L'aigle vole au soleil (John Ford - 1957)
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- Jack Griffin
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L'aigle vole au soleil (John Ford - 1957)
Voilà un film dont je n'attendais rien et qui m'a vraiment bouleversé. Il faut dire qu'il est peu cité dans les réussites fordienne et je profite de sa sortie en DVD zone 1 chez Warner (en fait zone all !) pour lui consacrer un topic.
Sorti en 1957 juste après The searchers, le film est le biopic d'un vieil ami de Ford, Franck Wead, membre de la Marine US mais aussi scénariste de bon nombre de films hollywoodiens (dont deux Ford, They were expendable et Airmail). John Wayne incarne donc Spig Wead au côté de Maureen O'Hara dans le rôle de sa compagne.
Un carton introductif nous présente le film comme un hommage à Franck "Spig" Wead, homme ayant apporté la puissance aérienne à la marine et de nombreux script à hollywood. Mais très rapidement Ford met les pieds dans le plat et c'est par le ton de la comédie que débute le film...Dans une description des petites luttes interne entre les recrues de l'armée et celles de la marine viennent se mêler un esprit légèrement potache, des gags et un humour que les habitués au cinéma de Ford reconnaîtront facilement. La manière dont le cinéaste dresse le portrait d’un groupe crée rapidement l’attachement envers les personnages. La séquence tragique de la mort de l'enfant, traitée avec une sobriété exemplaire annonce une des nombreuses ruptures de ton du film. La mise en scène de Ford lors de cette scène, par la simplicité et la puissance émotionnelle qu'elle dégage, est d'une maîtrise bluffante. A partir de là, le film bascule à un autre niveau et prend une profondeur inattendue. Au mot "fin", on se rend compte que l'histoire de Wead est en fait celle de l'échec d'un homme, tant dans sa vie privée que professionnelle...Là où le cinéaste excelle, c'est dans sa faculté de ne jamais forcer le trait, d'éviter tout pathos et d'approfondir subtilement et par petite touches la psychologie de Wead, démontrant de ce fait une confiance totale à l'intelligence du spectateur.
Il faut voir cette scène où Wayne, rentrant après une longue absence dans son foyer, découvre ses deux petites filles livrées à elles-mêmes. En deux ou trois plans et avec une nette économie de dialogues, Ford arrive dans la continuité de la scène, traitée apparemment avec légèreté, à sous entendre énormément de choses sur l'état de la relation qu'il noue avec Min, sa femme et la culpabilité qu'il en ressent. L'ensemble du film est mené avec fluidité et dynamisme, aidé par un scénario allant toujours là où on ne l'attend pas. Malgré la modestie apparente, il y a énormément d'instants et de scènes remarquables ...Il faudrait citer toutes celles avec Maureen O'hara (excellente !), celles de l'hôpital où encore les dix dernières minutes (les souvenirs de Wead devant l'album photo et le départ du porte-avions).
Wayne livre ici une de ses prestations les plus émouvantes, rappelant celle de La charge héroïque (son investissement dans le rôle lui fait même abandonner sa perruque). La musique de Jeff Alexander soutient magistralement le film et rend certaines scènes extrêmement touchantes, comme par exemple celle du dernier baiser de O'hara sur la tête de Wayne.
Un beau film, à la fois triste et gai. Et ne vous arrêtez pas à l'affiche, ce n'est absolument pas un film de guerre ! Bon je ne rend pas justice au film en n'en parlant aussi mal mais il est à découvrir au plus vite pour ceux qui ne l'auraient pas vu. Et, comme d'autres sur ce forum, je conseille également les Sacrifiés (they were expendable), autre grand film.
A noter un Ward Bond imitant John Ford !
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Tu ne pouvais pas me faire plus plaisir.
J'ai du voir ce film à l'âge de 12 ou 13 ans et j'étais moi aussi tombé complètement sous son charme. J'avais peur de le revoir, tu viens de m'enlever toute appréhension. Quant à They were expendables, j'ai déjà dit ici et là tout le bien qu'il fallait penser de ce chef d'oeuvre de sensibilité et d'intelligence dans la description de la guerre et des hommes qui la font. Et ces deux films sont là pour prouver aux détracteurs de John Wayne qu'il était décidément un grand acteur pas nécessairement obligé d'en faire des tonnes pour convaincre.
Je reviendrais sur ce topic une fois revu les deux films grâce aux DVD Warner.
