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- Alexandre Angel a écrit :
Je suis d'accord avec ça.Watkinssien a écrit :C'est là où c'est fascinant, c'est d'occulter une autre manière de voir ou de ressentir cette violence. On a l'impression que c'est soit ça ou soit ça la violence chez Tarantino, mais non, il y a d'autres façons de la ressentir (mais je sais que Thaddeus saisit toutes formes de nuances ). Michael Madsen se faisant mordre et tuer par le serpent, par exemple. Quel regard porte-t-il? On peut jubiler! D'accord, je n'ai JAMAIS trouvé cela jubilant. J'ai trouvé cela cruel et en même temps forcément ironique. Le seul des personnages que la protagoniste n'arrive pas à tuer et pourtant c'est l'incarnation littérale de son surnom qui tue cet homme, trahi, solitaire, que l'on a vu se faire humilier, rabaisser. Acceptant de se sentir inférieur à un patron plouc comme chemin de rédemption.Alors, jubilation? Oui, comme une des composantes émotionnelles que l'on peut ressentir. Qu'un cinéaste me fasse passer différentes sensations dans ces moments graphiques, au sein d'un même film, parfois (et souvent même) au sein d'une même séquence, je ne le trouverais jamais nauséabond, mais plutôt conscient des degrés qui composent les spectateurs.Et pour en revenir au film de ce topic, il parvient à une intelligence encore plus sereine pour évoquer cette mixité sensitive qu'il y a dans certaines séquences.
Parce qu'il y a violence, cette dernière serait soit dégueu soit jubilatoire. Alors certes, elle est le plus souvent sardonique.
Mais c'est que la représentation, ou plutôt , l'occurrence de la violence chez Tarantino, n'est jamais unidimensionnelle : elle n'est pas sans nuances, véhicule ses contradictions et nous déstabilise de son ambivalence.
Oui, j'ai joui lorsque Aldo Raine grave une croix gammée sur le front de Hans Landa. Pourquoi? On est d'accord que ce n'est pas par sadisme et que je ne suis pas plus psychopathe que tous ceux qui ne le sont pas spécialement. Alors quoi?
Pour le plaisir enfantin de voir punir le méchant? Même pas. Comme Michael Madsen dans Kill Bill mais d'une façon différente, Hans Landa est attachant. Oui, j'ai bien dit attachant, parce qu'il est pulpy, qu'il dit "bingo!!", qu'il est parfois boudeur ("Décidément, vous et moi ne sommes pas soumis au même registre de respect mutuel"), qu'il a Bac+18 en italien et surtout, parce qu'il a la tête impayable de Christoph Waltz.
Bien sûr, il est un immonde enculé : l'incarnation du bourreau consciencieux et zélé, comme il devait tant y en avoir...
Mais quand Brad Pitt et son "bâtard" lui font son affaire, une étrange conjonction de ressentis peuvent être repérés.
Le plaisir, en ce qui me concerne, trouve sa pitance à plusieurs endroits. D'abord dans la bouclure impeccable d'un scénario qui se donne à voir (à lire) comme tel : on apprécie la tournure comme d'autres applaudissaient à Rostand. Ensuite, je suis, à ce moment-là, reconnaissant envers Tarantino pour sa lucidité, son absence totale de niaiserie, de bons sentiments, de concession : à une barbarie en répond une autre. Pitt et ses bâtards ne sont jamais sympathiques ni attachants. Au pire, ils sont (comme vient de le dire Tavernier sur son blog) inintéressants et Tavernier trouve le film sensiblement plus complexe et riche quand ils ne sont pas à l'image. En tous cas, lorsque le front de Landa est taillé au couteau et en gros plan, ses cris sont terribles (et bien faits!) et nous voyons ses mains arracher des touffes d'herbe. Il n'y a rien de fun : c'est de la série noire, et le plaisir (adulte) qui va avec. Et le fait d'enchainer direct avec la tarentelle géniale d'Ennio Morricone (celle d' Allonsanfan, des frères Taviani), nous emporte dans un souffle que peu de films contemporains ont su générer.
Cette illustration rejoint un peu ce que tu dis, il me semble
En tout cas Tarantino suscite des débats de haute volée.