La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Alexandre Angel
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Alexandre Angel »

The Eye Of Doom a écrit : Sur le reste j'ai trouvé Del Toro en belle forme.
Plastiquement le film est superbe. Une fois de plus, cad comme sur le 1ère partie de Crimson Peak, le réalisateur installe son univers plastique sans effort. Meme chargé, c'est un choix assumé, les décors vont tout de suite de soi. Alors que chez certain, une telle mise en place sent la sueur du mec de peu de talent qui peine à construire son univers, chez Del Toro, c'est naturel et immédiat.
On démarre avec une magnifique séquence de rêve aquatique. Plusieurs belles scènes dans le laboratoire, plan magnifique dans le cinéma vide, grande sensualité dans les scènes intimes, la danse de l'eau sur la vitre...
On est d'accord.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Zelda Zonk
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Zelda Zonk »

G.T.O a écrit : 22 janv. 18, 11:13 LA FORME DE L'EAU, Del Toro: 4/10
Meilleur que l'effroyable Crimson Peak ne veut pas dire bon film. Un conte de fée à la Jeunet encapsulé à la poésie préfabriquée, ne réussissant pas ou peu à transcender sa joliesse de boutique à souvenirs, échouant à faire vibrer et à développer son histoire d'amour au-delà de l'imagerie amoureuse habituelle, préférant se concentrer sur son décorum. Une constante chez cet illustrateur mexicain, où la mise en scène est souvent le parent pauvre au profit de la direction artistique. Plus qu'un cinéma des monstres, un cinéma de bibelots.
Découvert hier soir, et je me permets de reprendre l'avis de G.T.O qui résume assez bien mon ressenti sur ce film ("décorum préfabriqué", "boutique à souvenirs", "conte à la Jeunet", "cinéma de bibelots", c'est plutôt bien vu !), même si ma note sera un peu moins sévère, compte tenu de l'aspect soigné du production design et de la prestation convaincante de Sally Hawkins qui sauvent quelque peu le projet : 5,5/10
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Watkinssien
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Watkinssien »

Pour ma part, je l'ai revu avec énormément de bonheur et je vais utiliser un mot qui va faire lever les yeux au ciel de la plupart des forumeurs qui auront vu également le film.

Je vois La forme de l'eau (qui m'avait plu en salle) comme un vrai chef-d'œuvre du cinéma fantastique.
La mise en scène est si précise, si élégante, si significative, que ce que je prenais comme des scories il y a quelques années m'ont apparu comme des codes soigneusement posés.

C'est bien par l'image, par son utilisation magistrale de la lumière, des décors, des nuances, du placement des personnages dans le cadre que toutes les émotions que j'ai ressenties ont pris corps, de manière totale et définitive. Le recyclage que ses détracteurs lui reprochent m'apparaît comme l'enveloppe essentielle d'une romance qui mixe la subversion du cinéma de genre et une approche quasiment surréaliste.
De ce très adroit mélange, viennent se confronter les névroses de personnages malades, en quête de pureté, explosant les règles tacites de tout système social, politique. Sally Hawkins (géniale) et Michael Shannon (parfait dans un rôle à sa mesure) sont deux êtres dévorés par des émotions compulsives: l'une est poussée par l'amour constructif et l'un par la passion autodestructrice, englué et produit complaisant de son époque. Eros et Thanatos, mais pas seulement. Là où le désir de notre héroïne est totalement réalisé (mêlant amour, osmose, sexe, harmonie, plaisir et apaisement), Strickland vit son monde mental totalement envahi par des frustrations qui existaient déjà mais qui prennent le dessus dans tous les compartiments, ajoutant à ses interrogations.

