No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen - 2007)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Nicolas Brulebois
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Nicolas Brulebois »

Strum a écrit : Chez les Coen, le traitement de la violence participe d'une vision désespérée du monde, d'un humour juif, où l'absurde règne en maitre, et où les hommes (...) sont des pantins. Dans Fargo, les protagonistes croient maitriser la situation mais sont en réalité totalement dépassées par elle ; et un dieu moqueur de leur réserver une fin grotesque. Il n'y a rien de potache là-dedans.
je ne suis pas d'accord: les deux tueurs hurluberlus de Fargo sont clairement voisins des hurluberlus à l'oeuvre dans certaines de leurs comédies potaches (The Big Lebowsky, par exemple). A partir de là, je ne vois pas comment je pourrais prendre au sérieux la "vision désespérée" qu'essayent de mettre en oeuvre les frères Coen dans un tel film, puisque l'une des données première du film noir (le premier degré) est désamorçée.
J'ai eu l'occasion à une époque de diffuser ce film à des jeunes gens, et ils étaient clairement plus dans un rapport de bidonage/ricanement que de sérieux.
C'est aussi l'une des caractéristiques qui me dérange: à mes yeux, il n'y a ni humour juif ni "Dieu moqueur" guidant le destin grotesque des héros, mais un perpétuel ricanement "petit malin" qui m'empêche de ressentir quoi que ce soit face au déferlement d'emmerdes vécu par le personnage principal .
On ne peut ressentir l'absurdité tragique d'un destin que lorsque des cinéastes ou des auteurs font au moins mine d'y croire un peu au départ. Là, dès le début, je n'y crois pas, je sens d'emblée la poilade, et ça ruine tout.

Et pour en revenir à No Country...: quantité de commentaires lus ici insistaient sur l'aspect "fun" et "hilarante" de la coupe de cheveux du tueur, et sur l'incongruité maousse de son attirail.
Si ce ne sont pas des détails susceptibles d'insinuer du second degré, ça... :idea:
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par ed »

Nicolas Brulebois a écrit :un perpétuel ricanement "petit malin"
le même que dans tes messages ?
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Nicolas Brulebois
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Nicolas Brulebois »

Strum a écrit : l'absurde règne en maitre, et les hommes, comme chez Kafka, sont des pantins
Je veux bien le croire...
Mais est-ce une raison pour leur offrir si peu de chances au départ?
J'ai souvent déploré que dans un film des frères Coen, les personnages n'évoluaient jamais et restaient tout le long du film cantonnés à leur caractéristique (le plus souvent) simpliste de départ.
Exemple: les deux tueurs crétins ne sont rien d'autres que des tueurs crétins, le pourri malchanceux restera pourri malchanceux jusqu'au bout, le barbier mutique n'aura aucune autre espèce de caractérisation durant tout le film, idem pour l'arnaqueur homosexuel. Les personnages des Coen se limitent pour moi à des créatures de scénario qui jamais n'évoluent au-delà des 2 ou 3 malheureuses données de départ, ne se nuancent ou complexifient jamais.
Alors, effectivement, tu peux dire que ce sont des pantins et citer Kafka...
Pour ma part, je préfère parler de paresse d'écriture, ou pire, de faiblesse d'inspiration, tout simplement. Et c'est un autre point qui, ajouté au second degré quasi systématique, m'empêche d'apprécier leurs films à ambition "sérieuse", noirs ou pas.
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Colqhoun »

Nicolas Brulebois a écrit :je ne suis pas d'accord: les deux tueurs hurluberlus de Fargo sont clairement voisins des hurluberlus à l'oeuvre dans certaines de leurs comédies potaches (The Big Lebowsky, par exemple).[...]

Et pour en revenir à No Country...: quantité de commentaires lus ici insistaient sur l'aspect "fun" et "hilarante" de la coupe de cheveux du tueur, et sur l'incongruité maousse de son attirail.
Si ce ne sont pas des détails susceptibles d'insinuer du second degré, ça... :idea:
Tout cela ne ruine en rien le sérieux de la violence que présentent chacun de ces films. En rien du tout.

