Edgar G. Ulmer (1904-1972)
Publié : 10 sept. 11, 10:46
L'occasion de dédier un topic à ce réalisateur dont la filmographie, inégale mais passionnante, reste encore à explorer, notamment certains films difficiles à découvrir comme Club Havana, Carnegie Hall, Ruthless ou encore Greenfields.
THE NAKED DAWN
Réalisation : Edgar George Ulmer.
Scénario : Nina et Herman Schneider (en fait Julian Halevy, alors blacklisté)
Photographie : Fredrick Gately (technicolor)
Musique : Herschel Burke Gilbert.
Production : James O'Radford pour Universal.
USA-1955-82'
Interprétation : Arthur Kennedy ( Santiago), Betta St John ( Maria), Eugene Iglesias ( Manuel), Roy Engel ( Guntz), Francis McDonald ( le veilleur de nuit)
Au Mexique, après le vol d'un wagon de marchandises, Santiago perd son ami, blessé pendant l'opération.
Au cours de sa fuite, il trouve refuge dans la petite ferme d'un jeune couple d'origine indienne.
Manuel traite sa femme, Maria, avec peu d'égards; il est en outre affublé d'un certain nombre de tares (hypocrisie, lacheté, avidité) qui s'exprimeront lorsque Santiago récupérera l'argent du vol.
Maria, ne tenant plus à subir les outrages d'un mari veule et cupide souhaite partir avec Santiago, mais les circonstances les en empêcheront...
Sur le ton élégiaque, Edgar G Ulmer nous offre une histoire à la simplicité biblique où chacun des trois personnages principaux se lie avec cohérence à son environnement, à la société qui l'entoure, à tel point que que les caractéristiques réunies de ces trois figures confèrent une touche universelle au propos du réalisateur.
A la manière d'un conte des Mille et une nuits dont la morale apparait intemporelle, ce film brillant marque les esprits non par les péripéties ou intrigues qu'il contient (pour le coup, on est presque dans un huis clos), mais plutôt par la matière dont sont fait ses protagonistes, matière qu'on verra se forger, se travailler au contact de l'autre.
En effet, la visée morale de cette oeuvre pourrait être l'altruisme, cette richesse indescriptible et ô combien précieuse qu'on obtient en s'offrant sans calculs à la différence, en s'affranchissant de toute espèce d'à priori, mais aussi d'intérêts personnels.
Ce couple réuni par intérêts plus que par amour se verra offrir une nouvelle chance à la fin du film.
Sur la voie de la rédemption, Manuel saura t-il se défaire de ses travers ?
Ulmer, tout en retenue, ne nous livre aucune certitude, mais au moins, on devine que Santiago ne sera pas mort pour rien, lui qui apporte une providence inespérée à ce jeune couple.
Arthur Kennedy, déjà admirable dans un autre western à l'action confinée qu'est Rancho Notorious de Fritz Lang mais aussi chez Mann ( Bend of the river, The Man from Laramie), livre ici une composition d'une richesse inouïe.
Mi-ange, mi-démon, il incarne la figure synthétique et définitive du western.
Personne d'autre qu'Ulmer ne pouvait raconter avec tant de fluidité et de naturel cette histoire présentée comme une fable, lui qui raconte les mystères insondables de sa vie comme un film.
( cf. Tavernier et Coursodon, 50 Ans de Cinéma Américain, la notice consacrée à Edgar George Ulmer, mais aussi Amis Américains de Tavernier.
Enfin pour les admirateurs du réalisateur de Black Cat, Detour, Bluebeard, Strange Woman, The Man from Planet X, il existe ce livre paru à l'occasion de l'hommage rendu à Ulmer en 2002 par le Festival d'Amiens, intitulé Le Bandit démasqué, édité par Yellow Now, avec de nombreux textes et analyses de Michael Henry Wilson, Tavernier, Lourcelles, Moullet, Truffaut, Bogdanovich.)