Que la bête meure (Claude Chabrol, 1969)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Jordan White
King of (lolli)pop
Messages : 15433
Inscription : 14 avr. 03, 15:14

Que la bête meure (Claude Chabrol, 1969)

Message par Jordan White »

Très beau film de Chabrol autour d'une histoire poignante et qui permet de voir une confrontation au sommet entre un Michel Duchaussoy dépassé par la colère devant la tragédie et un Jean Yanne impeccable dans un rôle de salaud impassible.
Le film passe demain sur Paris Première.
Melmoth
G.I. Joe
Messages : 6134
Inscription : 12 avr. 03, 01:41

Message par Melmoth »

Un formidable film, très prenant, une très belle reflexion autour du monstre ordinaire qu'interprète Jean Yanne (qui n'est finalement pas grand chose de plus qu'un gros con) et toute l'ambiguité du personnage de Michel Duchaussoy. La première scène avec Jean Yanne, ses vociferations hors champs et les plans sur les visages des membres de la famille autour de la table vaut son pesant d'or !

A ne pas rater pour les malheureux qui ne l'auraient pas encore vu.
Image
Avatar de l’utilisateur
Joshua Baskin
ambidextre godardien
Messages : 11664
Inscription : 13 avr. 03, 20:28
Localisation : A la recherche de Zoltar

Message par Joshua Baskin »

Je l'ai vu y a assez longtemps et je n'en garde qu'un souvenir assez flou, si ce n'est de l'avoir autant apprécié que le boucher, que j'avais vu au même moment.
Mais depuis j'ai revu le boucher, il est frais dans ma mémoire, dire que je l'ai apprécié est un euphémisme, donc je suppose que ca doit être la même chose pour que la bete meure.

Pas sur d'avoir été très clair sur ce coup là. :?
Intersections Global Corp.
John T. Chance
Assistant(e) machine à café
Messages : 274
Inscription : 23 avr. 03, 09:00
Localisation : Paris

Message par John T. Chance »

film génial, en construction circulaire ( un enfant sort de la mer au début, un homme y entre à la fin). Jean Yanne y est génial, un de ses trois ou quatre meilleurs rôles. à ne manquer sous aucun prétexte. :wink:
passe me voir du côté du rio grande, petite...
Margo

Message par Margo »

Le film préféré de Leopold Saroyan, on devrait donc le voir rappliquer fissa :wink:
Sergius Karamzin
Invité
Messages : 5977
Inscription : 14 avr. 03, 11:54

Message par Sergius Karamzin »

Que la bête meurt, ça me rappelle "j'ai été mangé" :lol:
Bob Harris

Message par Bob Harris »

Une petite leçon de subjonctif s'impose en effet. :wink:
George Bailey
Monteur
Messages : 4876
Inscription : 22 avr. 03, 14:12
Localisation : Francilien

Message par George Bailey »

Un film très puissant où les personnages sont bouleversants.
Mes chéris
Mes préférés
Le coeur a ses raisons que la raison ne connait point. Pascal
loran
Stagiaire
Messages : 76
Inscription : 21 juil. 03, 22:04

Message par loran »

Pour moi, c'est un des meilleurs Chabrol...vivement le DVD...
vive les dvds... :o)
George Bailey
Monteur
Messages : 4876
Inscription : 22 avr. 03, 14:12
Localisation : Francilien

Message par George Bailey »

loran a écrit :Pour moi, c'est un des meilleurs Chabrol...vivement le DVD...
Tu peux trouver le dvd dans le coffret Chabrol dispo chez cdiscount .
Mes chéris
Mes préférés
Le coeur a ses raisons que la raison ne connait point. Pascal
Ben Castellano
Décorateur
Messages : 3689
Inscription : 23 janv. 05, 12:07

Que la bête meure (Claude Chabrol - 1969)

Message par Ben Castellano »

Bon bah voilà, c'est pas une claque ce film, c'est une vraie torgnole... Elle est d'autant plus grande que, si j'ai beau adorer le cinéma de Chabrol, on va pas dire qu'il arrive encore à me surprendre même quand je découvre ses meilleurs films. Et là, c'est sans doute ce qui en fait un morceau réellement majeur, c'est que tout en la reconnaissant, j'avais parfois la sensation de voir un film complètement au large de ce qui fait son oeuvre. C'est un peu comme ce plan ou l'on voit les pièces du jeu d'échec totalements dispercées sur la table de jeu. La mise en scène est toujours d'une intelligence brillante, mais voilà, les théorèmes du réalisateur sont ici ouverts à une réflexion sur l'humain, la conscience morale, presque philosophique parfois qui m'a emporté comme rarement ce cinéma (que je suradore) avait réussi à le faire, surtout sur le plan émotionnel (les dernières minutes sont incroyablements belles à ce niveau).