Bref, c'est un film que je ne cesserai d'explorer pour en découvrir d'autres richesses.
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harry
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par harry »

Bogus a écrit : 14 août 18, 20:57 On parle d'un homme poisson visqueux pas très causant qui gobe des oeufs durs et des chats. Je veux bien qu'elle soit seule et frustrée sexuellement... mais quand même. Et puis quand on prend le temps de nous expliquer où était caché son pénis, voilà quoi :| ...
Une des scènes où j'ai lâché le film (bon j'avais déjà grandement lâché avant mais bon...), elle vient expliquer ca a sa copine et la révélation passe tranquille. Si tu inscrit ton film dans les 50s (parce que comme disait Tarantino, le début des 60s c'est "les 50s Part2") je suis pas sur qu'une femme noire qu'on imagine plutôt religieuse accepte comme ca une confession de zoophilie, quand bien même c'est sa copine du taf.
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Shin Cyberlapinou
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Shin Cyberlapinou »

Même en partant du principe que le film est un conte opposant "freaks" à l'Amérique pseudo idéale incarnée par Michael Shannon*, il y a ce choix bizarre de l'ancrer dans une réalité très tangible (années 50, guerre froide, racisme, sexisme, homophobie. Le diptyque espagnol prenait aussi racine dans la guerre civile mais les protagonistes sont justement plus "normaux") et au delà de son design l'homme poisson n'a pas grand chose à offrir sur le plan "psychologique" pour une relation façon La belle et la bête.

Ca fait un moment que je me méfie de Del Toro (inattaquable dans les intentions, beaucoup plus dans l'exécution. Serait-ce le Christophe Gans mexicain?) et malgré une forme sans faille j'ai quand même pas mal de réserves sur cette Forme de l'eau bancale.

* Très bien en soi mais il aurait je pense fallu un acteur plus charmeur (par exemple Jon Hamm en mode Don Draper) pour rendre son personnage plus insidieux/intéressant. De ce point de vue Eduardo Noriega fonctionnait impeccablement dans L'échine du diable, pour moi le chef d'oeuvre de son auteur, et de plusieurs coudées.
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Invité1 »

Watkinssien a écrit : 5 avr. 22, 11:02 Je vois La forme de l'eau (qui m'avait plu en salle) comme un vrai chef-d'œuvre du cinéma fantastique.
[...]
C'est bien par l'image, par son utilisation magistrale de la lumière, des décors, des nuances, du placement des personnages dans le cadre que toutes les émotions que j'ai ressenties ont pris corps, de manière totale et définitive. Le recyclage que ses détracteurs lui reprochent m'apparaît comme l'enveloppe essentielle d'une romance qui mixe la subversion du cinéma de genre et une approche quasiment surréaliste.
De ce très adroit mélange, viennent se confronter les névroses de personnages malades, en quête de pureté, explosant les règles tacites de tout système social, politique. Sally Hawkins (géniale) et Michael Shannon (parfait dans un rôle à sa mesure) sont deux êtres dévorés par des émotions compulsives: l'une est poussée par l'amour constructif et l'un par la passion autodestructrice, englué et produit complaisant de son époque. Eros et Thanatos, mais pas seulement. Là où le désir de notre héroïne est totalement réalisé (mêlant amour, osmose, sexe, harmonie, plaisir et apaisement), Strickland vit son monde mental totalement envahi par des frustrations qui existaient déjà mais qui prennent le dessus dans tous les compartiments, ajoutant à ses interrogations.

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Watkinssien
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Watkinssien »

Shin Cyberlapinou a écrit : 5 avr. 22, 14:19 il y a ce choix bizarre de l'ancrer dans une réalité très tangible (années 50, guerre froide, racisme, sexisme, homophobie.
Aussi posé soit le contexte, il n'apparaît moins tangible (dans son sens littéral de pouvoir presque le toucher, le ressentir) que plus symbolique (malgré le soin apporté à la reconstitution). C'est une représentation, une incarnation de réalité sans cesse bousculée, transfigurée par le style atmosphérique, les détails de ses décors et de leur architecture.

Ce contexte développe les différents espaces mentaux du récit, malgré ce qu'on peut déceler de "réaliste" dans ce que ça évoque (minorités, problèmes raciaux, conflits amenant la paranoïa, etc...).

