Picnic (1955) - Joshua Logan
Un homme revient dans la ville de son enfance le jour du Labour Day. Lors du pique nique traditionnel, il tombe amoureux de la fiancée de son meilleur ami.
De ce qui aurait pu faire un superbe mélodrame, Joshua Logan fait un film glauque aux personnages tous plus antipathiques les uns que les autres, seuls échappent peut-être à la règle Millie la jeune soeur de l'héroine et le fiancé de Miss Sidney, vieille fille acariatre par qui le scandale va arriver. Le problème du film réside aussi dans les interprètes, Kim Novak manque de charme et se révèle d'une froideur épouvantable (froideur qui sera un atout dans la carrière future de l'actrice, mais ici rend son personnage antipathique, on se demande comment tous les hommes peuvent être amoureux d'elle, hormis pour sa plastique) dans le rôle de cette jeune fille qui se doit de réussir sa vie pour relever l'honneur familial, et William Holden semble surjouer continuellement. Jamais on ne croit en le voyant à l'homme jeune qu'il est sensé être. On a l'impression désagréable de voir un acteur cabotiner, se prendre pour un jeune homme qu'il n'est plus, il ne se révèle sensible et interessant que lorsqu'il se rend compte de son amour pour Marge. Il est évident que le personnage est futile, et peu intéressant mais sans doute ce problème d'âge est-il le centre du problème. Il y a une ambiance détestable dans ce film, sans doute est-ce aussi voulu, mais jamais on ne suit les péripéties de ces héros avec plaisir. La sensualité ou l'érotisme de l'affiche ne transparaissent pas dans ce film réalisé de manière convenue, sans aucune envolée.
Rosalind Russell est certes parfaite dans son rôle, mais là encore, Logan filme des personnages trop ordinaires et peu sympathiques, sans concession aucune. Betty Field est insupportable à souhait dans le rôle de cette mère qui ne vit qu'à travers ses fills. Seul moment agréable, l'évocation du pique-nique avec cette succession de scenettes évoquant les différentes attractions de cette fête, les jeux, les concours, etc., On se plaît à imaginer ce que le même sujet aurait donné avec un réalisateur comme Sirk ou Minnelli. Bref grosse déception à la vision de ce film qui se complaît dans l'évocation de la vie sans relief d'habitants sans intérêt d'une petite ville obscure du fin fond des USA !
Par ailleurs la copie proposée par le DVD Columbia est particulièrement mauvaise.
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Camelot (1967) - Joshua Logan
Les amours de Guenièvre, Arthur et Lancelot, évocation musicale des chevaliers de la table ronde.
Camelot est l'adaptation d'un succès de Broadway à l'écran et nous sommes face à trois problèmes. Le premier et ce qui constitue l'attrait principal d'une comédie musicale est sa musique, et il faut dire que même si Alan Jay Lerner et Frederic Loewe furent les auteurs à succès de My Fair Lady, leur partition ici est loin de l'égaler. On retrouve les mêmes sortes de "soliloques" pour Arthur que ceux signés pour Higgins à savoir ces chansons mi-parlées, mi-chantées écrites pour des acteurs qui n'étaient pas des chanteurs ici Richard Burton, créateur du rôle d'Arthur à Broadway . Le second écueil auquel peut se heurter une pièce à succès de Broadway est le transfert de la pièce du théâtre à l'écran, et ici c'est plutôt réussi formellement et esthétiquement parlant, de nombreuses scènes sont magnifiques, luxuriantes, même trop luxuriantes. L'oeil finit par se perdre dans ce fatras de détails. Le troisième problème est le fait que bien que voulant restaurer une esthétique moyen-ageuse, les héros semblent trop sortis de la vie réelle des seventies, là où Carol Reed a réussi une transposition parfaite d'Oliver dans l'Angleterre du XIXe, Joshua Logan oublie parfois quelques détails. Ainsi Franco Nero aborde une chemise largement ouverte sur un poitrail poilu et sa chaine, et la frange de Vanessa Redgrave fait tâche, de même que certaines robes.
Par ailleurs, le scénario est confus, on évoque juste quelques scènes la vie d'Arthur, pas d'évocation du graal, mais naturellement la table ronde. Les scènes les plus réussies sont sans doute toutes celles des forêts où Arthur se remémore l'enseignement de Merlin (ceci étant, on ne peut s'empêcher de penser à Merlin l'enchanteur de Disney quand il évoque les animaux ou même Sir Kay et the sword in the stone), la rencontre entre Arthur et Guenièvre est aussi une très belle réussite.