Michel Duchaussoy est un comédien vraiment brillant, ça on le savait déjà, mais ici avec ce véritable premier rôle son talent éclate à tout niveau, en particulier au niveau de la voix off, extrèmement belle et qui a réellement une fonction extrèmement vitale dans la logique du film. Jean Yanne est proprement démentiel, Caroline Cellier extraordinairement belle et touchante... La mise en scène est on ne peut plus fascinante, comme ce plan séquence figurant le salon bourgeois ou Chabrol donne à son regard une ampleur proche d'un peintre. La ballade en mer renderait presque réellement malade le spectateur, en vérité Chabrol a dans ce film quelque chose de plus ouvert à la nature, à l'idée de quelque chose qui dépasse, que ce soit dans l'évocation de Brahms que dans les derniers plans qui figurent véritablement ce sentiment.

C'est toujours aussi implacable, mais ce film semble habité d'une ampleur d'un autre niveau. J'ai l'impression que c'est son oeuvre la plus à l'aise avec l'influence de Lang. La scène ou Duchaussoy regarde ses "Home Movies" est l'une des plus réussies de ce type que j'ai pu voir, il faut voir avec quelle subtilité Chabrol y place sur le même plan le personnage et sa figure mentale. Je pourrai édicter le nombre de scènes impressionnantes mais j'ai pas envie de spoiler (il y a quand même un des plus beaux silence de cinéma dans une scène de révélation impliquant le flic joué par Pialat et ceux qui l'interroge).

En découvrant "Que la bête meure", on comprend pourquoi Chabrol vantait tant "Mystic River" dans Les Inrocks il y a quelques semaines. C'est son film de lui que je préfère de très loin jusqu'ici... je pense que l'écriture de Paul Gegauff qui atteint ici des sommets y est aussi pour beaucoup.

Et j'ajouterai que l'on a sans doute jamais aussi bien filmé la Bretagne depuis Epstein...

Image
Dernière modification par Jeremy Fox le 3 mai 08, 20:01, modifié 2 fois.
Alex Blackwell
Charles Foster Kane
Messages : 22026
Inscription : 13 avr. 03, 10:10
Localisation : into the sky, into the moon

Message par Alex Blackwell »

Je suis très réservé sur ce film que je viens également de découvrir. Il y a ce prologue très laconiquement découpé, ses quelques plans de mer, ce petit garçon en ciré jaune mis en parallèle avec un bolide, la voix de Kathleen Ferrier. Une simplicité tragique.

La conception de la vengeance et la description de la méthode employée me convainquent beaucoup moins par une certaine vacuité qui s'installe: les hypotèses et autres circonvolutions de l'énigme semblent vaines, la caméra impuissante à assouvir cette soif de vengeance justement et l'on attend seulement de savoir ce qui va se passer. Comme si Jean Yann était trop ignoble pour être vrai et que le temps qui lui est consacré est d'emblée gaspillé.
Un goût de grand inachèvement laissé par une oeuvre faussement silencieuse.
Image

Night of the hunter forever


Caramba, encore raté.
Ben Castellano
Décorateur
Messages : 3689
Inscription : 23 janv. 05, 12:07

Message par Ben Castellano »

Alex a écrit :
La conception de la vengeance et la description de la méthode employée me convainquent beaucoup moins par une certaine vacuité qui s'installe: les hypotèses et autres circonvolutions de l'énigme semblent vaines, la caméra impuissante à assouvir cette soif de vengeance justement et l'on attend seulement de savoir ce qui va se passer. Comme si Jean Yann était trop ignoble pour être vrai et que le temps qui lui est consacré est d'emblée gaspillé.
Un goût de grand inachèvement laissé par une oeuvre faussement silencieuse.
SPOILER


Ce n'est pas la caméra qui est impuissante à assouvir cette soif de vengeance, c'est Duchaussoy lui même... Ce que le film se plait à montrer, c'est son impossibilité à devenir un homme froid, à ne plus vivre que pour sa vengeance. Ce ne sont pas des circonvolutions de l'énigme mais un homme qui d'une certaine manière a été complètement dépassé par le piège qu'il mettait en place. C'est en celà qu'il y a une vraie réflexion sur ce que c'est que de tuer un homme, malgré ce sentiment de vengeance. Le sort de Jean Yanne est continuellement retardé avant d'être réglé hors champs de façon inatendue.
Alex Blackwell
Charles Foster Kane
Messages : 22026
Inscription : 13 avr. 03, 10:10
Localisation : into the sky, into the moon