Ce sont la présence physique, organique des éléments, l'incessante relation tissée entre les personnages et les volumes qui les entourent, les enferment ou les libèrent (la profondeur de l'eau et son horizon infini, de tous les possibles) qui mènent ce contraste entre les faits avérés et les conséquences de l'époque retranscrite. Le pouvoir d'évocation des personnages qui appartient tout sauf à un aspect plausible, mais quasiment onirique, liant l'imaginaire comme un éloignement de ce que propose ce système (niant toute forme d'échappatoire, ne croyant que sur ses intentions maladives de maintenance de l'ordre).
candygirl a écrit : 5 avr. 22, 14:37
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Torrente »

Shin Cyberlapinou a écrit : 5 avr. 22, 14:19 inattaquable dans les intentions, beaucoup plus dans l'exécution. Serait-ce le Christophe Gans mexicain?
Peut-être.
Pour moi, il reste moins talentueux techniquement que Gans (sauf si on inclut La belle et la bête dans la comparaison... alors là, par contre...).
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Count Dooku »

Shin Cyberlapinou a écrit : 5 avr. 22, 14:19De ce point de vue Eduardo Noriega fonctionnait impeccablement dans L'échine du diable, pour moi le chef d'oeuvre de son auteur, et de plusieurs coudées.
Pareil, mais je mettrais également "Le Labyrinthe de Pan" à égalité.
Pour ma part, je pense que Del Toro n'a jamais fait mieux que ces deux films espagnols (bon, pas encore vu "Nightmare Alley"). Comme si le fait de devoir composer avec des budgets plus réduits l'obligeait à se concentrer davantage sur la mise en scène et ses personnages, là où dans ses films hollywoodiens il semble s'attacher essentiellement à la direction artistique, quitte à livrer un résultat quelque peu désincarné (cf "Pacific Rim" ou "Crimson Peak").
"La Forme de l'Eau" me faisait un peu le même effet, quoique moins exacerbé car les personnage sont mieux écrits et incarnés. Mais il n'empêche que j'étais un peu resté à quai lors de mon unique visionnage du film, et je n'ai jamais réussi le saut de foi nécessaire pour adhérer à cette histoire d'amour. Et partant de là, le château de carte n'est pas loin de s'effondrer...
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Shin Cyberlapinou
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Shin Cyberlapinou »

Torrente a écrit : 5 avr. 22, 14:56
Shin Cyberlapinou a écrit : 5 avr. 22, 14:19 inattaquable dans les intentions, beaucoup plus dans l'exécution. Serait-ce le Christophe Gans mexicain?
Peut-être.
Pour moi, il reste moins talentueux techniquement que Gans (sauf si on inclut La belle et la bête dans la comparaison... alors là, par contre...).
Par exécution j'entends aussi l'approche globale (traitement du sujet, scénario, direction d'acteurs), et pas seulement l'aspect visuel/technique. Ce sont deux cinéastes dont je devrais adorer le travail au regard de leurs influences et ambitions mais les films ne sont pas toujours à la hauteur de leurs belles promesses...
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Re: La Forme de l'eau (Guillermo Del Toro - 2017)

Message par Samuel73 »

Je fais partie de ceux que le film ont déçus, sans bien savoir pourquoi.
Shin Cyberlapinou a écrit : 5 avr. 22, 14:19 en partant du principe que le film est un conte opposant "freaks" à l'Amérique pseudo idéale incarnée par Michael Shannon
C'est peut-être là que le bât blesse de mon côté : les "freaks" sont sans doute trop nombreux et trop disparates (une orpheline handicapée, une femme de ménage noire battue par son mari, un homosexuel délaissé, un espion communiste, une créature antédiluvienne). Ce sont des solitudes diverses qui font alliance contre un adversaire iconique, mais sans jamais vraiment se rejoindre et la sauce qui devrait les lier ne prend pas très bien. Le film éparpille ses enjeux narratifs au lieu de les resserrer autour de l'arc principal, et l'émotion naïve qui pourrait se dégager de l'histoire d'amour et d'amitié reste aux abonnés absents. L'esthétique très élaborée ne me semble pas arranger les choses en accentuant la relative froideur de l'ensemble.

Mais il faudra peut-être que je le revoie pour le réévaluer.
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