Le Western américain : Parcours chronologique III 1955-1959

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

hellrick a écrit :
Jeremy Fox a écrit : (Voir le top 50 dans le premier post)
Tout vu sauf Rivière rouge (que j'ai en dvd ouf), Viva Zapata et La charge des tuniques bleues (que j'ai aussi, plus qu'à le mettre dans le lecteur) :D
Et alors, il te convient dans l'ensemble ?
Pat Wheeler
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Re: The Hanging Tree

Message par Pat Wheeler »

Jeremy Fox a écrit :Le film est sorti en zone 2 avec VF d’origine et VO. Copie oscillant sans cesse du superbe au mauvais. Format 1.33 contrairement au DVD américain en 1.85. Mais allez comparer sur Beaver et vous vous rendrez compte que le premier est peut-être plus harmonieux.
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La copie du DVD américain me paraît quand même beaucoup mieux rien qu'au niveau de la définition. Les couleurs du zone 2 sont extrêmement délavées.

Sinon je suis d'accord avec ton analyse dans l'ensemble: un beau Daves qu'on peut considérer comme transitoire vu qu'il a déjà un pied dans l'étrier de ses futurs mélos tout en gardant l'autre dans celui de ses westerns purs et durs. :) Mais c'est vrai qu'on peut lui préférer 3h10 pour Yuma et La Dernière Caravane, plus maîtrisés et épurés.
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Jeremy Fox
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Re: The Hanging Tree

Message par Jeremy Fox »

Pat Wheeler a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Le film est sorti en zone 2 avec VF d’origine et VO. Copie oscillant sans cesse du superbe au mauvais. Format 1.33 contrairement au DVD américain en 1.85. Mais allez comparer sur Beaver et vous vous rendrez compte que le premier est peut-être plus harmonieux.
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La copie du DVD américain me paraît quand même beaucoup mieux rien qu'au niveau de la définition. Les couleurs du zone 2 sont extrêmement délavées.
Je ne parlais que de cadrage :wink:
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hellrick
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par hellrick »

Jeremy Fox a écrit :
hellrick a écrit :
Tout vu sauf Rivière rouge (que j'ai en dvd ouf), Viva Zapata et La charge des tuniques bleues (que j'ai aussi, plus qu'à le mettre dans le lecteur) :D
Et alors, il te convient dans l'ensemble ?
Nickel bien sur :wink:
Les seuls qui me parlent moins (je l'ai déjà dit, pas taper) ce sont Au-delà du Missouri et La captive aux yeux clairs :oops:
Critiques ciné bis http://bis.cinemaland.net et asiatiques http://asia.cinemaland.net

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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

hellrick a écrit : Les seuls qui me parlent moins (je l'ai déjà dit, pas taper) ce sont Au-delà du Missouri et La captive aux yeux clairs :oops:
2/47 qui ne te plaisent pas trop, il n'y a rien à redire. :wink:
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Jeremy Fox
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Ride Lonesome

Message par Jeremy Fox »

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La Chevauchée de la vengeance (Ride Lonesome - 1959) de Budd Boetticher
COLUMBIA



Avec Randolph Scott, Karen Steele, Pernell Roberts, James Best, Lee Van Cleef, James Coburn
Scénario : Burt Kennedy
Musique : Heinz Roemheld
Photographie : Charles Lawton Jr (Eastmancolor 2.35)
Un film produit par Budd Boetticher, Harry Joe Brown & Randolph Scott pour la Columbia


Sortie USA : 15 Février 1959


Ben Brigade (Randolph Scott), un ‘bounty hunter’ (chasseur de primes), ramène à Santa Cruz Billy John (James Best), un jeune meurtrier qu'il vient d'appréhender en pleine montagne, laissant ses complices s'enfuir. En cours de route, les deux hommes croisent Carrie (Karen Steele), une jeune femme tenant un relais et dont le mari vient d'être tué par les Indiens, ainsi que deux hors-la-loi, Sam (Pernell Roberts) et Whit (James Coburn), intéressés eux aussi par le criminel, une amnistie ayant été promise à qui le livrerait à la justice. Ce petit groupe de cinq personnes est également suivi par Frank (Lee Van Cleef), le frère du prisonnier qui, accompagné de son gang, souhaite délivrer Billy John. Malgré tous ces dangers alentours, sans compter les indiens qui aimeraient bien s’accaparer la blonde Carrie, Ben, prenant son temps à chaque halte, semble vouloir intentionnellement se faire rattraper par Frank ; et en effet, il a un lourd secret qui le pousse à vouloir se venger de ce dernier quitte à exposer à de graves dangers ses compagnons de route…

