Les Westerns 2ème partie

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Merci pour cet avis détaillé ; je ne connaissais pas :wink:
pak
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par pak »

Ben moi non plus, c'est passé à pas d'heure un vendredi soir sur RTL9 il y a quelques mois. Peut-être l'aurai-je mieux apprécié en VO et sans coupures pubs (mais en fait non, je ne crois pas... ).
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Pat Wheeler
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Pat Wheeler »

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Ce western un peu tardif de Sherman se révèle tout à fait honorable, avec une action rondement menée, des paysages sublimes et un couple Murphy-Farr attachant. Sans comporter le génie d'un Boetticher, ça en a la sécheresse et la concision, ce qui fait qu'il est difficile de s'ennuyer durant ces soixante-dix-sept minutes parfaitement utilisées. Le film est volontiers tendu et spectaculaire mais la psychologie des protagonistes n'est pas en reste: si le brave Audie s'avère évidemment blanc comme neige, le personnage de shérif campé par Stephen McNally (qui a ici droit à l'un de ses meilleurs rôle) est ambigu jusqu'au bout; de même pour le massif Robert Middleton, certainement pas net et sympathique mais peut-être pas aussi fourbe et cruel que de prime abord. En résumé, de la série B du meilleur tonneau à recommander chaudement aux amateurs.
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pak
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par pak »

Pas un film naphta, mais c'est le topic western...


La Revanche de Jesse Lee (Posse) de Mario Van Peebles (1993). Avec Mario Van Peebles, Stephen Baldwin, Charles Lane, Tommy 'Tiny' Lister, Big Daddy Kane, Billy Zane, Blair Underwood, Melvin Van Peebles, Salli Richardson, Pam Grier, Isaac Hayes, Richard Jordan, Woody Strode, Paul Bartel... Scénario de Sy Richardson et Dario Scardapane - Musique de Michel Colombier - Production : Jim Fishman, Preston L. Holmes et Jim Steele / PolyGram et Working Title Films. Sortie USA : 14/05/1993 - Sortie France : 21/07/1993.
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En 1898, durant la guerre hispano-américaine à Cuba, un groupe de soldats noirs, trahis par leur commandant blanc, le colonel Graham, déserte. Avec Graham à leurs trousses, Jessie Lee les mène jusqu'à sa ville natale Freemanville, où il compte bien régler de vieux comptes...


Pour comprendre un projet comme Posse, il faut revenir au contexte cinématographique du début des années 1990. A l'automne 1990 sort aux États-Unis Danse avec les loups de Kevin Costner, nettement pro-indien : c'est un succès critique (le film va rafler sept Oscars, trois Golden Globes et l'Ours d'Argent à Berlin plus des dizaines d'autres prix et nominations à travers le Monde), mais surtout public, rapportant près de dix fois ce qu'il a coûté rien que sur son territoire, à peu près 184 millions de dollars auxquels s'ajouteront les 484 millions rapportés par l'exploitation mondiale du film. Dès lors, les producteurs sentirent le filon à ré-exploiter, et remirent en selle, temporairement, un genre moribond, le western. La démarche de Costner ayant été à contre-courant du western traditionnel, s'intéressant plus à la cause indienne qu'aux classiques cowboys, les divers projets qui suivront tenteront la plupart du temps d'imiter l'acteur réalisateur en cherchant un angle inédit pour l'illustrer. En quelques années, le western va donc être décliné à toutes les sauces, avec bien-sûr les pro-indiens pour lesquels Danse avec les loups a ouvert la porte comme Le Dernier des Mohicans de Michael Mann en 1992 ou Geronimo de Walter Hill en 1993, parfois déclinés en neo-westerns comme La Vengeance du loup de Ryszard Bugajski en 1991 ou Cœur de Tonnerre de Michael Apted en 1992, mais aussi au féminin (Belles de l'Ouest de Jonathan Kaplan en 1994, Mort ou vif de Sam Raimi en 1995), en film d'auteur (Dead man de Jim Jarmusch, 1995), comédie (Maverick de Richard Donner, 1994), historique (Wyatt Earp de Lawrence Kasdan, 1994 ou Wild Bill de Walter Hill ainsi que Frank et Jesse de Robert Boris, 1995), crépusculaire (Impitoyable de Clint Eastwood, 1992), dessin animé (Fievel au Far-West, 1991)... et à la mode hip-hop avec ce Posse...

Mario Van Peebles fait feu de tout bois au début des années 1990. C'est un touche à tout : mannequin, acteur, scénariste, auteur de chansons, chanteur, réalisateur, producteur... Il commence à se faire un nom comme acteur, grâce notamment à sa participation au film Le Maitre de guerre de Clint Eastwood et Les Dents de la mer 4 (même si ce film est une purge, il a eu droit à une grosse exposition médiatique à sa sortie). Il s'est aussi rendu populaire à la télévision, notamment avec sa série Sonny Spoon en 1988, qui ne tiendra que deux courtes saisons totalisant une quinzaine d'épisodes. En 1991, il est parmi les 50 personnalités les plus belles du Monde d'après People Magazine, un classement en soi complètement idiot, mais qui est surtout indicatif quant à sa popularité d'alors. Mais surtout, cette même année, il impressionne en présentant sa première réalisation cinématographique (il avait déjà réalisé des épisodes de séries telles que Sonny Spoon, 21 Jump Street ou Un flic dans la mafia), New Jack City. Le début de la décennie, c'est aussi l’explosion du rap et de la rue. Drogue, guerres de gangs, rivalités entre rappeurs (qui aboutiront en 1996 et 1997 aux assassinats de Tupac Shakur et Biggie Smalls) marquent la culture et l’actualité américaines, d’autant que l’affaire Rodney King va jeter les dernières étincelles sur une poudre déjà brûlante. Au point que le rap s’impose dans les bandes originales, qu’une mode de films sur les ghettos et les tensions interraciales trouve le chemin des salles avec des titres comme Menace II society des frères Hughes, Boyz N the hood de John Singleton ou Rage in Harlem de Bill Duke, et qu’il est de bon ton d’avoir un ou plusieurs rappeurs à l’affiche qui jouent les durs (Posse ne fait pas exception avec Big Daddy Kane dans l'un des rôles principaux). C’est dans ce contexte naissant que Mario Van Peebles se fait remarquer avec sa première réalisation, et qu’il entame ensuite le tournage de Posse. Bien que ce dernier soit un western, il reste dans une veine contestataire et applique les recettes du film à la gansta rap : héros borderlines et hors-la-loi, racisme des blancs, rappeur de service, montage rapide et mise en scène clipesque.

Malgré tout, en dehors de ses aspects typés cédant à une mode, ce film a le mérite de mettre en avant des héros noirs dans l’Amérique de la fin du XIXème siècle. Le western, genre qui se situe pourtant dans le temps au lendemain de la guerre de Sécession (la plupart des films voient leurs scénarios sensés se dérouler après la fin du conflit), est largement et majoritairement composé de héros blancs, parfois secondés de mexicains. L’homme noir y est plus marginal et rarement dans les rôles principaux, la plupart du temps serviteur ou esclave (ce qui parfois revenait au même), et ne parlons pas des dames, abonnées aux rôles de femmes de maison (cuisinières, domestiques, nounous... ). Woody Strode par exemple, peut-être le premier acteur noir à avoir une présence importante à l’écran dans un western, est un esclave dans Les Boucaniers d’Anthony Quinn en 1958. Deux ans plus tard, dans Le Sergent noir de John Ford, s’il est le protagoniste autour duquel l’intrigue se développe, il reste une victime d’un système guidé par les préjugés, et doit son salut à l’intervention de blancs en sa faveur. Il redeviendra un personnage secondaire dans les Ford suivant qu’il tournera, Les Deux cavaliers et L’Homme qui tua Liberty Valence. Ceci dit, cette lente évolution le conduira en 1966 à être l’un des personnages forts du film de Richard Brooks, Les Professionnels. On pourrait dire qu'il a ouvert la voie puisqu'à partir de la fin des années 1960, des acteurs noirs vont aussi avoir des rôles principaux dans des westerns : citons Jim Brown dans Les Cent fusils, Sydney Poitier dans La Bataille de la vallée du diable ou Buck et son complice, Ossie Davis dans Les Chasseurs de scalps, et bien plus tard, Danny Glover dans Silverado ou Morgan Freeman dans Impitoyable. Mais ce genre est alors en déclin, et surtout, cela reste au niveau du divertissement. En parcourant tous ces films, alors que la cause indienne fut assez tôt représentée, la place dans le western (et donc dans l’Histoire des États-Unis lors de la conquête de l’Ouest) de ceux que l’on nomme désormais les afro-américains reste exceptionnelle et concentrée sur des cas isolés. Qu’un réalisateur noir, s’intéresse à un genre quasi exclusivement créé, animé et proposé par des blancs ne pouvait que susciter la curiosité voire l’enthousiasme d’avoir enfin un angle de vue inédit.

