Avec Robert Dhéry, Alfred Adam, Colette Brosset, Jean Richard, Michel Serrault, Jean Lefebvre, Louis de Funès, Jacques Legras, Jean Carmet, Roger Pierre, Jean-Marc Thibault, Christian Marin... Scénario de Robert Dhéry, Alfred Adam et Pierre Tchernia – Dialogues d'Alfred Adam – Musique de Gérard Calvi – Genre : comédie – Production française – Sortie : 29/09/1961
Un ouvrier rêve d'avoir une automobile et l'occasion se présente quand une riche veuve cède pour une somme dérisoire un cabriolet américain. Cet achat va quelque peu bouleverser son existence tranquille...
La bande-annonce, bien dans l'esprit du film, commentée par Pierre Tchernia, co-scénariste du film :
En 1961, la voiture est presque devenue un produit de consommation courant. L'industrie automobile connait une croissance importante durant les Trente Glorieuses, aidée de plus par le recours au crédit facilité dans les années 1960. Mais elle est encore un symbole d'une certaine prospérité d'un ménage, même ouvrier. Être propriétaire de son véhicule, c'est montrer une certaines aisance, une liberté de déplacement, une gestion du ménage parfaite. Et par conséquence, elle peut tout aussi bien devenir un vecteur de jalousie, ou du moins d'envie.
L'auteur croque ses contemporains en grossissant gentiment le trait. Les ouvriers sont les as du système D et solidaires entre eux, les riches un peu pédant mais pas si méchants, bref le français est un gars bien, quelque soit son statut social. Mais c'est le propre du cinéma de Dhéry, aux gags parfois loufoques (il est passé par le cirque et ça se sent dans certaines scènes assez clownesques), et à la naïveté voulue et assumée.
Ainsi l'on voit la vie d'un quartier populaire où tout le monde se connait et s'entraide, à la vie peu compliquée, une vision bien-sûr un peu fantasmée, même à l'époque. Toutefois, Dhéry épingle ce qui est encore vrai aujourd'hui : la fascination qu'éprouvent certains pour les grosses voitures ou les modèles exceptionnels, ainsi que l'image, souvent trompeuse, qu'ils peuvent donner de leur propriétaire.
Les deux reproches principaux qu'on pourrait faire à ce film (et qu'il a en commun avec d'autres de l'auteur), c'est l'aspect un peu bordélique du contenu (il y a un côté Marx Brothers dans ce bordel), pas toujours très cohérent, ainsi que les mimiques forcées de Dhéry (qui semble se prendre parfois par Stan Laurel) et de quelques acteurs en roue libre. Mais c'est l'esprit Banquignol qui veut ça, qui passait sûrement très bien sur scène, mais moins à l'écran. A noter un hommage discret aux Temps modernes de Charlie Chaplin.
En parlant de l'esprit Banquignol, on peut noter la fidélité de l'homme à sa troupe théâtrale de joyeux lurons, et la plupart des troupiers apparaissent dans le film dont un Louis de Funes hilarant. Cet esprit, c'est aussi la bonne humeur et elle prime ici devant toute autre considération. Si le film a vieilli (par exemple la scène à propos de la confusion des nouveaux et anciens francs va échapper aux plus jeunes), il n'en reste pas moins plaisant à (re)voir.
A noter que l'ultime scène est tournée en couleur alors que le reste du film est en noir et blanc, comme un symbole d'une nouvelle ère, celle de l'automobile...
Étoiles : * * . Note : 12/20.
Autour du film :
1. La belle américaine est un gros cabriolet Oldsmobile 98 convertible de 1959 (et pas une Cadillac comme on pourrait le croire, même si elle semble être similaire à celle vue par exemple dans Le corniaud (Gérard Oury, 1964).
2. La dernière scène est en couleur mais n'est pas colorisée, même si une version du film existe ainsi (colorisée) pour la télévision, qui a aussi d'ailleurs été recadrée (donc à l'image amputée : version à éviter si possible) pour la télévision. La couleur n'était pas encore le standard, et Robert Dhéry et Pierre Tchernia souhaitaient le film en couleur. Devant le surcoût que ce choix aurait engendré, la production a imposé le noir et blanc. Ce n'est qu'après le visionnage des rushs que les auteurs eurent l'autorisation de filmer la dernière scène en couleur.
3. Pierre Tchernia est un vieux loup de la télévision. Aujourd'hui connu pour sa longue collaboration avec l'animateur Arthur à l'émission Les enfants de la télé, c'est aussi un passionné de cinéma. Certains d'entre nous se souviennent de son jeu Monsieur cinéma du dimanche après-midi qu'il anima pendant 15 ans. Un des dérivés de cette émission existe encore : les fameuses fiches de monsieur cinéma, qui avaient encore plusieurs milliers d'abonnés en 2009. Pierre Tchernia na pas eu qu'un rôle passif au cinéma : il a été réalisateur de plusieurs films (tous avec Michel Serrault dont au moins le premier a marqué : Le viager, 1971) et scénariste, notamment de plusieurs adaptations animées d'Astérix ainsi que la première de Lucky Luke (Tchernia et Goscinny étaient très liés).
4. Gros succès pour ce film puisqu'avec 4 151 247 entrées, il se place 9ème du box-office français de 1961, 4ème en entrées pour un film français.