Bye Bye Braverman (1968)
Leslie Braverman, "écrivain de second ordre au talent de premier ordre" casse inopinément sa pipe à l'âge de 41 ans. Ses quatre meilleurs amis entament depuis Greenwich Village un périple émaillé d'incidents afin d'assister aux funérailles quelque part dans le Queens.
Bye Bye Braverman compte au nombre non négligeable de films réalisés par Sidney Lumet qui ne furent pas distribués en France alors même que le cinéaste jouissait d'une réputation solidement établie. Comme souvent, lorsqu'il s'agit d'un metteur en scène reconnu, l'invisibilité d'une œuvre éveille une curiosité légitime, attise de réels espoirs et peut conduire, le cas échéant, à une amère désillusion.
Lumet a beaucoup tourné, trop sans doute pour maintenir sa filmographie à un niveau égal de qualité. Il laisse en héritage une production disparate dont les sommets marquent pour l'éternité quatre décennies de cinéma américain, mais dont les déceptions trahissent une absence de vision à laquelle l'intelligence sut opportunément se substituer.
A l'origine du film, se trouve le premier ouvrage de l'écrivain américain Wallace Markfield ,
To an Early Grave (1964) ; une illustration de l'humour juif que d'aucuns ont comparé à Ulysse de Joyce – qui lui-même ne pratiquait que modérément l'humour juif.
Quatre personnages s'entassent dans l'habitacle confiné d'une volkswagen, quatre personnages pour symboliser une génération, quatre érudits dont les ambitions littéraires de jeunesse n'ont pas résisté à la médiocrité persévérante du quotidien. Mais il leur reste le verbe, et du verbe ils vont faire un usage immodéré. Au fil de cette odyssée à travers le Bronx, le spectateur est accablé sous le flot incessant des observations se rapportant aussi bien à la vie qu'à la mort, la religion, l'écriture, la culture juive, la culture populaire, le tout lesté de son poids de références et de citations. Malheureusement, de cette logorrhée, Sidney Lumet ne tire pas grand-chose cinématographiquement.
Il resterait le loisir de goûter à une indifférence salutaire en attendant la fin des évènements, si ce confort de nous était dénié par les assauts incessants d'un humour laborieux tristement inefficace. Rien n'est vraiment drôle, rien ne touche – surtout pas les personnages qui peinent à inspirer la moindre sympathie.
Le quatuor d'acteurs (George Segal, Jack Warden, Sorrell Booke et Fred Wiseman) fait le métier, mais il est dépassé par un ébouriffant trio de seconds rôles féminins (Zohra Lampert, Jessica Walter, Phyllis Newman).