Angle de vue tellement inédit qu’au moment de la sortie du film en salles, et même encore des années après lors d’une première vision, certains restent sceptiques sur des aspects du film. Et ce dès la scène d’ouverture, avec la participation de soldats de couleur lors de la guerre hispano-américaine à Cuba en 1898. Pourtant en 1989, Edward Zwick, dans Glory, avait montré avec panache que ces hommes avaient payé de leur sang leur droit de combattre les armes à la main durant la guerre de Sécession, et ce dès 1863. Droit durement acquis donc, poursuivi et honoré par les Buffalo soldiers (surnom donné par les Kiowas qu’ils affrontèrent plusieurs fois durant les guerres indiennes) dont on retrouvera justement les régiments engagés à Cuba. Van Peebles utilise ce fait historique comme entrée en matière, et suffisamment bien pour qu’on espère un film réussi. C'est le seul moment où il parvient à illustrer les rapports sulfureux entre blancs et noirs dans une armée, donc un pays, pas vraiment prêt à parler d'égalité des droits.
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Gravure de Don Stiver représentant les fameux Buffalo soldiers durant la campagne de Cuba
Un autre point d’étonnement concerne le fait de voir des noirs américains devenir aventuriers et se promener en toute impunité avec des armes. Pourtant, plusieurs photos d’époque montrent de tels hommes posant avec pistolets à la ceinture et / ou fusils à la main. Par exemple, prenons Ned Huddleston dont on voit la photo au début du film, né esclave dans l'Arkansas en 1849, affranchi à la fin de la guerre de Sécession, cowboy de rodéo puis voleur de chevaux au Mexique et au Texas, voleur de bétail dans le Wyoming, chercheur d'or, ayant connu une histoire d'amour tumultueuse avec une Shoshone et ayant échappé à la mort plus d'une fois. Un parcours qui en ferait presque le prototype du héros principal du film... Pour la petite Histoire, l'homme changea son nom en Isom Dart vers 1890, afin de changer de vie et avoir son propre ranch. Mais son passé de voleur le rattrapa puisque ses voisins ranchers le soupçonnaient d'avoir constitué son cheptel avec du bétail volé chez eux... Ceux-ci finiront par embaucher le fameux Tom Horn, qui tendit une embuscade à Huddleston / Dart le 3 octobre 1900 et le tua, bien qu'il ne fut jamais prouvé que ses bêtes furent effectivement volées, mais à l'époque, qui plus est lorsque l'affaire concernait un homme noir, la présomption d'innocence n'était qu'une vague notion vite balayée par une soi-disant justice très expéditive... Et par extension, passons du statut d’aventurier à celui de cowboy (les premiers devenant souvent les seconds et inversement) : contrairement à l’image véhiculée par les westerns, le métier de cowboy ne concernait pas que les blancs. S’il est difficile de nos jours d’évaluer le nombre d’hommes de couleurs concernés, il est admis qu’environ 30% des cowboys après la guerre de Sécession étaient des non-blancs, composés de mexicains, de métis et d’anciens esclaves. C’est d’ailleurs assez logique dans le sens où ce métier était dur, dangereux et très mal payé, la communauté des cowboys constituant l’une des plus basses couches sociales de cette fin de XIXème siècle. Là encore, il existe des photos d’époque illustrant ce fait. Il n’est donc pas aberrant, loin de là, de voir une petite troupe d’hommes noirs chevaucher l’arme à la hanche dans un pays qui pourtant ne les apprécie guère.
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Ned Huddleston / Isom Dart
Pas vraiment du genre à emmerder
Enfin, on peut aussi s’interroger sur l’existence de villes uniquement composées d’habitants de couleur dans les années 1890 telle celle où nos héros vont livrer leur dernier baroud. Pourtant, avec le rejet qu’ils suscitaient, il est bien naturel qu’un certain nombre de gens aient cherché à fuir les (ce qu’on n’appelait pas encore) ghettos dans lesquels ils finiraient cantonnés par la force des choses. De tels endroits existaient donc, citons Peyton Colony dans le Texas, Nicodemus au Kansas, Centralia dans l'état de Washington, Allensworth en Californie, ou encore Rosewood en Floride, la plus connue à cause des émeutes ethniques qui s'y déroulèrent en janvier 1923, entrainant la mort de plusieurs personnes et la quasi destruction de la ville par le feu... Ces petites villes, isolées, étaient surtout composées de familles relativement pauvres, souvent croyantes avec église et pasteur. Il est donc peu probable qu'on y trouve shérif de couleur, saloons, bouges et prostituées comme dans la Freemanville créée dans le film… D'ailleurs ces localités n'auront pas vraiment de statut légal puisque malgré l'abolition de l'esclavage, les noirs américains n'avaient pas accès au vote (il faudra attendre 1965) à cause de toutes sortes de lois ségrégationnistes, comme par exemple celle dite d'instruction, précisant qu'il fallait savoir lire pour s'inscrire sur les listes électorales, ou celle incluant la « clause du grand-père » en Louisiane qui précisait que pour pouvoir voter, il fallait que le père ou le grand-père du votant ait lui-même obtenu le droit de vote en 1867, sans parler des droits à payer imposés dans plusieurs états pour obtenir son bulletin de vote... Bref un ensemble d'artifices « légaux » n'ayant comme but commun et unique d'empêcher les noirs américains de voter, puisque la grande majorité d'entre eux étaient, à la fin du XIXème siècle, illétrés, pauvres et descendants d'esclaves. De ce fait, dans ces communautés isolées, il était impossible de voter pour un shérif ou un maire. La plupart de ces endroits finirent par devenir des villes fantômes, sauf là où des blancs s'installèrent.
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Nicodemus, Kansas, pas vraiment une ville festive...
Sur le fond, on sent que l’auteur et ses scénaristes se sont un minimum documentés sur l’environnement historique de leur récit. On comprend d’autant moins pourquoi le réalisateur reste finalement à la surface, plus intéressé à faire du bruit qu’à creuser son sujet. On sent rapidement que l'auteur évite le discour trop revendicatif. Il n'a pas l'intention de réécrire l'Histoire (sauf à la fin, pur fantasme), mais plutôt de s'amuser à détourner un genre tout en conservant ses codes (vengeance, chevauchées, poker, tireurs d'élite... ). Un acte tout de même presque politique dans le sens où, comme déjà dit plus haut, le western est un genre qu'on pourrait quasiment qualifier de résevé aux blancs, fait par des blancs, pour des blancs, toute autre teinte de peau étant cantonnée au mieux au faire-valoir, au pire candidate au massacre. Il tente donc parfois de tordre le cou au traditionnalisme. Par exemple, il introduit dans son gang un blanc, en la personne de Stephen Baldwin, en rigolo de servive, comme s'il appliquait une règle de quota mais inversée. Les indiens sont aussi représentés, mais timidement : Steve Reevis, qui interprète Two Bears, a très peu de scènes, encore moins de dialogues, et disparaît de manière très anonyme, quant à Lana (délicieuse Salli Richardson), on la devine fille métissée de Papa Joe et d'une indienne. Mais ces personnages sont très peu esquissés.

Mario Van Peebles ne se démarque pas vraiment de ses prédécesseurs, restant dans le divertissement, tout en édulcorant la réalité. Car si le western évite dans la majeure partie des cas de parler de l'esclavagisme (épisode pas très glorieux d'un pays qui n'a eu de cesse de partir en guerre pour sauvegarder la liberté), Van Peebles, en démarrant son récit en 1898, esquive lui aussi car le sujet est peu en phase avec ses héros qu'il ne veut pas montrer comme des victimes, mais comme des hommes forts et indépendants. C'est aussi malin de sa part car il évite de prêter le flan ainsi à des critiques ou remarques désobligeantes sur un éventuel esprit revanchard de sa part, ou sur le fait de transformer un sujet grave en prétexte ludique dans un film de genre, ce que n'hésitera pas à faire Quentin Tarantino dans Django unchained vingt ans plus tard. Il est d'ailleurs intéressant de noter que ces deux cinéastes, dans leur démarche commune de tourner un western hors des sentiers battus, lorgnent de concert plus facilement vers le western spaghetti, comme si par ce prisme il était plus aisé de démonter un genre classique et indissociable de la culture américaine, comme, aussi, un moyen de botter en touche car permettant d'utiliser l'excuse du spectacle pour justifier la violence décontractée de leurs images. Les deux hommes feront d'ailleurs la même erreur, en s'attaquant à un moment de leur film au Ku Klux Klan, vengeance par procuration cinématographique aussi inutile que dérisoire (on sait bien que ses membres ont rarement été inquiétés, et encore moins massacrés par un ou plusieurs hommes de couleur armés. Si ce moment passe mieux chez Tarantino, c'est parce que son film n'a aucune prétention historique et l'humour utilisé tourne en ridicule ces racistes cagoulés, ce qui n'est pas le cas avec Van Peebles qui tente de montrer que les hommes noirs n'étaient pas que des moutons et qui est nettement plus premier degré.
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Mario kart... à cheval !
A l'instar, encore, de ce que fera Tarantino, Van Peebles utilise des références cinématographiques et l'hommage à des gloires du passé. C'est clair dès le début avec l'apparition de Woody Strode (79 ans au moment du tournage, il décèdera à la toute fin de l'année suivante), qui sera le narrateur de l'histoire : il est au carrefour des deux types de westerns les plus connus, l'américain, pour les raisons précédemment invoquées, et le spaghetti, auquel se réfère Van Peebles (d'ailleurs le film se termine par un extrait montrant Strode dans Il était une fois dans l'Ouest). Quelques emprunts, qu'on qualifiera d'hommage, sont aisément identifiables : la montre musicale du personnage Marchand de Sable renvoie directement à celle du Colonel Mortimer joué par Lee Van Cleef dans Et pour quelques dollars de plus (1965), la charge de Jessie à cheval revolver au poing vers la mitrailleuse Gatling montée dans un chariot, c'est celle de Josey Wales (clin d’œil à Clint Eastwood, qui a dirigé l'acteur, mais aussi encore double miroir des westerns américains et italiens). De plus la structure en flashback rappelle la construction de nombreux westerns italiens. Parallèlement l'auteur convoque les anciennes figures du cinéma de Blaxploitation, courant qui émergea dans les années 1970, réponse noire au cinéma blanc, avec des castings quasi entièrement composés de personnes de couleur, et si des blancs apparaissaient, c'était pour interpréter les méchants de service (structure que reprend Posse). Le précurseur de ce mouvement n'était autre que le père de Mario, le réalisateur Melvin Van Peebles, présent dans le film de son fils en interprétant Papa Joe. On peut aussi reconnaitre Isaac Hayes, l'auteur du fameux thème musical de Shaft, Pam Grier, l'inoubliable Coffy et Foxy Brown, Robert Hooks, le Mister T de Fureur noire, Bob Minor, cascadeur de la plupart des films de Blaxploitation et dont on a croisé le visage dans pas mal de films d'action des années 1970-80, d'ailleurs, à l'instar de ce dernier, la plupart des seconds rôles ont des visages familiers pour les amateurs de cinéma de genre ou bis des deux décennies précédant les années 1990. Mais en accumulant tous ces visages plus ou moins connus, l'auteur cantonne beaucoup d'entre eux à une simple apparition presque muette (Pam Grier n'a quasiment rien à dire), les reléguant finalement à ce qu'ils sont dans le western traditionnel, de simples silhouettes vides ; de plus, il démontre une certaine incompétence à gérer ce casting et choisi la facilité en éliminant certains personnages à peine apparus à l'écran, ce qu'on comprend rapidement dès la fin de l'épisode guerrier, du coup on s'attache ensuite à très peu d'entre eux. Les références de Mario Van Peebles tournent d'ailleurs un peu en rond. Lorsqu'il évoque le western classique, c'est par le biais d'un chariot abandonné dans le désert avec un couple mort, et un petit garçon sur le point de les rejoindre : une séquence qui bien-sûr convoque l'humaniste John Ford et son film Le Fils du désert, et donc le souvenir du légendaire réalisateur qui fut celui qui le premier offrit un rôle important à un acteur de couleur, Woody Strode : ça s'appelle de la répétition...