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A peine quelques jours avant, dans les salles de cinéma américaines, Gary Cooper venait juste de frôler le lynchage lors d’une séquence finale inoubliable et oh combien émouvante sous un ‘Hanging Tree’ dans La Colline des potences, qui marquait par la même occasion la dernière incursion de Delmer Daves dans le genre. C’est à nouveau autour d’un 'arbre au pendu' que s’achève Ride Lonesome d'un autre géant du western, Budd Boetticher ; une image devenue célèbre pour tous les fans de westerns que celle de Randolph Scott venant de mettre le feu à cet arbre asséché et rachitique, symbole de sa haine et de sa vengeance, la caméra entamant un mouvement de grue ascendant d’une beauté à couper le souffle jusqu’à ce que le 'The End' vienne faire son apparition au bout d'à peine 1h10. Il s’agit du cinquième film de l'association qu'avait entamé Budd Boetticher avec Randolph Scott et l’un des westerns les plus purs, les plus parfaits de l’histoire du cinéma. La richesse de la collaboration entre le cinéaste et le comédien (cycle communément appelé Ranown pour englober ses deux producteurs, Randolph Scott et Harry Joe Brown) a décidément accouché d'une ‘série’ loin de ne comporter que des films interchangeables mais au contraire, malgré leurs innombrables points communs dont le thème quasi-récurrent de la vengeance, très différents les uns des autres. Après donc le splendide 7 hommes à abattre (Seven Men from Now) qui posait admirablement les bases de ce corpus, le lugubre L’Homme de l’Arizona (The Tall T), et plus récemment l’urbain et étonnant Decision at Sundown ainsi que l’iconoclaste Buchanan Rides Alone (L’Aventurier du Texas), Budd Boetticher poursuit un parcours sans-faute avec le superbe comédien, peut-être le film le plus réussi du lot, que ce soit au niveau scénaristique que plastique, une sorte d’aboutissement de l’épure et du style ‘boetticherien’ alors que le cinéaste utilise pour la première fois le Cinémascope avec une maestria qui laisse pantois.

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Ride Lonesome raconte l’histoire très simple et formidablement épurée de Ben Brigade, un chasseur de primes ramenant un meurtrier dans le seul but de faire sortir de sa tanière le frère de ce dernier dont il souhaite se débarrasser depuis longtemps pour venger une épouse tuée (un leitmotiv chez Burt Kennedy que ce motif de vendetta). En cours de route, Ben et son prisonnier rencontrent dans un relais une très jolie femme dont le mari vient d'être tué par les Indiens et deux hors-la-loi intéressés eux aussi par le criminel, une amnistie ayant été promise à qui le livrerait à la justice. Ce petit groupe se rendant à Santa Cruz est suivi par le frère du futur détenu qui, accompagné de son gang, souhaite le délivrer. Une intrigue apparemment limpide sauf que les motivations de chacun ne sont pas forcément celles que l'on croyait au départ ; ceci est valable pour tous les protagonistes de ce western palpitant mais d’un extrême dépouillement tourné en à peine 12 jours. Comme pour L'homme de l'Arizona dont il se rapproche par certains points, nous y trouvons en tout et pour tout à peine une dizaine de personnages, pas bien plus de chevaux, une cabane, une ruine et quelques paysages désertiques. Mais contrairement à ce dernier, aucun prologue ; on entre immédiatement dans le cœur de l’action, le film débutant où bien d’autres se seraient terminés, par l’arrestation d’un hors-la-loi par un chasseur de primes au cours d’une somptueuse séquence montrant d’emblée le sens de l’espace du cinéaste, sa façon unique et paradoxale d’être direct tout en s’accordant le luxe de prendre son temps, filmant sans se précipiter l’avancée de ses personnages et chevaux au sein d’étonnants et amples paysages brûlés par le soleil. 72 petites minutes dont presque 10 minutes consacrées à des images muettes des cavaliers en route vers leur destin ; et pourtant il s’agit d’un des westerns les plus riches qu’il puisse se trouver ! Boetticher était absolument unique pour allier une telle concision, un tel dépouillement, une telle rapidité d'exécution, tout en arrivant à brosser des portraits d’une incroyable complexité, à faire vivre toute une floppée de personnages pour lesquels nous éprouvons énormément de sympathie par le fait d'être, plutôt que bons ou méchants, humains avant tout.

