Federico a écrit :4.44... M'étonnerait pas que Ferrara (si il est responsable du titre) soit féru d'orientalisme, quand on connait la signification superstitieuse du chiffre 4 en Asie...
Les internautes sont de sacrés rigolos, et donnent au film une moyenne de 4.4 sur IMDB. Et pendant ce temps là, on a toujours pas de date de sortie française. Je commence à en avoir sérieusement marre d'attendre, et vais prendre le risque de commander le blu US.
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Bon, sinon, un petit top du roi du kitsh classe fera pas de mal:
NUMERO UNO
KING OF NEW YORK
Le classique des classiques, le film qui saura allier des thématiques riches, une exploration des couches sociales en pleine mutation, des personnages en perdition cherchant à donner un sens à leur vie, avec une photo absolument incroyable, bénéficiant d'une atmosphère urbaine aujourd'hui malheureusement disparue, et une brochette d'acteurs tous plus géniaux les uns que les autres. La confrontation entre un Victor Argo menotté et Walken cherchant autant à se convaincre lui-même du bien fondé de ses agissements que d'obtenir la compréhension de son interlocuteur restera un des grands moments de cette succession de grands moments, parfois provocateurs ("j'ai envie de te prendre dans le métro", 5min plus tard, ah bah ils sont en effet dans le métro
, on verrait difficilement un moment pareil au ciné aujourd'hui"hui) parfois inversement trash et dégénérés (la confrontation Snipes / Fishburne, la commande au McDo...). Le film est simplement un concentré de tout ce que j'aime au cinéma. Et quelle BO absolument fabuleuse!
PELOTON DE TETE
Fear City (NY, 2H du matin)
NY comme j'aime la voir au cinéma, NY comme je suis trop jeune pour l'avoir découverte. La 42e rue, les strips clubs, les cinémas, la luminosité de l'éclairage public, tout a trop changé (c'est bien sûr une vision romantique et cinématique pour laquelle j'opte dans le cadre cinéphile sans dénigrer les véritables apports du changement).
J'aime aussi le mélange des genre, on a du slasher, du kung fu et de la boxe, du film de mafieux, du softcore, du drame et une enquête policière. Malgré tout, le film se tient. Exercice d'équilibriste qui force mon respect et mon admiration, mais je comprends que d'autres n'y prennent pas le même plaisir.
China Girl
L'amorce de ce qui me semble être la deuxième phase de Ferrara, le film qui fait le lien entre le street raw des débuts et les œuvres plus professionnelles et commerciales (même si c'est plutôt son passage à la télé qui en est l'instigateur, mais je me limite ici aux long-métrages de ciné). Ferrara parvient encore une fois à mêler les sujets les plus sérieux qui soient (impact de l'immigration, conflit des générations), les passages fun (les combats de rue) et burnés (le big chinois qui encaisse et encaisse et qu'il faut poignarder à plusieurs reprises pour s'en défaire), le tout surmonté du joli ruban rose de la romance. Encore le dosage juste.
Ms. 45 (L'Ange de la vengeance)
Une œuvre marquante, rageuse, à la fois crue et ancrée dans le fantastique de genre, toutes les apparitions vengeresses étant à ce titre fantasmatiques plus que réalistes (à part
Body Snatchers, je ne vois pas vraiment Ferrara creuser cette veine). Le final est un modèle de mise en scène, une sorte de grotesque sublime délicat à maitriser. L'écart technique et professionnel avec
Driller Killer est stupéfiant.
Bad Lieutenant
Scénarisé par son interprète de
Ms. 45, les films entretiennent une connexion thématique certaine (la rétribution, le châtiment, le mutisme voire l'autisme, la difficulté à communiquer ce mal être...). Keitel nous fait un show grandiose, le film est encore une fois cru et fiévreux, mais j'ai un peu plus de mal avec l'hystérie religieuse au cinéma (quand c'est en contexte, dans
Alucarda ou
The Devils ça va, mais sinon...). C'est une remarque personnelle et non qualitative, mais ça joue sur ma capacité à revoir le film. Je lui trouve aussi quelques faiblesses rythmiques, sans doute dues à la routine voulue de ce quotidien putride. Bon, je pinaille, c'est tout de même un grand film.
EN BONNE POSITION
Body Snatchers
Et oui, j'apprécie chacune des trois adaptations, et je ne boude pas mon plaisir devant la version Ferrara. Le film est très/trop court (comme tous les Ferrara depuis celui-ci justement), et le dénouement est trop rapide. Il n'empêche, en tant que film de genre, il contient son lot de séquences instaurant le malaise et les SFX sont top. Je me dis souvent que si Ferrara avait eu des budgets au moins équivalents sur le reste de sa carrière, ses films (qui deviendront surtout des films d'idées) auraient tenu la dragée haute à un Scorsese.