Revenons sur le casting pour évoquer Billy Zane. L'acteur commence à se faire un nom au moment du tournage, remarqué dans son rôle de psychopathe dans le thriller maritime Calme blanc (Phillip Noyce) en 1989 entre la pas encore star Nicole Kidman et Sam Neill. Sa belle gueule et son talent lui permettent de jouer aussi bien les braves gars que le pire des sadiques. Il est excellent dans ce personnage improbable de nostalgique de la confédération, colonel de l'armée américaine mais portant un uniforme de sudiste proscrit depuis plus de vingt ans. Aussi poli que dangereux, dont l'éducation n'a d'égale que sa cruauté, froid mais déterminé, il aurait pu voler la vedette au héros s'il avait été mieux exploité. Mais on rejoint là cette gestion aléatoire du casting, voyant cet ennemi charismatique marquant le début du film, complètement oublié durant les deux tiers suivants pour réapparaitre dans un final poussif. Dommage, mais quelque part en phase avec la carrière du bonhomme, puisqu'il n'arrivera pas à s'imposer dans les années 1990, le four du Fantôme du Bengale en 1996 sonnant comme une condamnation, malgré sa participation au plus gros succès cinématographique mondial que fut le Titanic de James Cameron en 1997.
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Billy Zane, fier comme un colonel sudiste
On le voit, s'il y a des atouts, surtout celui de l'originalité, il y a pas mal de maladresses qui freinent l'enthousiasme. D'autant que l'interprétation est assez inégale, certains acteurs jouant comme dans un film de gansta avec dialogues idoines abusant d'expressions bien trop modernes pour l'époque du récit (vous savez, les trucs à base de « fuckeries »... ). Pourtant le film ne manque pas d'humour, parfois cynique mais qui fait mouche régulièrement (le parallèle qui est fait entre la découverte de l'Amérique et le vol d'une voiture dans la scène de présentation est bref mais percutant), du moins dans la première moitié du métrage, le ton devenant trop sérieux ensuite. Le scénario n'est pas toujours très cohérent. Il est par exemple peu probable qu'un homme noir arrêté pour le meurtre d'un blanc soit condamné à servir dans l'armée, à une époque où le lynchage racial était monnaie courante pour des motifs nettement moins graves. La réalisation, elle, oscille entre le classique et le clip hip-hop avec montage ultra découpé et angles de caméra tarabiscotés, mais la photo est belle, et c'est assez dynamique, la caméra étant rarement immobile. Le scénario n'est pas très original, et comporte surtout deux axes principaux : une course poursuite entre deux gangs pour récupérer un magot, et une vendetta pour venger la mort d'un père. Mais l'auteur, qui peine à les mener de front, s'intéresse d'abord à la poursuite, puis à la vengeance, les deux convergeant tant bien que mal dans une ultime fusillade pas vraiment bien montée. On sourira aussi devant la tenue du héros, avec pas mal d'éléments argentés bien brillants, sans parler de ses balles en or et de ses pistolets rutilants, car là encore, on est dans l'imagerie classique du rap, à la mode dans les années 1990.

Pourtant, malgré ses défauts et ses maladresses, l'ensemble dégage un sentiment de sympathie parce que malgré le passé douloureux et le besoin légitime de reconnaissance de ses pairs, Mario Van Peebles n'a pas un discours agressif. On n'ose imaginer le même film entre les mains du trublion Spike Lee, alors en pleine reconnaissance critique. On sera gré à l'auteur d'attendre le générique de fin avant de nous asséner un morceau de rap complètement hors de propos, même si cela va de paire avec une certaine révolte, cette dernière renforcée par les extraits en noir et blanc de vieux films américains passés en même temps, rappelant la (petite) place qu'y tenait l'acteur noir. Hélas, ce faisant, cela rappelle à quel point Van Peebles est passé à côté de son sujet, et en insérant des extraits de son propre film, il transforme un générique qui se voulait signifiant, en une espèce de clip de rap dans lequel une ultime fois la référence au western leonien se reconnaît à travers un sample de quelques notes bien identifiables d'Ennio Morricone. Finalement, c'est la conclusion sous forme de texte pré-générique de fin qui est la partie vraiment politique du film, ce qui est assez maladroit dans le sens où ces quelques lignes démontrent que le contenu précédent ces quelques mots et ses auteurs ont été hors-sujet.

En fait, Mario Van Peebles manque d'ambition, et est surtout un amuseur, d'ailleurs il donnera une sorte de suite à son film en 1997, avec Los Locos dont il écrivit le scénario, réalisé par Jean-Marc Vallée, futur auteur du remarquable C.R.A.Z.Y. en 2005, mais c'est surtout lorsqu'il reprend son personnage de Jessie Lee pour un caméo dans Gang of roses en 2003, western au féminin dans lequel ce sont désormais des bimbos qui font la loi à coups de revolvers et de décolletés, que l'on mesure ce déficit d'ambition. D'ailleurs, après ce Posse, l'acteur-réalisateur ira faire le pitre avec Christophe Lambert dans les navets Deux doigts sur la gâchette et Highlander III... En restant volontairement dans le divertissement, Van Peebles rate l'occasion de casser le mythe du cowboy blanc, et Posse ne sera pas l'équivalent d'un Danse avec les loups.

Film banal sur un sujet qui ne l'est pas, plaisant à regarder mais ne répondant à aucune question, dont le seul mérite est de donner envie d'en savoir plus (et de se rendre compte que peu d'éléments sont disponibles). Reste aussi la curiosité de découvrir à l'écran des visages aux noms plus ou moins connus parmi les seconds rôles. En plus des noms déjà cités, évoquons les présences du créateur de nombreuses séries Stephen J. Cannell (qui a permis à Van Peebles de faire ses premiers pas de réalisateur tout en produisant sa série Sonny Spoon) et de Paul Bartel, réalisateur des cultes Cannonball et de La Course à la mort de l'an 2000. Et en lisant le générique technique, un autre nom apparaît, étonnant, celui de Catherine Hardwicke comme décoratrice, la future réalisatrice de Thirteen, Les Seigneurs de Dogtown et (hélas) du premier Twilight, qui, après des études en arts plastiques et l'école de cinéma de l'université UCLA de Los Angeles, collabora ainsi à une vingtaine de films. Mais c'est un constat bien maigre pour un film qui aurait dû être social et historique, mais qui s'avère juste être un film d'action de plus...


Étoiles : * * . Note : 12/20.
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Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Rebel in Town

Message par kiemavel »

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Rebel in Town

1956
Réalisation : Alfred L. Werker
Scénario : Danny Arnold
Image : Gordon Avil
Musique : Les Baxter
Produit par Howard W. Koch et Aubrey Schenk
United Artists

Durée : 78 min

Avec :
John Payne (John Willoughby)
Ruth Roman (Nora Willoughby)
Ben Cooper (Gray Mason)
J. Carrol Naish (Bedloe Mason)
Ben Johnson (Frank Mason)
John Smith (Wesley Mason)
James Griffith (Le marshal Russell)

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Juste après la fin de la guerre de sécession, une famille d'anciens soldats sudistes originaire de l'Alabama, Bedloe Mason et ses 4 fils passe à proximité d'une petite localité de l'ouest. En fuite et survivant en pillant les banques, ils se tiennent éloignés des villes mais deux des fils décident de se rendre dans une petite ville pour y faire provision d'eau et pour repérer les lieux. Le très jeune fils d'un ancien officier nordiste, toujours impliqué dans la traque des rebelles, se trouve en ville pour y fêter son anniversaire. Le jeune garçon se voit offrir un revolver factice par une petite fille de son âge, s'en sert dans le dos des 2 fils Mason et est abattu par l'un d'eux avant qu'il n'ai eu le temps de se rendre compte de l'identité de l'agresseur. John, le père, rempli de haine, est bien décidé à traquer les assassins sans relâche...

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Sur un scénario assez simple, un western "psychologique" remarquable dont il est compliqué de parler sans livrer trop d'informations qui nuiraient à l'intérêt du film. C'était l'avant dernier réalisé par Alfred Werker et pour moi, à ce jour, c'est son meilleur et d'assez loin. Dès les scènes d'ouverture, on se rend compte que l'on ne se trouve pas dans un western "ordinaire". Devant la maison familiale, un enfant joue...Vêtu d'un uniforme nordiste, Il se lance au grand galop, brandit un sabre et décapite un mannequin de soldat disposé comme un épouvantail devant la ferme familiale ! Sa mère s'émeut d'ailleurs des jeux guerriers du petit mais le père -qui voue une haine farouche aux sudistes- l'encouragerait plutôt à endurcir le jeune garçon. On enchaine aussitôt avec le jour de l'anniversaire de l'enfant. Il accompagne sa mère en ville. On retrouve les amis. Les élégantes sont de sortie. L'amourette enfantine est charmante... et tout à coup, on bascule brutalement dans le drame. Quand par jeu, l'enfant sort son arme/jouet tout juste reçu de la petite fille dans le dos des 2 frères Mason qui viennent d'arriver en ville, en raison du cliquetis produit par l'arme, l'un des 2 frères, pris de panique, se retourne vivement et abat l'enfant qui est projeté plusieurs pas en arrière sous les yeux de la petite fille et de sa mère. La scène est stupéfiante de violence, admirablement filmée et osée pour l'époque tant les meurtres d'enfant son relativement rare dans le cinéma américain.

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La suite est à la hauteur. L'un des frères ayant été blessé dans des circonstances qu'il serait criminelle de dévoiler, il est recueilli à la ferme des Willoughby (On dirait un nom inventé par Preston Sturges) par Nora en l'absence de John parti à la chasse aux tueurs. Le jeune homme, grièvement atteint et en apparence inoffensif gagne la sympathie de Nora. Elle s'interroge sans doute sur l'identité du garçon qui reste évasif lorsqu'on le questionne sur les circonstances de sa blessure et sur son passé, mais Nora, la jeune mère qui vient de perdre son seul enfant, le soigne et le protège. John, qui bâtait la campagne à la recherche des meurtriers, rentre au domicile familial, commence lui aussi à interroger le jeune homme, mais de manière plus sournoise…Commence alors un quasi huit-clos passionnant entre le jeune homme ; Nora, qui en veut sans doute à son mari d'avoir éduqué son enfant dans la haine et un père qui s'interroge sans doute sur sa responsabilité dans la mort d'un fils qui lui vouait une admiration sans bornes.