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Formellement parlant, à peine le générique terminé sur un très beau thème musical signé Heinz Roemheld, on n’arrêtera plus de s’extasier sur la maîtrise absolue des cadrages (que ce soit pour les plans serrées, les plans américains avec amorce de gros plans sur un côté, ou les plans d'ensemble très larges), sur les choix de montage et la grâce des mouvements de caméra, travellings et panoramiques étant tous d'une beauté qui effleurent le génie, notamment celui qui suit les cavaliers discutant dans le désert en chevauchant alors que l’on découvre en arrière-plan les Indiens se rassembler derrière eux au sommet d’une dune. On retrouve aussi le savoir-faire unique du cinéaste dans les scènes d'action : l’attaque du relais dévasté par les Indiens est un modèle du genre, le mouvement donné à Boetticher à cette séquence étant assez stupéfiant, sans qu’il ne se sente le besoin d’utiliser nombre de figurants ni importants moyens pyrotechniques ; l'efficacité de l'ensemble n'a d'égale que sa sobriété, affirmation que l'on peut d'ailleurs appliquer à l'ensemble de son cinéma. Une virtuosité formelle confondante (d'autant qu'elle n'est à aucun moment m'as-tu-vu) et un panache constant qui aboutissent à la séquence inoubliable du panoramique vertical sur l’incendie de l’arbre aux pendus (planté tout spécialement par le réalisateur au centre d’un lac asséché et que l’on verra à nouveau dans son tout aussi sublime western suivant, Comanche Station), ce dernier étant la représentation de tout ce qui hantait Brigade et de ce qu’il pouvait haïr. Avant celà, nous aurions déjà eu tout le loisir de nous pâmer de plaisir devant l'arrestation du hors-la-loi lors de la première séquence, au vu de l'apparition de la diligence avec son conducteur transpercé par une lance, devant la scène de suspense au cours de laquelle le prisonnier subtilise un fusil et menace son geolier... Un festival de séquences inoubliables !

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Si formellement, le film est blufant, il en va de même pour le fond. Burt Kennedy signe ici son scénario le plus riche avec une subtilité toujours aussi grande dans la caractérisation psychologique de tous ses vulnérables protagonistes ; on retrouve également ses conversations coutumières autour du feu qui nous en apprennent beaucoup sur le caractère complexe de chacun, le laconisme et l’humour habituels de ses dialogues (Carrie Lane : "You don't seem like the kind that would hunt a man for money" - Ben Brigade : "I am"), et enfin une originalité de taille concernant le final : non seulement le duel annoncé et attendu est désamorcé mais de plus Brigade laisse partir ses ‘compagnons’ de route avec la femme, préférant la solitude à la prime et à une nouvelle histoire d’amour. Décidément, après Decision at Sundown, Boetticher ne semble pas vouloir que ses personnages principaux interprétés par Randolph Scott aient droit au bonheur ! Cependant, une première version du scénario voyait en plus Brigade abattre Sam Boone ; mais le cinéaste, en accord avec son scénariste, décida de l'épargner en raison de la sympathie pour le personnage dont Pernell Roberts (plus connu pour son rôle d’Adam Cartwright dans la série Bonanza) donne une interprétation de tout premier ordre. Et en effet, rarement nous n’avions encore éprouvé un aussi fort attachement pour un ‘bad guy’ qui a pourtant dès le début l’intention (sans d’ailleurs s’en cacher) de tuer Brigade une fois évacués les dangers traversés ensemble afin de toucher lui-même la prime. Par son impassibilité (il a très peu de répliques) et sa gestuelle, Randolph Scott semble une fois encore annoncer ‘l'homme sans nom’ de Sergio Leone et Clint Eastwood ; il est ici tout simplement magistral, tout aussi inquiétant que touchant, encore plus renfermé que dans n’importe lesquels de ses rôles précédents. Hormis donc pour Brigade qui met néanmoins fin à ses démons et désirs de vengeance, un final plutôt optimisme et qui fait chaud au cœur d'autant que nous étions arrivés à apprivoiser le trio qui semble enfin bien décidé à prendre le départ d'une nouvelle vie que l'on devine apaisée et heureuse.

