The crazies (George A. Romero - 1973)

[Julien Léonard]

Salut à tous !!

Bon, j'ai vu "The crazies" de George A. Romero y'a pas longtemps... Film tourné en 1973, la même année que "Season of the witch" (bof bof celui-là...), avec un petit budget...

Sérieux, j'ai beaucoup accroché !! Certes, le film manque d'un certain dynamisme, notamment dans la gestion de son action (le film ne décolle que dans sa seconde partie de ce côte là...) et un peu beaucoup de bavardages... Mais quelle ambiance, quel tour de force opéré par ce scénario !!

En fait, je le trouve plus appréciable que "La nuit des morts vivants"... J'adore Romero (et surtout son chef-d'oeuvre ultime que constitue le crépusculaire "Dawn of the dead" : une claque, que dis-je, une leçon !!) et je dois bien avouer qu'après avoir revu "La nuit des morts vivants" ce week-end, je l'ai trouvé un brin vieillot... Et pourtant quand j'ai découvert ce film il y a 6 ans, je l'avais trouvé magnifique, percutant et solide !! Cette fois-ci je l'ai trouvé toujours aussi malsain et incisif sur son sujet, toujours aussi mordant dans les relations entres les personnages, toujours aussi fascinant dans sa photographie très proche du documentaire, toujours aussi captivant et toujours aussi bien mis en musique...

Par contre, je n'ai pas pu m'empêcher de le trouver un peu morne par rapport à mes souvenirs, voire même perdant de sa solidité dans sa mise en scène... et même parfois maladroit. Ce qui ne m'empêche absolument pas de l'apprécier encore (allez, puisque c'est la mode des notes, je lui mettrais 7/10, et peut-être un tout petit peu plus...).

"The crazies" m'a paru beaucoup plus expérimenté, beaucoup plus fort, même si l'objet scénaristique s'en va un peu dans tous les sens... Même Romero semble bien plus à son aise derrière un meilleur budget (relativement meilleur...). La traque des contaminés, la tenue des militeires, le duel militaire-scientifique (un des thèmes forts de la filmographie de Romero)... beaucoup d'éléments qui concourent à faire de ce film un excellent exercice de style, continuant avec encore plus d'acharnement le propos de "La nuit des morts vivants" et précédant (rien que dans son traitement et ses tenues, par exemple...) "Dawn of the dead" !!

J'ai vraiment aimé (allez... en gros, mettons 8/10) et je crois que je vais faire l'achat du DVD chez Wild Side pour 12,99€ ces temps-ci...

Et vous, l'avez-vous vu ? Qu'en pensez-vous ?



L'affiche du film :

[Jack Griffin]

La nuit des morts-vivant a un petit ventre mou mais les personnages restent marquants ce qui je trouve fait un peu défaut à ce Crazies. C'est un bon film avec pas mal de bonnes scènes et une ambiance bien rendue malgré des moyens limités. Je suis resté sur ma faim la seule fois où je l'ai vu à cause d'un scénar qui ne m'avait pas completement convaincu.
à revoir.

Il me semble que Romero avait eu quelques difficultés sur le tournage.

[Julien Léonard]

Malgré un scénario qui part un peu n'importe comment, je dois avouer que l'impact de "The crazies" sur moi n'est en rien entaché... Perso, je le trouve plus fort et plus féroce encore que "La nuit des morts vivants" !!

Mais l'acteur de "La nuit..." dégageait quelque chose d'important et il est vrai que je ne retrouve aucune énergie semblable dans "The crazies", c'est un point faible.

[John Anderton]

J'ai beaucoup aimé ce Romero, qui est bien dans la mouvance de LA NUIT DES MORTS-VIVANTS, par les thèmes abordés et même par l'histoire, assez proche. Je suis d'accord pour dire qu'en revanche, SEASON OF THE WITCH, situé lui aussi en début de carrière de Romero, est mauvais... non seulement l'histoire ne m'a pas intéressé, mais on a à peine l'impression de regarder un film cinéma tellement c'est minimaliste... et que dire quand on sait que c'est Romero qui l'a signé...

[Frank Bannister]

Je suis d'accord pour dire qu'en revanche, SEASON OF THE WITCH, situé lui aussi en début de carrière de Romero, est mauvais...

tout à fait, en plus, c'est assez lent et pénible a suivre. Il ne s'y passe vraiment pas grands chose. Pour The Crazies, ce film à eu plusieurs titres. Je me souviens avoir une VHS de ce film retitré Experiment 2000.
J'aime beaucoup ce film, son atmosphère étrange qui s'installe dès les premiers plans et sa folie latente, jusqu'a ce que ca explose. Il y a une scène qui me vient tout de suite a l'esprit quand je parle de ce film:

SPOILER

c'est celle ou la grand-mère tricote tranquillement, assise dans son rocking-chair, et attaque avec ses aiguilles à tricoter l'un des scientifiques en combinaison.

FIN SPOILER

Je ne sais pas pourquoi cette scène m'a marqué plus que les autres. En tout cas, je trouve que ce film est à placer dans le haut du panier de la filmographie de ce réalisateur.[/b]

[Julien Léonard]

Effectivement, la scène avec la grand-mère est assez spéciale, marquante... Ou encore les gens traqués par les militaires et tués de façon spéciale aussi...

[Boubakar]

Bien que Season of the witch soit un film assez chiant (il ne se passe rien), le véritable morceau du coffret édité par Wild Side reste The crazies.
Le film manque de rythme, mais c'est assez bien mené, et il y a son lot de scènes assez sympas (comme avec la grand-mère, ou la destruction d'un hélico avec un fusil ). Le film est aussi constitué de pas mal de stock-shots, qui donnent l'impression que le film a un budget plus important que celui annoncé, mais elles sont assez incluses, en tout cas, ça ne choque pas.

