Le Privé (Robert Altman - 1973)
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Re: The long goodbye - le privé
Rien...Vu que je ne l'ai pas vu!!Dave Garver a écrit : Qu'en avez-vous pensé ?
C'est trés bien de demander mon avis Dave, à bientôt pour un autre avis pertinent!
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Altman... voilà un auteur que je connais très mal. A vrai dire, avant de voir Le Privé hier soir en salle, je n'avais vu que le très bon Gosford Park. Et voilà un fim qui me donne très envie le reste de sa filmographie !
The Long Goodbye est porté par un Marlowe assez inénarrable, mélange du détachement classieux du Bogart du Grand Sommeil et du j'en-foutisme loser du Dude de The Big Lebowski. On prend un grand plaisir à le voir nourrir son chat, se moquer de la petite frappe censée le prendre en filature, balancer ses vannes en toutes circonstances...
Ce qui me séduit beaucoup dans cette transposition du livre de Chandler dans les années 70, en comparaison avec Le Grand Sommeil ou d'autres films noirs de l'âge d'or, c'est le côté ancré dans la réalité (Cicero, hors de mon corps !). Ca sent la sueur, le tabac et l’alcool. Car Altman porte une certaine attention à ses personnages secondaires : l’escroc allumé et sa bande (Schwarzy ! ), les voisines baba défoncées, le « docteur » Verringer (excellent Henry Gibson, qui me met toujours mal à l’aise) et son asile de fous, le portier et son imitation de Walter Brennan à mourir de rire, etc. Altman accorde aussi une certaine importance à laisser sa caméra divaguer, dans un style parfois presque documentaire, pour filmer les à-côtés et donner une portée sociale au film. Un exemple : quand Marlowe vient pour la première fois dans la colonie bourgeoise pour son rendez-vous avec Eileen Wade, la caméra embarquée tourne sur la gauche pour filmer au passage les employés de maison noirs au travail sur le trottoir. Contraste immédiat avec les joueuses de tennis aux manières bourgeoises qui arrivent quelques secondes plus tard dans leurs jupes courtes et immaculées. Tout ça est assez fugace, mais ça suffit pour ancrer la villa luxueuse où va pénétrer Marlowe dans la réalité : il commence par nous montrer ce qu’elle cache. Comme dans Gosford Park, Altman s'intéresse particulièrement à l’envers du décor. Cf. aussi l'arrivée du privé au Mexique.
Cette opposition soulignée par Altman représente bien le positionnement de Marlowe par rapport à ses clients et son ami Terry Lennox : il préfère la droiture et la simplicité au luxe et à l’argent sale, comme le montre bien la fin et ce très beau plan dans lequel il ignore Eileen (quelques instants après le dialogue dans ma signature, qui débouche sur ce qu’on sait…) et, continuant son chemin à pieds, esquisse un pas de danse avec une mexicaine de passage.
Le tout est brillamment mis en scène par Altman, superbement épaulé par Vilmos Zsigmond. Le plan où on aperçoit à travers la vitre une très vague forme blanche, au loin dans l'obscurité, s’éloigner vers la mer est glaçant, ainsi que toute la séquence qui suit.
Si on ajoute à ça des acteurs impeccables (mention spéciale à Sterling Hayden impressionant en écrivain alcoolique) et l'entêtante petite musique de John Williams qui revient périodiquement sous différentes formes dans le film, on obtient une grande réussite, un polar admirable sur lequel il y aurait beaucoup à dire… Vraiment une très belle découverte.
The Long Goodbye est porté par un Marlowe assez inénarrable, mélange du détachement classieux du Bogart du Grand Sommeil et du j'en-foutisme loser du Dude de The Big Lebowski. On prend un grand plaisir à le voir nourrir son chat, se moquer de la petite frappe censée le prendre en filature, balancer ses vannes en toutes circonstances...