Un huit-clos rompu tout de même par les agissements des autres membres du clan Mason, dont on connaitra surtout 3 des membres. Le père, qui n'a plus rien en dehors de ses fils n'a qu'une obsession, préserver sa famille sans laisser personne sur la route. C'est la raison qui le pousse, malgré sa droiture, a ordonner à toute la famille de fuir à la suite de la mort "accidentelle" de l'enfant, certain qu'il est que la haine des nordistes s'abattra forcément sans discernement sur eux quelque soit les circonstances de la mort du petit. Le poids de la grande histoire en quelque sorte....Cette même fatalité -les conséquences de la guerre- avait déjà fait d'eux des errants et des pilleurs de banque. Mais fondamentalement c'est un honnête homme. Malgré sa rudesse apparente et son autorité, toutes les décisions sont soumises aux votes et doivent être unanimes mais l'équilibre bien sur précaire est soudain rompu quant un des fils trahit les principes familiaux. Les 2 frères que l'on aura à connaitre sont interprétés par Ben Johnson, le mauvais fils et Ben Copper, le bon fils (attention, y'a surement un piège). Le rôle du patriarche est tenu par un J. Carrol Naish bien plus inspiré...que la plupart du temps. Ils sont tous excellents. Très bonne musique et très bonne chanson de générique "Rebel in Town" (mais dont le propos n'a rien à voir avec le film à venir). Pour le western de série B, une Rolls à tous points de vue : Scénario, photo en NetB, réalisation, interprétation. Incroyablement resté méconnu en France.
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kiemavel
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At Gunpoint

Message par kiemavel »

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Le doigt sur la gâchette (At Gunpoint)
Réalisation : Alfred L. Werker
Scénario : Daniel B. Ullman
Produit par Vincent M. Fennelly
Allied Artists (distribution France, Warner)

Durée : 81 min

Avec :
Fred MacMurray (Jack Wright)
Dorothy Malone (Martha Wright)
Skip Homeier (Bob Dennis)
Walter Brennan (Doc)
Whit Bissell (Clem)
Tommy Rettig (Billy Wright)
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Dans la petite ville paisible de Plainview surgissent les 5 membres de la bande Dennis du Kansas. Ils attaquent la banque, l'un d'eux tue le caissier puis c'est au tour du vieux Marshal d'être abattu alors qu'il tentait de s'interposer. Jack Wright, le propriétaire du magasin général de la ville se saisit du révolver de son vieil ami et tire sur les individus en fuite, blessant grièvement un des frères Dennis qui est ensuite achevé par le tir de carabine d'un autre habitant de la ville. Wright et Henderson, les 2 tireurs, sont traités comme des héros par la population, ils sont fêtés et ont même l'honneur de faire la une du journal local. C'est ainsi que les autres membres de la bande réfugiés dans une cabane à proximité de la ville, apprennent le nom des tireurs. A l'initiative de Bob Dennis, le frère de l'homme abattu, une nuit ils reviennent en ville et abattent Henderson qui rentrait chez lui. Dès le lendemain, les habitants de Plainview commencent à éviter le nouveau héros…
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Le point de départ, c'est une variation sur le thème de High Noon, l'homme seul, abandonné par la population de sa ville, qui devra se battre contre une bande d'affreux, ici des pilleurs de banque. la comparaison s'arrête là car ce film de Werker est tourné dans un style totalement différent et les personnages principaux sont eux aussi à des années lumière du film de Zinnemann. Le personnage principal n'est en rien un surhomme ni une gâchette imbattable à 1...contre tous. Présent au moment de l'attaque, l'épicier avait juste ramassé l'arme du marshall abattu et le bras tremblant avait tiré et atteint sa cible grâce à un "tir chanceux". Jack, en dépit de ses protestations, est salué comme un héros par tout le monde, même s'il ne sera jamais héroïsé à aucun moment du scénario, sa réputation est faite et c'est dangereux lorsque les autres membres de la bande à laquelle appartenait l'homme abattu reste aux alentours. Inconscient du danger qui le guette, Jack n'est même pas mécontent d'avoir changé de statut dans sa communauté. Il était présenté comme quelqu'un d'effacé, d'austère et il profite tout à coup d'un certain prestige, y compris auprès de sa famille. Classique, mais pas mal présenté...
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Tout change lorsque les habitants prendront conscience des conséquences de cet acte initial, de la responsabilité prise inconsciemment par Jack. Exposé à la vengeance du frère de l'homme abattu et vivant dans la crainte de voir revenir la bande, les habitants de la petite ville vont les uns après les autres fuir le voisinage de Wright, des Wright devrais-je dire car même sa femme (Dorothy Malone) et son fils (Tommy Rettig) seront mis à l'écart par la population. Un seul tiendra vraiment le coup, le vieux médecin incarné par Walter Brennan. Je n'en dit pas plus. C'est un film simple comme bonjour. On redoute les grands discours, il n'y en a pas, à part ceux un brin moralisateur de Brennan. La petite ville est décrite avec un certain réalisme et un certain coté "naturaliste" de la mise en scène de Werker sert bien le propos. Même l'allure et la personnalité de Fred MacMurray sert le propos. Il n'était pas fait pour le genre…mais un épicier dans un cadre de western, c'était pour lui (sans ironie aucune). A l'exception des "Texas Rangers (La légion des damnés), Fred MacMurray a tourné des westerns surtout vers sa fin de carrière, juste avant sa dernière période Disney et pour moi ce n'est vraiment pas dans ce genre qu'il aura été le plus à l'aise. Il était en revanche très agréable dans la comédie, le genre dans lequel il s'est le plus illustré et pas mal du tout :mrgreen: dans certains films noirs. Enfin, on peut aussi trouver un certain agrément en jouant à : Mais qui c'est donc celui là ? Tant le nombre de têtes à western, bien connus des amateurs passent en grand nombre dans ce film : John Qualen, Jack Lambert, James Griffith, Irving Bacon, Harry Shannon, Frank Ferguson, Dabbs Greer, etc…
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Ce film est un des derniers réalisés par Werker que l'on connait pour ses autres westerns de fin de carrière. The Last Posse. Trois heures pour tuer avec Dana Andrews est assez moyen. Le meilleur et d'assez loin est selon moi le précédent film critiqué Rebel in Town, enfin le dernier Canyon Crossroads est un assez moyen western moderne. Ses débuts avait été modeste mais il a parfois dirigé des acteurs de 1er plan dès les années 30. Le proscrit (Kidnapped), un assez bon film d'aventure commencé par Preminger (est passé sur le canalsat). Fantômes déchainés, un Laurel et Hardy tardif, est poussif (DVD zone 2). Shock et surtout Il marchait la nuit, tous les 2 édités sont des films noirs qui se regardent, surtout le second qui est excellent mais il a été en partie réalisé par Anthony Mann. DVD gravé (vost)
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Intéressant ; je ne connaissais pas. Mais son trois heures pour tuer (son western son plus connu) m'avait passablement ennuyé.
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Jeremy Fox a écrit :Intéressant ; je ne connaissais pas. Mais son trois heures pour tuer (son western son plus connu) m'avait passablement ennuyé.
J'ai écrit "Assez moyen" et pourtant je suis un grand admirateur de Dana Andrews. Les 2 dont je viens de parler, surtout le premier sont selon moi très bien, maintenant si tu lis ce qu'en dit Tavernier (ou plutôt ce qu'il en disait), çà ne donne pas envie. Pour les autres auteurs du genre, je ne sais pas quel est leur réception des westerns de Werker et je n'ai pas eu la curiosité d'aller voir. Ils ont de toute façon été très longtemps difficiles à voir à mon avis. Rebel In Town, sérieusement, je ne vois pas trop comment on pourrait ne pas le trouver intéressant et pour moi, il est même plus que çà. Le second est sympathique et traite bien son modeste sujet, y compris par sa mise en scène…et le casting des seconds rôles est vraiment étonnant. Dans quelques scènes d'intérieurs, les habitants se réunissent dans un bar, une salle commune, se regroupent pour se protéger, et tu retrouves côte à cote une concentration de têtes à western qui est assez rare tout au moins dans des productions équivalentes.
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

3 westerns de William Castle
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Pete Carver et la bande dirigée par son père attaque un train, et après avoir tué les conducteurs et fait sauter un wagon, ils s'emparent des fonds de la Wells Fargo. Poursuivis par le shérif et ses adjoints, ils se refugient dans une grotte dans laquelle Pete jouait enfant. L'or est vite dissimulé mais tous les hommes sont abattus les uns après les autres à l'exception du jeune Pete qui refuse de divulguer l'endroit ou est caché le magot. Il est donc condamné à 15 ans de prison. A sa sortie, il retourne vivre dans une ville située à proximité des grottes et y recommence sa vie recevant la bienveillance des commerçants qui lui accordent un crédit semble t'il illimité qui lui permet de venir en aide à la propriétaire du journal local, en grande difficulté financière depuis la disparition de son mari. Tout le monde n'est pas si bienveillant, il est aussi sous la menace de l'homme d'affaire le plus puissant de la ville et de ses hommes et surveillé de près par l'enquêteur de la Wells Fargo qui n'a pas abandonné l'idée de récupérer l'argent volé ...

Comme dans la plupart des films de Castle que j'ai vu, il exploite parfois de bonnes idées mais dans un scénario maladroit et pas très bien exploité par la mise en scène. Ce type ne manquait pas d'idées, le problème était de les intégrer à des intrigues cohérentes et de les mettre en scène avec maitrise. Or, même dans ses westerns la régularité dans l'effort était loin d'être la qualité première de Castle mais des moments épars dans ses films sont très insolites :

Pete alors qu'il n'est encore qu'un adolescent est violemment tabassé et frappé au visage par le shérif. Pendant toute la scène, on ne voit que les jambes du gosse qui s'agite, et les sons des coups qui pleuvent et du gamin qui geint, le reste du corps étant dissimulé derrière une concrétion. Plus tard, alors qu'ils doivent se retrouver sur la place de la ville, l'enquêteur de la Wells Fargo et Pete observeront des enfants qui joueront puis se battront en étant l'un, le bandit de la caverne et l'autre le policier de la Wells Fargo…Les 2 véritables personnages en question faisant des pronostics et des commentaires au sujet du duel. Le regard porté sur les commerçants est lui aussi assez ironique car ils sont tous très sympas avec Pete et lui font tous crédit, persuadés de rentrer dans leurs investissements quand il aura récupérer son magot.