Je ne suis pas grand amateur de Romero (enfin, j'en ai vu assez peu aussi...), mais celui-ci m'a bien plu.

[Demi-Lune]

Un virus expérimental et incontrôlable libéré en pleine nature, des gens qui deviennent cinglés, des autorités totalement dépassées, des militaires en combinaison qui font le ménage à coups de lance-flammes sur les civils... cinq ans avant Zombie, Romero dessine déjà les contours de son style apocalyptique et percutant, abordant cette épidémie avec le style documentaire et sec qui lui est coutumier. Pas de doute, on est bien dans les 70's avec la reprise d'une certaine imagerie de la guerre (les lances-flammes, les hélicoptères, la forêt, les gradés qui dissimulent des informations, le héros ancien Béret Vert, etc) pour faire planer le spectre traumatique du Vietnam, et la dénonciation, à travers d'une parabole fantastique, des dérèglements des institutions américaines. Entre une armée à la fois source du mal et contrainte à la coercition, et une administration qui évoque avec indifférence l'option du nettoyage nucléaire, on est là dans l'expression pamphlétaire du Romero de cette époque. Pessimiste, The Crazies est également bien cynique, que cela soit avec sa représentation ubuesque de la gestion de crise par les autorités militaires (la reconnaissance vocale ou la mort débile du médecin chercheur), ou son détournement de symboles connotés, comme lorsque, après Kubrick et avant McTiernan, le très américain When Johnny Comes Marching Home se met à résonner (ici sous les sifflements des soldats masqués).

The Crazies n'en oublie pas d'être un thriller très efficace. Romero exploite la situation avec réalisme, délivre des scènes choc au fil d'une narration rythmée. Comme dans ses meilleurs films, il place immédiatement le spectateur au cœur des évènements. Dans cette volonté de ne pas s'embarrasser de superflu et de composer un montage très sec, il parvient à créer un climat de chaos assez impressionnant (il suffit de se souvenir de l'ouverture de Zombie qui transpire déjà la fin du monde). Ainsi, même avec son budget rikiki, ses quelques stock-shots hasardeux et sa photo de téléfilm, Romero délivre un film dont la puissance et la hargne ne sont pas entachées par le poids des ans. En revanche, les limites du casting affaiblissent l'entreprise. Les acteurs n'ont pas suffisamment de carrure pour que l'on s'attache réellement à leurs personnages. Cela ne m'empêchera pas de considérer The Crazies comme une réussite, préparant le terrain à l'aboutissement que représente Zombie, voire, si l'on voulait chercher plus loin, préfigurant le Cronenberg de Frissons (on retrouve la même actrice, Lynn Lowry) et de Rage.

[Brody]

Je suis assez d'accord avec tes réserves, et moins enthousiaste sur les qualités purement cinématographiques du film. Romero semble tellement obsédé par sa charge sociale et anti-militariste, qu'il en oublie un peu le rythme et la gestion du stress du spectateur. Il y a quelques belles scènes (la grand-mère effectivement, entre autres citées ici) mais je trouve qu'elles manquent de liant. et le mini-budget se voit pas mal non seulement sur la photo mais aussi sur la mise en scène de l'action, où l'on sent vraiment le manque de costumes et de figurants. Pas forcément de sa faute, mais du coup cela m'a sauté aux yeux et fait sortir un peu de l'histoire.

Au final je n'en garde pas un mauvais souvenir quelques semaines après, mais continue à très largement lui préférer Zombie, qui en se concentrant sur l'histoire et le rythme fait justement passer bien plus subtilement les messages de fond à travers la forme d'un film devenu à juste titre une référence essentielle du genre.

[Demi-Lune]

il en oublie un peu le rythme et la gestion du stress du spectateur.

Ah sur ce point-ci, je trouve quand même le montage intéressant. On n'en est pas encore à l'aboutissement survolté de Zombie (version européenne), mais Romero coupe avec un vrai sens de l'urgence, ce qui imprime une atmosphère de panique générale au film ainsi qu'un rythme particulier, qui laisse peu d'aérations (tout le monde essaie de sauver sa peau à sa manière, c'est l'hystérie totale). C'est frappant lors des scènes de gestion de crise avec le colonel noir. Romero est fort pour suggérer, avec de purs outils visuels, un sentiment ambiant d'apocalypse. Du coup, je trouve (subjectivement, donc) la situation stressante en elle-même, même si on n'atteint effectivement pas les pics d'angoisse des films de zombies de Romero.
Ce que j'ai bien aimé aussi, c'est qu'avec son style formel dépouillé, ça donne un cachet "reportage volé" au film. Il y a quelques moments qui en sont illustratifs (justement, par exemple, où les soldats en combinaison semblent prendre la pause avec la marche militaire sifflée). Zombie avait des passages comme ça, aussi, comme quand les héros survolent une sorte de bivouac de rednecks et de policiers qui font la chasse aux morts-vivants entre deux saucisses grillées au barbecue. On dirait un reportage télé.
Après, c'est sûr que les contraintes du budget se ressentent sur les scènes d'action. Quoique certaines présentent quand même un découpage bien hargneux (l'évasion et le vol de la camionnette). Zombie reste clairement au-dessus de côté-là, mais perso, j'ai tendance à trouver que Romero s'est bien fait la main sur The Crazies.