John Constantine a écrit :je suis vulgaire et je me parfume au Axe Marine!
Les Damnés (Luchino Visconti - 1969)
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les Damnés: Fait partie de ces classiques pour lesquels j'ai du mal à souscrire à l'enthousiasme général. D'abord parce que meme en tant qu'amateur de Shaw Brothers, de giallo et de western spaghetti j'ai vraiment eu du mal avec l'accumulation de gros coups de zooms brouillons dans les scènes d'intérieur -dans le passage des fusillades je les ai trouvés moins inappropriés, peut etre parce que cela va dans ce cas de pair avec une surenchère dramatique- là où au moins des zooms un peu plus discrets, un peu plus de classicisme pour cadrer avec le choix d'ampleur épique de la mise en scène le reste du temps n'aurait pas fait de mal selon moi. Quand je pense que ça a été plus souvent villipendé concernant le cinéma populaire italien de genre de l'époque, j'en viens à me dire qu'il y a eu deux poids et deux mesures. En tout cas, cet aspect montre au moins les liens esthétiques du film avec ce cinéma-là (bien souvent c'étaient les memes techniciens qui s'occupaient des films de Bava ou Corbucci autant que de ceux d'auteurs plus prestigieux), bref qu'on ne peut totalement séparer ces deux versants du cinéma italien de l'époque. Autre chose: je trouve le film trop long. Reste qu'outre son scénario écrit, son casting trois étoiles et son superbe score, le film vaut comme symbole d'une époque qui n'avait pas peur de transgresser certaines limites du bon gout -le coté décadent assumé du film- et d'aborder tous les sujets de façon décomplexée, ce qui lui donne un certain charme. 7.75/10
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Mon Visconti préféré jusqu'à présent : la décadence d'une famille mise en exergue par des événements extérieurs.Vic Vega a écrit :les Damnés: Fait partie de ces classiques pour lesquels j'ai du mal à souscrire à l'enthousiasme général. D'abord parce que meme en tant qu'amateur de Shaw Brothers, de giallo et de western spaghetti j'ai vraiment eu du mal avec l'accumulation de gros coups de zooms brouillons dans les scènes d'intérieur -dans le passage des fusillades je les ai trouvés moins inappropriés, peut etre parce que cela va dans ce cas de pair avec une surenchère dramatique- là où au moins des zooms un peu plus discrets, un peu plus de classicisme pour cadrer avec le choix d'ampleur épique de la mise en scène le reste du temps n'aurait pas fait de mal selon moi. Quand je pense que ça a été plus souvent villipendé concernant le cinéma populaire italien de genre de l'époque, j'en viens à me dire qu'il y a eu deux poids et deux mesures. En tout cas, cet aspect montre au moins les liens esthétiques du film avec ce cinéma-là (bien souvent c'étaient les memes techniciens qui s'occupaient des films de Bava ou Corbucci autant que de ceux d'auteurs plus prestigieux), bref qu'on ne peut totalement séparer ces deux versants du cinéma italien de l'époque. Autre chose: je trouve le film trop long. Reste qu'outre son scénario écrit, son casting trois étoiles et son superbe score, le film vaut comme symbole d'une époque qui n'avait pas peur de transgresser certaines limites du bon gout -le coté décadent assumé du film- et d'aborder tous les sujets de façon décomplexée, ce qui lui donne un certain charme. 7.75/10
J'ai hâte de revoir ce film en dvd, c'est pour bientôt.
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Les Damnés
Ou comment, à travers le portrait d’une famille, un pays entier se fait ronger par la plus terrible des maladies. Visconti filme ses personnages comme des morts vivants, suintants de toute leur crasse. Tout y passe : vengeance, cupidité, inceste se succèdent dans des salons aux couleurs tantôt rouges sang, tantôt glaciales, mais empreintes d’une même odeur de mort. Car La chute des rois prend au fil du récit l’ampleur d’une tragédie, rythmée par un inexorable et vertigineux jeu de massacre, prenant naissance dans les passions souveraines. Cette histoire est celle de la vielle Allemagne, Sophie von Essenbeck, de plus en plus cadavérique scène après scène, coupable d’avoir mené au pouvoir ceux qui scelleront sa perte.
Un film qui vous met les yeux rouges. Incroyable chef-d’œuvre, aux tableaux faisant passer l'empire romain pour un doux songe.
