le titre mais aussi dans ses intentions. C'est à la fois le film le plus touchant (du moins où les émotions sont le plus accentués) et le film le plus distant de Bertolucci.
Le film avait tout pour lui, une intrigue forte, un acteur en forme et un personnage magnifiquement ambigüe. Mais par excès d'intentions (ou le contraire) Bertolucci multiplie les apartés, les personnages et change toute les trois secondes de tonalité (drame, politique, comédie) au point de dédramatiser l'intrigue principale et de rendre certaines scènes réellement sans intérêt. Pourquoi le cinéaste ne pas se concentrer sur le personnage de Tognazzi, pourquoi offrir tant de scènes aux personnages secondaires alors qu'ils sont ternes et sans émotions, d'ailleurs pourquoi autant de personnages secondaires. Était-ce le désir d'une œuvre complexe, à énigmes ? Seulement au final, c'est l'ennuie qui prends la place des questionnements initialement souhaités. Et pourtant... pourtant le personnage de Tognazzi est tellement riche, tellement fascinant de lâcheté et en même temps de courage, de passivité en même temps que d'émotions. C'est là toute la qualité du film, d'offrir un personnage qui ne s'offre jamais au spectateur, qui feint de livrer des traits de caractères pour mieux les contredire la scène d'après. Et pour couronner le tout, le réalisateur s'offre un voix off qui par définition sert à définir profondément le personnage qui en use mais qui ici, ne sert qu'à brouiller les pistes. Dès lors, lorsque arrive la scène finale chargée en émotions, on ne sait toujours pas quoi penser de Tognazzi, s'il est un père aimant délaissé et incompris ou un parfait salaud qui ne pense qu'à son entreprise. Aucune clé nous est donnée et c'est brillamment fait.
C'est vraiment pour et par le personnage de Tognazzi que le film mérite une attention, le reste est par moments soporifique.