Selon toi il faudrait que tout soit absolument premier degrès pour que le film fonctionne ?
D'ailleurs, depuis quand le film noir doit il absolument être premier degrès ?
Quand je vois des films comme The Long Goodbye de Robert Altman ou Chinatown de Polanski, j'ose encore me dire que le film noir n'est pas que premier degrès.
Et heureusement d'ailleurs.
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Billy Budd
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Billy Budd »

Nicolas Brulebois a écrit : je ne suis pas d'accord: les deux tueurs hurluberlus de Fargo sont clairement voisins des hurluberlus à l'oeuvre dans certaines de leurs comédies potaches (The Big Lebowsky, par exemple). A partir de là, je ne vois pas comment je pourrais prendre au sérieux la "vision désespérée" qu'essayent de mettre en oeuvre les frères Coen dans un tel film, puisque l'une des données première du film noir (le premier degré) est désamorçée.
Il est certain que dans Fargo, certains aspects de Stormare ou surtout Buscemi relèvent effectivement du burlesque, voire du cartoon ; il n'en demeure pas moins que les coups font mal et que la violence n'est guère fun - je pense que le spectateur est supposé voir les agissements de ces détraqués par les yeux de McDormand, soit une personne ordinaire, qui est loin de se taper sur les cuisses lorsqu'elle assiste à la fameuse séquence à la fin ...

Nicolas Brulebois a écrit : J'ai eu l'occasion à une époque de diffuser ce film à des jeunes gens, et ils étaient clairement plus dans un rapport de bidonage/ricanement que de sérieux.
Cela me rappelle bigrement le débat sur Tarantino, je vais donc une nouvelle foix exposer mon laïus : lorsque j'ai découvert Reservoir Dogs en 1992, vu trois fois en salles à l'époque, personne dans la salle n'a ri au cours de la séquence Stuck in the middle with you.

J'ai revu le film deux ans plus tard lors d'une double programmation avec Pulp fiction et les rires fusaient ...

Bref, le problème est davantage à chercher dans l'approche du public que dans la façon dont la violence est montrée

Cela est évidemment valable pour Fargo
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Addis-Abeba
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Addis-Abeba »

Colqhoun a écrit : Quand je vois des films comme The Long Goodbye de Robert Altman ou Chinatown de Polanski, j'ose encore me dire que le film noir n'est pas que premier degrès.
Et heureusement d'ailleurs.

Ou tout simplement, et justement déjà chez les frères Cohen, l'excellent Miller's Crossing.
Strum
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Strum »

Nicolas Brulebois a écrit :je ne suis pas d'accord: les deux tueurs hurluberlus de Fargo sont clairement voisins des hurluberlus à l'oeuvre dans certaines de leurs comédies potaches (The Big Lebowsky, par exemple). A partir de là, je ne vois pas comment je pourrais prendre au sérieux la "vision désespérée" qu'essayent de mettre en oeuvre les frères Coen dans un tel film, puisque l'une des données première du film noir (le premier degré) est désamorçée.
...Et pour en revenir à No Country...: quantité de commentaires lus ici insistaient sur l'aspect "fun" et "hilarante" de la coupe de cheveux du tueur, et sur l'incongruité maousse de son attirail.
Si ce ne sont pas des détails susceptibles d'insinuer du second degré, ça... :idea:
Fargo est peuplé d'hurluberlus tout autant que dans Le Chateau de Kafka, où l'agitation vaine des protagonistes produit parfois des scènes très drôles. Mais cela reste un rire jaune.

Ta comparaison avec le film noir doit être maniée avec précaution car propice au contresens. Le film noir relève en dernier ressort d'une vision sèche de moraliste, où comme dans une tragédie grecque le déroulement des faits rend inéluctable la fin des personnages, quelque soient leurs actions parfois, comme s'ils payaient pour d'autres. Surtout, les personnages finissent par apercevoir leur propre condamnation ; avant que ne tombe le couperet, ils recouvrent la vue, comprennent ce qui leur arrive, et parfois même acceptent la mort car ils l'ont déjà pressentie. Le monde a un sens, qui peut être perçu de manière interne au récit par le personnage principal.