J'ai du voir ce film à l'âge de 12 ou 13 ans et j'étais moi aussi tombé complètement sous son charme. J'avais peur de le revoir, tu viens de m'enlever toute appréhension. Quant à They were expendables, j'ai déjà dit ici et là tout le bien qu'il fallait penser de ce chef d'oeuvre de sensibilité et d'intelligence dans la description de la guerre et des hommes qui la font. Et ces deux films sont là pour prouver aux détracteurs de John Wayne qu'il était décidément un grand acteur pas nécessairement obligé d'en faire des tonnes pour convaincre.
Je reviendrais sur ce topic une fois revu les deux films grâce aux DVD Warner.
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Tout à fait d'accord,c'est un film qui a conservé intact son pouvoir d'émotion,et la prestation de Wayne confirme une fois de plus ses exceptionnelles qualités de comédien.J'en profite pour rendre aussi hommage à un autre film de Ford : The Long Gray Line (en français" Ce nest qu'un au revoir" ,avec le non moins estimable Tyrone Power .
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J'ai revu celui-ci l'année dernière et en revanche l'ai trouvé extrêmement mauvais aussi bien scénaristiquement (Ford se vautre dans la sensiblerie et quelle lourdeur de ton !) que techniquement (assez plat).Randolph Carter a écrit :J'en profite pour rendre aussi hommage à un autre film de Ford : The Long Gray Line (en français" Ce nest qu'un au revoir" ,avec le non moins estimable Tyrone Power .
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C'est un film que je n'ai pas vu depuis des lustres.Il m'avait fait grande impression à l'époque,mais il faudrait sans doute que je le revoie pour nuancer mon jugement.La mémoire joue parfois des tours.....Jeremy Fox a écrit :J'ai revu celui-ci l'année dernière et en revanche l'ai trouvé extrêmement mauvais aussi bien scénaristiquement (Ford se vautre dans la sensiblerie et quelle lourdeur de ton !) que techniquement (assez plat).Randolph Carter a écrit :J'en profite pour rendre aussi hommage à un autre film de Ford : The Long Gray Line (en français" Ce nest qu'un au revoir" ,avec le non moins estimable Tyrone Power .
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Re: L'aigle vole au soleil de John Ford
Cher Jack , rassures toi...tu rends plutôt service au film et tu en parles très bien à mon gout ...peut-être parce que je pense pareil...Jack Griffin a écrit :
Voilà un film dont je n'attendais rien et qui m'a vraiment bouleversé. Il faut dire qu'il est peu cité dans les réussites fordienne et je profite de sa sortie en DVD zone 1 chez Warner (en fait zone all !) pour lui consacrer un topic.
Sorti en 1957 juste après The searchers, le film est le biopic d'un vieil ami de Ford, Franck Wead, membre de la Marine US mais aussi scénariste de bon nombre de films hollywoodiens (dont deux Ford, They were expendable et Airmail). John Wayne incarne donc Spig Wead au côté de Maureen O'Hara dans le rôle de sa compagne.
Un carton introductif nous présente le film comme un hommage à Franck "Spig" Wead, homme ayant apporté la puissance aérienne à la marine et de nombreux script à hollywood. Mais très rapidement Ford met les pieds dans le plat et c'est par le ton de la comédie que débute le film...Dans une description des petites luttes interne entre les recrues de l'armée et celles de la marine viennent se mêler un esprit légèrement potache, des gags et un humour que les habitués au cinéma de Ford reconnaîtront facilement. La manière dont le cinéaste dresse le portrait d’un groupe crée rapidement l’attachement envers les personnages. La séquence tragique de la mort de l'enfant, traitée avec une sobriété exemplaire annonce une des nombreuses ruptures de ton du film. La mise en scène de Ford lors de cette scène, par la simplicité et la puissance émotionnelle qu'elle dégage, est d'une maîtrise bluffante. A partir de là, le film bascule à un autre niveau et prend une profondeur inattendue. Au mot "fin", on se rend compte que l'histoire de Wead est en fait celle de l'échec d'un homme, tant dans sa vie privée que professionnelle...Là où le cinéaste excelle, c'est dans sa faculté de ne jamais forcer le trait, d'éviter tout pathos et d'approfondir subtilement et par petite touches la psychologie de Wead, démontrant de ce fait une confiance totale à l'intelligence du spectateur.