Pour le reste l'intrigue est sans surprise. Tous en veulent après le magot même des protagonistes inattendus. Les uns emploieront des méthodes expéditives. "On lui casse la gueule et on lui fait les poches". Il y a d'ailleurs deux bonnes bagarres dans le film. Les autres emploieront des méthodes un peu plus fines. En marge de la recherche du magot convoité, une intrigue sentimentale peu passionnante opposera deux des principaux protagonistes pour conquérir la belle Alexis Smith. Pour l'anecdote, alors qu'elle est censée être fauchée, cette dernière enchaine les défilés de haute couture 1880...et elle est diaboliquement belle la bougresse. Elle est au coeur d'une intrigue secondaire. Son mari a disparu mystérieusement des mois auparavant et les spéculations sur son compte vont bon train...J'accorde un petit bonus pour le bon second rôle tenu par l'un de mes vieux préféré du cinéma B, Edgar Buchanan.

Tourné en partie dans des grottes du Nouveau-mexique. Mais de ce site insolite, Castle ne fait pas grand chose. On les retrouvent à différents moments du récit sans que ce lieu ai stimulé l'imagination du metteur en scène. Vu en vost. Les autres westerns de Castle sont inédits en France pour la plupart mais visibles. Fort Ti avec George Montgomery. La terreur des sans lois avec le même. Conquest of Cochise avec John Hodiak et Robert Stack. Enfin, Rendez-vous sur l'amazone, qui n'est pas un "vrai" western, un film commencé d'ailleurs par Boetticher et qu'il avait abandonné, est lui passé sur une ou des chaines de télé françaises.
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CONQUEST OF COCHISE. 1953
sorti en Belgique sous le titre " La conquête de Cochise" (non ? Si, je jure sur la tête de maman que c'est vrai )

Avec John Hodiak (Cochise), Robert Stack (Le major Tom Burke), Joy Page (Consuelo de Cordova)

Sur le papier, les prémices d'un très bon western, du potentiel donc…mais hélas il est presque totalement gâché par les développements d'un scénario indigent, par des interprètes incompétents et une mise en scène minimaliste. La complexité de la situation politique dans les nouveaux territoires conquis par les USA à l'issus de la guerre contre le Mexique et ses conséquences auraient pu être potentiellement passionnants à suivre et étaient bien présent en germes dans le scénario au travers de personnages qui auraient pu incarner l'instabilité et l'insécurité qui régnaient dans ces territoires au milieu du 19ème siècle. A propos de la situation politique, çà commençait plutôt bien, Castle montre que le désordre et la division régnait dans tous les camps au moment de l'achat Gadsden et des négociations qui ont précédé. On assiste d'ailleurs à une réunion diplomatique entre représentants américains et mexicains et on voit les prémices sérieuses de ce que ce changement de souveraineté pouvait entrainer. L'incertitude généralisée.

Chez les indiens, la division est grande entre les apaches avec à leur tête Cochise -lui-même contesté à l'intérieur de sa tribu- qui veulent faire la paix alors que pour les Comanches de Red Knife il est impensable d'arrêter la lutte. Pour certains mexicains, la perte de ces territoires est très mal vécu et entraine leur exil, alors que d'autres acceptent la prise de pouvoir des américains. Chez les colons aussi la division règne et au milieu de ce désordre, c'est Robert Stack et son détachement de l'armée US qui tentera de calmer tout le monde. Mais c'est compliqué quand autant d'intérêts divergent, quand les alliances de circonstance et les tentatives de manipulation pourront envenimer les conflits…Tout ceci encore une fois pouvait être potentiellement très intéressant mais il aurait fallu :

- Un metteur en scène. Or assez curieusement, on n'a même pas droit à ces quelques bizarreries à la Castle qui font souvent le charme et l'intérêt parfois tout relatif de ses films. Ici, je n'en ai compté aucune à part peut-être si on veut être indulgent, le sadisme de certaines des scènes finales. On doit se satisfaire de 2 attaques indiennes, une au tout début puis une autre bien plus tard, l'attaque d'une hacienda. Elles ne sont pas trop mal filmés même si par moment la mise en scène est d'une grande naïveté. Castle et ses scénaristes nous font aussi le coup de la fraternisation forcée entre ennemis qui donne d'ailleurs de bons résultats. Le séjour de l'aristocrate Mexicaine incarnée par l'obscure Joy Page (que je n'ai vu il me semble nul par ailleurs) dans le camp de Cochise nous donne quelques scènes pleines de bonnes intentions. Ils sont plein de bons sentiments ces discours sur la tolérance nécessaire à l'égard des coutumes de l'autre mais on a du mal à ne pas sourire aux dialogues que cela entraine.

Il manquait aussi :
- Des interprètes compétents. Je ne suis déjà pas fan de Robert Stack ni de John Hodiak mais je crois qu'ils battent des records de médiocrité dans ce film. John Hodiak est nul en Cochise. çà doit être le poids des responsabilités qui lui donne cet air accablé. C'est vrai que diriger une tribu d'apaches, c'est pas de tout repos. Hodiak fait paraitre Chandler génial en comparaison, c'est dire. Plus largement, dans Conquest of Cochise, tous les indiens sont nuls. Les interprètes mais aussi les dialogues qu'on leur donne à défendre. On parlemente beaucoup chez eux mais c'est aussi inutile que les discours de l'ONU, à la fin, ceux qui veulent faire la guerre la font qu'en même. Les autres comédiens ne sont pas mieux, à commencer par Robert Stack qui a juste un peu d'allure mais qui trimbale sa fadeur habituelle (à quelques exceptions près, chez Sirk par exemple). Il a tout de même une ou deux bonnes scènes un peu amusantes. En marge d'une réunion diplomatique, il roule des pelles à une donzelle dans les couloirs alors qu'on l'attend pour une réunion diplomatique et il y a également un peu d'humour dans les dialogues de la première rencontre avec sa possible petite amie mexicaine.

Dernière remarque au sujet du Technicolor. La qualité exceptionnelle de la copie que je connais fait d'autant plus ressortir des couleurs qui sont parmi les plus criardes que j'ai jamais vu. çà ne pose pas trop de problèmes dans les scènes d'extérieur, mais dans les scènes urbaines, on a l'impression que le costumier a eu pour consigne de trouver les vêtements les plus colorés et le manque de travail sur l'image qui est d'une extraordinaire platitude fait parfois ressortir tristement le coté carton patte des décors de ville. ____________________________________________________________
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Rendez-vous sur l'Amazone (The Americano)
1955
Réalisation : William Castle
Scénario : Guy Trosper d'après
une histoire de Leslie T. White
Produit par Robert Stillman (RKO)

Durée : 85 min

Avec :

Glenn Ford (Sam Dent)
Frank Lovejoy (Bento Hermanny)
Cesar Romero (Manoel Silvera/El gato)
Ursula Thiess (Marianna)
Abbe Lane (Teresa)

Sam Dent, un éleveur du Texas accepte la commande d'Antoni Barbossa, un éleveur brésilien qui souhaite acquérir des taureaux pour améliorer la qualité de son élevage contre la promesse de recevoir 25 000 $ s'il fait parvenir 3 taureaux à destination. Après un long voyage, il arrive enfin dans la petite localité de Boa Vista ou est sensé l'attendre son acheteur mais personne n'est là à la descente du train qui l'a amené jusque là et tout le monde semble prendre peur à chaque fois que Dent prononce le nom de Barbossa. Manoel, un homme à l'allure de baroudeur l'amène cependant…jusqu'au corps de Barbossa qui vient d'être assassiné mais il lui propose de le guider jusqu'à la propriété du défunt qui est maintenant gérée par son second, Bento Hermanny. Ils commencent le long périple d'abord en camion puis poursuivent à cheval, traversent la jungle puis les plateaux du Mato Grosso, et à l'approche du ranch d'hermanny, sont attaqués par les hommes de Marianna Figuerido, la propriétaire d'un ranch voisin. Manoel s'enfuit mais après une simple mise en garde Marianna relâche l'américain contre la promesse qu'il ne s'ingère pas dans les conflits entre éleveurs. Arrivé au ranch, Hermanny lui propose de travailler pour lui mais Dent refuse l'offre, empoche son argent et se met sur le chemin du retour. Mais à peine a t'il quitté le ranch qu'il est attaqué, l'argent est volé et un homme qui l'accompagnait est même tué. Dent, contraint de rebrousser chemin, regagne épuisé le ranch d'Hermanny…
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Un film d'aventure ? Un western ? Un peu des deux. L'intrigue tient totalement du western mais l'époque (il n'en est question à aucun moment mais les trains et le camion que l'on voient sont sans doute contemporains du film) et sa localisation au Brésil font que je le range plutôt dans les films d'aventure…et pas un bon. On traverse des paysages inhabituels mais malgré un tournage en partie au Brésil, les animaux que l'on voit sont soit des pauvres bêtes sorties du vivarium pour faire frémir un public très peureux (y'a de grrosss serpents qui pendouillent des branches ou qui rampent dans les feuilles) ou qui proviennent de stocks shots absolument horribles. On apprend ainsi comment traverser une rivière infestée de piranhas avec un troupeau de bovins. Il faut simplement abattre un caïman, ainsi, tous occupés à becqueter la pauvre bête, les piranhas laissent les jambons des taureaux tranquilles. Plus tard, on a aussi droit à l'apparition d'un puma asthmatique qui tente d'attaquer Dent mais Hermanny l'abat très vite, plus vite en tout cas que ne courrait la pauvre bête. Au rayon cascade catastrophique, on a aussi une chute de cheval et un "combat" au lasso que n'auraient pas reniés Laurel et Hardy. Sur ce tournage, il n'y avait pas que les animaux de patraque, le metteur en scène et le chef opérateur aussi étaient mal portant. Il est évident par moment que le tournage a été expédié ou exécuté par des gens sans doute peu motivés (à propos du tournage chaotique voir les 2 derniers paragraphes).