Message par Alex Blackwell »

Ben Castellano a écrit :
Alex a écrit :
La conception de la vengeance et la description de la méthode employée me convainquent beaucoup moins par une certaine vacuité qui s'installe: les hypotèses et autres circonvolutions de l'énigme semblent vaines, la caméra impuissante à assouvir cette soif de vengeance justement et l'on attend seulement de savoir ce qui va se passer. Comme si Jean Yann était trop ignoble pour être vrai et que le temps qui lui est consacré est d'emblée gaspillé.
Un goût de grand inachèvement laissé par une oeuvre faussement silencieuse.
SPOILER


Ce n'est pas la caméra qui est impuissante à assouvir cette soif de vengeance, c'est Duchaussoy lui même... Ce que le film se plait à montrer, c'est son impossibilité à devenir un homme froid, à ne plus vivre que pour sa vengeance. Ce ne sont pas des circonvolutions de l'énigme mais un homme qui d'une certaine manière a été complètement dépassé par le piège qu'il mettait en place. C'est en celà qu'il y a une vraie réflexion sur ce que c'est que de tuer un homme, malgré ce sentiment de vengeance. Le sort de Jean Yanne est continuellement retardé avant d'être réglé hors champs de façon inatendue.


SPOILERS



Cette explication est bien sûr très séduisante et je suis à motié convaincu: le père a beau coucher des mots sur le papier, on voit sans arrêt qu'il ne fait strictement rien et qu'il ne devient pas ce qu'il voudrait être. Néanmoins ce détachement tragique de la mise en images des premiers plans me donne ensuite l'impression de tourner à vide et de ne pas suffisamment se distinguer de la vacuité des personnages eux-même, à l'exemple de cette conversation sur la beauté diverse de Quimper durant le printemps ou l'automne. Les dialogues sont inexistants volontairement mais les images qui nous les font entendre ne doivent pas forcément l'être à leur tour, et je ne suis pas convaincu par l'esthétique de Chabrol.
Image

Night of the hunter forever


Caramba, encore raté.
Ben Castellano
Décorateur
Messages : 3689
Inscription : 23 janv. 05, 12:07

Message par Ben Castellano »

Alex a écrit :
SPOILERS



Cette explication est bien sûr très séduisante et je suis à motié convaincu: le père a beau coucher des mots sur le papier, on voit sans arrêt qu'il ne fait strictement rien et qu'il ne devient pas ce qu'il voudrait être. Néanmoins ce détachement tragique de la mise en images des premiers plans me donne ensuite l'impression de tourner à vide et de ne pas suffisamment se distinguer de la vacuité des personnages eux-même, à l'exemple de cette conversation sur la beauté diverse de Quimper durant le printemps ou l'automne. Les dialogues sont inexistants volontairement mais les images qui nous les font entendre ne doivent pas forcément l'être à leur tour, et je ne suis pas convaincu par l'esthétique de Chabrol.
Je ne trouve pas que les images soient inexistantes... Il y a par exemple un panoramique qui doit presque approcher les 360° lors d'une réflexion sur le hasard et les coincidence que je trouve très beau. De là même manière pour la confrontation aux "Home Movies", et à la mer. C'est plus un film qui s'exprime via la mise en scène qui guide l'esthétique d'elle même. Pour moi elle s'accomode parfaitement bien à la bretagne, c'est un endroit plus aisément ouvert au contemplatif qu'au lyrisme, le tragique que tu sembles guetter y sera aisément étouffé, c'est presque question culturel... mais il s'y développe aussi quelque chose de mystérieux, mystique. Je ne sais pas si tu as vu "Au coeur du mensonge", mais ça reflète aussi cet aspect "atténuant" de la Bretagne sur les gens et leurs sentiments, on a à faire à un cinéaste sui développe réellement l'espace temps de son lieu de tournage.

Chabrol reste aussi quelqu'un de profondément encré dans un univers qui dépeint des cultures, des modes de vie, des classes: c'est un regard que certain qualifieront d'enthomogiste et distant: le plan séquence dans le salon, la pêche au crabe, c'est toujours une façon de regarder les personnages de manière un peu extérieur. Cette confrontation des personnages au décor, à l'espace, au temps, c'est ce qu'il a hérité de Lang et qui fait tout le stimuli intellectuel de son oeuvre. Mais ce film a plus de coeur et de tripes que beaucoup d'autres, même par rapport au "Boucher".
Répondre