
Being John Malkovich (Dans la peau de John Malkovich) - Spike Jonze
Criterion, 2012 (US)
BD-50, Zone A
1.85, Couleurs
1080p, AVC, débit vidéo moyen : 25970 kbps
English / DTS-HD Master Audio / 5.1 / 48 kHz / 4189 kbps / 24-bit (DTS Core: 5.1 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
STA, amovibles
Partant d'un scan 4K, l'image reste parfois un peu douce, et avec des noirs pas toujours aussi profonds qu'on le souhaiterait. Cependant, l'édition Criterion présente, malgré un recadrage assez flagrant, une nette amélioration par rapport au Blu Ray Universal disponible jusqu'à présent. Fini le bruit vidéo et l'aspect imprécis du disque Universal. Qui plus est, cette nouvelle édition est supervisée et validée par Jonze et son directeur de la photo, et d'après Jonze "représente enfin la palette de couleurs qu'on avait pensé et qui n'a jamais été reproduite correctement en vidéo jusqu'à présent".
L'image est au final propre (malgré quelques petits défauts ci et là), et possède à 95% du temps une belle profondeur de champ, avec certains plans assez impressionnants en terme de précision, le tout avec un rendu très naturel.



























Mais c'est la piste 5.1 qui impressionne, avec un design sonore extrêmement bien conçu, utilisant à merveille les 5 enceintes et le caisson de basses. Les meilleurs moments restent évidemment les passages à travers les yeux de Malkovich, permettant une spatialisation ultra précise doublée d'un gros travail sur le rendu sonore (grondements, rendu "marmonné" des dialogues, environnement sonore proche et lointain).
En bref, évidemment loin d'une démo sonore comme peut l'être un Oblivion ou un Star Trek Into Darkness, Being John Malkovich propose une piste 5.1 au design sonore simplement excellemment fin et intelligent.
Image : 8.5/10
Son : 9.5/10
Film : 10/10
"- Malkovich ?
- Malkovich, Malkovich.
- Malkovich !"
Qu'est-ce que Malkovich ? Et qu'est-ce que Being John Malkovich ?
Où se situe la frontière entre ce qu'on est et ce qu'on parait être, entre sa propre volonté et celle dictée par les autres ? Peut-on être unique et plusieurs en même temps, le tout dans la même personne ?
Et surtout, pourquoi le bord de l'autoroute est forcément la sortie ?
Admettons-le, Being John Malkovich est probablement un des films les plus originaux de ces 15 dernières années, tout en étant à la fois ce qui se rapproche le plus du surréalisme à la Buñuel et certainement quelque chose qui en laissera plus d'un perplexe.
Pourtant, tout fait sens dans John Malkovich, mais c'est juste profondément n'importe quoi. Depuis l'intégralité des personnages, entre losers patentés et bitch ultra agressive, jusqu'aux situations dans lesquelles ils se retrouvent, il y a de quoi finir le film avec un bon mal de crâne à force d'avoir les yeux écarquillés devant tant de trouvailles complètement cinglées.
Et pourtant, la puissance de Charlie Kaufman, aux commandes du script, c'est précisément d'utiliser cela comme si c'était tout à fait normal. Dès les 1eres minutes, tout est complètement halluciné, mais c'est normal. Le patron a 105 ans ? C'est normal. Cameron Diaz ressemble à une mégère SDF qui a plus d'animaux dans son appart que le plus grand zoo du monde ? C'est normal. John Cusack est un marionnettiste au chômage qui ne trouve rien de mieux que de jouer une pièce très explicite en pleine rue devant une fillette de 8 ans ? C'est normal aussi.
Et puis, arrive Malkovich. Pourquoi pas Being Tom Cruise ? Parce que Malkovich, mais si, vous savez, celui qui a joué le voleur de bijoux, là. C'est normal.
Rebondissant d'idées en idées, complètement jetées, sans jamais perdre le rythme, c'est une gigantesque toile de fond qui se tisse, au fur et à mesure que les gens prennent conscience de ce qu'ils peuvent faire de la possibilité d'être John Malkovich. Et si on y allait à plusieurs ? Et si on essayait de rester plus que les 15 minutes habituelles ? Et si on faisait l'amour à travers John Malkovich, dans une relation lesbienne hétérosexuelle (c'est normal) ?
"Oh, look away. Look away. Look away..."
A force, on saisit pleinement ce que pointe le film. Qui sommes-nous vraiment ? Sommes-nous nous ou sommes-nous simplement des marionnettes ?
Et puis, il y a aussi cette atmosphère mélancolique et tragique qui pullule dans le film, que John Cusack traverse comme un loser depuis la 1ere jusqu'à la dernière minute. L'épilogue du film pointe notamment une chose simple : à quoi bon frauder, à quoi bon vouloir fausser notre identité, chercher compliqué quand on peut faire simple, et surtout, fuir qui nous sommes ? Au final, rien n'est éternel, tout a une fin. Et à la fin du mensonge, rares sont les menteurs qui trouveront le bonheur.
La plupart des personnages qui gravitent autour de l'histoire principale sont d'ailleurs des gens essayant de se donner de l'importance, et tous sont principalement tragiques dans leur représentation : souvent inexacts, impolis, simplement ignorants, ils contrastent fortement avec les bonnes manières polies et réservées d'un Malkovich complètement malmené par un film qui ne lui laissera aucun répit.
Reste au final un film complètement halluciné et jamais à court d'idées pour se renouveler, preuve qu'il existe encore un chouia d'originalité quelque part au cinéma. Mindfuck complet, Being John Malkovich est une expérience folle qu'on ne peut que recommander.
Et accessoirement, Charlie Kaufman est un dieu vivant.