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Outre Randolph Scott et Pernell Roberts, le reste de la distribution n'a rien à leur envier. Effectivement, tous les autres protagonistes sont aussi richement décrits et l'on se surprend à s'attacher à presque chacun d'eux, tout autant au personnage féminin qu’à tous les autres. Carrie Lane, campée par la trop peu connue mais magnifique et talentueuses Karen Steele, déjà à l’affiche de Decision at Sundown, est l’objet de toutes les convoitises, y compris celles des Indiens, mais s’avère dans le même temps fortement respectée par chacun de par sa beauté et son caractère. Sam Boone et Whit (premier rôle, un peu en retrait, de James Coburn au cinéma) forment un couple de bandits absolument inoubliable ; la description de l’amitié qui lie ces deux outlaws est écrite avec une sensibilité et une tendresse qui entérine le fait que le duo Boetticher/Kennedy était loin d’être misogyne/manichéen comme on l’a parfois lu : ils n’hésitent pas à mettre dans la bouche de Pernell Roberts une sorte de déclaration d’amour/amitié avec ce "Je t’aime bien" lancé à l’intention de son complice de longue date. Le moins sympathique est Billy John auquel James Best (l’un des deux amis de Billy le Kid dans Le Gaucher – The Left-Handed Gun de Arthur Penn) apporte néanmoins un relief inattendu, moins cabotin qu'à son habitude. Quant au dernier personnage de relative importance, Lee Van Cleef, encore à ses débuts, s'avère déjà plutôt charismatique. Heinz Roemheld signe à nouveau un superbe score, à la fois archétypal et d'une profonde mélancolie, et Charles Lawton soigne particulièrement sa chaude photographie ; même les nuits américaines sont magnifiques et somme toute assez crédibles. Tout ceci pour en arriver une fois encore à ce célèbre final, assez sobre, qui peut se vanter de faire partie des plus beaux de l'histoire du genre avec ceux de 3h10 pour Yuma de Delmer Daves et de Comanche Station, le prochain Boetticher qui allait sortir dans les salles de cinéma pas plus tard que l’année suivante.

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Ride Lonesome atteint donc une sorte de perfection de par la densité des caractères décrits, un admirable scénario, une interprétation en tout point remarquable et une mise en scène paradoxalement à la fois dépouillée et majestueuse. Un sens de l'épure rare et aujourd’hui quasiment disparue de nos écrans de cinéma, une facilité à aller à l’essentiel tout en restant suprêmement intelligent et humain. L’un des plus purs chefs-d’œuvre du genre et, de par sa conclusion, l’un des plus optimistes de son auteur contrairement à celui qui suivra. Je vous convie donc à aller y jeter un oeil par vous-même ; vous ne devriez pas le regretter et enfin comprendre pourquoi certains films de série B pouvaient arriver à atteindre de tels sommets, quasiment inégalés !
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Alphonse Tram
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Re: Ride Lonesome

Message par Alphonse Tram »

une mise en scène paradoxalement à la fois dépouillée et majestueuse. Un sens de l'épure rare et aujourd’hui quasiment disparue de nos écrans de cinéma, une facilité à aller à l’essentiel tout en restant suprêmement intelligent et humain.
C'est d'ailleurs déroutant parce que je n'en ai pas forcemment conscience sur le moment. À la vision le tout semble "normal", "naturel", "évident". C'est a-posteriori, en déroulant le fil, et en comparant éventuellement avec d'autres films moins épurés, qu'on peut en être frappé. J'ai eu ce sentiment également avec Wichita.
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Jeremy Fox
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Re: Ride Lonesome

Message par Jeremy Fox »

Alphonse Tram a écrit :
une mise en scène paradoxalement à la fois dépouillée et majestueuse. Un sens de l'épure rare et aujourd’hui quasiment disparue de nos écrans de cinéma, une facilité à aller à l’essentiel tout en restant suprêmement intelligent et humain.
C'est d'ailleurs déroutant parce que je n'en ai pas forcemment conscience sur le moment. À la vision le tout semble "normal", "naturel", "évident". C'est a-posteriori, en déroulant le fil, et en comparant éventuellement avec d'autres films moins épurés, qu'on peut en être frappé. J'ai eu ce sentiment également avec Wichita.

