Quelques années après la Première Guerre mondiale en Australie. Tom Sherbourne, ancien combattant encore traumatisé par le conflit, vit en reclus avec sa femme Isabel, sur la petite île inhabitée de Janus Rock dont il est le gardien du phare. Mais leur bonheur se ternit peu à peu : Isabel ne peut avoir d’enfant… Un jour, un canot s’échoue sur le rivage avec à son bord le cadavre d’un homme et un bébé bien vivant. Est-ce la promesse pour Tom et Isabel de fonder enfin une famille ?
Après plusieurs mois de sorties en salles assez déprimantes, ça m’a fait plaisir de tomber sur un film qui arrive enfin à me convaincre pleinement. Saveur d’autant plus appréciable qu’elle confirme tout le bien que je pense de Derek Cianfrance, l'assoyant un peu plus dans mon estime comme un des meilleurs réalisateurs actuels. Pourtant, je partais sur la pointe des pieds vers cette Vie Entre Deux Océans. Cianfrance s’essaie au mélodrame en costume adapté d’un best-seller. La possibilité qu’il se dégonfle dans un gros machin académique ne pouvait être écarté. Heureusement, le film n’a rien d’une reconstitution historique friquée. Au contraire, on perçoit rapidement ce qui a pu attirer Cianfrance dans cette histoire : principe de changement de point de vu, récit ample s’étalant sur plusieurs années, rythme laissant vivre ses personnages sans jamais vouloir les juger… Et surtout, il y a cette conviction qu’une histoire modeste peut devenir extraordinaire si on en donne les moyens. Cianfrance fait en ce sens une belle utilisation de l’environnement, offrant à la fois un véritable cachet visuel au scénario et en renforçant son sens. J’aime beaucoup par exemple sa façon de mettre en valeur un imposant ciel uniforme, équivalent d’une immense page blanche sur lesquels les personnages jetteront leur projet d’avenir. Comme l’explicitera un dialogue, toute la tragédie se jouera par la propension des personnages à se tourner vers l’avenir ou le passé, à se construire une nouvelle vie ou se morfondre au côté des morts. Pas étonnant alors que le point d’équilibre du long-métrage soit une scène de baptême avec le Funeral Canticle de Tavener en fond sonore, soit une association de la vie et la mort en un même instant. Le film est gorgé de ce genre d’efforts visuels ou narratifs (le passage au personnage d’Hannah se fait par le seul et unique flashback du film, mettant ainsi en exergue qu’elle vit définitivement dans le passé) renforçant une œuvre déjà fort émouvante par la justesse de ses personnages.