Ce qui me séduit beaucoup dans cette transposition du livre de Chandler dans les années 70, en comparaison avec Le Grand Sommeil ou d'autres films noirs de l'âge d'or, c'est le côté ancré dans la réalité (Cicero, hors de mon corps !). Ca sent la sueur, le tabac et l’alcool. Car Altman porte une certaine attention à ses personnages secondaires : l’escroc allumé et sa bande (Schwarzy ! ), les voisines baba défoncées, le « docteur » Verringer (excellent Henry Gibson, qui me met toujours mal à l’aise) et son asile de fous, le portier et son imitation de Walter Brennan à mourir de rire, etc. Altman accorde aussi une certaine importance à laisser sa caméra divaguer, dans un style parfois presque documentaire, pour filmer les à-côtés et donner une portée sociale au film. Un exemple : quand Marlowe vient pour la première fois dans la colonie bourgeoise pour son rendez-vous avec Eileen Wade, la caméra embarquée tourne sur la gauche pour filmer au passage les employés de maison noirs au travail sur le trottoir. Contraste immédiat avec les joueuses de tennis aux manières bourgeoises qui arrivent quelques secondes plus tard dans leurs jupes courtes et immaculées. Tout ça est assez fugace, mais ça suffit pour ancrer la villa luxueuse où va pénétrer Marlowe dans la réalité : il commence par nous montrer ce qu’elle cache. Comme dans Gosford Park, Altman s'intéresse particulièrement à l’envers du décor. Cf. aussi l'arrivée du privé au Mexique.
Cette opposition soulignée par Altman représente bien le positionnement de Marlowe par rapport à ses clients et son ami Terry Lennox : il préfère la droiture et la simplicité au luxe et à l’argent sale, comme le montre bien la fin et ce très beau plan dans lequel il ignore Eileen (quelques instants après le dialogue dans ma signature, qui débouche sur ce qu’on sait…) et, continuant son chemin à pieds, esquisse un pas de danse avec une mexicaine de passage.
Le tout est brillamment mis en scène par Altman, superbement épaulé par Vilmos Zsigmond. Le plan où on aperçoit à travers la vitre une très vague forme blanche, au loin dans l'obscurité, s’éloigner vers la mer est glaçant, ainsi que toute la séquence qui suit.
Si on ajoute à ça des acteurs impeccables (mention spéciale à Sterling Hayden impressionant en écrivain alcoolique) et l'entêtante petite musique de John Williams qui revient périodiquement sous différentes formes dans le film, on obtient une grande réussite, un polar admirable sur lequel il y aurait beaucoup à dire… Vraiment une très belle découverte.
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Pour ceux que ça intéresse, le film sera projeté à Beaubourg dimanche soir à 20h30 - dans le cadre de l'exposition "Imaginez Los Angeles" du Centre Pompidou.
"De toutes les sciences humaines, la pipeaulogie - à ne pas confondre avec la pipe au logis - ou art de faire croire qu'on sait de quoi on parle, est sans conteste celle qui compte le plus de diplômés !" Cosmo (diplômé en pipeaulogie)
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à fond d'accord avec ce qui est dit plus haut, moi aussi. ce film est un bijoux.
à sa manière, altman a parfaitement su élaborer une mise ne scène cohérente avec le parti pris de chandler.
un personnage en distance avec tout ce qui se passe autour de lui, presque effacé, dénué de psychologie et de porté déterminante sur l'action. il n'existe que par les événements face à lui et parleur rythme. d'où la mobilité des plans et la vie mise en scène autour du sujet (figue, anecdotes...).
et cette dernière scène où il se révèle, où il explose, où le film prend une nouvelle dimension. il nait une nouvelle fois dans la tête du spectateur, différent, cette fois avec un personnage total.
superbe !
à sa manière, altman a parfaitement su élaborer une mise ne scène cohérente avec le parti pris de chandler.
un personnage en distance avec tout ce qui se passe autour de lui, presque effacé, dénué de psychologie et de porté déterminante sur l'action. il n'existe que par les événements face à lui et parleur rythme. d'où la mobilité des plans et la vie mise en scène autour du sujet (figue, anecdotes...).
et cette dernière scène où il se révèle, où il explose, où le film prend une nouvelle dimension. il nait une nouvelle fois dans la tête du spectateur, différent, cette fois avec un personnage total.
superbe !