Tout à fait : c'est tellement fluide et harmonieux, l'histoire parait tellement simple, que l'intelligence du propos et la richesse psychologique ne nous sautent pas immédiatement à la figure. C'est quand on se dit que, en enlevant tous les plans purement illustratifs, tout ceci ne tient qu'en à peine une heure, que l'on commence à se poser des questions et à admirer la capacité du cinéaste à aller à l'essentiel sans rendre ses films secs, tout au contraire. Idem pour Tourneur effectivement.
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Re: Ride Lonesome

Message par Hitchcock »

Jeremy Fox a écrit : Ride Lonesome atteint donc une sorte de perfection de par la densité des caractères décrits, un admirable scénario, une interprétation en tout point remarquable et une mise en scène paradoxalement à la fois dépouillée et majestueuse. Un sens de l'épure rare et aujourd’hui quasiment disparue de nos écrans de cinéma, une facilité à aller à l’essentiel tout en restant suprêmement intelligent et humain. L’un des plus purs chefs-d’œuvre du genre et, de par sa conclusion, l’un des plus optimistes de son auteur contrairement à celui qui suivra. Je vous convie donc à aller y jeter un oeil par vous-même ; vous ne devriez pas le regretter et enfin comprendre pourquoi certains films de série B pouvaient arriver à atteindre de tels sommets, quasiment inégalés !
Le meilleur Boetticher donc selon toi ? ;)
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Re: Ride Lonesome

Message par Jeremy Fox »

Hitchcock a écrit :
Jeremy Fox a écrit : Ride Lonesome atteint donc une sorte de perfection de par la densité des caractères décrits, un admirable scénario, une interprétation en tout point remarquable et une mise en scène paradoxalement à la fois dépouillée et majestueuse. Un sens de l'épure rare et aujourd’hui quasiment disparue de nos écrans de cinéma, une facilité à aller à l’essentiel tout en restant suprêmement intelligent et humain. L’un des plus purs chefs-d’œuvre du genre et, de par sa conclusion, l’un des plus optimistes de son auteur contrairement à celui qui suivra. Je vous convie donc à aller y jeter un oeil par vous-même ; vous ne devriez pas le regretter et enfin comprendre pourquoi certains films de série B pouvaient arriver à atteindre de tels sommets, quasiment inégalés !
Le meilleur Boetticher donc selon toi ? ;)

J'ai encore une toute, toute petite préférence subjective pour Decision at Sundown mais Ride Lonesome me semble encore plus parfait. Mais ça se tient à pas grand chose y compris avec 7 hommes à abattre.
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Re: Ride Lonesome

Message par Hitchcock »

Jeremy Fox a écrit :
Hitchcock a écrit :
Le meilleur Boetticher donc selon toi ? ;)

J'ai encore une toute, toute petite préférence subjective pour Decision at Sundown mais Ride Lonesome me semble encore plus parfait. Mais ça se tient à pas grand chose y compris avec 7 hommes à abattre.
Je vois. Personnellement, j'avoue que j'ai un petit (même un gros) faible pour Le Traître du Texas, mais je ne connais pas assez la filmo de Boetticher pour l'affirmer de manière objective.
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Re: Ride Lonesome

Message par Jeremy Fox »

Hitchcock a écrit :
Je vois. Personnellement, j'avoue que j'ai un petit (même un gros) faible pour Le Traître du Texas, mais je ne connais pas assez la filmo de Boetticher pour l'affirmer de manière objective.

J'aime aussi beaucoup :wink:
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The Hangman

Message par Jeremy Fox »

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Le Bourreau du Nevada (The Hangman - 1959) de Michael Curtiz
PARAMOUNT



Avec Robert Taylor, Tina Louise, Fess Parker, Jack Lord, Gene Evans
Scénario : Dudley Nichols d'après une histoire de Luke Short
Musique : Harry Sukman
Photographie : Loyal Griggs (noir et blanc 1.85)
Un film produit par Frank Freeman Jr pour la Paramount