Ou comment, à travers le portrait d’une famille, un pays entier se fait ronger par la plus terrible des maladies. Visconti filme ses personnages comme des morts vivants, suintants de toute leur crasse. Tout y passe : vengeance, cupidité, inceste se succèdent dans des salons aux couleurs tantôt rouges sang, tantôt glaciales, mais empreintes d’une même odeur de mort. Car La chute des rois prend au fil du récit l’ampleur d’une tragédie, rythmée par un inexorable et vertigineux jeu de massacre, prenant naissance dans les passions souveraines. Cette histoire est celle de la vielle Allemagne, Sophie von Essenbeck, de plus en plus cadavérique scène après scène, coupable d’avoir mené au pouvoir ceux qui scelleront sa perte.
Un film qui vous met les yeux rouges. Incroyable chef-d’œuvre, aux tableaux faisant passer l'empire romain pour un doux songe.
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Super critique, à laquelle j'adhère totalement: ce Visconti-ci (Visconti-ci, Visconti-là...) m'a séchée. Le couple Thulin/Bogarde est incroyable, c'est lord et lady Macbeth après des siècles de décadence et de consanguinité avec la corruption, quant à Helmut Berger il est tout bonnement renversant, tantôt fils à maman petit-bras et ange du mal.masquedemort a écrit :Les Damnés
Ou comment, à travers le portrait d’une famille, un pays entier se fait ronger par la plus terrible des maladies. Visconti filme ses personnages comme des morts vivants, suintants de toute leur crasse. Tout y passe : vengeance, cupidité, inceste se succèdent dans des salons aux couleurs tantôt rouges sang, tantôt glaciales, mais empreintes d’une même odeur de mort. Car La chute des rois prend au fil du récit l’ampleur d’une tragédie, rythmée par un inexorable et vertigineux jeu de massacre, prenant naissance dans les passions souveraines. Cette histoire est celle de la vielle Allemagne, Sophie von Essenbeck, de plus en plus cadavérique scène après scène, coupable d’avoir mené au pouvoir ceux qui scelleront sa perte.
Un film qui vous met les yeux rouges. Incroyable chef-d’œuvre, aux tableaux faisant passer l'empire romain pour un doux songe.
J'observe au passage, mon cher masquedemort, que nous avons pas mal de films en commun
Sinon ce serait pas plutôt La chute des Dieux?
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C'est egza, c'est bien La Chute des Dieux; on est totalement dans le registre tragique de Shakespeare ou de Corneille: le pouvoir qui rend fou, le coeur du souverain comme celui qui décide de la face du monde, la démesure, l'abolition de la moralité... Les acteurs et actrices (vraiment exceptionnels) sont d'ailleurs tous, enfin, presque, beaux comme des dieux, enfermés dans leur chateau, ressemblant par moments à l'antichambre de l'enfer. Ah non mais quel film, quel film ! Je ne m'en remets pas.Jack Sullivan a écrit :Super critique, à laquelle j'adhère totalement: ce Visconti-ci (Visconti-ci, Visconti-là...) m'a séchée. Le couple Thulin/Bogarde est incroyable, c'est lord et lady Macbeth après des siècles de décadence et de consanguinité avec la corruption, quant à Helmut Berger il est tout bonnement renversant, tantôt fils à maman petit-bras et ange du mal.masquedemort a écrit :Les Damnés
Ou comment, à travers le portrait d’une famille, un pays entier se fait ronger par la plus terrible des maladies. Visconti filme ses personnages comme des morts vivants, suintants de toute leur crasse. Tout y passe : vengeance, cupidité, inceste se succèdent dans des salons aux couleurs tantôt rouges sang, tantôt glaciales, mais empreintes d’une même odeur de mort. Car La chute des rois prend au fil du récit l’ampleur d’une tragédie, rythmée par un inexorable et vertigineux jeu de massacre, prenant naissance dans les passions souveraines. Cette histoire est celle de la vielle Allemagne, Sophie von Essenbeck, de plus en plus cadavérique scène après scène, coupable d’avoir mené au pouvoir ceux qui scelleront sa perte.
Un film qui vous met les yeux rouges. Incroyable chef-d’œuvre, aux tableaux faisant passer l'empire romain pour un doux songe.
Sinon ce serait pas plutôt La chute des Dieux?