Par contre, il est assez curieux de voir Guenièvre et Lancelot et même le roi Pellimore se transformer en Jenny (sous-titré Jennifer en français, alors qu'on entend bien Jenny), Lance ou Pelly, mais bon cela n'est pas bien gênant. L'histoire est confuse, brouillonne. On ne sait pas très bien qui sont les chevaliers de la table ronde, hormis les pairs du royaume qu'on réunit. Le film se découpe en deux parties bien distinctes ; la première très chantante et qui permet de voir les plus belles scènes du film, lumineuse, évoque l'apogée d'Arthur, de Guenièvre et l'arrivée de Lancelot, un peu caricatural toutefois. Cette partie laisse la place à une seconde beaucoup plus sombre qui voit la chute de Guenièvre, la trahison de Mordred, impeccablement interprété par David Hemmings, elle est aussi plus bavarde et plus confuse, on y a aussi une jolie scène de bagarre sur la table.
Sans doute le problème de Camelot réside-t'il dans les doutes métaphysiques d'Arthur, et les scènes où le roi se questionnent sont souvent longues et confuses, même si certaines ne sont pas dénuées de poésie comme l'évocation de Merlin. Richard Harris campe un Arthur fort sympathique, même si le personnage est plus nostalgique qu'autre chose, tout comme Franco Nero campe un Lancelot tout à fait crédible, sans oublier Vanessa Redgrave qui interprète une reine Guenièvre tout à fait convaincante.
Bref un film n'est pas un mauvais film, il est même esthétiquement un beau film (le mariage, la rencontre, le tournoi, etc.), même si certains anachronismes peuvent choquer; le hamac, ou comment ne pas penser au printemps de Boticcelli ou à des rassemblements hippies quand Guenièvre évoque le joli mois de mai. Le problème du film vient sans doute du livret original qui d'un sujet intense ne retient que quelques bribes anecdotiques et décousues, et surtout d'une musique tout à fait incolore.
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Bus stop (1956) - Joshua Logan
Un cowboy qui n'a jamais quitté son ranch va à Phoenix disputer un rodéo. Un vieil ami lui conseille de s'initier aux "filles", le jeune homme décide qu'il n'y en aura qu'une, il jette son dévolu sur une chanteuse de boite de nuit et veut l'épouser à tout prix.
Joshua Logan réalise avec Bus Stop une sorte de Road Movie, avec cette excursion en bus entrecoupée par un rodeo ou les fameux arrêts aux Bus stop. Nous sommes aussi dans l'adaptation de pièce, quelque part, l'atmosphère de ces arrêts d'autobus fait penser à celle de l'auberge de la Forêt pétrifiée, par son côté relais ! Il y a aussi une description de ces personnages typiques de l'amérique profonde, cette amérique aux gens ordinaires qui ne vivent jamais rien et pour qui un voyage peut tant représenter. Les scènes de rodéo ou de parade sont admirablement réalisées, et le réalisateur arrive à recréer cette 'atmosphère chaleureuse de cet arrêt d'autobus paumé au milieu de nulle part si ce n'est de la neige.
C'est aussi le portrait croisé de plusieurs personnes, Beauregard, le cow boy qui a toujours tout réussi du premier coup et pense prendre une fille dans son filet, comme il prend un taureau au lasso, finalement attachant malgré son côté pataud, insupportable et brusque campé idéalement par Don Murray. Il y a la fameuse fille, fille perdue, magnifiquement interprétée par Marylin Monroe qui se montre bouleversante dans ce rôle de fille perdue qui pour une fois n'est pas la bimbo stupide, mais une fille à la dérive, dont le corps semble être l'unique attrait, à cette fille s'oppose trois autres femmes, la serveuse confidente Vera, qui ne cherche qu'à aider Cherie, Grace, plus entremetteuse quelque part avec son relai dans lequel le chauffeur de bus aimerait bien passer plus de temps et Elma, l'autre serveuse de l'arrêt de bus, sorte de parallèle vertueux de Chérie et très subtilement interprétée par Hope Lange.
Côté masculin, il y a en quelques sortes les deux "pères" du jeune homme, celui qui l'a formé magistralement interprété par Arthur O'Connell et ce chauffeur qui lui fera comprendre la vie. Cette chronique de portraits est bien typique d'une certaine Amérique, mais contrairement à Picnic que Logan a tourné l'année précédente, les personnages ici ne seront pas à contre-emploi ou inexistants. Le film doit beaucoup à la présence de Marylin Monroe qui bénéficie notamment de superbes gros plans. Si Bus Stop n'est pas un chef d'oeuvre, il ne mérite absolument pas l'opprobre à laquelle il est généralement assimilée. Une jolie chronique très typique de ce théâtre américain moralisateur et plein de bons sentiments amplifiés par les aspects négatifs de certains personnages.