Les personnages et les comédiens qui les incarnent : Glenn Ford est assez agréable dans la 1ère partie (tant qu'il touchait son chèque ?) puis s'endort très vite. Certes, son personnage refuse de prendre partie dans les conflits entre éleveurs, les regarde même avec un air amusé et refuse catégoriquement mais poliment la proposition d'Hermanny de travailler pour lui, une attitude qui pourrait justifier un jeu minimaliste mais contraint de rebrousser chemin après le vol dont il est victime, il sera bien obligé d'ouvrir une paupière surtout quand il sera accusé de meurtre…Pour ce qui est de la personnalité des deux méchants potentiels, c'est mieux. Il est beaucoup question d'El Gato, un bandit local dont l'identité véritable est vite éventée sans toutefois que ce soit gênant. Il est aussi évident que quelqu'un en veut à l'américain. Son but était simplement de le dévaliser ? de l'obliger à s'impliquer dans le conflit entre éleveur ? Obliger l'éleveur expérimenté à travailler pour Hermanny ou un autre ? L'identité du véritable méchant est un des intérêt de ce film qui en comporte peu.
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Si Frank Lovejoy est lui aussi assez moyen, en revanche, Cesar Romero est formidable dans le rôle de Manoel et il sauve le film par sa présence. Le numéro de Romero est assez gros mais très réjouissant mais je n'en dis pas plus…Heureusement qu'il y a ce personnage d'ailleurs car c'est le seul qui mérite vraiment qu'on s'y attarde…En revanche, les deux personnages féminins ne sont pas bien passionnants non plus. Celui de Marianna aurait pu être intéressant. Elle est la propriétaire d'un ranch voisin de celui dont a pris possession Hermanny et évidemment ils sont rivaux, chacun accusant l'autre des pires méfaits. Marianna et ses hommes prennent parti contre Sam Dent puisqu'il est l'hôte d'Hermanny et qu'il semble être son allié mais cela ne donne pas grand chose. C'est un classique conflit entre propriétaires terriens pas très inspiré à part une scène de lynchage à la rigueur intéressante car une ambiguité subsiste à l'issu de celle ci. La seconde femme, c'est Teresa, la gouvernante de la maison d'Hermanny. Sa sensualité affichée se double d'un certain mystère en raison de son inquiétude apparente et de sa curiosité discrète. Elle semble prêter une certaine attention à Manoel et à Sam Dent mais on ne connaitra pas avant la partie finale la nature de ces liens.

Bilan : Un film bancal et souvent maladroit mais c'est sans doute en raison des péripéties qui ont précédé ou qui sont survenus pendant le tournage. C'est en effet Budd Boetticher qui devait diriger le film et il en a commencé le tournage au Brésil avec Sara Montiel à la place d'Abbe Lane dans le rôle de Teresa. Faute d'argent (le studio RKO était déjà dans une situation financière précaire) ou en raison d'un dépassement du budget alloué, le tournage fut arrêté semble t'il avant que toutes les scènes prévues ne soient tournées, ce qui explique en partie tous ces inserts et stock-shots plus ou moins infâmes que l'on retrouve dans le montage final. La plupart des scènes tournées au Brésil seraient donc de Boetticher. Evidemment, le tournage repris par William Castle plusieurs mois plus tard ne pouvait que faire du rattrapage et du replâtrage sauvant plus ou moins habilement un projet initial qui ne devait de toute façon pas bénéficier d'un budget pharaonique car a quoi bon se délocaliser au Brésil si c'est pour faire traverser de beaux paysages assez différents de ceux que l'on voit habituellement dans le western…par 3 taureaux (très beaux d'ailleurs, les taureaux Brahma) convoyés par 2 gars. Certes, cela laisse de la place aux dits paysages…
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Ensuite, le paysage étaient égaillé par 2 présences féminines, mais seulement des présences car on ne peut pas dire que leurs rôles étaient étoffés. A propos d'étoffe, les tenues exotiques, sexy et forcément légères (vive les tropiques ! ) portées par Abbe Lane amène un léger agréement (cling-cling). Elle danse, puis chante une chanson parait-il célèbre à l'époque "El Americano" composée d'ailleurs par son mari dans le civil, le compositeur Catalan Xavier Cugat. Quant à Ursula Thiess, elle est plus célèbre pour avoir été la femme de Robert Taylor pendant 15 ans ( jusqu'à son décès) que pour sa carrière d'actrice limitée à une poignée de films mais elle tenait le 1er rôle féminin de quelques films visibles (La révolte des Cipayes et Bandido Caballero). Vu en vost (mais pas passé à la TV depuis un bon moment il me semble)

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Mention spéciale au formidable Cesar Romero
kiemavel
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Re: Les Westerns 2ème partie

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Montagne rouge (1951)
Réalisation : William Dieterle
Production : Hal B. Wallis (Paramount)
Scénario : George W. George et George F. Slavin
Photographie : Charles Lang
Musique : Franz Waxman

Avec :

Alan Ladd (le Capitaine Brett Sherwood)
Lizabeth Scott (Chris)
Arthur Kennedy (Lane Waldron)
John Ireland (Le Général Quantrill)
Jeff Corey (Skee)
et Neville Brand (Le Lt.Dixon) ; Walter Sande (Benjie) ; Whit Bissell (Miles)…

Lane Waldron, un ancien soldat confédéré devenu prospecteur a été vu sortant du bureau d'un essayeur d'or de Brocken Bow dans le Colorado qui est découvert abattu dans son magasin. Il est poursuivi par la milice de la ville et malgré l'opposition du shérif est sur le point d'être lynché quand il est sauvé par l'intervention d'un inconnu qui prend la fuite avec lui. Le mystérieux tireur, Brett Sherwood, un ancien officier sudiste, demeure évasif sur ses motivations mais Waldron comprend qu'il est sans doute le véritable assassin. Une relation étrange s'installe entre les 2 hommes, faites de méfiance et de ressentiment car bien que sauvé, Waldron se sait toujours soupçonné du crime et que la seule façon de se disculper serait de livrer Sherwood, pourtant son sauveur. La situation se complique encore quand Chris, la fiancée de Waldron se joint au duo recherché. Waldron s'apprête à mener Sherwood en ville pour se disculper mais ce dernier parvient à reprendre le dessus et leur fait prendre la direction de l'ouest car le but de son voyage était de rejoindre le Général Quantrill et de poursuivre la lutte à ses cotés. En chemin, Waldron tente de surprendre Sherwood mais dans la bagarre se brise la jambe, contraignant le trio à se réfugier dans une grotte. Le lendemain, lorsqu'un groupe de soldats sudistes dirigés par le Général Quantrill passe au pied de la montagne, Sherwood se présente au Général, retrouve son grade et un uniforme…
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Un des assez nombreux westerns ayant montrés la période de la fin de la guerre civile américaine et mettant en scène le personnage du général Quantrill (nommé Quantrell dans la VF). Ici les évènements relatés, censés se dérouler dans les tous derniers jours de la guerre, en particulier l'alliance entre la milice du général rebelle et des tribus indiennes, sont semble t'il totalement fantaisistes mais c'est pour une bonne cause car je pense que les scénaristes ont tout simplement voulu rajouter l'ingrédient "Peaux rouges" à un western militaire, option guerre de sécession, déjà bien mouvementé. C'est d'ailleurs l'un des intérêts de ce film par certains aspects excellents mais non dénué de faiblesses. D'une part, il se déroule dans des paysages superbes magnifiés par la très belle photographie de Charles Lang. C'est autour de la fameuse montagne rouge que se déroule les deux derniers tiers de l'action…et de l'action, il y en a : quelques bagarres ; quelques gunfights ; les actions de la milice de Brocken Bow qui sillonne le secteur ; celles des raiders de Quantrill (le "Général" étant très bien campé par John Ireland) ; les indiens…et même la cavalerie. Le fait qu'une partie de l'intrigue se déroule dans ou aux abords d'une grotte ne suffit même pas à susciter l'ennui tant le metteur en scène sait tirer parfaitement parti de cette localisation insolite dans un cadre encore une fois magnifique.
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Mais ce qui fait le prix de ce film -dans une certaine mesure car c'est aussi dans ce qui est le plus intéressant que l'on peut éventuellement déplorer quelques défaillances, c'est la complexité de la personnalité des trois personnages principaux et leurs relations en perpétuelle évolution. Celui qui fait le moins de chemin, c'est le personnage interprété par Arthur Kennedy. Celui qui était censé au départ être le héros positif est présenté comme un peu trop tendre pour une époque aussi violente. On le découvre d'abord victime des circonstances et de l'époque. C'est parce qu'il est un ancien soldat rebelle démobilisé qu'il est à l'évidence soupçonné d'être le meurtrier, puis il manque d'être victime de la justice expéditive d'une assemblée de braves citoyens. C'est d'autant plus rageant qu'il vient enfin de trouver le très riche filon d'or (dont il est le seul à connaitre l'emplacement, les scénaristes se servent d'ailleurs jusqu'au bout très habilement de l'appât de l'or…) qui va enfin lui permettre de démarrer une nouvelle vie avec Chris (Christiane dans la VF ). Malheureusement pour lui, il sent très vite le mélange d'attirance et de répulsion qu'éprouve sa fiancée pour celui a qui il doit son malheur…et par lequel il sera vaincu. Bientôt immobilisé et diminué par une grave fracture qui va même mettre sa vie en danger, il va osciller entre abandon, découragement et accès de rage…car malgré tout il s'accrochera à l'espoir de renverser la situation, espérant jusqu'au bout pouvoir livrer celui qu'il croit coupable du meurtre et ainsi sauver sa peau…mais progressivement on se demande aussi s'il ne s'y mêle pas le désir de se débarrasser d'un rival. C'est le genre de personnage ambigu, en apparence bon mais ici, faible, fourbe et menteur, dans lesquels excellait Arthur Kennedy mais dans Red Mountain il est tout de même un peu trop sournois et pleurnichard pour un héros "positif".
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C'est Alan Ladd qui fait le plus de chemin. Le "méchant", portant à la ceinture la même arme que celle qui a servi à tuer le commerçant ; le rebelle sudiste s'apprêtant à rejoindre les massacreurs de Quantrill est le personnage le plus intéressant pour le conflit qui va naitre entre ce qu'il considère comme son devoir, poursuivre la lutte coute que coute pour le sud et ses problèmes de conscience qui vont naitre en raison des actes de Quantrill. Dans un premier temps totalement loyal et fier de retrouver son grade et son uniforme, il va en tout cas commencer à s'interroger sur les réelles motivations du général et condamner notamment les exactions commises par les tribus indiennes servant comme supplétifs dans son armée. Au cours de sa métamorphose, on s'interroge parfois sur la sincérité de son attitude vis à vis de Waldron qu'il tente d'aider et de soigner, sans doute en partie pour plaire à Chris qui n'éprouve d'abord que de la haine pour lui malgré une attirance physique qui crève les yeux entre les deux "ennemis" car la seule chose qui semble les rapprocher en apparence est leur haine réciproque en raison de leur histoire personnelle commune qui les uni sans les rapprocher, bien au contraire, car tout deux ont en commun d'avoir vu leurs familles respectives massacrées par les troupes ennemis. Elle fera néanmoins du chemin et saura se faire entendre de Sherwood…La relation évolue tellement entre eux deux que bien avant qu'ils ne se sautent dessus, on comprend bien que si Chris reste aux côtés de son fiancé, c'est plus par pitié et par devoir que par amour. Ce sont ces scènes qui posent problèmes selon moi car si elles sont plutôt bien écrites, elles sont tout de même un peu trop bavardes et handicapées par le manque d'alchimie entre Alan Ladd et Lizabeth Scott mais de manière surprenante, je trouve que c'est elle qui se montre la moins à l'aise dans ces scènes…et plus largement tout du long car elle sur-joue beaucoup l'indignation, la colère, la haine. Il aurait fallu un meilleur directeur d'acteurs pour lui faire donner plus de mesure à ce personnage (cela dit, il faudrait aussi découvrir ce film en vo car la voix française de L. Scott est insupportable ce qui n'aide pas…).
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Les autres sont très bons, y compris Alan Ladd dans un de ses meilleurs rôles. C'était seulement son 3ème western après Whispering Smith et Branded. On reconnait aussi de nombreuses bons seconds couteaux dont le meilleur est surement Jeff Corey, en sergent soudard qui tente de violer Chris. Je (re)signale la très belle photographie de Charles Lang qui était déjà le directeur de la photographie d'un des rares autres films en couleurs de Lizabeth Scott, La furie du désert de Lewis Allen (1947) ainsi que la bonne musique de Franz Waxman. John Farrow aurait suppliée pendant quelques jours William Dieterle tombé malade.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Au vu de ta description, ce western a tout pour me plaire. J'avoue être un peu jaloux sur le coup surtout que la copie a l'air pas mal du tout. Espérons que l'on puisse le voir un jour en DVD ou sur une des chaines françaises.
kiemavel
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