Si toi aussi tu aimes les épopées franchouillardes au coeur de la seconde guerre mondiale avec Pierre Mondy, Jean Lefebvre et Aldo Maccione, gimme five.Jack Sullivan a écrit :'observe au passage, mon cher masquedemort, que nous avons pas mal de films en commun
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Des mouches tournant autour de gens distinguésmasquedemort a écrit :c'est bien La Chute des Dieux; on est totalement dans le registre tragique de Shakespeare ou de Corneille
Voilà ce que nous sommes pour les divinités:
Elles nous tuent pour s'amuser (Shakespeare, Le roi Lear, de mémoire)
Heuuuuuu Je peux pas troquer ça contre un ZAZ?masquedemort a écrit :Si toi aussi tu aimes les épopées franchouillardes au coeur de la seconde guerre mondiale avec Pierre Mondy, Jean Lefebvre et Aldo Maccione, gimme five.Jack Sullivan a écrit :J'observe au passage, mon cher masquedemort, que nous avons pas mal de films en commun
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Re: Ludwig : question sur les versions
Je vais être bien seul sur ce fuseau, mais j'ai trouvé Les Damnés grotesque. Pour moi, trop d'excès tuent l'excès ; le caractère excessif des effets de mise en scène, de l'histoire par trop édifiante et simpliste, et du jeu d'Helmut Berger, m'ont complètement fait sortir du film. Je n'y ai pas cru du tout.
Dans Le Guépard (pour moi un des plus beaux films de l'histoire du cinéma, à la fois somptueux visuellement et profond sur le plan des idées) et à un degré moindre Mort à Venise (j'aime beaucoup Thomas Mann, Mahler et Venise), je peux m'abandonner sans trèves aux plaisirs de la contemplation. Mais je conçois que ces films puissent ennuyer des caractères moins contemplatifs.
Dans Le Guépard (pour moi un des plus beaux films de l'histoire du cinéma, à la fois somptueux visuellement et profond sur le plan des idées) et à un degré moindre Mort à Venise (j'aime beaucoup Thomas Mann, Mahler et Venise), je peux m'abandonner sans trèves aux plaisirs de la contemplation. Mais je conçois que ces films puissent ennuyer des caractères moins contemplatifs.
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Re: Ludwig : question sur les versions
Ludwig est très beau parce que le personnage de Louis II / Helmut Berger reste très juste.Watkinssien a écrit :(même le remarquable et puissant Les damnés)
La mise en scène des Damnés est très belle (je n’ai pas vu ce film depuis longtemps et je ne peut pas rentrer dans les détails), mais les personnages sont franchement caricaturaux et le mélange décadence psycho / jeu de pouvoir est difficilement crédible.
Le message politique de ce film, d’autre part, était clairement voulu par Luchino Visconti :
"Il me semble que de toutes les interprétations du fachisme, la plus juste, plus juste que celle de caractère freudien et psychanalytique, est celle qui considère le nazisme comme la dernière phase du capitalisme dans le monde, comme le dernier résultat de la lutte des classes arrivée à son extrême conséquence, à son extrême solution, celle d'une monstruosité comme le nazisme ou le fachisme et qui naturellement ne peut préluder à autre chose qu'à une solution dans un sens socialiste".
Hors ce message, on n’est pas obligé d’y adhérer. Comme le film est entièrement tourné autour de cette idée, on peut finir par trouver le film grotesque, en dépit de ses beautés cinématographiques.
Pour moi, le nazisme n’a rien à voir avec le capitalisme, mais avec le totalitarisme, qui sait aussi bien s’épanouir avec l’économie de marché qu’avec l’économie socialiste.
Tant qu’à la grande industrie allemande, elle a très bien su s’adapter au régime nazi, prospérer durant cette période et se remettre de la chute de l’Allemagne ensuite.
Historiquement, cette vision de l’industrie gangrenée par le nazisme et sa propre décadence bourgeoise, qui finit par laisser le nazisme prendre le pouvoir en son sein, parce que le nazisme est sa créature, je la trouve grotesque. Si les personnages étaient plus sobres, cette vision historique ne me générait sans doute pas trop. Mais là, ça fait trop. Visconti s’est peut-être inspiré de l’histoire des Krupp et d’Alfred Krupp en particulier, mais il en a fait une grotesque caricature. La véritable histoire était d’ailleurs suffisamment noire pour qu’il n’ait pas besoin d’en faire une fable gothique.
A l’inverse, Ludwig, c’est vraiment la fin d’un monde et le personnage était effectivement caricatural. Le résultat est absolument somptueux cinématographiquement et il sonne juste. Il n’y a rien d’outré, d’exagéré comme dans les Damnés.