Les Coens ne font pas de films noirs, dans la définition classique du terme telle que je l'entends. Dans la vision absurde du monde qui est la leur, qui j'insiste, appartient à la tradition juive, les personnages amènent leur propre fin, mais en se débattant jusqu'au ridicule et au grotesque, car ils n'aperçoivent jamais la fin qui les attend. Ils croient toujours maitriser ce qui leur échappe. Ils touchent alors au pathétique, car ici se pose la question du sens du monde, qui demeure irrésolue. D'ailleurs, cette question du sens du monde, il existe à la fois dans Fargo et No Country, un personnage extérieur, témoin du drame, qui se la pose explicitement, sans trouver de réponse.

Quant aux commentaires insistant sur l'aspect "fun" du tueur... ils proviennent manifestement de gens qui ont mal regardé le film et se trompent sur le personnage de Chigurgh. Mieux vaut donc les ignorer.
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par ed »

Colqhoun a écrit :Quand je vois des films comme The Long Goodbye de Robert Altman ou Chinatown de Polanski, j'ose encore me dire que le film noir n'est pas que premier degrès.
Et puis le film noir est né du roman hard-boiled, qui n'est pas avare en ironie non plus (lire Hammett ou Chandler).
D'ailleurs prétendre que le film noir DOIT être exclusivement premier degré est une aberration ; ce serait priver Le grand sommeil de ses sous-entendus, Assurance sur la mort du regard sardonique de Wilder, En quatrième vitesse de ses paraboles etc...
Quant à l'évolution des personnages chez les Coen, ce que tu dis ici
Les personnages des Coen se limitent pour moi à des créatures de scénario qui jamais n'évoluent au-delà des 2 ou 3 malheureuses données de départ, ne se nuancent ou complexifient jamais.
me démontre ta méconnaissance de leur oeuvre (ou plutôt la littéralité de ton approche). Ce n'est pas bien grave, cela arrive à tout le monde.
Personnellement, je crois - entre autres - ne pas bien comprendre Kubrick, je me garde donc bien de trop en parler. Toi, ce serait un peu le contraire. Moins tu comprends, plus tu assènes. Et puis d'ailleurs, tu te répètes : http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 66#p871266 ou http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 81#p912981... :D
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par ed »

Strum a écrit :Le film noir relève en dernier ressort d'une vision sèche de moraliste, où comme dans une tragédie grecque le déroulement des faits rend inéluctable la fin des personnages, quelque soient leurs actions parfois, comme s'ils payaient pour d'autres. Surtout, les personnages finissent par apercevoir leur propre condamnation ; avant que ne tombe le couperet, ils recouvrent la vue, comprennent ce qui leur arrive, et parfois même acceptent la mort car ils l'ont déjà pressentie. Le monde a un sens, qui peut être perçu de manière interne au récit par le personnage principal.