Sortie USA : 05 mars 1959


Le Marshall Mackenzie Bovard (Robert Taylor), surnommé ‘The Hangman’ pour sa ténacité à mener sa tâche jusqu’à son terme (qui est souvent la potence), a pour dernière mission avant de prendre sa retraite d’arrêter quatre hors-la-loi ayant cambriolé une diligence en causant la mort d’un homme. Les deux premiers bandits ont déjà été pendus et Bovard vient d’appréhender le troisième ; il ne lui reste plus qu’à capturer le quatrième homme du gang, un certain John Butterfield, ex-membre de la cavalerie américaine qui avait pourtant une très bonne réputation au sein de sa compagnie. Le Marshall apprend le nom de la ville où il se serait réfugié sous une fausse identité. Ne connaissant pas son visage, il demande alors, contre une coquette somme, à ce qu’un des soldats ayant bourlingué avec le bandit se rende dans cette petite ville afin de l’identifier ; mais aucun des camarades de Butterfield ne souhaite le dénoncer ; seule Selia (Tina Louise), son ex-compagne, réticente au départ, finit par accepter, n’ayant plus grand-chose pour vivre, les 500 dollars allant lui être bien utiles. Le Marshall et la jeune femme se donnent donc rendez-vous dans la petite ville dans laquelle la rumeur dit que le hors-la-loi a trouvé refuge. Mais une fois sur place, Selia a des problèmes de conscience ; au vu de l’attitude des citoyens -y compris du shérif (Fess Parker)- qui, en apprenant que Butterfield pourrait être John Bishop (Jack Lord) semblent tous vouloir le protéger, elle fait finalement tout pour ne pas commettre la délation demandée et pour laquelle elle a été payée. Tout le monde ne semblant pas croire à la culpabilité de Bishop, les convictions de Bovard commencent elles aussi à vaciller d’autant que l’homme qu’il cherche à arrêter parait être grandement apprécié de l’ensemble des habitants pour son altruisme et sa gentillesse…

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Sorti en 1954, L’homme des plaines (The Boy from Oklahoma) bénéficiait d’une histoire à priori cocasse, celle d’un homme ayant préféré étudier le droit par correspondance plutôt que le maniement des armes et se retrouvant néanmoins nommé shérif d’une petite bourgade du Nouveau Mexique alors qu’il n’avait rien demandé. Seulement, le résultat assez terne n’était guère enthousiasmant et n'a pas laissé d’impérissables souvenirs ; il apportait surtout de l’eau au moulin de ceux qui décrétaient que Michael Curtiz avait perdu son savoir-faire dès les années 50, notamment lorsqu’il tournait pour la Paramount. S’il est évident que ce qu’a réalisé le cinéaste d’origine hongroise durant cette décennie ne saurait rivaliser avec sa production des deux précédentes, aucune honte à avoir cependant : des films tels que la célèbre et sympathique comédie musicale Noël Blanc (White Christmas), L’Égyptien, l’un des péplums hollywoodiens les plus intelligents qui ait été réalisé, ou encore Le Fier rebelle (Proud Rebel), sont là pour nous le prouver, même si la critique française fut également impitoyable à leur encontre, reprochant les bons sentiments mis en avant ici et là, confondant souvent charme et guimauve, ces trois films étant à mon avis au contraire dépourvus de mièvrerie. En effet, il n'existe aucune règle qui avance que parce que l’on se trouve devant une histoire toute simple avec beaux sentiments et nobles personnages l'on devrait lui accoler automatiquement ce qualificatif péjoratif ; Le Bourreau du Nevada en est à nouveau un bel exemple.

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Rien de spécialement remarquable dans ce nouveau western mais un charme indéfinissable qui nous cueille dès le départ et qui ne nous lâche plus jusqu’au très bel Happy-End au cours duquel le regard de chien battu de Fess Parker (d’ailleurs très attachant, bien meilleur qu’en Davy Crockett) nous fait penser à postériori à celui de Robert Forster lors du sublime final de Jackie Brown de Quentin Tarantino. Pour son 167ème film (juste après le célébrissime King Creole), Michael Curtiz nous offrait donc, à défaut d’un chef-d’œuvre, une jolie histoire correctement mise en scène, bien écrite et parfaitement bien interprétée. Sans rebondissements spectaculaires ni forts enjeux dramatiques, un western très classique, tendre et émouvant, qui fait primer les sentiments et les rapports humains sur la violence et l’action. Si Michael Curtiz ne fait pas particulièrement d’étincelles (sans cependant que sa mise en scène soit mauvaise, loin de là), le scénario de Dudley Nichols (sur lequel W.R. Burnett aurait collaboré sans être crédité) est finalement très original contrairement à ce que le postulat de départ laissait à penser, tout comme le trompeur titre du film qui ne reflète pas vraiment le personnage qui porte ce surnom. Si on le nomme ‘The Hangman’ pour son efficacité à arrêter les hors-la-loi et les ramener jusqu’en prison, l’homme de loi se défend de cette appellation en disant "I don't hang them ; the judge does that". Ce n’est donc ni un mauvais bougre ni un homme impitoyable ; fatigué de faire ce métier qu’on lui a plus ou moins imposé, il a décidé de prendre sa retraite une fois cette dernière mission accomplie, ayant dans l’idée de se rendre ensuite en Californie prendre un repos bien mérité. En cette fin de décennie, les cow-boys vieillissants sont légions, annonçant le western crépusculaire. Quoiqu’il en soit, épuisé ou pas, déclinant ou pas, un Marshall à la poursuite de bandits, rien de plus banal à priori !

