Pour ma part, je suis partagé entre un plaisir certain, malgré quelques facilités et l'impression criante que les auteurs sont des petits malins qui ont savamment pioché à droite et à gauche et davantage recyclé que créé.
Cette re-visitation de l'avant-aube de la Révolution vue du côté de nantis à problèmes est plaisante par son ton déluré, volontairement anachronique tant par certains dialogues que par les attitudes (et j'ajouterai aussi par les physionomies*). Sam Karmann est, comme d'hab', impeccable** en pater familias tournesolesque détaché des réalités qui l'entourent. Hubert Koundé apporte sa force tranquille en homme de confiance et les seconds couteaux leur aspect commedia dell' arte (la palme à l'horripilant petit vicomte poudré sur-joué avec une délectation évidente par Hubert Benhamdine). Matthieu Simonet a un rôle étonnamment effacé (c'est à peine si on comprend lequel) mais quelque chose me dit qu'il va s'étoffer dans les épisodes à venir.
Bon. Je ne vais pas plus longtemps tourner autour du pot : ce qui m'a le plus captivé est la beauté des trois actrices interprétant les effrontées et vindicatives filles du comte. Rarement vu un trio plus charmant que Camille Claris (qui m'avait déjà bien tapé dans l'oeil dans un court-métrage), Julie Voisin et Lou de Laage. Auxquelles j'associerai le sourire (et le décolletté) fondant de Zoe Schellenberg qui interprète leur femme de chambre et camarade de jeux.

Mais malgré ces délicieuses "distractions visuelles", j'ai compris après cinq minutes que les concepteurs connaissaient par coeur - et ont décortiqué - la Marie-Antoinette de Sofia Coppola (pour son côté rock'n'roll, les space-cakes etc.) et Que la fête commence de Tavernier (pour la gaillardise et le contraste - ô combien réel mais parfois un peu simpliste dans la démonstration - entre patriciens et plébéens). Il y a aussi un poil de Reine Margot pour les trognes à cheveux filasses (un trait que j'avais déjà remarqué dans l'excellente adaptation télévisée récente du Bossu) ainsi que de Ridicule (le noble sans le sou passionné de technologies "modernes"). Le copié-collé concerne également la musique et là, c'est pas très honnête d'avoir pompé l'astuce de la guitare blues avec accompagnement canin du Mademoiselle Nobs des Pink-Floyd

(*) Sous l'Ancien Régime et plus encore chez des nobles désargentés, les filles du comte auraient eu bien du mal à conserver un teint et une dentition de porcelaine aussi éclatants que ceux de ces ravissantes actrices.

(**) Ça m'amusera toujours que ce comédien aussi talentueux que discret soit le sosie du multimédiatique Kad Merad. Et question ressemblance, on notera celle - toute aussi étonnante - de Bruno Debrandt avec Javier Bardem, de Camille Claris avec la Nastassja Kinski des débuts et de Lou de Laage avec... (j'ai son nom sur le bout de la langue

http://www.pluzz.fr/1788----et-demi.html
[edit sur le copié-collé musical] : le... compositeur (?) a surtout honteusement décalqué Radiohead et sa version plus mainstream, Muse. C'en est carrément gênant. Et pour enfoncer le clou, le choix des illustrations musicales tombe souvent comme un cheveu gras dans la soupe de lentilles. C'est sympa et/ou cool (à défaut d'être nouveau) de jouer le décalage sonore anachronique mais la musique, c'est comme l'image, il faut un bon monteur.
[edit sur l'incroyable accumulation de sosies] : Nina Ambard (la jeune nonne amante de la plus jeune des soeurs) est la jumelle cachée de Laetitia Casta.