Les Coens ne font pas de films noirs. Dans la vision absurde du monde qui est la leur, qui j'insiste, appartient à la tradition juive, les personnages amènent leur propre fin, mais en se débattant jusqu'au ridicule et au grotesque, car ils n'aperçoivent jamais la fin qui les attend. Ils croient toujours maitriser ce qui leur échappe. Ils touchent alors au pathétique, car ici se pose la question du sens du monde, qui demeure irrésolue. D'ailleurs, cette question du sens du monde, il existe à la fois dans Fargo et No Country, un personnage extérieur, témoin du drame, qui se la pose explicitement, sans trouver de réponse.
Je suis assez d'accord avec cela, même si je trouve ta définition du film noir trop exclusive. D'une part l'idée du sens du monde ne s'applique pas forcément à tous les films noirs dits classiques, d'autre part elle sous-tend l'idée d'une "objectivité" (ce n'est pas le mot que je cherchais, mais bon) en négligeant l'idée d'un regard sur le monde. Je pense qu'il y a effectivement de la tragédie grecque dans le film noir, dans l'épure dramatique comme dans l'intensité des enjeux. Mais le monde n'a pas forcément un sens achevé, ou plutôt ce sens se modifie par les actions des personnages. C'est la théorie d'Hammett, poussée au bout dans Miller's crossing par exemple : "semer au maximum le désordre pour tout voir se résoudre" (en gros). Ainsi, selon moi, les frères Coen font bien du film noir, mais à leur sauce (appelons-le néo-noir si vous voulez, même si je n'aime pas trop le terme...). Ils ont digéré l'essence dramatique du genre, mais ils en modifient l'approche par leur regard, qui n'est pas si potache ou malicieux que Nicolas aime à le prétendre, en tout cas pas seulement. Comme tu l'évoques, leur regard sur le monde est très complexe ; il obéit à la fois à une logique, à une cohérence interne implacable mais aussi à une irrésolution (que tu appelles justement absurdité, mais j'évite le mot pour sa connotation comique) et donc à une vraie forme de désespoir. C'est toute l'évolution d'Ed Crane, par exemple, dans The man who wasn"t there : il prend conscience qu'il ne sait pas et sa quête est donc celle du sens. Il devient alors acteur de sa vie, ce qui est pour lui un changement tellement considérable, tellement brutal, que quand il réalise que le sens n'est qu'un leurre, il est trop tard. Il a seulement cherché à être, mais même cela ne lui est pas accordé dans ce monde... C'est aussi tout le sel de Tom, dans Miller's crossing ; j'ai vu des gens s'agacer de ne pas savoir s'il tirait toutes les ficelles ou s'il subissait tous ces évènements. La réponse est simple mais cruelle : peu importe car il n'y a pas de sens à ce monde. Finalement, je crois Nicolas trop cartésien pour apprécier la finesse de leur univers...
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Strum
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Strum »

ed a écrit :que tu appelles justement absurdité, mais j'évite le mot pour sa connotation comique
Si tu veux, mais enfin, le concept d'absurde fait si évidemment référence au célébrissime Mythe de Sisyphe de Camus que tu as certainement lu (et où il parle d'ailleurs de Kafka), qu'il me semble que ce risque de connotation comique est limité. Après tout, même W. Bush a lu l'Etranger.
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Nicolas Brulebois »

ed a écrit : Moins tu comprends, plus tu assènes
Arf ! j'adore ces gens qui, lorsqu'on ne partage pas leurs goûts, nous accusent de "ne pas comprendre". C'est tout de même un peu simpliste, comme vision des choses.
cela s'appelle peut-être de la cohérence, non? creuser une idée ou une réflexion sous différents angles d'approche?
Strum a écrit :Ta comparaison avec le film noir doit être maniée avec précaution car propice au contresens. Le film noir relève en dernier ressort d'une vision sèche de moraliste, où comme dans une tragédie grecque le déroulement des faits rend inéluctable la fin des personnages, quelque soient leurs actions parfois, comme s'ils payaient pour d'autres. Surtout, les personnages finissent par apercevoir leur propre condamnation ; avant que ne tombe le couperet, ils recouvrent la vue, comprennent ce qui leur arrive, et parfois même acceptent la mort car ils l'ont déjà pressentie. Le monde a un sens, qui peut être perçu de manière interne au récit par le personnage principal.

Les Coens ne font pas de films noirs, dans la définition classique du terme telle que je l'entends. Dans la vision absurde du monde qui est la leur, qui j'insiste, appartient à la tradition juive, les personnages amènent leur propre fin, mais en se débattant jusqu'au ridicule et au grotesque, car ils n'aperçoivent jamais la fin qui les attend. Ils croient toujours maitriser ce qui leur échappe. Ils touchent alors au pathétique, car ici se pose la question du sens du monde, qui demeure irrésolue. D'ailleurs, cette question du sens du monde, il existe à la fois dans Fargo et No Country, un personnage extérieur, témoin du drame, qui se la pose explicitement, sans trouver de réponse
C'est très intéressant, pour le coup :idea: . Hormis Kafka, est-ce que tu pourrais nous citer d'autres auteurs ou oeuvres pratiquant ce type de vision? Notamment dans le cinéma? Et en particulier le film "noir" au sens large (à part eux)?
Pour ma part, en admettant que les Coen procèdent réellement de cette "tendance" (et non d'une distanciation "cool" née dans les années 90, comme le dit Blue)... je crois alors que je préfère définitivement le versant "tragédie" du film noir. Cette hypothétique tendance "tradition juive de l'absurde" appliquée au thriller me semble un peu contre nature, car vectrice de trop de dérision potentielle (en tout cas, chez les Coen). Et j'ai beaucoup de mal à appréhender une histoire a priori dramatique qui se présenterait dès le début sous un jour un peu absurde ou ricaneur, même avec les meilleurs alibis culturels du monde.
Nikita a écrit :Il est certain que dans Fargo, certains aspects de Stormare ou surtout Buscemi relèvent effectivement du burlesque, voire du cartoon
:shock: :? :roll:
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Billy Budd
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par Billy Budd »