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Mais là où le script devient plus intriguant et plus novateur, c’est que l’on se rend vite compte que le bandit qu’il poursuit sans en connaitre le visage, semble être apprécié par tous ceux qu’il rencontre (que ce soient les simples soldats et officiers avec qui il a ‘travaillé’, ou même les habitants de la ville dans laquelle il vient de se réfugier) au point que personne n’apporte quelconque aide à l’homme de loi fédéral, pas plus le shérif local que quiconque autre ; au contraire même, on se plie en quatre pour cacher le soi-disant hors-la-loi, on fait tout pour le disculper, prendre sa défense et le protéger de l’arrestation. Bovard a beau affirmer au début de sa traque que "Everyone has a price", personne n’acceptera une telle somme si la contrepartie est de devenir un délateur, un traître ; pas plus le vieux soldat du début que l’ex-maîtresse malgré qu’elle ait été tenté de le faire pour se sortir de la situation où elle se trouvait, être obligé de faire la blanchisseuse pour la cavalerie. Même le témoin qu’il trouve en dernier recours, alors qu’il pensait ne plus pouvoir arriver à mener à bien sa mission, va le lâcher en cours de route, en profitant même pour aider à fuir celui à qui il aurait dû tendre un piège : "Why does everyone in town try to help him?" s'étonnera le Marshall. Les citoyens n’ayant rien à reprocher à cet homme arrivé il y a deux ans dans leur petite ville, n’ayant au contraire cessé de le louer pour ses bienfaits, ne peuvent pas croire à sa culpabilité ou estiment que son passé ne les concerne pas : une belle leçon de loyauté et de compassion. Devant tant d’abnégation et de bienfaisance que, devenu cynique et revenu de tout, Bovard n’aurait jamais cru qu'on puisse réellement en trouver à son époque et dans ce pays, le tenace homme de loi va se mettre à lâcher du lest jusqu’à totalement lâcher prise : l’avant dernière séquence (la prise de conscience par Bovard que la bonté existe et l'abandon de son devoir au profit de son libre arbitre) est à ce titre un très beau moment, finissant de faire de ce western un joli film pétri d’humanité.

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A l’occasion de The Hangman, Robert Taylor, pour la première fois depuis 1935 et Magnificent Obsession de John M. Stalh (soit 24 ans), fait faux bond à son studio de prédilection, la toute puissante MGM. Est-ce pour cette raison, ayant peut-être eu des remords, qu’il dira toujours par la suite assez injustement que le film de Michael Curtiz a été l'un des films les plus ratés de sa filmographie ? Il s’avère néanmoins une fois de plus parfait dans ce rôle peu gratifiant de prime abord, cynique et pas spécialement courtois, pour tout dire souvent déplaisant ; aucun regret à ce que ce ne soit pas James Cagney qui ait été retenu alors que c’avait été le premier choix des producteurs. Non que ce dernier soit un mauvais acteur, loin s’en faut ; mais ce personnage de vieil homme de loi physiquement séduisant lui aurait moins bien convenu à mon avis. Nous n’aurions pas eu le plaisir de nous délecter de ce running gag de la vielle femme (très amusante Mabel Albertson) lui tournant autour, et l’attrait qu’il suscite chez la sculpturale Tina Louise aurait surement été moins convaincant. Il est fort probable que le scénario aurait été modifié en fonction des comédiens choisis, mais le fait de trouver Robert Taylor dans la peau de ce personnage cynique ayant perdu tout idéal ("I'm not a sentimentalist. I've seen too much of life") mais qui va s’humaniser au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue, s'avère bougrement plaisant. Le film de Michael Curtiz rajoute en tout cas une réussite de plus à la très belle filmographie westernienne du séduisant acteur durant cette décennie ; jugez-en par vous-même : Devil's Doorway (La porte du diable) d’Anthony Mann, Westward the Women (Convoi de femmes) de William Wellman, The Last Hunt (La Dernière chasse) de Richard Brooks ou The Law and Jake Wade (Le Trésor du pendu) de John Sturges.