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Little Big Horn (1951)
Réalisation : Charles Marquis Warren
Production : Carl K. Hittelman
Distribution : Lippert Pictures
Scénario : Charles Marquis Warren
d'après une histoire de Harold Shumate
Photographie : Ernest Miller
Musique : Paul Dunlap

Avec :

Lloyd Bridges (le capitaine Phulipp Donlin)
John Ireland (Le lieutenant John Haywood)
Marie Windsor (Celie Donlin)
Reed Hadley (le sergent Grierson)
Jim Davis (le caporal Moylan)

Au fort Lincoln en 1876, le lieutenant Haywood, du 7ème régiment de cavalerie s'apprête à démissionner de l'armée pour partir avec sa maitresse Celie, la femme du capitaine Donlin qui n'en peut plus de cette vie de femme de soldat. Donlin surprend une conversation entre les deux amants juste avant de devoir quitter le fort pour prendre le commandement d'une patrouille qui a reçu l'ordre de sillonner la région pour surveiller les déplacements des tribus indiennes et qui doit ensuite rejoindre le gros des troupes du général Custer stationnée à Camp Yellowstone. Il est bientôt rejoint par un détachement commandée par le lieutenant Haywood qui a reçu pour ordre de rejoindre toutes les patrouilles surveillant la région afin de les ramener au fort mais lorsque Donlin apprend que Custer a quitté son camp pour se diriger vers la rivière Little Big Horn alors que ses observations prouvent que de nombreux groupes d'indiens convergent vers ce lieu, il décide de contourner les ordres et de rejoindre le fort seulement lorsqu'il aura pu prévenir Custer du piège vers lequel il se dirige. Alors que la demande de démission de Haywood n'a pas encore été acceptée et qu'il se trouve donc encore dans l'obligation d'obéir aux ordres de son supérieur, Donlin lui impose de se joindre à son détachement pour le suppléer -dit-il- s'il lui arrivait quelque chose dans cette mission que Haywood considère comme une mission suicide au milieu d'un territoire infesté d'indiens à travers lequel la petite troupe va devoir parcourir en quelques jours les 400 km les séparant de Custer…
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Ce petit western fait avec rien : même pas une dizaine d'hommes, quelques sous officiers, leurs deux officiers et quelques indiens longtemps invisibles est pourtant un petit bijou. Ce titre est trompeur car Little big Horn évoque une grande bataille mais ici les scènes d'action sont rares et la grande histoire reste en toile fond car nous sommes…juste avant puis pendant…mais ailleurs…Les grandes batailles et la grande histoire n'intéresse manifestement pas Warren et ne sont pas son sujet mais, si le film n'est pas spectaculaire, n'exprime pas de grandes idées sur la conquête des territoires de l'ouest américain, sur les indiens et n'a pas d'opinion sur la personnalité du général Custer, c'est en revanche un très grand western "humaniste". On accompagne en territoire hostile un groupe d'individus que tout semble séparer, qui ne comprennent pas le but du "voyage" et qui, au bout de celui ci auront appris le respect de l'autre et feront bloc au point de ne plus faire qu'un. Mais ce n'est absolument pas un film à la gloire du chef, même petit, et on n'accompagne pas le stage accéléré de parfaits soldats en campagne. Si les hommes ne font qu'un, ça ne veut pas dire que le seul cerveau en état de fonctionner à la fin du récit sera celui du chef et que les autres personnalités auront été broyées ou auront été fondues dans le groupe car, bien au contraire, on aura eu l'impression de connaitre presque intimement chacun des hommes et c'est en parfaite connaissance de cause qu'ils épouseront une cause pourtant perdue. C'est même parce qu'ils se savent exposés au plus grand danger, parce qu'ils voient leurs camarades disparaitre les uns après les autres, que les inimitiés, les méfiances, les mesquineries comme les oppositions plus graves ayant le racisme pour origine ou le conflit plus personnel opposant les deux officiers, vont devenir futiles. Tous les conflits, toutes les tensions vont être progressivement désamorcés comme si tous les motifs de mésententes seraient vains pour ces hommes qui agissent comme s'il se savaient condamnés à mort puisque, si nous devinons plus ou moins le sort qui leur ai réservé -bien que ce film nous montre seulement une petite histoire dans une grande dont on connait l'issu- les hommes aussi agissent comme s'ils connaissaient leur sort et c'est même au coeur des décisions de leur officier supérieur dont la personnalité et les motivations profondes sont au coeur de nos interrogations et de celles de ses hommes et en premier lieu de celles du Lt. Haywood qui va d'abord contester l'utilité de la mission que Donlin s'est assignée en dépit des ordres reçus.
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Le personnage du Cpt. Donlin est parfaitement caractérisé par Warren à la 1ère occasion, dès qu'il nous montre la patrouille en action après que Haywood la rejoint. Il forcera ses hommes assoiffés à parquer leurs chevaux, à s'aligner en bon ordre et à faire preuve de maitrise avant de pouvoir enfin étancher leur soif. Ce qui est pris d'abord pour un excès d'autoritarisme et un manque d'humanité, révèle aussi son sens des responsabilités car c'est après avoir pris conseil auprès du soldat le plus expérimenté et s'être assuré que l'eau était bien potable, qu'il autorisera les hommes à boire. Sa dureté, sa rigueur, le sens de l'ordre et de la discipline vont de paire chez lui avec un sens du devoir, une intégrité et un vrai respect de ses soldats mais jusqu'où est il prêt à aller pour accomplir sa mission et, parce qu'il y a peu de chance qu'elle réussisse, vaut-elle la peine de risquer la vie de son détachement. Ses hommes d'ailleurs ne la discutent pas contrairement à son officier en second. Haywood s'opposera à lui pour sauver quelques vies (ou seulement la sienne avant tout pour celui qui s'apprête à quitter l'armée ?) tandis que Donlin affirme n'avoir qu'une obsession, prévenir Custer. Il dira à Haywood : "vous voulez sauver quelques vies, je veux en sauver beaucoup"; sans que l'on sache (avant un final révélateur) s'il est sincère, s'il agit comme un homme désespéré et allant au devant de la mort ou s'il veut avant tout tuer ou faire tuer son rival. Progressivement, la popularité grandissante de Haywood et surtout les premiers morts vont entrainer un fléchissement dans le comportement de Donlin. Il voudra de moins en moins apparaitre comme l'officier implacable envoyant ses éclaireurs à la mort. Ainsi, après plusieurs morts, il sera d'abord tenté de laisser faire le hasard puisque c'est une partie de cartes qui au milieu du récit désignera le prochain infortuné puis, après la mort du soldat DeWalt, ne voulant même plus laisser le sort décider, il va demander conseil à Haywood et tentera de déléguer ses responsabilités à son ennemi intime…qui lui prendra ses responsabilités. A ce moment là, ce dernier s'était déjà rendu plus populaire auprès des hommes car dans un premier temps, certain d'entre eux connaissant le conflit privé opposant les deux hommes, s'étaient rangés sans le dire derrière leur capitaine. Mais leur opinion va assez vite changer quand lors de la 1ère confrontation avec les indiens, le Lt. Haywood va d'abord endosser la faute commise par un des soldats qui avait rompu le silence imposé par le Cpt. Donlin et avait tiré sur une sentinelle indienne, et va se charger (presque) seul de les neutraliser. Puis, Haywood se proposera pour aller seul au devant de Custer, et enfin va mentir à Donlin pour protéger un autre homme qui avait enté de déserter.
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Même si les deux officiers sont les personnages les plus suivis, on va aussi apprendre à connaitre chaque homme de troupe et sous officiers par petites touches car dans ce scénario admirable chaque détail a son importance. Ces hommes ne sont des archétypes de rien mais leurs expériences personnelles ou même quelques objets (des photos, un jeu de carte, des menottes, etc…) et chaque information donnée au spectateur connait son prolongement à un moment ou un autre du récit et nous permet de connaitre progressivement ces hommes et permet notamment de faire connaitre et de voir évoluer leur positionnement par rapport au conflit qui oppose leurs deux officiers. Ainsi un homme lui-même trompé par sa femme permet de montrer la méfiance des hommes qui seront majoritairement dans un 1er temps derrière Donlin, puis le même sera le révélateur de l'incertitude des soldats quant ils vont croire que parfois Donlin agit avant tout pour se débarrasser de son subordonné sans que l'on sache dans un 1er temps s'ils désapprouvent ses noirs desseins…Le sergent Greirson (Reed Hadley), un ex major de l'armée sudiste, est respecté par Donlin, celui qui est par le grade aujourd'hui son supérieur. C'est d'ailleurs à lui qu'il s'adresse en priorité mais c'est aussi à lui qu'il confie ses inquiétudes et ses doutes et c'est le 1er personnage qui permet de mieux le comprendre…Zecca, un soldat raciste et voleur dont les mains sont menottés notamment la nuit pour l'empêcher de chaparder et de s'enfuir. On va discuter de l'attitude à adopter vis à vis de cet homme mal aimé ; on va lui ôter, lui remettre ces menottes, avant que Warren ne les montre abandonnées un matin au départ d'un bivouac lorsque la menace plus ou moins imaginaire représentée par Zecca ne sera plus rien…Arika, l'éclaireur indien dont certains hommes se méfient…"Un indien reste un indien"…avant que plus tard l'un des hommes ne tente de raisonner ses camarades en expliquant que le Cpl. Arika est d'une tribu traditionnellement ennemi des sioux…ceci avant que l'indien ne fasse enfin la preuve de son dévouement total…Quince, le marrant, qui suppliera Zecca, le lâche, le voleur, celui sur lequel on ne peut compter, de l'achever avant que celui qui est aussi le plus raciste des soldats ne remercie le cadavre de l'éclaireur indien qui s'était exposé pour le protéger…DeWalt, l'ex joueur professionnel, expert aux cartes et réputé forcément tricheur, ce qu'il est semble t'il, mais qui ne trichera pas quand l'enjeu sera autrement plus grave que celui d'une simple partie de cartes sans conséquences…Hofstetter, un homme dont la femme plus très jeune attend leur premier enfant et qui veut rejoindre le fort à temps pour être auprès de sa femme…Le plus jeune de la troupe, le soldat Mason, est le seul à avoir une raison personnelle pour rejoindre Custer puisque son père est sergent du 7ème de cavalerie (lui aussi est d'une scène admirable qui permettra de montrer un visage encore plus humain de Donlin)…Le soldat Corbo dont on suit le feuilleton du futur mariage avec une jeune immigrante canadienne sur le point d'arriver au fort et qui connaitra un ultime prolongement bouleversant car la découverte d'une petite caravane de pionniers attaquée par les sioux quelques heures auparavant donne l'occasion à Warren de filmer une des plus belles scènes de sa carrière. Lors de l'approche prudente de la patrouille, au milieu des cadavres et des tonneaux éparpillés, on remarque une caisse attestant l'origine Canadienne des immigrants. Puis, quelques hommes descendent de cheval et remarquent une très jeune femme que l'on croit vivante un très court instant mais qui est bien morte, restée assise dans son charriot le corps appuyé contre la bâche. Elle s'effondre lorsque Donlin provoque le déséquilibre du véhicule en posant le pied sur la 1ère marche du charriot. L'un des soldats reconnait la jeune femme puisqu'il s'agit bien sûr de la fiancée canadienne de Corbo lequel avait fait circuler sa photo. Il est appelé ; Donlin lui demandant de faire vite. Il monte sur la plate forme du charriot et s'adresse à la jeune femme dont on voit le corps allongé ainsi qu'une de ses mains et une partie de son visage. Il s'adresse alors à elle un sourire timide au bord des lèvres : "Waow ! You're even prettier than in your picture. I'm purely proud". Il lui prend la main, lui passe une bague au doigt et dit : "Mrs James Corbo ! "; la regarde encore un instant et repart.
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Cette scène qui ouvre la dernière partie du film est à l'image de cet demi-heure, admirable. Si la séquence précédente fait penser à Ford, c'est à Wellman que l'on pense avec la (presque) séquence finale ou on retrouve les soldats survivants alignés, interrogés les uns après les autres par leur officier survivant pour savoir s'ils acceptent de prendre le risque insensé de traverser la Little Big Horn sous le nez des indiens. Ils répondent les uns après les autres à l'appel de leurs noms avant de se lancer au galop à la suite de leur chef. Cette séquence est presque aussi forte que l'énumération du nom des mortes par les survivantes dans une des plus inoubliables séquences du Convoi de femmes de William Wellman, d'ailleurs sorti 6 mois plus tard à la fin de l'année 1951. Cette dernière charge inutile est à juste titre édulcorée. Warren filme le début d'une chevauchée…puis surimpressionne de furtives images de bataille à celles des tombes retrouvées. Le traitement elliptique de cette scène est admirable car il souligne par là l'inutilité de ce sacrifice qui est l'ultime hommage des hommes à leur chef et une justification d'une mission dont ils pensaient tous ou presque à son début qu'elle était injustifiée mais qui avait véritablement sa raison d'être et qui aurait pu aboutir. Si cette séquence d'action "édulcorée" est absolument réussie, les autres séquences d'action qui parsèment le récit d'un bout à l'autre, principalement les rencontres avec les indiens, sont les seules séquences ratées. Warren se sort très bien des scènes montrant la progression angoissante de la troupe presque sous le nez de groupes d'indiens beaucoup plus nombreux que les soldats mais que pendant une demi-heure, on ne verra que dans dans de courts plans les montrant se déplaçant en des endroits indéterminés. Puis à partir du moment ou il filme une 1ère embuscade impliquant deux éclaireurs indiens, leur nombre va progresser avec des premières conséquences : un soldat grièvement blessé et abandonné , un autre capturé mais maintenu vivant et attaché comme un épouvantail au sommet d'une colline pour attirer ses camarades, etc…mais si certaines de ces séquences ne sont pas mal réalisées, dans la plupart des cas, dès que Warren doit filmer une scène d'action, il semble ne plus savoir ou poser sa caméra et sait encore moins les dynamiser par sa mise en scène et par le montage. Il est vrai que c'était surtout un auteur et il s'appuyait ici avant tout sur un fabuleux scénario. C'était aussi…son premier essai, car Little Big Horn était son 1er film et malheureusement pour nous son meilleur et de très loin (en tout cas le meilleur des 6 westerns que je connais de ce metteur en scène).
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Je termine…par l'ouverture totalement, et à l'évidence volontairement, trompeuse car n'annonçant en rien la suite de ce qui nous attend. On l'aura compris, on a pas du tout affaire à un western "en chambre" car même si la rivalité amoureuse est à l'origine du conflit qui oppose les deux plus hauts gradés du détachement, elle est en arrière plan. Celie, l'épouse de Donlin, ne réapparaîtra indirectement qu'en deux occasions. Lorsque Haywood voudra restituer une photo de sa maitresse à son mari, le désarroi de celui ci, entrainera un très court mais admirable et inattendu flashback qui nous montrera que la situation amoureuse est d'une plus grande complexité qu'il ne parait mais, dans ce film ou je l'ai dis tous les motifs de discorde seront annihilés, il y aura une seule exception car en une occasion il faudra bien que la tension entre les deux hommes explose dans une courte mais rude bagarre mais pour ces deux hommes qui avaient déjà fait un peu de chemin l'un vers l'autre sans forcément l'admettre, le moteur était déjà davantage la frustration que la haine et au final le moins épuisé et abimé des deux relèvera l'autre, le vainqueur ne triomphant aucunement et le court échange constatant simplement "Il fallait en passer par là ; on passe à autre chose". Un très grand western diffusé au moins une fois sur une chaine française.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Encore une fois alléchant même si désormais je me méfie beaucoup de Marquis Warren : son Arrowhead m'avait horripilé ; aussi puant sur le fond que terne sur la forme.
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