Dangerous Game (Snake Eyes)
Le premier Ferrara nouvelle mode. Huis clos, filmage au plus près de l'acteur, théorisation progressive de son cinéma... Et pourtant, le film est traumatisant à plus d'un titre. J'ai rarement eu l'occasion de voir des personnages aussi rageux, plein d'amertume, de frustration, vecteurs d'humiliation et de coercion. Au niveau des rapports humains, c'est aussi glauque et sans espoir que
Bad Lieutenant. Un beau film que j'ai du mal à revoir (mais une Madonna exceptionnelle, preuve que Ferrara est un superbe directeur d'actrices, sans problème du niveau d'un Lynch).
The Blackout
Un film poisseux dans lequel Ferrara s'extraie (partiellement) de New York pour le soleil de Miami. Une réflexion sur le pouvoir de l'image, ses bienfaits, ses risques, ses différentes utilisations. Le blackout tient ici la place des tentatives d'assassinat des
Blow Out,
Blow Up,
Conversation secrète... Je vois très clairement le film dans cette lignée, sauf qu'ici c'est l'ellipse qui devient mortelle. Et devant la preuve des sons et images vidéo, ne reste que le choix de croire ou pas. Un film finalement peu représentatif du ciné US actuel, qui se termine par le choix de ne pas assumer ses actes, et de ne plus laisser de traces. Un goût amer reste en bouche. Et j'adore Dennis Hopper ainsi que la géniale BO de Schooly D.
Bons, voire très bons films, mais invariablement entachés de défauts importants
New Rose Hotel
Une première heure fabuleuse, digne de ce qu'il a fait de mieux, Asia au top de ses formes, mais le manque de budget (ou bien inclusion de la partie coke dans le devis) se fait sentir. J'imagine qu'il aurait été impensable de faire d'un film avec Walken, Defoe et Argento un moyen métrage, mais en l'état, ç'aurait peut-être été plus judicieux. Je sais que je peux tout de même me regarder le film avec plaisir (mais toujours avec une pointe de frustration).
'R Xmas
Un conte de Noël original, à la fois histoire vraie et tranche de vie, et film anti-dramatique. Drea Di Matteo est superbe, et Ice-T joue un rôle intéressant quand l'on connait le fin mot de l'histoire. Mais le film manque de nerf, même en tant que conte sur la fin d'une époque. Pour une raison que je ne m'explique toujours pas vraiment, je rapproche souvent ce film des co-réalisations de Wayne Wang et Paul Auster.
Driller Killer
Un beau bordel, finalement déjà très théorique, dont les épanchements gores apparaissent comme des doigts d'honneur plus que comme des parties de rigolade. On sort de la torpeur artsy dans laquelle les personnages s'embourbent pour y revenir très vite après une crise d'hystérie. Ferrara s'avère être un très bon comédien. J'aurai apprécié le revoir dans d'autres rôles (et non pas juste dans son apparition crypto-freudienne de
Ms. 45). Ne pas s'attendre à un slasher, ni même à un film d'horreur quel qu'il soit.
The Funeral
Assez grande déception, après des années passées à saliver. Annabella Sciorra et Isabella Rossellini sont superbes, elles volent chaque scène où elles apparaissent. J'ai eu plus de problèmes avec les acteurs masculins (à l'exception de Vincent Gallo et Benicio Del Toro, à leurs places). Et puis, l'affreuse sensation que le film n'a pas grand chose à dire de si hors du commun sur la famille. Le contexte historico-social est bien plus intéressant finalement. Et c'est peut-être le dévédé qui est à blamer, mais j'ai trouvé la photo quelconque, et le production design vide (encore un problème de budget?).
Problématiques
Cat Chaser
Ça commence tip top, tendu et noir, les acteurs font leur job, mais on finit par s'en désintéresser, tout comme Ferrara visiblement (dans les suppléments du disque français, Nicole Brenez nous fait savoir que Ferrara s'est barré en cours de route pour aller tourner
King of New York). Ça se regarde, mais le soufflé est quand même retombé.
MARY
Un film schizophrène, parsemé de moments de grâce, d'actrices superbes et de bonnes idées et histoires parallèles. Mais le trop est l'ennemi du bien et je trouve qu'aucune des histoires n'est correctement développée et les personnages ne sont pas assez ni écrits ni incarnés. Typiquement, Ferrara se perd en filmant les femmes qu'il aime, mais là il ne retombe pas sur ses pieds. Avec un titre pareil, c'est d'autant plus dommage. En tant que film global, ça ne marche pas pour moi. Mais ça reste parsemé de très belles scènes.
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Je n'ai à ce jour pas pu voir ni
Nine Lives of a Wet Pussy, ni
The Gladiator, ni
The Addiction (gros manque, mais j'attends un DVD digne de ce nom et abordable) ni aucun des films post-
MARY. Et je considère pour finir que ses épisodes de
Crime Story et son clip de
California pour Mylène sont de grosses réussites.