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Aux côtés de Robert Taylor, apportant au film une sympathique pointe d’érotisme, la superbe Tina Louise, aussi belle que talentueuse, son jeu étant très naturel et toujours juste. Elle interprète une femme qui a déjà bien vécu, qui a connu pas mal de tourments mais qui garde néanmoins la tête haute, ne geignant jamais sur son sort, toujours prête à aider son ex-amant malgré le fait qu’elle ait appris qu’il se soit marié, et ne concevant aucune jalousie à l’encontre de son épouse enceinte. Une femme très moderne qui sied à ravir à l’actrice que le metteur en scène ne se prive pas de profiter de son splendide physique, nous la montrant se baignant nue dans une baignoire puis dans une rivière, enfilant ses bas, se mettant en petite tenue, se faisant menotter aux barreaux du lit, traversant une rue superbement vêtue et faisant se retourner tout le monde sur son passage, y compris un chien ! Une séquence expressément humoristique et qui, tournée à la Warner, aurait sombré dans la vulgarité et la lourdeur ; au contraire ici, le tout reste assez léger, rien n’est appuyé. Mais qu’on ne s’y trompe pas, le film n’a rien d’une comédie ; excepté au travers les punchlines assez acerbes du Marshall et les réparties parfois vachardes de Selia, le scénario de Dudley Nichols demeure très sérieux malgré son absence de violence. Un scénariste qui a peu travaillé durant cette décennie mais qui, comme Robert Taylor, aura eu une belle brochette de films à son actif durant cette période : Rawhide (L’attaque de la malle-poste) d’Henry Hathaway, The Big Sky (La Captive aux yeux clairs) de Howard Hawks, The Tin Star (Du Sang dans le désert) d’Anthony Mann. Pour en revenir aux comédiens, Fess Parker s’avère étonnement irrésistible dans la peau de ce shérif doux et nonchalant, tombant amoureux de Selia sans que son amour soit réciproque, tout comme Jack Lord qui, après avoir été le psychopathe dans L’Homme de l’Ouest d'Anthony Mann, s’avère tout aussi convaincant dans le rôle de l’homme recherché qui se révèle être un ange de bonté et de probité, père et époux idéal, même s’il avoue avoir été tenté de suivre la mauvaise voie à un moment de sa vie où il ne savait plus comment survivre. Alors qu’il était méconnaissable dans le sombre western de Mann, on devine en revanche parfaitement ici son futur Steve McGarrett dans la célèbre série Hawaii police d’état : même mimiques, même gestuelle ; assez jubilatoire pour les fans de la série TV…

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Le reste des seconds rôles, tous aussi bien croqués, est constitué de visages très connus tels Mickey Shaughnessy, Gene Evans, James Westerfield ou Lorne Greene : un véritable plaisir de retrouver autant d’habitués du genre au sein de ce western foncièrement pacifique et optimiste sur la condition humaine, abordant entre autre les thèmes des dilemmes entre devoir et compassion, entre loyauté et délation. Le savoir-faire du cinéaste étant intact (le film est loin d’être aussi mollasson qu’on a bien voulu le dire, le manque d'action n'influant pas sur un montage et une construction assez rapide), le casting étant de première qualité, l’histoire étant susceptible de toucher beaucoup de monde, ce film aux personnages bien caractérisés baignant dans une ambiance sacrément séduisante s’avère un divertissement de qualité à défaut d'être un western mémorable. A noter que ce film pourrait plaire à ceux qui ne sont pas spécialement aficionados du genre. A découvrir !
Hitchcock
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Hitchcock »

J'attends avec impatience ta chronique de Rio Bravo :)
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 3 (55

Message par Jeremy Fox »

Hitchcock a écrit :J'attends avec impatience ta chronique de Rio Bravo :)
Pas de soucis à te faire : il vient d'intégrer mon top 50 :wink:
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