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South Pacific (1958) - Josua Logan
Durant la seconde guerre mondiale sur une ile du pacifique, le destin croisé d'une infirmière amoureuse d'un français exilé et celui d'un lietuenant américain qui aime une jeune indigène. Les deux hommes se retrouvent ensemble dans une mission d'espionnage.
Josua Logan adapte le succès de Rodgers et Hammerstein à l'écran. Le gros point fort de cette comédie musicale est justement sa musique, comme dans Sound of Music, toutes les chansons sont sympathiques et restent très longtemps en tête que ce soit l'envoutant "Bali Hai", le sensuel "Some enchanted Evening" ou les primesautiers "I'm Gonna Wash That Man Right Outa My Hair" , I"'m love with a wonderful guy" ou le sympathique "Happy Talking".
Ici peu de danse comme c'est souvent le cas dans les musicals créés par Rodgers et Hammerstein, mais une succession de morceaux chantés, notamment dans la première partie qui ferait presque oublier que nous sommes en situation de guerre, et que l'Ile est la base de soldats américains en guerre avec les japonais. La deuxième partie est plus sombre avec cette mission d'espionnage, et ces êtres séparés dans leurs amours respectifs. On y retrouve aussi les thèmes chers aux auteurs à savoir le racisme, la guerre, la différence. Le gros problème du film réside dans sa réalisation et surtout l'utilisation de filtres colorés dans quasiment toutes les chansons, filtres dorés pour les chansons de rêves, ou succession de filtres différents rose, rouge dans Bali Hai. Si les couleurs obtenues sont surprenantes et gênent un peu, on peut dire que l'utilisation des filtres bleus est particulièremenr réussie. La plus belle scène est aussi sans doute la rencontre entre le jeune lieutenant et Liat dans la maison de Bloody Mary, notamment l'ouverture de cette porte entre l'extérieur Bali Hai et cette maison mais aussi cette vision des soldats venus assister à la fête de Thanksgiving. Toutes les scènes "militaires" ou mettant en action des soldats sont toujours filmées de manière normale, y compris leurs chansons.
Il est dommage que les talents de danseuse de Mitzi Gaynor ne soient quasiment pas exploités. Elle est toutefois parfaite dans le rôle de cette infirmière pleine de préjugés, tout comme Rossano Brazzi qui joue de son charme italien pour interpréter un français qui parle anglais ! John Kerr complète le casting dans le rôle de ce jeune officier lui aussi plein de préjugé mais qui se laisse envouter par la magie de Bali Hai. Juanita Hall campe une Bloody Mary, mère maquerelle assez attachante, même si le personnage exubérant est un peu exaspérant avec ses rires continuels. Ray Walston apporte la touche "comique" nécessaire au genre.
South Pacific n'est donc pas un chef d'oeuvre, mais un film très agréable et Josua Logan quand il n'utilise pas ses filtres illustre de manière magnifique l'histoire avec cette photo certes très cliché et chromo de la mer, des plages, de la végétation luxuriant. Lla grande course de Liat à travers Bali Hai pour retrouver Cable est exemplaire. Et puis de toute façon, il y a la musique et n'est-ce pas le plus important pour une comédie musicale digne de ce nom !
L'image du DVD Fox est magnifique, toutefois comme d'habitude, malheureusement les chansons ne sont pas sous-titrées ce qui est gênant vu l'usage des filtres qui est fait suivant le texte de celles-ci.
hansolo a écrit :J'ai également passé un très bon moment devant ce film et je n'ai pas été gêné par les fameux filtres.
La musique est excellente et j'ai apprécié le jeu des acteurs!
Cathy a écrit :J'ai été gênée dans une ou deux scènes surtout ces filtres jaunes qui donnent une impression bizarre du paysage. Cela ne m'a pas gêné quand c'est sur Bali Hai, mais par exemple dans "I'm in love with a wonderful guy", je trouve que cela n'apporte rien, et c'est plutôt gênant, on a l'impression d'un vieux film "daté", ceci étant la musique est tellement bonne que cela est secondaire. Et puis il y a certains effets qui sont très beaux, notamment dans les auréoles floues "blanches".
Music Man a écrit :Pour ma part, j'avais adoré ce film, et me souviens avec délice de la séquence Happy Talk avec la facétieuse Juanita Hall.
Et comme tu le rappelles si bien, toutes les chansons sont magnifiques (this nearly was mine ou Younger than springtime, entre autres, pour en nommer deux , car il n'y a rien à jeter dans la partition).
Peut-on espérer un jour voir la version scénique à Paris....