Mais bon, j'avoue que les raisons pour lesquelles ce film m'énèrve n'ont rien à voir avec la mise en scène
"pour cet enfant devenu grand, le cinéma et la femme sont restés deux notions absolument inséparables", Chris Marker
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Re: Ludwig : question sur les versions
Ce que tu dis est intéressant, trouver l'idée "grotesque" n'est en soi pas interdit, mais elle se moule parfaitement dans la mise en scène de Visconti, dont le découpage et le sens de la narration s'harmonisent pour souligner l'atmosphère décadente dans ce qu'elle a de plus cauchemardesque, de plus dégradante.
On parle de la lie de l'humanité qui se fait détruire par le système qu'ils ont créé ou pour lequel ils y ont contribué et c'est remarquablement rendu par Visconti. Et la peinture des personnages n'est pas caricaturale, elle est basée sur des idées aussi diverses que les personnalités.
On parle de la lie de l'humanité qui se fait détruire par le système qu'ils ont créé ou pour lequel ils y ont contribué et c'est remarquablement rendu par Visconti. Et la peinture des personnages n'est pas caricaturale, elle est basée sur des idées aussi diverses que les personnalités.
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Re: Ludwig : question sur les versions
Pour partir sur "Les damnés", je ne rejoins pas vraiment les analyses données ci-dessus : dire que les nazis sont des présentés comme décadents me semble être une erreur. Les vrais nazis, ceux qui gagnent à la fin (les SS, et donc l'officier Aschenbach joué par Helmut Griem) ne sont pas du tout décadents ! Au contraire, ils profitent des faiblesses et des tares morales (ambition, jalousie, etc.) des membres la grande bourgeoisie allemande ici représentés pour les manipuler et supprimer leur pouvoir. Cette bourgeoisie qui tenait le même rôle de tentateur et manipulateur dans "Ludwig" quand il s'agissait d'éliminer l'aristocratie régionale finissante !! En croyant manipuler Hitler, en pensant ainsi contrer la menace du communisme, les puissances capitalistes allemandes ont mis en branle une machine de mort qui allait complètement les dépasser. Voici le sens des "Damnés" pour moi, que je ne trouve pas si contestable que cela...
Par ailleurs, quand vous dites que le plus dégénéré des Von Essenbeck fera le meilleur Nazi (comprendre Martin joué par Helmut Berger, je présume), c'est totalement faux et c'est très bien expliqué : les SS lui donnent le pouvoir de se venger, et il en profite. Les nazis abolissent les lois pour se faire des alliés utiles, mais Martin n'a pas de conscience politique ou de loyauté. Le meilleur Nazi de la famille, ce sera Gunther (Renaud Verley) qui est un pur, pas décadent du tout justement, mais que les circonstances vont placer dans les griffes des SS.
Maintenant, c'est certainement le Visconti historique où Visconti me semble aller le plus loin dans l'extrapolation et le fantasme, c'est clair... c'est sans doute son film le plus expressionniste en ce sens.
Par ailleurs, quand vous dites que le plus dégénéré des Von Essenbeck fera le meilleur Nazi (comprendre Martin joué par Helmut Berger, je présume), c'est totalement faux et c'est très bien expliqué : les SS lui donnent le pouvoir de se venger, et il en profite. Les nazis abolissent les lois pour se faire des alliés utiles, mais Martin n'a pas de conscience politique ou de loyauté. Le meilleur Nazi de la famille, ce sera Gunther (Renaud Verley) qui est un pur, pas décadent du tout justement, mais que les circonstances vont placer dans les griffes des SS.
Maintenant, c'est certainement le Visconti historique où Visconti me semble aller le plus loin dans l'extrapolation et le fantasme, c'est clair... c'est sans doute son film le plus expressionniste en ce sens.
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Re: Ludwig : question sur les versions
je ne partage pas cette analyse.Manolito a écrit :Par ailleurs, quand vous dites que le plus dégénéré des Von Essenbeck fera le meilleur Nazi (comprendre Martin joué par Helmut Berger, je présume), c'est totalement faux et c'est très bien expliqué : les SS lui donnent le pouvoir de se venger, et il en profite. Les nazis abolissent les lois pour se faire des alliés utiles, mais Martin n'a pas de conscience politique ou de loyauté. Le meilleur Nazi de la famille, ce sera Gunther (Renaud Verley) qui est un pur, pas décadent du tout justement, mais que les circonstances vont placer dans les griffes des SS.
Un bon nazi est un nazi docile et obéissant, sans conscience aucune de ce qu'il fait, ce qui est le cas de Martin.