Il faut voir cette scène où Wayne, rentrant après une longue absence dans son foyer, découvre ses deux petites filles livrées à elles-mêmes. En deux ou trois plans et avec une nette économie de dialogues, Ford arrive dans la continuité de la scène, traitée apparemment avec légèreté, à sous entendre énormément de choses sur l'état de la relation qu'il noue avec Min, sa femme et la culpabilité qu'il en ressent. L'ensemble du film est mené avec fluidité et dynamisme, aidé par un scénario allant toujours là où on ne l'attend pas. Malgré la modestie apparente, il y a énormément d'instants et de scènes remarquables ...Il faudrait citer toutes celles avec Maureen O'hara (excellente !), celles de l'hôpital où encore les dix dernières minutes (les souvenirs de Wead devant l'album photo et le départ du porte-avions).
Wayne livre ici une de ses prestations les plus émouvantes, rappelant celle de La charge héroïque (son investissement dans le rôle lui fait même abandonner sa perruque). La musique de Jeff Alexander soutient magistralement le film et rend certaines scènes extrêmement touchantes, comme par exemple celle du dernier baiser de O'hara sur la tête de Wayne.
Un beau film, à la fois triste et gai. Et ne vous arrêtez pas à l'affiche, ce n'est absolument pas un film de guerre ! Bon je ne rend pas justice au film en n'en parlant aussi mal mais il est à découvrir au plus vite pour ceux qui ne l'auraient pas vu. Et, comme d'autres sur ce forum, je conseille également les Sacrifiés (they were expendable), autre grand film.
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J'ai vu ce film à la télévision vers 1975 ..80 , je l'ai en VHS depuis facilement 20 ans ...mais comme toi j'ai tout de même acheté le DVD...de plus à voir en VO c'est sûr...
En ce qui me concerne , dans ce film , il y a quelques scènes de WAYNE véritablement inoubliables...même extraordinaires : le baiser de MAUREEN sur le crane , la fin ...THE DUKE qui pleure....etc...
Film mésestimé dans l'oeuvre de FORD, mais film très bon...
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Merci beaucoup !! Pour "The long voyage home", il parait que non... Mais ce serait bizarre que les deux films sortis ensemble ne soient pas édités tous deux en zone all...bogart a écrit :Oui pour l'Aigle vole au soleil (indiqué par Jack Griffin dans sa présentation du film)Julien Léonard a écrit :"The long voyage home" et "The wings of eagles" sont-ils donc tous deux en zone all ?? Merci d'avance pour la réponse...
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Bizarre non, ça arrive à chaque coffret : ça dépend du studio pour lequel a été tourné le film. Je viens de vérifier et ce n'est pas un All zoneJulien Léonard a écrit : Merci beaucoup !! Pour "The long voyage home", il parait que non... Mais ce serait bizarre que les deux films sortis ensemble ne soient pas édités tous deux en zone all...
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Et m---- !! Vivement que Warner le sorte en zone 2... Mon nouveau lecteur n'est pas dézonné, et je n'arrive pas à trouver un site qui traite ce modèle...Jeremy Fox a écrit :Bizarre non, ça arrive à chaque coffret : ça dépend du studio pour lequel a été tourné le film. Je viens de vérifier et ce n'est pas un All zoneJulien Léonard a écrit : Merci beaucoup !! Pour "The long voyage home", il parait que non... Mais ce serait bizarre que les deux films sortis ensemble ne soient pas édités tous deux en zone all...
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Je tiens, à rajouter mon enthousiasme vis à vis de ce Ford, découvert, il n'y a pas si longtemps que ça et qui ma autant surpris que ravis.
Surpris, car le film commence comme un film de guerre à première vu identique à biens d'autres (la présence de Wayne y est pour beaucoup) et tourne rapidement à 180° pour se transformer en drame psychologique, sur les séquelles d'une guerre, la mentalité d'un soldat dans la vie de tout les jours avec son handicap et la destruction de l'american way of life, à travers une vie de couple désastreux et le regard de la société sur un marginal (handicapé).
Ravi, car le film est touchant (Wayne dans l'un de ses meilleurs rôles) sur cette histoire vraie et dont Ford filme sans a priori, sans clichés.
Surpris, car le film commence comme un film de guerre à première vu identique à biens d'autres (la présence de Wayne y est pour beaucoup) et tourne rapidement à 180° pour se transformer en drame psychologique, sur les séquelles d'une guerre, la mentalité d'un soldat dans la vie de tout les jours avec son handicap et la destruction de l'american way of life, à travers une vie de couple désastreux et le regard de la société sur un marginal (handicapé).
Ravi, car le film est touchant (Wayne dans l'un de ses meilleurs rôles) sur cette histoire vraie et dont Ford filme sans a priori, sans clichés.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
- Jeremy Fox
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