Me répondre par des smileys, c'est vraiment de la provoc'
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Message par pak »

Nicolas Brulebois a écrit :
pak a écrit :Je me demande bien ce que Peckinpah, esthète de la représentation stylisée de la violence, aurait pensé ce ce débat ?
Puisque PAK mentionne Peckinpah, il faut tout de même dire que si celui-ci la "stylisait", il n'accompagnait pas la violence d'un second degré systématique.

Bizarrement, ça ne me dérange pas chez un Tarantino, dont les constructions/narrations un peu échevelées annoncent la couleur et ne visent pas forcément la linéarité d'un récit classique.
Alors que les Coen, dans un film comme Fargo, lorgnent quand même (un minimum) sur le film noir, proposent une intrigue relativement "linéaire". Mais, personnellement, je ne vois pas comment l'on peut ressentir cette noirceur de l'histoire si celle-ci est battue en brêche par l'ironie potache systématique qu'ils y insinuent.
Pas besoin des guillemets, Peckinpah, de par ses montages et ralentis, rendait esthétique ce qui ne l'est pas, en l'occurence la mort, violente et sanglante.
Et c'est aussi un moyen de prendre de la distance par rapport à ce qui est montré, presque de l'ironie (oh, comme c'est beau un homme qui meurt), et donc aussi en quelque sorte du second degré. Donc, si, de mon point de vue, avec des moyens différents, certes, les démarches des Coen et de Peckinpah sont similaires.

Mais ceci nous éloigne du débat, à savoir les références limites et inappropriées du petit soldat, la provoc n'étant pas forcément synonyme de pertinence.

Une chose découle de ces débats, c'est que la représentation de la violence au cinéma, et l'interprétation que se fait le spectateur, n'a pas fini de faire couler l'encre ou de titiller les doigts sur les claviers...
Dernière modification par pak le 14 mai 08, 00:09, modifié 3 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par ed »

Nicolas Brulebois a écrit :
ed a écrit : Moins tu comprends, plus tu assènes
Arf ! j'adore ces gens qui, lorsqu'on ne partage pas leurs goûts, nous accusent de "ne pas comprendre". C'est tout de même un peu simpliste, comme vision des choses.
Ce n'est pas une question de goûts. Je suis tout à fait capable de discuter avec quelqu'un qui ne partage pas mes goûts. J'affirmais simplement cela à la lumière de tes propos, notamment sur l'évolution des personnages. Pour moi, tu passes totalement à côté du sens du cinéma des frères Coen. Ce n'est pas un reproche (tout juste puis-je être triste pour toi), mais un constat, que je suis tout à fait capable de faire, pour d'autres cinéastes, à mon propre sujet.
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Re: No Country for Old Men (Joel & Ethan Coen, 2007)

Message par pol gornek »

Strum a écrit :W. Bush a lu l'Etranger.
Ceci explique beaucoup de choses...
Le public qui grandit devant la télé affine son regard, acquiert une compétence critique, une capacité à lire des formes compliquées. Il anticipe mieux les stéréotypes et finit par les refuser car il ne jouit plus d'aucune surprise ni curiosité, les deux moteurs de l'écoute.Il faut donc lui proposer des programmes d'un niveau esthétique plus ambitieux. La série télé s'est ainsi hissée, avec ses formes propres, au niveau de la littérature et du cinéma.
(Vincent Colonna)
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