A l'instar d'un certain nombre de romans allemands ayant pour sujet la décadence d'une famille (dont le modèle incontournable reste Les Buddenbrooke de Mann), le film passe en revue au cours de sa narration 4 chefs de famille possibles pour les Von Essenbeck qui sont autant de capitaines d'industrie que l'Etat totalitaire nazi voudrait pouvoir contrôler : le vieux grand-père trop attaché au monde ancien même s'il collabore avec le régime, un SA par définition incontrôlable car son allégeance va ailleurs, Bogarde et son personnage d'arriviste sensible, puis l'idiot de la famille, le dégénéré : Martin.
Les trois premiers sont incompatibles avec le régime et Aschenbach (qui personnifie l'Etat totalitaire et sa volonté de contrôle) les fait éliminer par divers stratagèmes au cours du film. Reste Martin. Martin, méprisé par sa mère, par son grand-père, espèce de sous-Stavroguine avec lequel il partage des pulsions pédophiles et une absence totale de conscience de ce qui est bien ou mal (mais sans le charisme du personnage de Dostoïevski). L'obsession de l'Etat totalitaire, c'est l'unité ; toutes les structures sociales, familiales ou politiques du régime doivent périr ou passer sous son contrôle. Martin est le nazi idéal, car il est exclu du respect de sa famille en tant que dégénéré ; c'est le seul des 4 prétendants successifs à "comprendre" le nazisme nous dit le film lors d'un dialogue explicite entre Helmut Berget et Bogarde ("even I understand" répond Martin quand Bogarde lui confie ne pas comprendre la nazisme). Sans famille, Martin, manipulé, contrôlé, par Aschenbach qui lui donne les moyens d'assouvir une vengeance contre son propre sang en détruisant ce qu'il en reste, trouve refuge dans le nazisme. La fin du film, nous le montre brutal, sûr de ses faits et gestes, pour la première fois de son existence ; pour la première fois du film, il n'est plus une loque, mais donne des ordres. Comme s'il avait trouvé une raison de vivre. Il s'est trouvé une famille de substitution. Assassin de sa mère, sans remord aucun, il fera un bon petit soldat, sans aucun scrupule, sans aucune conscience.
S'agissant de Gunther : le film nous le montre, dans une sous-intrigue totalement invraisemblable d'un point de vue psychologique, basculer sans doute du côté nazi. Mais de ce basculement et de ses conséquences, on ne verra rien. Tu le reconnais toi-même en estimant qu'il "fera" un excellent nazi, en employant le futur, là ou Martin est déjà l'instrument agissant et docile de l'Etat totalitaire. Peut-être que Gunther fera un bon nazi, peut-être pas. En tout état de cause, cela relève du hors champs cinématographique et ce n'est pas le sujet du film. Le sujet en est que le rejeton dégénéré et pédophile d'une lignée de chefs capitalistes est celui qui, compatible avec le régime hitlérien et accepté par ce-dernier avec ses tares (qui sont connues de Aschenbach), devient un bon nazi.
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- Machino
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Re: Ludwig : question sur les versions
Pas d'accord du tout, je t'invite à revoir le film ou à relire le découpage.
Il y un discours très clair d'Aschenbach à ce sujet après que Herbert, joué par Umberto Orsini, vient se livrer au nazis pour qu'on libère sa femme et ses filles. Le SS révèle à ce moment à Gunther que c'est Frederick, joué par Bogarde, qui a tué son père de ses propres mains. Et là, il explique que si Martin n'est qu'une "vipère" dont la morsure suffira pour éliminer Sophie et Frederick, l'ordre nouveau a besoin de la "haine pure" de quelqu'un comme Gunther pour faire des grandes choses, que c'est lui la vraie conquête d'Aschenbach. Recruter les meilleurs hommes pour un ordre nouveau en pleine ascension, tandis que l'ordre ancien de la bourgeoisie industrielle est sur le déclin irrémédiable...
Il y un discours très clair d'Aschenbach à ce sujet après que Herbert, joué par Umberto Orsini, vient se livrer au nazis pour qu'on libère sa femme et ses filles. Le SS révèle à ce moment à Gunther que c'est Frederick, joué par Bogarde, qui a tué son père de ses propres mains. Et là, il explique que si Martin n'est qu'une "vipère" dont la morsure suffira pour éliminer Sophie et Frederick, l'ordre nouveau a besoin de la "haine pure" de quelqu'un comme Gunther pour faire des grandes choses, que c'est lui la vraie conquête d'Aschenbach. Recruter les meilleurs hommes pour un ordre nouveau en pleine ascension, tandis que l'ordre ancien de la bourgeoisie industrielle est sur le déclin irrémédiable...