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L'enfant du désert (1951)
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Le directeur d'une compagnie de chemins de fer qui voyage à travers l'ouest pour ses affaires à bord de son wagon privé délaisse Chester, son fils adolescent qui se montre arrogant avec les passagers et le personnel. Son comportement soulève tant de protestations qu'il incite un vieil employé à s'en ouvrir à l'homme d'affaires. Celui ci promet d'être plus ferme avec son fils songeant même à l'envoyer en pension à la rentrée suivante. Plus tard, au cours d'un arrêt pour que le train se ravitaille en eau, le gamin boudeur s'éloigne du train quand survient un cow-boy à la poursuite d'un étalon sauvage. L'homme est prêt à l'attraper quand une maladresse du jeune garçon fait échouer la tentative de capture. Le cow-boy s'éloigne au moment ou le train s'apprête à partir mais le garçon ne parvient pas à rejoindre le train à temps. Il rattrape le cow-boy et exige contre rétribution qu'il le conduise jusqu'à Santa Fe, la prochaine halte du train de son père. Le cow-boy, convoyant un troupeau de bovins avec ses camarades, refuse tout comme les autres cow-boys et leur patron que Chester tente d'acheter à leur arrivée au campement. Il se retrouve obligé de rester auprès d'eux…
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Juste pour rendre compte brièvement d'un autre western de l'année 1951 après Cave of Outlaws, Red Mountain et Little Big Horn car celui ci est selon moi anecdotique. Un gosse délaissé par son père fait des conneries pour retenir son attention. C'est Dean Stockwell qui jouait le gamin difficile. Dans le genre sale gosse, pourri gâté et têtes à claques, le Chester c'est quelque chose. Il est à ce point agaçant que même un de ces putains de soixante-huitard cher à ce con de Zemmour aurait envie de lui mettre des trempes, c'est dire. Heureusement, le père négligent est relayé par des gars un peu bourrus mais sympathiques, à commencer par le plus sympa de tous, Dan Matthews (Joel McCrea) qui va jouer au père de substitution, genre Charles Ingalls (sans l'air con). Ils vont lui apprendre les vrais valeurs. 1ère mesure : Au boulot le Chester ! Avec eux, tu travailles pas, tu manges pas (salauds ! s'en prendre à des gosses. Attention ! S'en prendre à des gosses, oui, mais c'est pas non plus Brockebareback Mountain). Bon, le travail n'est pas non plus très harassant. Il va devenir l'assistant du cuisinier du convoi interprété par Chill Wills (qui en fait des caisses en gros plouc). Au début le régime alimentaire le surprend un peu. Lui qui n'aime que les fraises, même hors saison, les premiers jours il repousse les fayots ! Mais il va finir par s'y faire (ouf…) : les fayots, l'odeur des vaches…et tout le reste. Évidemment, on ne transforme pas du jour au lendemain un gamin arrogant, menteur, faux-jetons. Chester tente de se faire la malle, multiplie les erreurs mais finalement il ne manque pas de courage, sait se tenir à cheval, endure sans broncher les épreuves : le désert brulant, la tempête de sable, le manque d'eau, le troupeau qui s'emballe, etc…mais c'est surtout avec la chasse à l'étalon sauvage, un feuilleton qui dure presque jusqu'au bout, que le scénariste file une métaphore simplette mais sympathique. Ce western l'est aussi mais c'est le western pour toute la famille…des années 50 car je doute qu'il intéresse celles d'aujourd'hui (mais peut-être bien encore quelques parents). J'oublie un détail qui peut avoir son importance, c'est la qualité du DVD qui propose une qualité d'images assez rare.
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Quand Joel McCrea tend à Chester une photographie de sa fiancée avec laquelle il compte s'installer quand il aura son ranch ou il élèvera des chevaux…Il lui montre une photo de sa femme dans la vrai vie : Frances Dee.
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

J'imagine sans sous titres pas même anglais ? :(

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